C’est Reagan qui a créé la Fondation nationale cubano-américaine dont le rôle sinistre vis-à-vis du blocus et du terrorisme contre Cuba devait être mis au grand jour quelques années plus tard quand le gouvernement des États-Unis à déclassifié des documents secrets, bien que toujours surchargés de ratures. L’avoir su avant n’aurait pas changé notre conduite pour autant.

Quand on apprit à Cuba, le 30 mars 1981, que Reagan avait été victime d’un attentat —par une arme calibre 22 dont une balle se logea dans un poumon, lui occasionnant des risques et des souffrances— je lui ai fait parvenir un message de vœux de rétablissement : j’ai demandé à notre ministre des Affaires étrangères, Isidoro Malmierca, d’avoir une conversation à ce sujet avec Wayne Smith, chef de la Section des intérêts des États-Unis à La Havane. J’en cite des extraits textuels :

« ISIDORO MALMIERCA. Je vous ai convoqué et reçu à la demande expresse du président Fidel Castro, qui m’a demandé de vous remercier des informations que vous avez offertes au directeur Joaquín Más au sujet de l’attentat dont le président Reagan a été victime. Mais je tiens aussi à vous dire, toujours au nom du président Fidel Castro, combien nous regrettons ce fait et à exprimer notre espoir, à faire des vœux pour le prompt rétablissement du président Reagan.

" WAYNE SMITH. Je vous remercie.

" ISIDORO MALMIERCA. Nous avons reçu des informations sur les soins médicaux qu’il reçoit. Vous avez aussi reçu au début des informations selon lesquelles les conséquences de l’attentat étaient simples, mais il semble que ce soit plus grave, qu’on l’a soumis à une intervention chirurgicale.

" WAYNE SMITH. Oui. Nous avions l’impression qu’il avait déjà été opéré, mais la radio a informé que l’opération vient de commencer. Il est probable qu’il en sorte d’ici une heure. Une opération de trois heures, ça n’a rien de simple, donc, surtout pour un septuagénaire. On dit qu’il est hors de danger. J’interprète ceci comme quoi il n’y aura pas de danger immédiat. Mais, chez un septuagénaire, une opération de trois heures est quelque chose de sérieux. Mais on dit que la situation n’est pas grave, qu’il est stable. Nous espérons que tout ira bien. Je vous remercie de vos vœux, ainsi que de l’intérêt et du message du président Fidel Castro.

"ISIDORO MALMIERCA. À Washington aussi, M. Frechette s’est adressé à la Section des intérêts de Cuba et nous a fait parvenir des renseignements sur la situation. Il a expliqué que vous aviez reçu aussi des informations. Parfait. Je vous répète que le président Fidel Castro m’a chargé personnellement de vous rencontrer et de vous exprimer nos vœux que le président Reagan puisse se rétablir rapidement des conséquences de l’attentat.

" WAYNE SMITH. Je vous remercie. Mon Dieu ! Que c’est dur ! Le président Kennedy a été assassiné à Dallas, et il semble que le responsable de l’attentat contre Reagan soit de Dallas. Il vit maintenant dans le Colorado, mais il est de Dallas. Je ne sais si…

" ISIDORO MALMIERCA. J’ai lu dans des dépêches qu’il est né près de Denver, à une trentaine de kilomètres.

" WAYNE SMITH. Je ne sais pas. L’un de mes consuls ici, de la Section, m’a dit qu’il avait écouté à la radio que c’est un type qui a fréquenté la même école que lui. Je ne sais pas, peut-être a-t-il vécu quelques années à Dallas. Je ne sais pas ce qu’a l’ambiance à Dallas pour…

" ISIDORO MALMIERCA. On dit que ce sont trois frères, fils d’un pétrolier.

" WAYNE SMITH. Son papa, oui. C’est un jeune de vingt-deux ans, étudiant de Yale, mais qui venait d’abandonner ses études. Peut-être un jeune frustré par un échec, qui a agi sur un coup de tête. A vrai dire, je me réjouis que ce soit un jeune comme ça, et non un Portoricain, par exemple, ou quelqu’un comme ça car cela pourrait avoir des conséquences politiques.

