Les auditions de la Cour internationale de justice de La Haye sur le mur de séparation, qui doivent avoir lieu le 23 février 2004, donnent déjà lieu à l’élaboration de stratégies juridiques de la part des différents protagonistes.
La CIJ a ainsi décidé, jeudi 15 janvier 2004, que les États membres de la Ligue arabe pourraient se joindre à l’Autorité palestinienne pour témoigner dans ce dossier. Cette décision a révolté les responsables israéliens, qui redoutent qu’elle soit symptomatique du type de sentiment anti-israélien qui pourrait corrompre la procédure.
Le gouvernement israélien travaille par ailleurs à empêcher la tenue du procès. Le ministre des Affaires étrangères, Silvan Shalom, a ainsi déclaré, lors d’une conférence de presse avec le Premier ministre irlandais, Brian Cowen, que le renvoi de la question du mur devant la Cour allait handicaper les futures négociations de paix entre Israël et l’Autorité palestinienne. Le gouvernement demande donc aux pays ayant voté à l’ONU contre ce renvoi d’écrire à la Cour pour lui signifier les raisons de leur opposition. Des négociations sont également menées avec des États clés tels que les États-Unis, la Russie et l’Union européenne afin qu’ils s’opposent à la procédure devant la CIJ.
Selon le Jerusalem Post, « Israël n’a pas encore décidé s’il allait envoyer quelqu’un présenter une déclaration orale devant la Cour » mais continue néanmoins d’étudier son dossier. L’État hébreu négocie avec deux sociétés de relations publiques internationales qui doivent « l’aider à élaborer son message dans la bataille de propagande qui accompagnera à coup sûr la procédure ». D’après des sources officielles anonymes citées par le journal, « le professeur de droit de Harvard Alan Dershowitz a offert son aide à la campagne israélienne. (…) L’expert britannique en droit international Daniel Bethlehem aide à la rédaction d’un argumentaire expliquant pourquoi l’affaire ne doit pas être entendue ». Des responsables du ministère de la Défense souhaitent pour leur part exposer à la communauté internationale les motifs légitimes qui justifient la construction du mur. Israël envisage également de changer l’image de sa politique en qualifiant le mur de « barrière anti-terroriste ». Cette décision se veut une réponse aux récentes dénominations du mur qui prévalent dans la presse telles que « mur de Berlin » ou « mur d’apartheid ».
La Haute Cour de Justice israélienne a accepté d’entendre une requête élaborée par des avocats israéliens contre le mur, dans le cadre d’une répétition générale de ce que devraient être les audiences devant la Cour de la Haye. Cette requête avait été présentée avant que la question d’un éventuel renvoi du dossier devant la CIJ n’ait même été évoqué. Elle permettra à la justice israélienne de donner, au préalable, son avis sur la question. Le litige provient du fait que le mur ne respecte par la « ligne verte » de la frontière israélo-palestinienne existant avant 1967, et confisque de fait des territoires palestiniens au profit d’Israël.
Le cabinet restreint, qui comprend le Premier ministre et ses principaux ministres (le vice-Premier ministre Ehud Olmert, le ministre de la Défense, Shaul Mofaz, le ministre des Finances, Benyamin Netanyahu, le ministre des Affaires étrangères, Silvan Shalom, et le ministre de la Justice, Yosef Lapid), doit décider, dimanche 18 janvier 2004, de la façon dont Israël présentera sa position.

[CONTEXTE] Selon Proche-Orient.info, le groupe français Publicis serait l’une des deux sociétés de relations publiques choisies par Israël dans cette affaire.

Source
Ha&8217;aretz (Israel)
Quotidien de référence de la gauche intellectuelle israélienne. Propriété de la famille Schocken. Diffusé à 75 000 exemplaires.
Jerusalem Post (Israël)

« Arab states may testify on fence », par Tovah Lazaroff, Jerusalem Post, 16 janvier 2004. « Inner cabinet to decide on fence defense strategy at The Hague », par Aluf Benn et Sharon Sadeh, Ha’aretz, 16 janvier 2004.