Le 9 septembre 2001, Ziad Jarrah, le terroriste qui dirigea le détournement du vol 93 le 11 septembre 2001, a été flashé en voiture à plus de 90 miles à l’heure sur l’I95. S’il avait été arrêté ce jour-là, il n’aurait pas pu détourner cet avion (il était le seul à savoir piloter) et peut-être même qu’il aurait été possible en le faisant parler d’éviter la totalité des attentats. Rouler au dessus de la limitation de vitesse deux jours avant une telle opération est stupide, mais il l’a quand même fait.
Depuis l’arrestation des 17 suspects dans une affaire de terrorisme au Canada, on lit beaucoup dans les journaux qu’il ne s’agirait pas de « vrais terroristes », que les personnes arrêtées auraient eu des comportements trop ineptes pour être vraiment dangereux. Mais leur attitude était-elle moins censée que celle de Ziad Jarrah ? On pourrait aussi parler de Jamal Zougam, l’organisateur des attentats de Madrid, qui fut arrêté en juillet 2001 et en décembre 2001 et qui aurait pu être surveillé, mais qui n’eut pas la présence d’esprit de coordonner les opérations avec un autre téléphone que son portable. De même Ben Laden ne savait pas que les Twin Towers s’effondrerait le 11 septembre, mais il a eu de la chance. Richard Reid ne savait pas bien comment fonctionnait l’explosif qu’il avait dans ses chaussures, mais il n’a pas eu de chance.
En fait, minimiser les compétences des 17 terroristes permet surtout aux Canadiens de se rassurer. Ils ne veulent pas voir la réalité en face. Ils devraient pourtant comprendre qu’ils sont embarqués sur le même bateau que les autres.

Source
National Post (Canada)

« Fooling ourselves into feeling safe », par David Frum, National Post, 10 juin 2006.