" ISIDORO MALMIERCA. Oui, on pourrait spéculer alors sur les motivations politiques.

" WAYNE SMITH. Oui, c’est incontestable, cela pourrait encourager des interprétations politiques. Mais un jeune Blanc du Colorado, du Texas, il est bien difficile de faire des interprétations politiques.

"ISIDORO MALMIERCA. La police a même informé que c’est quelqu’un qui a agi seul, sans lien avec aucun groupe…

" WAYNE SMITH. Oui, ça doit être un fou ou un fanatique pour s’approcher tant du président… En fait, il a été immédiatement arrêté. Il a sorti son pistolet et il a tiré…

" ISIDORO MALMIERCA. Braddy est mort ?

" WAYNE SMITH. Non.

" ISIDORO MALMIERCA. On a dit qu’il avait été tué.

" WAYNE SMITH. Oui, certains rapports ont parlé de sa mort, mais non, il est dans un état très grave, mais il n’est pas mort. Je suppose que si cela ’avait été une balle calibre 45, il serait mort, mais avec un calibre 22, il a certaines possibilités… Mais il semble avoir reçu la balle dans la tête, et là évidemment… Tout cela ne laisse présager rien de bon, il n’y a guère d’espoir.

" ISIDORO MALMIERCA. Une balle dans la tête, de n’importe quel calibre, c’est très grave.

" WAYNE SMITH. Braddy est dans un état très grave. Il pourrait en réchapper, mais ce serait une vie végétative.

" ISIDORO MALMIERCA. Je regrette que notre conversation ait été provoquée par un fait si regrettable.

" WAYNE SMITH. Je vous remercie de vos vœux. J’enverrai aussitôt une dépêche à mon gouvernement pour l’informer de notre conversation. Je vous prie de transmettre mes remerciements au président Fidel Castro. "

Je n’ai aucun commentaire à faire. La version de Malmierca, rédigée aussitôt après, parle d’elle-même. Wayne Smith est aujourd’hui un opposant résolu du blocus et des agressions contre Cuba.

Mais l’histoire de ma conduite envers le président d’un pays qui, dès l’époque d’Eisenhower, a tramé des centaines de plans pour m’assassiner ne conclut pas là.

Une information remise de manière absolument confidentielle, à l’été 1984, à un fonctionnaire responsable de la sécurité des représentants cubains auprès de l’ONU lançait une mise en garde contre le fait qu’un groupe d’extrême droite de Caroline du Nord préparait un attentat contre le président Ronald Reagan. L’ayant appris, j’ai décidé d’en informer immédiatement les autorités états-uniennes. Notre fonctionnaire a suggéré de le faire par l’intermédiaire de Robert C. Muller, chef de la sécurité de la mission des États-Unis auprès des Nations Unies. Des liens avaient été établis avec ce dernier en vue de la protection des délégations cubaines qui se rendaient au siège de l’ONU.

L’attentat devait se produire à une date très proche, quand Reagan se rendrait en Caroline du Nord dans le cadre de sa campagne de réélection à la présidence.

Les informations que nous possédions étaient complètes : noms des comploteurs ; jour, heure et endroit où le crime aurait lieu ; type d’armement aux mains des terroristes ; où les armes étaient cachées ; lieu de réunion des individus impliqués et bref récit de ce qui avait été dit au cours de cette réunion.

Notre fonctionnaire a remis les informations à Muller dans un édifice de la 37e rue et de la 3e avenue, à deux rues de la mission cubaine.

Il lui transmit tous les détails connus alors, et surtout le plus important : les noms des impliqués, l’endroit, l’heure et le type d’armes qui seraient utilisées.

À la fin de la rencontre, il lui affirma avoir reçu des instructions du gouvernement cubain de le faire d’urgence et que s’il avait été choisi, c’est parce qu’on savait que c’était un expert en des questions de sécurité.

