Juste au moment de la commémoration
du 11-Septembre, des terroristes islamiques
voulaient commettre un « attentat
atroce » avec « un nombre très élevé de morts »
(Spiegel Online) qui aurait « fait surgir en Allemagne
une dimension de la terreur jamais
connue auparavant » (Frankfurter Allgemeine
Zeitung – FAZ
) et qui a pu être évité
seulement « à la dernière minute » (Lausitzer
Rundschau
) grâce à l’action résolue des forces
de sécurité. Il y a un an, de telles prophéties
avaient déjà eu lieu autour de la prétendue
valise à la bombe découverte à la gare principale
de Cologne. Pourtant, depuis, la situation
s’est aggravée comme le résume l’éditorialiste
du FAZ, Berthold Kohler : « Les bombes
deviennent plus grandes et leurs poseurs apparemment
plus professionnels. C’est une réalité
à laquelle on doit faire face également dans
notre pays. Elle est depuis la récente opération
policière si évidente que Schäuble [1] a pu se passer
d’ajouter son éternelle revendication pour
une perquisition online. »

Cependant, pour le malheur du ministre de
l’Intérieur et de ses ventriloques de Frankfort,
l’attentat a prouvé le contraire : les prétendus
poseurs de bombes font preuve de plus
en plus d’amateurisme et d’idiotie. Fritz G.,
le prétendu meneur du trio, appréhendé le 11
septembre à Oberschledorn dans le Sauerland,
rappelle involontairement le personnage
principal de la comédie de
Woody Allen Prends l’oseille et tire-toi.

Dans Wikipedia, le dictionnaire sur internet, il
est écrit sur ce malchanceux personnage de cinéma : « Né dans un environnement
pauvre, il a dû s’exposer très tôt
déjà aux difficultés rencontrées dans un milieu défavorisé. On lui casse toujours
ses lunettes. Plus tard, on lui détruira également
son cher violoncelle. C’est pourquoi,
il décide de prendre ce qu’il veut. Certes, il
devient très vite évident, que Virgil est plein
d’énergie criminelle mais que la réalisation de
ses plans hardis échoue toujours à cause de sa
maladresse. Après s’être évadé plusieurs fois
de prison et avoir essayé de s’améliorer, Virgil
est condamné finalement à 800 ans de détention,
mais il espère, pour son bon comportement,
n’en devoir faire que la moitié. »

0,7 tonnes d’un seul coup

« Le terroriste Fritz et ses dangereux complices » —tel est le titre de Die Welt du 8
septembre— ont en tout cas fait preuve d’une
semblable maladresse. Bien qu’ils aient été
prétendument instruits dans un camp de formation
dans le Nord du Pakistan pour répandre
la terreur, ils voulaient précisément mixer
leurs bombes avec un produit chimique qui
n’est absolument pas approprié pour cela : le
péroxyde d’hydrogène est jusqu’à aujourd’hui
plutôt connu comme substance de base pour
la fabrication de produits décolorants pour
les cheveux des blondes artificielles de mauvaise
réputation. Le Frankfurter Allgemeine
Zeitung
forgea déjà l’expression de « bombes
au péroxyde d’hydrogène » ce qui est complètement
insensé, mais paraît très dangereux du fait
de la résonance ressemblant au terme : « bombe
à l’hydrogène ». En se référant aux attentats de
la capitale espagnole du 11 mars 2004, qui ont
fait près de 200 morts, on sait que le trio aurait
déjà préparé « une quantité vingt fois plus
grande que l’explosif utilisé à Madrid ».

