Monsieur le Premier ministre,
Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames, Messieurs,

C’est un grand honneur pour moi de pouvoir m’adresser aujourd’hui à vous à l’occasion de cette conférence.

Il y a un peu plus de quatre ans, les représentants de groupes afghans et les délégués de la communauté internationale se réunissaient au Petersberg, près de Bonn, pour tenir la première grande conférence sur l’Afghanistan. Ils avaient déjà une certaine expérience. En effet, les Afghans et la communauté internationale avaient eu l’occasion, au cours des années antérieures, de se rencontrer en Allemagne pour discuter de l’avenir du pays après le régime des talibans.

La conférence de Petersberg a marqué le début d’une nouvelle époque. C’est dans ce cadre que les jalons d’une reconstruction totale du pays ont été posés, après de longues décennies de guerre et de guerre civile et après la terrible oppression exercée par les talibans. La tâche de Bonn était immense. Elle confrontait autant les Afghans que la communauté internationale à des défis insoupçonnés.

Aujourd’hui, quatre ans plus tard, nous sommes entrés dans une nouvelle phase. L’inauguration du parlement afghan, le 19 décembre dernier, a marqué la fin du processus de Bonn qui, je peux l’affirmer avec conviction, s’est bien terminé.

Pour prendre toute la mesure du succès de ce processus, nous devons revenir en arrière à la situation de départ en 2001. Après 22 ans de guerre et de guerre civile, l’infrastructure matérielle et institutionnelle de l’Afghanistan était presque complètement détruite. Une large partie de la population s’était enfuie dans les États voisins. Depuis des années, l’enseignement n’était plus qu’irrégulièrement dispensé dans les écoles et les universités. Au lieu de s’instruire, les enfants étaient sans cesse exposés aux combats. Les femmes et les filles étaient systématiquement exclues de la vie publique. Les minorités ethniques étaient opprimées et n’avaient guère la possibilité de jouer un rôle dans la vie publique. Le pays était isolé du monde extérieur.

L’Afghanistan a accompli entre-temps un développement remarquable. Les étapes de ce développement, convenues dans l’accord de Bonn, ont été mises en œuvre sans exception : la population afghane a adopté une nouvelle constitution. Le 9 octobre 2004, vous avez été, Monsieur le Président, le premier chef d’État de l’histoire de l’Afghanistan à avoir été élu librement. Le 18 septembre 2005, pour la première fois après 36 ans, des élections législatives avaient lieu. La reconstruction de l’infrastructure et des institutions, comme l’armée et la police, avance. Les milices de la guerre civile ont été désarmées. La situation sécuritaire demeure difficile, mais elle s’est améliorée dans de nombreuses parties du pays, notamment grâce à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), des forces armées de la coalition et leurs équipes régionales de reconstruction. Le gouvernement central arrive de plus en plus à étendre son monopole de la force dans les provinces.

Comment s’explique ce succès ? Je voudrais notamment avancer les raisons suivantes :

Premièrement : l’accord de Bonn contenait un agenda politique exemplaire du point de vue de sa clarté, de sa logique et de la précision des échéances.

Deuxièmement : l’approche du processus de paix et de reconstruction était globale ; le processus politique s’accompagne d’une composante militaire et de développement.

Troisièmement : la stratégie de règlement était multilatérale et multinationale : aucun État ni aucune organisation internationale n’aurait été en mesure de supporter seule la charge du processus de reconstruction de l’Afghanistan. Ainsi, un grand engagement de la communauté internationale et une bonne coordination caractérisent aujourd’hui ce processus. En assurant avec succès cette coordination, les Nations Unies la légitiment tout particulièrement.

Et quatrièmement, c’est très important : le processus de reconstruction a un visage afghan.

Naturellement, il y a eu aussi des revers et des retards. La reconstruction du pays reste un processus d’apprentissage des deux côtés, pour la communauté internationale comme pour les Afghans eux-mêmes. Mais il faut le souligner, la coopération globale, à l’échelon national et international, s’est transformée en une coopération empreinte de grande confiance.

Aujourd’hui, Monsieur le Président, les conditions sont créées pour que les Afghans prennent eux-mêmes le destin de leur pays en main. Le processus de Bonn est désormais relayé par le "processus de Kaboul". En effet, le plan appelé "Afghanistan Compact" dont il est question ici, a été élaboré à Kaboul.

Malgré les succès remportés, nous sommes toutefois conscients qu’il faudra relever encore beaucoup de défis avant que l’Afghanistan ne connaisse la paix, la prospérité et la sûreté sociale. Nous devons continuer d’œuvrer avec engagement pour que le processus de démocratisation et de stabilisation offre une chance de vie meilleure à la population afghane, une chance de vivre dans la liberté et la dignité, de vivre dans la sécurité et à l’abri de la violence, de pouvoir développer ses possibilités et d’avoir un avenir pour les exploiter au mieux.

Dans ce processus, des institutions démocratiquement légitimées et opérationnelles sont capitales. En effet, celles-ci sont le mieux adaptées pour prévenir les crises, de même qu’un régime politique qui souscrit aux droits de l’homme et aux droits civiques et qui les applique effectivement au quotidien. C’est la meilleure façon de combattre à long terme les affrontements intérieurs et le terrorisme.

La communauté internationale continuera de soutenir résolument l’Afghanistan. En effet, nous souhaitons mener à bien le processus de reconstruction. L’ampleur et le rythme de ce processus dépendront plus que jamais des choix du gouvernement et du parlement afghans. Je suis persuadé que l’intégration régionale jouera également un rôle de plus en plus important. Un pays pacifique et prospère peut devenir le moteur d’une coopération régionale dynamique.

L’Allemagne s’est tout particulièrement engagée ces dernières années en Afghanistan et pour l’Afghanistan.

Nous sommes le premier contributeur en effectifs dans la FIAS.

Nous avons fourni deux équipes régionales de reconstruction.

Nous assurons la coordination de la FIAS dans le Nord.

Nous coordonnons la formation de la police pour l’Afghanistan et l’assurons - de concert avec les États-Unis et d’autres partenaires.

Nous avons fourni des fonds substantiels à l’aide au développement.

D’autre part, nous sommes prêts à apporter une contribution allemande dans le cadre de l’initiative de Cologne sur la dette. En effet, libérer le pays du poids d’une dette écrasante est une étape importante sur la voie du retour dans la communauté internationale.

L’Afghanistan est une priorité de notre engagement international. Nous sommes convaincus que le peuple afghan atteindra le but qu’il s’est fixé, il y a quatre ans, et poursuivrons notre engagement. Dans ce contexte, nous nous réjouissons que ce soit Tom Koenigs, un Allemand, qui prenne prochainement la direction de la MANUA à Kaboul. À mes yeux, sa nomination est aussi une reconnaissance de notre mobilisation en Afghanistan. Je suis persuadé que Tom Koenigs saura continuer l’excellent travail déjà engagé par ses prédécesseurs Francesc Vendrell, Lakhdar Brahimi et Jean Arnault.

Je vous remercie.