Muller a lu les informations pour s’assurer que rien n’avait été modifié et que tous les éléments importants étaient signalés.

Quand il s’est enquit de la source, on lui a répondu qu’elle était sûre. Il a affirmé que le Secret Service [1] devrait forcément rencontrer les fonctionnaires cubains. On lui a répondu qu’il n’y avait pas d’inconvénients.

Les agents du Secret Service ont rencontré des représentants cubains l’après-midi de ce même jour-là, vers quatre heures et demie.

L’entretien s’est déroulé dans l’appartement 34-F, au septième étage de Ruppert Towers, un ensemble d’édifices de la 92e rue, entre les 3e et 2e rues, dans la partie haute de Manhattan.

Les agents étaient deux jeunes blancs, cheveux ras, en costume. Ils tenaient principalement à vérifier ce que Muller leur avait transmis, puisqu’ils avaient avec eux une copie de la dépêche que celui-ci leur avait envoyée. Nos fonctionnaires ont vérifié la teneur de la dépêche et ont assuré que rien n’y manquait.

Les agents du Secret Service ont voulu savoir qui avait donné les informations et comment elles nous étaient parvenues. La réponse a été la même que celle qui avait été donnée à Muller. Ils ont voulu savoir si on pouvait leur en dire davantage et on leur a répondu que si quelque chose de nouveau arrivait, on le leur ferait savoir immédiatement. Ils ont laissé leurs cartes de visite, demandé qu’on leur téléphone directement au cas où nous aurions d’autres informations, et précisé que ce n’était plus la peine de passer par Muller.

Nous avons appris le lundi suivant que le FBI avait arrêté un groupe de personnes en Caroline du Nord et que plusieurs chefs d’accusation pesaient sur elles, dont aucun, bien entendu, n’avait à avoir avec un attentat contre le président Reagan qui s’est rendu dans cet État quelque temps après dans le cadre de sa campagne de réélection présidentielle.

Quatre ou cinq jours après cette arrestation, durant le même week-end, Muller a téléphoné à notre mission pour inviter le fonctionnaire cubain à un déjeuner au restaurant des délégués des Nations Unies. Là, il lui a demandé tout d’abord de transmettre au gouvernement cubain les remerciements du gouvernement états-unien pour les informations fournies, et il a confirmé que celui-ci avait agi contre le groupe en question. Un combattant antiterroriste cubain avait sauvé la vie d’un président des États-Unis !

Tel ou tel journal états-unien signale le journal intime de plus de sept cents pages que Reagan rédigea, depuis son arrivée à la Maison-Blanche jusqu’à la passation du pouvoir à son successeur Bush père, ces notes personnelles indiquant censément que son gouvernement n’aurait pas été si agressif contre Cuba.

Or, selon ce qu’on raconte, Robert McFarlane, alors sous-secrétaire d’État adjoint d’Alexander Haig, affirme dans ses Mémoires : « De toutes les administrations ayant eu à voir avec Fidel Castro depuis 1959, celle de Reagan semblait la moins adéquate pour dialoguer avec le régime communiste de Cuba. »

Peut-être Reagan avait-il senti quelque gratitude tant de notre préoccupation au moment de l’attentat de 1981 que pour l’alerte que lui sauva la vie face à un danger imminent et voulut-il le faire savoir par Robert C. Muller interposé.

C’est en fait Reagan qui a signé le premier accord migratoire avec Cuba, mais il ne pouvait échapper à son environnement, au point que d’autres encore plus de droite que lui souhaitaient l’éliminer physiquement, comme ils l’avaient fait avec Kennedy après que celui-ci eut connu de près le terrible risque de la guerre thermonucléaire. En pleine année électorale, Reagan modifia sans aucun doute sa politique envers Cuba, ne respecta pas l’accord souscrit qui fixait jusqu’à vingt mille le nombre de visas que les USA devaient délivrer en vue d’une émigration sûre, puisqu’il en délivra moins de mille, et maintint la Loi d’ajustement cubain qui a coûté tant de vies cubaines.