Ce qui est prouvé, c’est seulement que le
groupe a acheté douze tonneaux avec en tout
730 kilogrammes de péroxyde d’hydrogène et
les a stockés provisoirement dans une maison
près de Freudenstadt dans la Forêt noire. Cependant,
cette substance en elle-même n’est
pas dangereuse. Cela change seulement lorsque
le produit chimique réagit avec de l’acétone
et d’autres acides ; alors, il en résulte du
triacétone tripéroxyde (TATP) ou l’apex. Le
mélange est toutefois tout à fait inutilisable
pour la construction de bombes car il explose
trop facilement et de manière incontrôlée. Le
Frankfurter Allgemeine Zeitung doit même
avouer que « l’apex est très sensible en particulier
à un coup, au frottement et à la chaleur.
Si l’explosif est conservé dans un récipient
avec une fermeture à vis, le frottement
lors de l’ouverture peut déjà provoquer l’explosion. L’important c’est que le mélange soit
au moment même de la production suffisamment
froid, sinon il explose. » Comment les
auteurs auraient-ils pu sortir leurs bombes à
l’apex du garage de leur maison de vacances,
et encore plus vouloir les transporter à leur
prétendue destination dans un établissement
états-unien quelconque sans qu’elles leur explosent
à la figure ?

D’ailleurs, l’apex n’a rien à voir avec l’attentat
à la bombe de Madrid —là, on sait que
de la dynamite issue des mines d’Asturie a été
utilisée. En ce qui concerne les attaques sur
le réseau du tramway de Londres le 7 juillet
2005, le TATP est toujours désigné par les
médias comme l’explosif utilisé, mais les
rapports officiels de la Chambre
des Communes britannique et des services
de renseignement se taisent là-dessus.

Bien qu’aucun attentat dans les métropoles
occidentales n’ait été jusqu’à maintenant
commis au moyen du péroxyde d’hydrogène,
cette substance surgit toujours dans les histoires
de chasseurs de terroristes : comme il
appartient aux produits chimiques en usage
dans le commerce, on provoque facilement
la crainte du « terroriste d’à côté » qui peut se
procurer, dans une droguerie, tout ce dont il a
besoin pour commettre un massacre.

Malgré l’effet du péroxyde d’hydrogène,
inoffensif dans le meilleur des cas et même
contreproductif dans le cas d’un mélange,
le terroriste Fritz et ses compagnons se sont
procurés sucessivement plus de 0,7 tonnes du
produit chimique chez un grand distributeur
d’Hanovre et les ont charriées lors de plusieurs
transports à travers la République vers
leur cachette dans la Forêt noire. Comme s’ils
voulaient mettre les enquêteurs sur la bonne
piste…

Fritz fait ce qu’il veut

Même en ce qui concerne d’autres éléments,
Fritz G. en particulier, le meneur présumé du
trio, n’oublia rien afin d’attirer l’attention sur
lui et sur son plan. Bien qu’on ait enquêté sur
lui déjà en 2005 pour formation d’une association
criminelle et incitation populaire et qu’on
l’ait arrêté pour une courte durée, il ne sombra
pas dans la clandestinité, ne changea pas son
apparence, ne se procura pas d’autre identité.

Au plus tard au printemps 2007, il aurait
dû remarquer que le Service de la protection
de l’État était de nouveau derrière lui : son appartement
à Ulm avait été perquisitionné. Le
Frankfurter Allgemeine Zeitung s’étonne
du fait « que Fritz G. et ses complices présumés
ne se soient pas laissés effrayer par la
perquisition de leur maison, qu’au contraire,
ils commencèrent seulement après à se procurer,
jerrycan après jerrycan des substances
explosives, à louer des maisons et des garages,
à se pourvoir de détonateurs militaires et
même à insulter les enquêteurs soi-disant par
emails (interceptés). Cela soulève des questions
sérieuses. »

Début mai est apparu un rapport alarmant
dans le magazine Focus. « Le groupe y était
décrit de manière assez détaillée, on rendait
compte de ses relations au Pakistan et en Ousbékistan
et de fait que les hommes auraient
déjà tourné des vidéos d’adieu à la façon des
auteurs d’attentats suicide. Pour les services
de sécurité, ce rapport de Focus était une petite
catastrophe. Ils s’attendaient à ce que le
groupe tombe dans la clandestinité… ».

