Tendances et événements au Proche-Orient

Une source diplomatique arabe s’est déclarée surprise de constater à quel point les positions européennes, notamment françaises, concernant les questions arabes, sont alignées sur celles des États-Unis. Que certains pays arabes qui tournent dans l’orbite des États-Unis adoptent une attitude hostile à la Syrie est, certes inacceptable, mais compréhensible. Cependant, que des États européens, puissants et souverains, ayant une histoire prestigieuse, se transforment en simples exécutants des instructions de Washington est surprenant.
Un responsable arabe affirme que tous les émissaires, arabes ou européens, qui vont à Damas discuter ou négocier avec les responsables syriens, ne sont que des variantes des États-uniens. Les ministres des Affaires étrangères et autres émissaires étrangers développent toujours des arguments US et transmettent des messages de Washington. Ils sont chargés par les États-uniens de tâter le terrain syrien et d’essayer d’obtenir des réponses aux questions adressées par l’administration Bush. Chaque émissaire à une tâche définie à l’avance par Washington.
L’exemple vivant illustrant cette réalité est le suivant : quelques heures après avoir encouragé le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, à hausser le ton contre Damas, les États-Unis ont invité la Syrie à la conférence de paix au Moyen-Orient, convoquée par George Bush en novembre. Et ce sont les États-uniens qui empêchent certains pays arabes de parler aux Syriens, alors qu’eux s’offrent ce luxe quand bon leur semble.
Dans sa décision de faire face au projet hégémonique des États-Unis dans la région, Damas a résisté avec succès. Le jour où Washington sera contraint de conclure un deal avec lui, cela signifiera qu’il aura reconnu le rôle régional de la Syrie en tant que puissance évoluant en dehors de la sphère d’influence israélo-US au Moyen-Orient. C’est pour cette raison que le prix de ce compromis en gestation sera élevé pour les États-Unis.

Presse et agences internationales

• Israël et la Syrie sont sur leurs « gardes » et scrutent leur déploiement mutuel de troupes, a affirmé lundi le Premier ministre israélien Ehud Olmert. « Les deux côtés sont sur leurs gardes. J’espère que la tension disparaîtra graduellement et que le front nord retrouvera le calme. Il est certain que nous souhaitons cela », a indiqué M. Olmert dont les propos sont rapportés par un responsable israélien. Celui-ci assistait à une intervention à huis clos du Premier ministre devant la commission parlementaire des Affaires étrangères et de la Défense.
« Nous sommes actuellement dans la même situation qu’au cours des récentes semaines. Nous voyons le déploiement des forces syriennes et ils voient le nôtre », a ajouté M. Olmert, toujours cité par le responsable, précisant que ni les Syriens ni l’État hébreu n’étaient « intéressés par des frictions violentes ».
Conformément à l’attitude adoptée par les responsables israéliens, M. Olmert n’a pas évoqué un récent raid aérien présumé comme une installation syrienne dans le nord-ouest du pays.
Citant un haut responsable syrien, la violation de l’espace aérien du pays par des appareils israélien, le 5 septembre dernier, a « donner le coup de grâce à toute possibilité de reprise des négociations de paix bilatérales ».

• L’Iran ne voit « aucun obstacle » à la venue à Téhéran du chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, qui a récemment évoqué la possibilité d’une « guerre » pour stopper le programme nucléaire iranien, a déclaré dimanche le ministère iranien des Affaires étrangères.
« Il a évoqué son désir (de venir en Iran). Nous n’y voyons aucun obstacle. Nous pensons que de telles rencontres et échanges politiques aident à mieux comprendre les réalités de la région », a déclaré le porte-parole du ministère, Mohammad Ali Hosseini, lors de son point de presse hebdomadaire.
Dans une interview au Figaro, M. Kouchner avait répondu « Oui » à la question de savoir s’il était prêt à se rendre à Téhéran en cas d’invitation.
« Oui au dialogue permanent avec l’Iran. Oui aux efforts menés par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique). Pendant ce temps là, laissons-nous imaginer des sanctions ciblées, afin de persuader les Iraniens de notre sérieux », avait dit M. Kouchner dans cette interview.
M. Kouchner avait averti peu avant des risques d’une « guerre » avec l’Iran si la diplomatie et les sanctions échouaient à convaincre les Iraniens de suspendre leur programme d’enrichissement d’uranium.

