Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le Commissaire,
Mesdames et Messieurs,

Nous nous souvenons tous parfaitement du contexte dans lequel la précédente Conférence a eu lieu il y a deux ans à Moscou au lendemain des tragiques attentats qui ont fait des milliers de victimes aux Etats-Unis. La Résolution que vous avez adoptée à cette occasion exprimait clairement la volonté politique et la confiance placée dans les valeurs que sont la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit. Vous avez alors montré la voie à suivre : agir de concert, fermement et efficacement pour protéger notre civilisation contre le terrorisme.

Au cours des deux dernières années, la Résolution de Moscou a été très précieuse pour orienter l’action du Conseil de l’Europe dans la lutte contre le terrorisme. Vous verrez dans mon rapport que nous nous sommes efforcés de mettre en oeuvre rapidement toutes les mesures que vous avez préconisées à cette occasion. Je ne m’attarderais pas sur l’ensemble des mesures prises et des initiatives lancées par notre Organisation pour lutter contre le terrorisme, car je préfère penser à l’avenir.

Permettez-moi simplement de mentionner l’adoption des Lignes directrices sur les droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme et les progrès significatifs réalisés dans le domaine juridique depuis votre dernière conférence grâce au Groupe multidisciplinaire sur l’action internationale contre le terrorisme (GMT). En l’espace d’une année seulement, nous avons pu mettre à jour la Convention européenne pour la répression du terrorisme, grâce à un Protocole portant modification de cette Convention qui a été ouvert à la signature le 15 mai 2003. De plus, des priorités d’action future du Conseil de l’Europe ont été définies et leur mise en oeuvre, qui a déjà débuté, sera suivie régulièrement, ce qui évitera tout gaspillage de temps et d’énergie.

J’en viens maintenant à la substance de mon intervention d’aujourd’hui : comment allons-nous poursuivre notre action ?

Vous conviendrez avec moi que les mesures prises ne sont pas suffisantes.

La menace du terrorisme est toujours présente et nous ne pouvons nous satisfaire des progrès réalisés, aussi importants soient-ils. De nouvelles voies doivent être explorées, des mesures supplémentaires permettraient sans nul doute d’améliorer notre capacité à éviter la violence terroriste.

J’estime qu’il est de mon devoir, en ma qualité de Secrétaire Général, d’attirer votre attention sur une autre mesure importante, et même la plus importante, que devrait prendre le Conseil de l’Europe qui depuis plus de cinquante ans lutte contre la criminalité tout en défendant les droits de l’homme, ce qui fait sa singularité.

Je veux parler de ce qui devrait être une nouvelle priorité absolue dans l’immédiat : l’élaboration d’une convention générale du Conseil de l’Europe sur le terrorisme.

Comme je vais l’expliquer, je suis fermement convaincu que la négociation d’une convention de ce type renforcerait l’action de l’Organisation des Nations Unies et présenterait une valeur ajoutée évidente des points de vue juridique et politique.

L’Onu négocie une convention générale sur le terrorisme. Cela étant, comme nous le savons tous, ces négociations se heurtent à des obstacles qu’il sera difficile de surmonter dans un avenir proche.

Dans ce contexte, notre Assemblée parlementaire a souligné qu’il serait bon d’envisager la possibilité d’élaborer une convention générale du Conseil de l’Europe contre le terrorisme, en tenant compte des travaux menés par l’Onu. Le Comité des Ministres a pris note de cette proposition avec intérêt et a accepté d’examiner la question de manière plus approfondie sur la base des conclusions de votre Conférence.

De plus, les autres organisations internationales ont été dûment informées de cette initiative qu’elles ont appuyée.

La réunion à haut niveau tenue à Genève en février, à laquelle ont participé l’Onu, l’OSCE et le Conseil de l’Europe ainsi que des représentants de l’UE, s’est expressément félicitée de cette initiative.

La présidence de l’UE notamment a déclaré qu’elle s’y intéressait lorsque je suis intervenu devant le Conseil permanent de l’OSCE à Vienne en juillet dernier.

Nous avons naturellement été en contact avec nos collègues de l’Onu qui sont favorables à l’élaboration d’un tel instrument au Conseil de l’Europe, y voyant une contribution positive à leurs objectifs qui pourrait ouvrir la voie à une convention générale et universelle contre le terrorisme.

Pour parvenir à ce résultat, certaines conditions doivent être réunies : les négociations devraient être menées dans un bref délai. Elles devraient prendre comme point de départ l’acquis des négociations de l’Onu et éviter les questions qui les ont interrompues. Elles devraient aussi contribuer aux travaux de l’Onu.