Toutefois, le contraire s’est produit encore
une fois : Fritz et Cie ont continué en toute
tranquillité. Finalement, le trio choisit précisément
Oberschledorn, un village idyllique
du Sauerland, pour fabriquer leurs bombes.
Sur cet endroit, la Frankfurter Allgemeine
Zeitung
écrit que « dans le village, où vivent
environ 900 personnes, tout le monde se connaît
ainsi que les vacanciers ». Dans cet environnement,
au milieu des estivants et des
excursionnistes, ces hommes obscurs certains aux cheveux
longs et barbus, d’autres chauves,
devaient attirer l’attention comme les Rapetou
lors d’une fête d’anniversaire d’enfants chez
Donald Duck. Pourquoi n’ont-ils pas loué un
appartement dans un immeuble anonyme avec
un garage souterrain et accessible par l’autoroute,
comme l’ont fait les membres de la
RAF [Fraction armée rouge] en leur temps ?

L’histoire précédant directement la saisie
policière du 4 septembre est également très
informative : le 3 septembre, tous les trois circulaient
en voiture en plein jour, leurs feux
de distance allumés, et c’est pourquoi ils ont
été arrêtés lors d’un contrôle routier. Bien
qu’un policier de patrouille ait dit imprudemment
à haute voix à son collègue lors du
contrôle que les passagers du véhicule sont
inscrits « sur la liste du BKA [Office fédéral
de la police criminelle] », ils ont pu continuer
leur route.

L’exemple le plus net du comportement
des prétendus poursuivants et poursuivis a
été révélé finalement par Spiegel Online, malheureusement
sans indiquer le moment exact
de la situation. En tout cas, un jour, les trois
se seraient fâchés contre les policiers qui les filaient et
« l’un des islamistes […] serait descendu à
un feu rouge et aurait éventré les pneus de la
voiture du service de renseignement intérieur
qui les poursuivait. »

Beaucoup de points sur l’histoire du terroriste
Fritz et de ses deux complices seraient
encore à éclaircir. Mais une chose est sûre : à
la manière dont ils s’y sont pris, ils n’auraient
jamais pu commettre un attentat de grande
ampleur.

Trois théories mènent à la solution de
l’énigme. Soit la troupe était trop idiote pour
employer son énergie criminelle vers le but
visé —comme cela est montré dans le film de
Woody Allen. Soit —c’est ce que suppose le
journaliste de la FAZ, Peter Carstens— ils
voulaient, en se faisant remarquer dans leurs
agissements, détourner l’attention des services
de sécurité d’autres cellules terroristes
qui entre-temps ont pu continuer à mener
sans gêne leurs propres activités. Soit les trois
se sentaient préservés d’une arrestation parce
qu’ils accomplissaient un travail d’initiés et
croyaient profiter d’une protection de haut
rang.

Au vu de l’état actuel des informations,
on ne devrait exclure aucune de ces possibilités.
Peut-être qu’elles sont vraies toutes
trois : trois types particulièrement fous ont été
embauchés par un groupe du Service de renseignement
pour tenir en haleine le reste des
services de sécurité et les détourner des véritables
terroristes dangereux. D’une manière perverse, la déclaration
de Wolfgang Schäuble, comme quoi la fin de l’alerte ne
peut être donnée, serait donc correcte.

Source
Horizons et débats (Suisse)

Cette affaire n’est pas sans rappeler une autre opération de propagande, celle des « explosifs liquides » lancée le 10 août 2006 à Londres :
 « Complot terroriste au Royaume-Uni : que se passe-t-il vraiment ? », par Craig Murray, Réseau Voltaire, 18 août 2006
 « Londres : terrorisme fictif, guerre réelle », par Jürgen Elsässer, Réseau Voltaire, 17 août 2006
 « Fabriquez vous-mêmes votre bombe au TATP », par Thomas C. Greene, Réseau Voltaire,21 août 2006
 « L’alerte terroriste inquiète les Britanniques, sauf Tony Blair », Réseau Voltaire, 14 août 2006.
 « Les certitudes de Nicolas Sarkozy : “Un faisceau d’éléments permet de penser que la nébuleuse Al Qaïda n’est pas très éloignée de ce qui aurait pu se passer” », Réseau Voltaire, 17 août 2006.

Le présent article est initialement paru en allemand sur le site Hintergrund

[1Wolfgang Schaüble est ministre de l’Intérieur de la République fédérale allemande.