Cette année, 20 ans après le premier discours de Ronald Reagan sur le programme Star Wars, les États-Unis vont déployer le premier composant d’une défense nationale antimissile. L’idée de rendre les États-Unis imperméables à une attaque de missiles est apparue juste avant que l’URSS ne commence à s’effondrer. Elle aurait dû disparaître avec la fin de l’URSS, mais elle a subsisté grâce à une bande d’idéologues qui l’ont réorientée autour de la menace potentielle des États voyous. Les évènements du 11 septembre auraient également dû donner un coup mortel à cette idée puisque la doctrine militaire des États-Unis a évolué en direction des frappes préventives qui ont justement pour objectif de frapper les pays avant qu’ils aient les moyens d’être un danger pour les États-Unis. Compte tenu de cette doctrine, il est étrange que le 22 juillet, les premiers missiles à longue portée du système anti-missiles aient été placés dans un silo souterrain en Alaska. Le responsable du programme, le général John W. Holly, et George W. Bush ont présenté ce programme comme essentiel à la défense des Américains, mais les missiles d’Alaska ne défendent pas le pays, c’est une dépense d’argent énorme qui le rend plus vulnérable.
La faisabilité technique du système est depuis longtemps en question compte tenu de la multiplicité des systèmes permettant de cacher un envoi de missile ou d’éviter sa destruction en vol. En outre, la défense anti-missiles se concentre peut-être sur la mauvaise menace puisqu’il est beaucoup plus facile de tirer un missile depuis un bateau au large des côtes américaines plutôt que d’envoyer un missile continental. Ce programme va par ailleurs coûter une fortune et déstabiliser nos relations avec la Russie et la Chine. Les défenseurs du système assurent qu’à terme, les États-Unis disposeront d’un système intégré anti-missiles. Pourtant un tel système va surtout relancer la course aux armements en Corée du Nord, en Iran, les seules vraies menaces, mais aussi en Chine et en Russie.

Source
Los Angeles Times (États-Unis)

« ’Star Wars’ : Pie in the Sky », par William M. Arkin, Los Angeles Times, 15 août 2004.