La Synarchie est un courant de pensée qui trouve ses racines dans la mystique versaillaise de Joseph-Alexandre Saint-Yves d’Alveydre (1842-1909). Il se développa pendant l’entre-deux-guerres dans les milieux des grandes écoles influencés par l’ésotérisme martiniste. Ses partisans rêvaient d’exercer le pouvoir au nom de leurs compétences techniques et sous l’autorité politique d’un "collège de grands initiés "qui, ignorant la lutte des classes, transcenderait le clivage droite-gauche. Ils multiplièrent les groupes de réflexion dont le plus significatif fut, en 1931, X-Crise. À l’initiative de Jean Coutrot, des polytechniciens y pensèrent une économie planifiée pour répondre à la crise de 1929. Sous Philippe Pétain, les partisans de la Synarchie justifièrent de la "nécessaire continuité de l’État "pour poursuivre leur carrière et préserver les intérêts de puissants trusts, dont la banque Worms. S’adaptant au pouvoir personnel de l’ex-maréchal, ils abandonnèrent toute référence à un "collège de Sages "et autres fantasmes martinistes pour se cantonner dans la défense de leur corporation. À Vichy, les factions rivales de l’État français s’accusèrent mutuellement de complot synarchique. Le 17 novembre 1941, l’ex-maréchal institua une "Fondation française pour l’étude des problèmes humains", dont le prix Nobel de médecine, Alexis Carrel, fut le régent. Cette institution synarchique fut animée notamment par Alfred Sauvy, président de "l’Alliance Population et Avenir", et par Gustave Thibon. Elle ambitionnait d’inventer une "anthropotechnie". À la Libération, ce courant de pensée, s’épurant de toute référence à l’État français, s’investit dans la création de l’ENA et du Commissariat au plan.