Deux grands quotidiens français, Libération et Le Figaro, l’un de gauche, l’autre de droite, ont consacré dans leurs éditions respectives du 27 janvier 2005 un important dossier à la victoire du Hamas aux élections législatives palestiniennes.

Comme l’ensemble de la presse « occidentale », ils se sont attelées à dénigrer le choix du peuple palestinien en lui déniant son droit de résister à l’oppression et en présentant sa résistance comme une folie meurtrière.

Les deux quotidiens ont choisi d’afficher en « Une » un militant armé du Hamas, titrant « La bombe électorale : L’ample victoire du Hamas, parti islamiste partisan des attentats, inquiète les autres forces palestiniennes et Israël » pour Libération, « Hamas : le monde s’alarme » pour Le Figaro.

Libération propose une construction mentale, bâtie sur une dialectique surprenante. Le Hamas est présenté comme un parti sans aucun projet politique, dont le combat originel n’a été qu’ « Une longue marche violente vers le pouvoir » (titre du second article). Ainsi, il paraît évident qu’« Israël ferme la porte à toute négociation » (titre du cinquième article) avec « le Hamas qui lui dénie tout droit d’existence ».

Le Figaro, beaucoup plus expéditif, explique d’emblée que « Les Palestiniens ont sanctionné la corruption et compromis le processus de paix » en votant pour le Hamas.

À aucun moment les deux quotidiens, toujours prompts à dénoncer le manque de sincérité lorsque leurs favoris perdent des élections, ne relèvent l’irrégularité du scrutin : le financement massif du Fatah par les États-Unis, les nombreux assassinats de leaders du Hamas par Tsahal, et l’interdiction de vote de 94 % des habitants palestiniens de Jérusalem-Est par Israël. En effet, ces violations de la démocratie visaient toutes à limiter la victoire du Hamas qui a néanmoins emporté 75 % des suffrages exprimés.

Libération et Le Figaro préfèrent relayer la rhétorique des services de communication israéliens selon laquelle « il n’y a pas de partenaire arabe pour la paix » (c’est-à-dire que la poursuite de la guerre est imputable à l’obstination des seules populations occupées). Tous deux assurent que « le mouvement islamiste appelle à la destruction d’Israël », ce qui est faux. En effet, la Charte du Hamas exige la fin de l’occupation de la Palestine, pas l’expulsion des populations juives.