I. Introduction

1. Le présent rapport rend compte des activités que la Mission d’observation des Nations Unies pour l’Irak et le Koweït (MONUIK) a menées après la suspension de son mandat du fait de la détérioration de la situation en matière de sécurité dans la zone démilitarisée avant l’invasion de l’Irak par les forces de la Coalition le 20 mars 2003.

II. Évolution de la situation

2. Pendant la période considérée, un quartier général arrière a été maintenu au centre de soutien logistique de Kheitan à Koweït afin d’assurer une présence pour le maintien de la paix dans la zone d’opérations de la Mission, de maintenir les fonctions de liaison politique et militaire de haut niveau, de préserver la capacité d’effectuer une planification d’urgence pour une opération en cours ou modifiée, de mener à bien les tâches qui restent à accomplir, par exemple la récupération, l’inventaire et la cession des avoirs, et de fournir un appui à d’autres organismes des Nations Unies actifs dans la région.

3. Au 21 mars 2003, le personnel administratif civil de la MONUIK avait été réduit au minimum nécessaire pour assurer les services de base au centre de soutien logistique de Kheitan. Avec l’accroissement des tâches résultant de la décision de conserver un quartier général au Koweït, le centre de Kheitan a été reconfiguré et amélioré.

4. À la suite de l’évacuation de la zone démilitarisée le 18 mars 2003, une petite équipe a été constituée pour superviser la situation à Koweït et tenir l’ensemble du personnel informé des menaces potentielles. Des moyens de détection nucléaire, biologique et chimique (NBC) ont été conservés pour alerter le personnel de la MONUIK en temps voulu en cas de risque de contamination par des missiles Irakiens tombés au Koweït.

5. Le système satellitaire statique de la MONUIK a cessé de fonctionner au quartier général de la Mission dans les 24 heures du retrait de celle-ci de la zone démilitarisée, et la MONUIK a dû utiliser une technologie satellitaire mobile et le réseau téléphonique local du Koweït. Lorsque les opérations militaires ont commencé, la Mission a eu des difficultés à maintenir le contact avec le Siège de l’Organisation des Nations Unies. Le personnel de la MONUIK chargé des transmissions s’est efforcé en priorité de mettre en place à Kheitan un système satellitaire statique pour assurer la liaison avec le Siège de l’ONU par le biais du réseau étendu des Nations Unies, ce qui a été fait le 28 mars.

6. Depuis l’installation du quartier général de Kheitan à Koweït, la MONUIK a maintenu le contact avec les autorités koweïtiennes et, au niveau des relations de travail, avec l’armée et la police des frontières du Koweït. Aux niveaux supérieurs, la liaison a été maintenue avec le Ministre koweïtien des affaires étrangères. Un observateur militaire représentant la MONUIK a aussi assisté à la réunion quotidienne d’information humanitaire au Centre d’opérations humanitaires de Khaldiya, à Koweït. La représentation régulière de la MONUIK à cette réunion a permis au commandant de la Force de se tenir au courant de l’évolution de la situation dans la zone d’opérations de la Mission.

7. Pour l’essentiel, les combats qui se sont déroulés au voisinage immédiat de la frontière entre l’Irak et le Koweït avaient pris fin le 25 mars 2003, même si des poches de résistance ont subsisté pendant quelques semaines encore à Oumm Qasr. La MONUIK a effectué sa première visite du côté koweïtien de la zone démilitarisée le 26 mars, escortée par des agents de sécurité koweïtiens, et au quartier général de la MONUIK à Oumm Qasr le 29 mars, dans le cadre d’arrangements coordonnés avec les forces de la Coalition. Les locaux et installations de la MONUIK avaient été mis à mal et occupés par des combattants durant le conflit. Des pertes, dommages et destructions plus ou moins importants des installations ont été constatés. Les forces de la Coalition avaient occupé des locaux et utilisé des biens des Nations Unies sans autorisation.