• Le quartette international pour le Moyent-Orient, composé de la secrétaire d’État US Condoleezza Rice, du ministre russe des Affaires étrangères, Serguéi Lavrov, du secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-Moon, du coordinateur de la politique extérieur européenne, Javier Solana, et de son envoyé spécial dans la région, l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, a exprimé son soutien à la conférence de paix au Moyen-Orient convoquée par George Bush.
Les États-Unis inviteront à cette réunion « les parties (Israéliens et Palestiniens), leurs voisins dans la région, le Quartette et les membres du comité de suivi de la Ligue arabe, ainsi que d’autres acteurs clés internationaux », a déclaré à la presse un haut responsable du département d’État.
« Je pense que vous trouverez digne d’intérêt que les membres, au pluriel, du comité de suivi de la Ligue arabe seront invités », a souligné ce haut responsable ayant requis l’anonymat, en insistant sur l’article pluriel pour signifier qu’il pensait à tous les membres de ce comité.
Ce comité comprend la Jordanie et l’Égypte —les deux seuls pays arabes à avoir signé un traité de paix avec Israël—, ainsi que le Qatar, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et la Syrie.
Cette annonce est intervenue à l’issue de deux rencontres bilatérales que Mme Rice a eues dans un grand hôtel de New York avec ses homologues saoudien, Saoud al-Fayçal, et koweitien Mohammed al-Sabah, apparaissant comme un geste envers les alliés arabes de Washington. À l’issue de sa rencontre avec Mme Rice, le prince Saoud a refusé de préciser si l’Arabie saoudite, qui n’entretient pas de relations diplomatiques avec Israël, participerait à cette conférence.

NEW YORK TIMES (QUOTIDIEN ÉTATS-UNIEN)
Le président français Nicolas Sarkozy a exclu le recours à la force contre l’Iran mais a mis l’accent sur la nécessité de renforcer les sanctions contre Téhéran pour l’empêcher de fabriquer la bombe atomique. Le chef d’État français a proposé d’apporter une aide à tout pays souhaitant se fournir en énergie nucléaire à des fins civiles.
M. Sarkozy a réaffirmé la détermination de son pays à empêcher l’Iran d’acquérir l’arme nucléaire, soit à travers les sanctions soit par le biais de la négociation.
D’autre part, l’ancien conseiller à la sécurité nationale de Jimmy Carter, Zbiginew Brzezinski, a déclaré dans une interview accordée à CNN que l’administration Bush préparait le climat à une guerre contre l’Iran. Selon lui, la Maison-Blanche projette de rééditer le scénario qui a conduit à l’invasion de l’Irak. Pour sa part, l’ancien secrétaire d’État Henry Kissinger a déclaré, toujours à CNN, qu’il n’avait aucun doute sur les intentions des Iraniens d’acquérir l’arme nucléaire. Dans deux ou trois ans, l’Iran sera capable de fabriquer la bombe atomique, a-t-il dit.

Audiovisuel international

AL-JAZEERA (CHAINE QATARI)
Principal journal du soir
Reprise des propos de George Bush à l’issue de rencontre avec Mahmoud Abbas et Salam Fayyad
Je soutiens fortement la création d’un État palestinien. J’ai donc dit au président (Abbas) que les États-Unis d’Amérique travailleraient aussi dur que possible pour vous aider à réaliser cette vision. Et je crois que la vision de deux États vivant côte-à-côte et en paix peut être réalisée.

