Après plus de 15 ans dans le renseignement militaire chimique, je ne me souviens pas avoir déjà entendu parler de l’usage de tétraoxide d’oxium avant cette semaine. J’ai travaillé avec des experts du monde entier sur de nombreuses composantes préoccupantes mais le tétraoxide d’oxium n’en fait pas partie. Pourtant, on nous dit aujourd’hui que les services de sécurité ont contrecarré un complot visant à faire exploser une bombe utilisant ce composant dans Londres.
On nous parle d’Al Qaïda et de « bombe sale ». On nous dit que ce produit chimique n’est pas « contrôlé » et peut-être acheté sur Internet. Pourtant, d’autres produits, plus dangereux peuvent aussi être achetés par ce biais et il semble que ce produit ne serve en réalité qu’à rendre l’explosif plus puissant. Ces histoires sont d’autant plus étranges qu’on nous dit que le complot a été déjoué grâce à des écoutes de téléphones portables. Mais qui sont donc ces comploteurs qui communiquent encore des informations sensibles par téléphone portable, dont les écoutes sont si aisées ? Et si le gouvernement s’inquiète vraiment de l’usage de ce produit, pourquoi rendre cette information publique ?
J’ai d’abord pensé que cette histoire était une opération de promotion d’un des services de renseignement qui cherchait à accroître son prestige en organisant des « fuites » sur cette affaire, mais depuis que j’ai entendu le ministre de l’Intérieur David Blunkett en parler, je me demande s’il ne s’agit pas d’une opération de propagande servant à valider la politique du ministère. Cela ne m’inspire pas confiance dans la façon dont le ministère conçoit ses politiques.
L’emploi du terme « bombe sale » sert à justifier le combat contre le terrorisme alors que la bombe incriminée ne ferait pas plus de dégât que celles utilisées par l’IRA. Ce terme a été utilisé de façon impropre et c’est inquiétant concernant nos responsables politiques.

Source
The Independent (Royaume-Uni)

« Were terrorists really planning a dirty bomb ? », par Brian Jones, The Independent, 9 avril 2004.