Je suis certain que notre Organisation sera en mesure de remplir ces conditions. Mon optimisme repose non seulement sur une certaine forme de foi aveugle qui résulte de mon expérience à la tête de cette Organisation mais aussi et surtout, sur une appréciation objective de la composition homogène du Conseil de l’Europe, de son Statut et de notre capacité avérée à élaborer des traités délicats et complexes.

Par ailleurs, des négociations de ce type présentent un grand intérêt tant d’un point de vue juridique que d’un point de vue politique.

 D’un point de vue politique, parce qu’elles permettraient de prouver à nos citoyens que nous entendons poursuivre notre action commune contre le terrorisme et montrer en outre clairement à la communauté internationale l’utilité des initiatives normatives multilatérales par opposition à l’unilatéralisme.

 D’un point de vue juridique, parce qu’elles favoriseraient une approche européenne permettant de concilier une plus grande répression et la protection des droits de l’homme. De plus, une convention générale du Conseil de l’Europe offrirait une plateforme juridique commune pour prévenir, détecter et poursuivre plus efficacement les actes de terrorisme.

L’heure est venue d’imprimer un élan politique fort à cette initiative et d’ouvrir des négociations relatives à un instrument de ce type.

Cette initiative devrait être au centre des efforts menés par notre Organisation pour lutter contre le terrorisme dans les années à venir et est de fait l’une de mes priorités absolues.

Mesdames et Messieurs,

La présence de plus de 40 ministres ici aujourd’hui montre bien que le Conseil de l’Europe demeure la tribune idéale sur le continent pour traiter des grands défis que notre société doit relever.

Dans ce contexte, je me félicite de la présence du Commissaire, M. Vitorino, qui a toujours appuyé l’action du Conseil de l’Europe. Je souhaiterais souligner que les relations futures entre l’UE et le Conseil de l’Europe sont capitales pour nos Etats membres et seront au coeur de notre Troisième Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement.

Il va sans dire que l’élargissement de l’UE, qui passera de 15 à 25 pays, représente un changement majeur dans le paysage géopolitique européen.

L’UE et le Conseil de l’Europe ont des missions et des champs d’action différents mais partagent les mêmes objectifs : construire une Europe pacifique, stable et prospère sur la base de valeurs communes.

Le cadre de coopération qui existe entre les deux institutions devrait être révisé pour permettre une coordination plus étroite. Il faut donc faire preuve d’imagination et c’est pourquoi j’ai proposé à l’Assemblée parlementaire et au Comité des Ministres que l’UE devienne membre associé.

Vous reconnaîtrez comme moi que la cohérence et la sécurité juridique sont indispensables dans le domaine de la justice et des affaires intérieures. Nombre de vos domaines de compétence vont bientôt relever à la fois de l’UE et de ses Etats membres. Je mentionnerais par exemple la corruption, la traite des êtres humains, la coopération judiciaire en matière pénale, l’harmonisation de la législation et des procédures pénales, la lutte contre la criminalité et bien sûr, le terrorisme.

Dans ces domaines, il sera essentiel de poursuivre et d’intensifier la coopération au niveau de la Grande Europe sans clivages.

Les Etats membres et non membres de l’UE devraient continuer de tirer parti des possibilités qu’offre le Conseil de l’Europe, à savoir des solutions multilatérales pour l’ensemble du continent. Ces solutions sont beaucoup plus efficaces qu’une série d’accords bilatéraux.

C’est pourquoi je vous invite à conjuguer vos forces en faveur d’un nouveau partenariat institutionnel fondé sur un même engagement en faveur des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit.

Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs les ministres, Monsieur le Commissaire, Mesdames et Messieurs,

Le sujet qui nous réunit aujourd’hui montre clairement que seule une action concertée nous permettra de faire face avec succès aux grandes menaces qui pèsent sur nos sociétés.

Le terrorisme n’a pas encore été vaincu.

Nous ne devrions pas nous permettre de relâcher nos efforts, sous peine de voir nos valeurs et principes anéantis.

Notre message demeure le même, la lutte contre le terrorisme doit être menée sans concession mais toujours dans le respect des valeurs que le Conseil de l’Europe défend.

Je compte sur vous pour permettre au Conseil de l’Europe de continuer à contribuer utilement à la lutte mondiale contre le terrorisme et je vous demande de vous prononcer en faveur de l’ouverture immédiate de négociations en vue d’une convention générale dans ce domaine.

Monsieur le Premier ministre,

Permettez-moi, pour terminer, de vous adresser ainsi qu’aux autorités bulgares, mes plus sincères remerciements pour votre chaleureuse hospitalité et votre soutien.

Je vous remercie de votre attention.

Source : Conseil de l’Europe