8. La plus grande partie des biens et des locaux de la MONUIK se trouvant du côté Irakien de la zone démilitarisée a été totalement volée ou détruite durant le conflit ou peu après celui-ci. Le siège de la MONUIK à Oumm Qasr a été en grande partie démoli, apparemment par des pillards avant le début des hostilités et ultérieurement durant les combats. Au camp Khor, du côté koweïtien de la frontière, le toit du hangar BANAIR et un camion de la MONUIK ont été endommagés. Outre les destructions, le quartier général de la MONUIK et le point de passage de la MONUIK à Oumm Qasr ont été occupés par les forces britanniques, tout comme le camp Khor, lorsqu’elles ont construit un pipeline pour transporter l’eau de la station de traitement du camp au quartier général de la Mission à Oumm Qasr. Des soldats britanniques avaient placé un réseau de barbelés et des positions de tir autour de l’ancien quartier général du bataillon bangladais (BANBATT) et d’une partie des baraquements, représentant près de 20 % du camp Khor. Des forces des États-Unis ont occupé le camp Abdally, quartier général du secteur nord et deux bases de patrouille et d’observation, et les installations de la Mission au point de passage d’Abdally, la base de patrouille et d’observation S-6 et les points de passage Bravo et Charlie ont été occupés par des forces koweïtiennes.

9. Le Gouvernement koweïtien a ultérieurement pris des dispositions pour que les forces occupant le camp Khor s’en retirent le 8 avril 2003, et a confirmé que le camp resterait la propriété de la MONUIK, la Mission conservant le contrôle de son utilisation. Les forces des États-Unis ont évacué le camp Abdally et remis à la MONUIK les clefs de tous les locaux de la Mission le 13 mai 2003. On a constaté le même jour que les forces des États-Unis avaient aussi évacué les bases de patrouille et d’observation N-8 et N-9, et que les forces koweïtiennes avaient évacué la base de patrouille et d’observation S-6. Toutefois, lors d’une visite dans la zone démilitarisée le 12 juin, des membres de la Mission ont constaté qu’au camp Abdally les barrages de béton avaient été enlevés et que des véhicules appartenant aux forces des États-Unis étaient garés à l’intérieur de l’enceinte. Les biens meubles des Nations Unies se trouvant dans des installations considérées comme exposées à des vols ou des actes de vandalisme ont été enlevés et transportés au camp Khor par le personnel de la MONUIK aux fins d’examen technique, d’inventaire et de comptabilisation, en même temps que les biens se trouvant déjà au camp. Ces installations des Nations Unies situées du côté koweïtien de la zone démilitarisée seront officiellement remises à la garde des autorités koweïtiennes, conformément aux termes d’un mémorandum d’accord signé entre le Gouvernement du Koweït et la MONUIK.

10. Du côté Irakien de la zone démilitarisée, les forces britanniques sont demeurées au quartier général de la MONUIK à Oumm Qasr avec l’accord de la Mission. À Jabal Sanam, du côté Irakien de la frontière, où une tour de transmissions de la MONUIK avait été installée, la Mission, pour des raisons de sécurité, n’a pu mener qu’une inspection à la jumelle à partir de divers points de Moon Road du côté koweïtien de la frontière. Le 28 mars 2003, la MONUIK a observé que le centre de transmissions de Jabal Sanam était en bon état, mais les 13 et 14 mai la tour de transmissions et la plus grande partie des équipements connexes avaient disparu. Des travaux de terrassement assez importants semblaient avoir été entrepris à cet endroit. On ne sait pas ce qu’il en est des biens de la MONUIK qui se trouvaient à Jabal Sanam car le personnel de la Mission n’a pu se rendre sur le site. Au quartier général du secteur sud, des serrures semblent avoir été forcées et des biens de la MONUIK avaient disparu. Les autorités koweïtiennes ont averti la Mission de leur intention de retirer leurs forces aux points de passage de la frontière Bravo, Charlie et Delta et d’y reconstruire un talus et une tranchée. Du au 14 mai, la MONUIK a démantelé et enlevé tous ses biens qui se trouvaient à ces points de passage. Les autorités koweïtiennes ont ouvert quatre nouveaux points de passage de la frontière aux bornes frontière 58, 61, 77 et 89 ou près de celles-ci.

11. Pour des raisons climatiques, les installations inoccupées du camp Khor ont commencé à montrer des signes de dégradation en raison du climat difficile. La MONUIK a dit craindre que si rien n’était fait, l’ensemble du camp ne se délabre rapidement, ce qui créerait des risques opérationnels et des dépenses supplémentaires. Elle a donc demandé à ce que le personnel nécessaire soit autorisé à retourner au camp pour y entreprendre des travaux de réparation et d’entretien. Ces travaux ont maintenant commencé.

12. Le Gouvernement koweïtien a posté un détachement de police au camp Khor pour en assurer la sécurité. Le camp demeure néanmoins exposé, et deux cambriolages y ont eu lieu en mai, lors desquels des biens des Nations Unies ont été dérobés. La MONUIK a instamment prié le Gouvernement koweïtien de renforcer la sécurité du camp Khor.