Un vrai chaos se déchaîna le 11 septembre 2001 dans le pays voisin. Ce jour-là, pendant très longtemps, les aéroports refusèrent le droit d’atterrissage, si bien qu’un nombre incalculable d’appareils de ligne durent continuer de voler. Telles étaient les nouvelles que transmettaient les médias états-uniens. On informait que des milliers de personnes avaient péri à New York parmi les employés qui travaillaient dans les Tours jumelles, les pompiers et les visiteurs. On parlait aussi d’un avion de passagers qui s’était écrasé sur le Pentagone. Nous offrîmes, le cas échéant, des dons de sang sûr en provenance de donneurs habituels, une tradition de toujours de la Révolution cubaine.

Ce jour-là, près de quinze mille étudiants et diplômés universitaires avaient été convoqués à six heures de l’après-midi pour la réouverture de l’école Salvador Allende où 3 599 jeunes allaient entreprendre des études supérieures pour devenir, selon des méthodes nouvelles et éprouvées, professeurs dans l’enseignement primaire.

Six ans se sont écoulés depuis ce douloureux épisode. On sait aujourd’hui que la désinformation a été délibérée. Je ne me rappelle pas avoir entendu dire ce jour-là que les sous-sols de ces tours, dont les étages étaient le siège de nombreuses banques transnationales et sociétés, renfermaient environ deux cents tonnes de lingots d’or. Les gardiens avaient reçu l’ordre de tirer sans sommation contre quiconque tenterait de pénétrer dans cette zone. Les calculs concernant les structures d’acier, les impacts d’avion, les boîtes noires et leur contenu, ne s’ajustaient pas aux vues de mathématiciens, de sismologue, de spécialistes en information et de spécialistes en démolition, etc., etc. Le plus dramatique, c’est qu’on ne saura peut-être jamais ce qu’il s’est passé exactement. En tout cas, que l’on sache, plusieurs personnes qui volaient de New York à San Francisco ont téléphoné à des parents quand l’appareil était déjà contrôlé par des individus qui n’appartenaient pas à l’équipage.

Quand on analyse l’impact d’avions semblables à ceux qui se sont précipités contre les tours et tombés par accident dans des villes très peuplées, on conclut qu’aucun appareil ne s’est écrasé sur le Pentagone et que seul un missile a pu provoquer l’orifice rond causé par le prétendu avion. Aucun passager mort n’est jamais non plus apparu. Nul ne doutait alors dans le monde que le Pentagone avait été attaqué. On nous a trompés, tout comme le reste des habitants de la planète.

Parlant ce jour-là, 11 septembre, à la Cité des sports, j’avais abordé entre autres points cette tragédie aux États-Unis. Ne pouvant reproduire l’allocution complète, j’en donne ici des extraits :

« […] Nous ne pensions pas annuler ce meeting, et nous ne le pouvions pas, malgré la tension internationale créée par les événements. Je suppose que beaucoup de vous sont au courant, mais voilà en gros de quoi il s’agit. Vers neuf heures du matin, un Boeing, un des très grands, s’est écrasé directement contre l’une des deux célèbres tours de New York, l’un des immeubles les plus hauts du monde. Naturellement, cette tour a pris feu sous l’impact du carburant de ce gros avion. Des scènes terribles se sont déroulées. Dix-huit minutes plus tard, un autre avion, lui aussi d’une compagnie étasunienne, s’est précipité directement contre l’autre tour.

Quelques minutes plus tard, un autre avion s’est écrasé sur le Pentagone. D’autres nouvelles informent, au milieu d’une certaine confusion, d’une bombe face au Département d’Etat et d’autres faits alarmants. Bien sûr, je n’ai mentionné que les plus importants.

