L’attentat de Riyad de la semaine dernière est le signe que, comme l’Iran du Shah, l’Égypte de Sadate et le Pakistan de Bhutto, les Saoudiens sont les victimes du monstre islamiste qu’ils ont créé.
La stratégie islamiste de l’Arabie saoudite a commencé dans les années 60 pour contrer le nationalisme arabe de Nasser, puis le communisme à Oman et au Yémen dans les années 70 (ce qui entraîna la mort du roi Fayçal, assassiné par un islamiste dans sa famille en 1975) puis la révolution iranienne dans les années 80 et enfin contre les aspirations libérales de la classe moyenne saoudienne dans les années 90. Durant les vingt dernières années ; on estime à 100 milliards de dollars les sommes dépensées par le royaume pour soutenir l’islamisme sous toutes ses formes.
Toutefois des tensions entre l’État saoudiens et les islamistes sont apparues en 1990 après la guerre du Golfe, avec l’arrivée des troupes américaines dans le royaume et l’instauration d’une assemblée consultative en 1995 qui fut perçue, malgré son caractère profondément conservateur, comme un signe d’occidentalisation du royaume. Leur rancœur contre la maison royale se développa encore avec la politique d’ouverture en direction des libéraux, des laïcs des nationalistes arabes et des chiites du prince Abdallah, la proposition de plan de paix avec Israël et les purges menées dans le clergé et le corps enseignants pour isoler les islamistes. Ils ont enfin particulièrement mal accueilli l’annonce de l’élection visant à pourvoir la moitié des conseils municipaux dans lesquelles les femmes pourront voter. Les islamistes ont pu alors être motivés d’attaquer par deux éléments : le départ des troupes états-uniennes du royaume et le rapprochement entre Abdallah et Vladimir Poutine, honni pour sa guerre en Tchétchénie mais invité par le régent saoudien à assister au sommet de la conférence islamique à Kuala Lumpur.
Trop longtemps, le royaume a ignoré la menace représenté par les cellules terroristes formés par les anciens d’Afghanistan, même si aujourd’hui la monarchie saoudienne s’y attaque. Il est difficile de savoir pour l’instant si Riyad va réellement affronter les islamistes, peu soutenus dans la population, mais si le royaume applique une politique similaire à celle de l’Égypte et l’Algérie, cela pourrai entraîner la chute de plusieurs têtes de l’hydre islamiste.

Source
New York Times (États-Unis)
Le New York Times ambitionne d’être le premier quotidien global au travers de ses éditions étrangères.

« Same Tactics, New Target », par Amir Taheri, New York Times, 15 novembre 2003.