13. Les observateurs militaires de la MONUIK ont escorté les membres civils de la Mission qui sont allés récupérer des avoirs de la MONUIK qui se trouvaient encore dans la zone démilitarisée. Ils ont aussi préparé des missions de liaison et de reconnaissance et y ont participé avec la police koweïtienne et ont régulièrement inspecté les installations de la Mission des deux côtés de la zone démilitarisée pour déterminer dans quelle mesure elles avaient souffert du conflit armé ou d’activités criminelles.

14. Durant la période à l’examen, la Mission a fourni une assistance à des organismes des Nations Unies qui se trouvaient sur place pour répondre aux besoins de la population Irakienne ainsi qu’au Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Irak nouvellement ouvert à Bagdad. Le quartier général de la MONUIK a organisé le conditionnement et le transport de Koweït à Bagdad des quatre générateurs, sept véhicules et matériels de communications nécessaires pour installer le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Irak.

15. La Section des communications et des technologies de l’information de la MONUIK a fourni un appui au Bureau du Coordonnateur des opérations humanitaires des Nations Unies en Irak en vue de l’installation et de la programmation de radios VHF et HF, l’installation de systèmes de communication embarqués et de la configuration du réseau de communication au camp Khor. Des radios ont également été programmées et installées pour l’Organisation internationale des migrations (OIM) et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La MONUIK a aussi prêté des radios au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), et elle lui a fourni un appui technique pour l’établissement de ses cartes d’identité et l’a laissé utiliser son répéteur VHF pour une liaison VHF interorganisations.

16. La Section du soutien génie de la MONUIK a préparé des logements et des bureaux pour les personnels des organismes des Nations Unies qui seraient déployés à long terme sur la frontière avec l’Irak. Tout en fournissant cet appui concret, la MONUIK a également établi un mémorandum d’accord pour officialiser l’appui fourni aux organismes des Nations Unies. À la suite d’une demande du délégué régional du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), la MONUIK a accueilli au camp Khor, du 29 mars au 8 juin 2003, 32 agents du CICR qui travaillaient près d’Oumm Qasr.

17. La Section de la sécurité et de la sûreté de la MONUIK a fourni une assistance à des organismes des Nations Unies dans le domaine de la sécurité. En avril 2003, elle a prêté le matériel nécessaire au Bureau de coordination de la sécurité des bureaux extérieurs du PNUD et a aidé celui-ci à fabriquer les cartes d’identité du personnel des organismes des Nations Unies et à former le personnel du PNUD à la délivrance de telles cartes. La Section de la sécurité et de la sûreté a participé à la supervision du trafic radio des organismes des Nations Unies en Irak à partir de la salle radio de ces organismes au Koweït et a fourni des conseils en matière de sécurité sur les procédures à mettre en oeuvre pour maintenir un contact radio permanent entre tous les véhicules ou patrouilles des organismes des Nations Unies. La MONUIK a aussi fourni des services de sécurité au Programme alimentaire mondial (PAM), au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et à des bureaux extérieurs de l’OIM.

18. La Section des transports de la MONUIK a fourni un appui important à des organismes des Nations Unies, elle a préparé des véhicules pour les vendre à des organismes humanitaires. L’OIM a acheté 12 véhicules, l’OMS trois et le Bureau du Coordonnateur des opérations humanitaires des Nations Unies en Irak 15. Vingt-cinq véhicules supplémentaires sont aussi en cours de préparation pour ce bureau Au titre de l’appui logistique, la MONUIK a repeint les véhicules du Bureau du Coordonnateur des opérations humanitaires des Nations Unies en Irak aux couleurs approuvées par l’Organisation pour les opérations en Irak, assuré l’entretien des véhicules de l’OIM et du Bureau du Coordonnateur, fourni des camions pour transporter du matériel et des fournitures de l’aéroport de Koweït au camp Khor, et pris livraison à l’aéroport de Koweït des véhicules destinés au Bureau du Coordonnateur pour les convoyer ultérieurement au centre de soutien logistique de Kheitan.

19. La Section du contrôle des mouvements de la MONUIK a fourni un appui à des organismes des Nations Unies pour le dédouanement, à des points d’entrée au Koweït (port, aéroport), de 27 500 kilos de marchandises de secours et de véhicules destinés au Bureau du Coordonnateur des opérations humanitaires des Nations Unies en Irak et à d’autres organismes.