De toute évidence, le pays a été victime d’une attaque violente et par surprise, inattendue, inusitée, quelque chose de vraiment insolite qui a donné lieu à des scènes impressionnantes, surtout lorsque les tours étaient en feu et, ensuite, lorsqu’elles se sont écroulées avec leurs cent étages sur des immeubles proches. On sait que des dizaines de milliers de personnes y travaillaient dans ces bureaux de nombreuses compagnies de différents pays.

Il est logique que ces événements aient provoqué une commotion aux États-Unis et dans le monde. Les bourses ont commencé à s’effondrer. Étant donné l’importance politique, économique, technologique des États-Unis et leur pouvoir, le monde était aujourd’hui ébranlé par ces événements qu’il a fallu suivre de près toute la journée, alors que pour notre part nous prêtions attention aux conditions et aux circonstances dans lesquelles allait se tenir ce meeting.

Par conséquent, je devais aborder deux points : l’école et son énorme importance, et la catastrophe politique et humaine qui s’est produite là-bas, spécialement à New York.

[…] Aujourd’hui est un jour tragique pour les États-Unis. Vous savez parfaitement que nous n’avons jamais semé ici la haine du peuple états-unien. Cuba, justement parce qu’elle se sent pleinement libre, qu’elle a une patrie mais pas de maître, parce qu’elle est cultivée et n’a pas de complexes, est peut-être le pays où l’on traite avec le plus de respect les citoyens états-uniens. Nous n’avons jamais prêché la moindre de haine nationale, ni rien de semblable au fanatisme. Et si nous sommes si forts, c’est parce que notre conduite est fondée sur des principes et des idées. Voilà pourquoi nous nous traitons avec beaucoup de respect —et ils s’en rendent compte— tous les citoyens états-uniens qui visitent notre pays.

Nous n’oublions pas non plus le peuple états-unien qui a mis fin, par son opposition, à la guerre génocide du Vietnam. Nous n’oublions pas le peuple états-unien qui, à plus de 80 %, a appuyé le retour du petit Elian dans notre pays. Nous n’oublions pas son idéalisme, même s’il est souvent trompé, car, comme je l’ai souvent dit, pour pousser un États-unien à soutenir une cause injuste, une guerre injuste, il faut d’abord le tromper, et la méthode classique utilisée dans la politique internationale de cet énorme pays est de tromper d’abord la population pour pouvoir compter ensuite sur son appui. Lorsque l’inverse se produit et que le peuple découvre une injustice, il s’oppose par tradition d’idéalisme à tout ce qu’il avait appuyé, qui sont bien souvent des causes très injustes, parce qu’il était convaincu de soutenir une cause juste.

C’est pourquoi —bien que nous ne sachions pas le nombre exact de victimes— après avoir vu des scènes de souffrance impressionnantes, nous avons ressenti une douleur et une tristesse profondes à l’égard du peuple étasunien, fidèles à la ligne que nous avons toujours suivie.

Nous n’adulons pas les gouvernements, nous ne cherchons pas à entrer dans les bonnes grâces de personne, nous ne cherchons pas le pardon, mais nous n’avons pas la moindre peur. La Révolution a prouvé dans son histoire combien elle est capable de relever un défi, combien elle est capable de lutter, combien elle est capable de résister autant qu’il le faut, ce qui nous a converti en un peuple invincible. Ce sont là nos principes, une Révolution basée sur des idées, sur la persuasion et non sur la force. […]

Telle a été notre réaction, et nous avons voulu que notre peuple voie les scènes et la tragédie. Nous n’avons pas hésité à exprimer publiquement nos sentiments. J’ai ici une déclaration qui a été remise à la presse internationale vers trois heures de l’après-midi, élaborée aussitôt que les faits ont été connus, tandis que notre télévision diffusait des images des événements. Elle sera communiquée à notre peuple au journal télévisé du soir.

Je devance le moment pour quelques minutes afin de vous lire la Déclaration officielle du gouvernement de Cuba face aux événements qui ont eu lieu aux États-Unis :

"Le gouvernement de la République de Cuba a connu avec douleur et tristesse les attaques violentes réalisées ce matin par surprise contre des installations civiles et officielles à New York et à Washington et qui ont causé de nombreuses victimes. […]
On ne saurait oublier que notre peuple a été victime, durant plus de quarante ans, d’action de ce genre, encouragées depuis le territoire même des États-Unis.
Aussi bien pour des raisons historiques que par des principes éthiques, le gouvernement de notre pays rejette et condamne énergiquement les attaques perpétrées contre ces installations et exprime ses condoléances les plus sincères au peuple états-unien pour les pertes humaines, douloureuses et injustifiables, qu’elles ont provoquées.
À cette heure amère pour le peuple états-unien, notre peuple se solidarise avec lui et exprime sa totale disposition à coopérer, dans la mesure de ses modestes possibilités, avec les institutions sanitaires et avec toute autre institution à caractère médical ou humanitaire de ce pays aux soins et à la réhabilitation des victimes causées par les faits de ce matin".

[…] Même si on ne sait pas encore si les victimes sont au nombre de cinq, dix, quinze ou vingt mille —on sait seulement qu’il y avait des centaines de passagers dans les avions qui se sont écrasés contre les tours et contre le Pentagone— nous avons offert ce que nous pouvions en cas de besoin.

Il s’agit d’un pays qui possède un grand développement scientifique, médical, qui dispose de ressources, mais il est possible qu’à un moment donné il ait besoin de sang d’un groupe donné, de plasma, ou de tout autre produit, ce que nous lui donnerions avec plaisir, ou alors d’un appui médical ou de personnel paramédical, car nous savons que de nombreux hôpitaux manquent de techniciens et de professionnels. Bref, ce que nous voulions c’était exprimer notre attitude et notre disposition face à ces événements tragiques.

[…] Les détournements d’avions, une méthode inventée contre Cuba, étaient devenus un véritable fléau universel, et c’est nous qui avons réglé en fin de compte ce problème quand, après de nombreux avertissements dans ce sens, nous avons renvoyé aux Etats-Unis deux pirates de l’air. C’était d’autant plus douloureux qu’il s’agissait de citoyens cubains, mais nous l’avions averti publiquement et nous avons tenu parole. Ensuite, les autorités de là-bas ne nous ont jamais plus donné de leurs nouvelles, même pas pour leur famille. Ils ont leur façon d’agir. Allez savoir… Je sais qu’ils ont été condamnés à quarante ans de prison. En tout cas, c’est ça qui a mis fin aux détournements d’avions.

[…] Aucun des problèmes actuels du monde ne peut se régler par la force. Aucun pouvoir global, aucun pouvoir technologique, aucun pouvoir militaire ne peut garantir l’immunité totale contre des faits de cette nature, car ils peuvent être perpétrés par des petits groupes, difficiles à découvrir […]

Il est très important de savoir quelle sera la réaction du gouvernement des États-Unis. Des jours dangereux s’annoncent vraisemblablement pour le monde. Je ne parle pas de Cuba. Cuba est le pays le plus tranquille au monde, pour différentes raisons : notre politique, notre forme de lutte, notre doctrine, notre morale et, aussi, compañeras et compañeros, notre absence totale de crainte.

Rien ne nous inquiète, rien ne nous intimide. Il serait très difficile de monter une calomnie contre Cuba, même pas celui qui l’inventerait y croirait. C’est très difficile. Cuba n’est pas rien dans ce monde, elle jouit d’une très grande position morale et d’une position politique très solide.

[…] Les prochains jours seront d’une grande tension, aux États-Unis et au dehors. Tout le monde commencera à émettre des opinions.

[…] Nous suggérerions à ceux qui dirigent le puissant empire de garder leur sérénité, d’agir avec sang-froid, de ne pas se laisser emporter par des accès de colère ou de haine, de ne pas se lancer à la chasse de gens en larguant des bombes de partout. […]

Je le répète : aucun des problèmes du monde, dont le terrorisme, ne peut se régler par la force, et chaque action de force, chaque recours irrationnel à la force, où que ce soit, ne ferait que les aggraver.