III. Question d’organisation

20. Douze observateurs militaires ont été autorisés à demeurer au centre de soutien logistique de Kheitan pour maintenir une présence militaire. Les rotations régulières des observateurs militaires à partir de leurs pays respectifs ont été annulées. 21. Au 31 mai 2003, la MONUIK avait un effectif total de 154 personnes, réparti comme suit : a) 11 observateurs militaires venant des pays suivants : Argentine (1), Finlande (1), France (1), Hongrie (1), Inde (1), Italie (1), Pakistan (1), Fédération de Russie (1), Sénégal (1), Royaume-Uni (1) et États-Unis d’Amérique (1) ; b) 143 agents civils, dont 45 recrutés sur le plan international et 98 sur le plan local.

IV. Aspects financiers

22. Étant donné la situation actuelle, le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires n’a pas établi de rapport en ce qui concerne les prévisions budgétaires de la MONUIK pour l’exercice biennal 2003-2004, mais la Cinquième Commission a, sur la base d’une recommandation du Comité consultatif, adopté un projet de résolution autorisant un engagement de dépenses d’un montant de 12 millions de dollars, financé par prélèvement sur le solde accumulé au Compte spécial de la Mission, pour répondre aux besoins de la Mission pendant la période de quatre mois allant du 1er juillet au 31 octobre 2003.

23. Au 10 juin 2003, le montant des contributions non acquittées au Compte spécial de la Mission depuis la création de cette dernière s’élevait à 8 millions de dollars. Le montant total des contributions non acquittées pour toutes les opérations de maintien de la paix s’élevait à la même date à 1 milliard 364 millions de dollars.

V. Observations

24. La MONUIK continue de fournir un appui à d’autres activités des Nations Unies et, par des contacts réguliers avec le Gouvernement du Koweït, un des deux pays hôtes, à maintenir un climat de confiance avec celui-ci. Le Gouvernement du Koweït a fait savoir à la MONUIK qu’il était satisfait de la coopération de la Mission en cette période d’incertitude due à l’absence d’un gouvernement représentatif internationalement reconnu en Irak. Le 31 mars 2003, le Représentant permanent du Koweït m’a informé que son gouvernement pensait que la situation délicate concernant la frontière entre le Koweït et l’Irak suffisait amplement à justifier le maintien de la Mission jusqu’à ce que la situation devienne plus claire et que la paix et la sécurité soient rétablies dans la région. Le 5 mai 2003, il m’a de nouveau écrit pour demander le maintien de la MONUIK au Koweït pour six mois supplémentaires après le 6 juillet 2003.

25. D’avril 1991 à la mi-mars 2003, l’action de la MONUIK a été couronnée de succès et a constitué à de nombreux égards un modèle d’opération de maintien de la paix des Nations Unies. Néanmoins, maintenant que le conflit en Irak s’est estompé à la suite de l’adoption par le Conseil de sécurité le 22 mai 2003 de la résolution 1483 (2003), le Conseil pourra souhaiter examiner si le maintien de la MONUIK au Koweït, alors que son mandat a été suspendu et que les circonstances ont changé, demeure souhaitable. Dans ces conditions nouvelles, je recommande de maintenir les effectifs restant en place au titre du maintien de la paix pour les trois derniers mois, jusqu’au 6 octobre 2003, date à laquelle la Mission sera close. Durant cette période, la MONUIK réduira sa présence militaire au minimum, continuera de fournir un appui aux opérations d’assistance humanitaire en Irak à partir du centre de soutien logistique de Kheitan et du camp Khor, maintiendra la liaison avec les autorités koweïtiennes, procédera à l’inventaire et à la liquidation des avoirs de la MONUIK et, cela est le plus important, prendra les dispositions voulues pour assurer la prise en charge par d’autres entités demeurant dans la région de l’assistance qu’elle fournit aux opérations humanitaires. Cela permettrait également de disposer de davantage de temps pour évaluer la situation en matière de sécurité dans l’ancienne zone d’opérations de la Mission, comme le souhaite le Gouvernement du Koweït, avant la clôture finale de celle-ci.

26. En conclusion, je souhaite rendre hommage au général de division Franciszek Gagor ainsi qu’aux hommes et aux femmes placés sous son commandement pour leur professionnalisme et le dévouement dont ils ont fait preuve au service du maintien de la paix durant une période particulièrement difficile. Ce qu’ils ont fait est à mettre à leur crédit, à celui de leur pays et à celui de l’Organisation des Nations Unies.

Source : ONU