La voie à suivre n’est ni la force ni la guerre. Je le dis ici, fort de l’autorité que me donne le fait d’avoir toujours parlé avec honnêteté, de posséder des convictions solides et d’avoir vécu l’expérience et les années de lutte qu’a connues Cuba. Seule la raison, la politique intelligente consistant à chercher la force du consensus et de l’opinion publique internationale peuvent extirper ce problème. Je pense qu’un fait aussi insolite devrait servir à favoriser la lutte internationale contre le terrorisme. Mais celle-ci ne se gagne pas en éliminant un terroriste par ci et un autre par là, en tuant de ci et de là, en employant des méthodes similaires et en sacrifiant des vies innocentes. Elle se gagne, entre autres, en mettant fin au terrorisme d’État et à d’autres formes de tuer répugnantes, en mettant fin aux génocides, en suivant loyalement une politique de paix et de respect de normes morales et légales imprescriptibles. Le monde ne pourra se sauver que s’il suit une politique de paix et de coopération internationale.

[…] Nous avons largement prouvé que nous pouvons survivre, vivre et aller de l’avant. Et tout ce que nous avons vu ici aujourd’hui est l’expression d’un progrès sans égal dans l’histoire. On ne progresse pas seulement en produisant des voitures : on progresse en épanouissant les intelligences, en apportant des connaissances, en créant de la culture, en s’occupant des êtres humains comme il le mérite. Tel est le secret de l’énorme force de notre Révolution.

Le monde n’a pas de salut par d’autres voies, et je parle ici de la violence. Qu’on cherche la paix partout pour protéger les peuples contre le fléau du terrorisme, soit, mais il est d’autres terribles fléaux : le sida, par exemple. Ou celui qui tue des dizaines de millions d’enfants, d’adolescents et de personnes dans le monde : la faim, les maladies, le manque d’assistance médicale et de médicaments.

Du point de vue politique, il existe des idées absolutistes, une pensée unique que l’on essaie d’imposer au monde et qui ne provoquent partout que la rébellion et l’irritation.

Le monde ne pourra se sauver —et cela n’a plus rien à voir avec le terrorisme— si l’on continue à développer et à appliquer cet ordre économique et social injuste qui nous mène tout droit à la catastrophe à laquelle ne pourraient pas échapper les 6,2 milliards d’habitants de la planète, ni leurs enfants. Car notre planète est de plus en plus détruite et poussée à la destruction, à la pauvreté, au chômage, à la faim et au désespoir. Les masses l’ont démontré à Seattle, à Québec, à Washington, à Gênes, des villes déjà historiques.

Les leaders les plus puissants de l’économie et de la politique mondiale ne peuvent pratiquement plus se réunir. Les gens en ont de moins en moins peur et se soulèvent partout, comme on peut le constater. Je reviens de Durban, une ville sud-africaine, et j’y ai vu des milliers de personnes qui appartiennent à des organisations non gouvernementales. Le mécontentement pousse comme des champignons dans le monde. […] »

Quelle différence énorme entre la conduite du gouvernement cubain et celle du gouvernement états-unien ! La Révolution, qui se fonde sur la vérité ; l’Empire, qui se fonde sur le mensonge !

Source
Agence Cubaine de Nouvelles
L’Agence Cubaine de Nouvelles (ACN) est une division de l’Agence d’information nationale (AIN) de Cuba fondée le 21 mai 1974.

Si vous n’avez pas encore lu le livre de Thierry Meyssan, L’Effroyable imposture, parce que la presse française vous en a dit du mal et que vous souhaitez cependant comprendre pourquoi le cheikh Zayed, les présidents Bachar el-Assad, Mahmoud Ahmadinejad, Hugo Chavez et Fidel Castro ne croient pas la version bushienne des attentats du 11 septembre, commandez-le en cliquant ici.

[1Le Secret Service est une agence états-unienne principalement chargée de la protection des hautes personnalités et de la lutte contre le faux-monnayage.