Tendances et événements au Liban

Des informations qui circulent dans des cercles restreints à Beyrouth assurent que des interventions urgentes de dernières minutes ont permis de reporter le plan que la majorité comptait mettre en œuvre et qui consistait à élire, ce mardi, l’ancien député Nassib Lahoud à la présidence de la République lors d’une séance dirigée par le vice-président de la Chambre, Farid Makari.
Des sources libanaises bien placées ont invité les pays européens à bien réaliser les répercussions et les dangers du chaos au Liban si une confrontation éclatait entre la majorité et l’opposition. Ces mêmes sources avancent l’analyse suivante :
« Certains milieux états-uniens et israéliens prétendent que le résultat du chaos serait le contrôle de l’ensemble du Liban par le Hezbollah. A travers ces allégations, ils cherchent à monter des pans entiers de la société libanaise contre la Résistance. Celle-ci bénéficie d’un large soutien de la part d’une écrasante majorité de la population, toutes appartenances communautaires confondues, comme cela s’est clairement illustré lors de l’agression israélienne de l’été 2006.
« Ce qu’États-uniens et Israéliens cachent à leurs alliés, c’est qu’ils craignent que le Liban tombe non pas entre les mains du Hezbollah et de l’opposition libanaise en général, main sous la domination d’al-Qaïda et d’autres organisations extrémistes. La guerre de Nahr el-Bared et les nombreux démantèlements de cellules dormantes dans la Békaa et ailleurs, montrent que la mouvance salafiste-jihadiste est fortement implantée dans toutes les régions libanaises.
« Si certains États arabes souhaitent se débarrasser de leur problème salafiste en l’exportant vers le Liban —la nature multinationale de Fatah al-Islam le prouve—, la Syrie est un des rares pays à avoir acquis l’expérience nécessaire lui permettant de se protéger de l’expansion de cette mouvance extrémiste.
« Le Hezbollah, lui, a fait preuve d’une grande capacité à rester focalisé sur l’ennemi principal, Israël, et à ne pas se laisser entraîner dans des conflits marginaux qui dilapideraient son énergie.
« Les principaux perdants du chaos seraient les alliés des États-Unis, car le désordre verrait l’effondrement de tout l’édifice politique qu’ils s’efforcent de contrôler depuis plus de deux ans. Le premier à en pâtir serait le Courant du futur qui représente les milieux d’affaires et les grandes fortunes sunnites. Ceux-là n’ont aucun intérêt à voir le Liban sombrer dans le désordre.
« C’est pour cette raison que les Européens doivent effectuer des calculs précis sur les conséquences d’une situation chaotique au Liban. Car l’Europe, en raison de la proximité géographique, serait la première à faire les frais d’une transformation du Liban en terre de Jihad.
« Dans la crise autour de la présidentielle libanaise, les Européens devraient savoir identifier leurs intérêts vitaux et tout faire pour les défendre. Si certains sont tentés par les sirènes des néo-conservateurs, ils devraient très vite se ressaisir ».
Et la source politique de conclure : « Les Européens devraient être, tout naturellement, les premiers à empêcher que le Liban ne sombre dans le chaos. _ Seul l’élection d’un président consensuel, accepté de toutes les parties libanaises, est susceptible d’éviter au pays les scénarios les plus sombres et les plus effrayants ».

Articles relatifs au Liban

• La séance du Parlement libanais convoquée mardi pour élire le président de la République a été ajournée au 23 octobre pour permettre à la majorité et l’opposition, en conflit ouvert, de s’entendre sur un nom avant la fin du délai constitutionnel dans deux mois.
« La séance a été ajournée au 23 octobre à 10h00 », a annoncé un porte-parole du Parlement. « La séance a été ajournée faute de quorum » des deux tiers des députés, nécessaire au premier tour du scrutin, selon une source parlementaire.
« Nous sommes venus élire un président de la République (...) car nous voulons épargner au Liban et aux Libanais les dangers du vide » du pouvoir, a déclaré le vice-président du Parlement Farid Makari, membre de la coalition au pouvoir du 14-mars.
Auparavant, un des députés de l’opposition présents au Parlement avait affirmé que le quorum ne serait pas atteint et que le président du Parlement Nabih Berri reporterait le vote. « Il n’y a pas eu de consensus sur un candidat, donc il n’y aura pas de quorum pour la séance d’aujourd’hui (mardi) », avait dit le député du Hezbollah Hussein Hajj Hassan.
Un dispositif de sécurité exceptionnel entourait la réunion du Parlement.
Des troupes d’élite et des chars étaient déployés autour du bâtiment et une double fouille était en place. Des barrages militaires ont été installés à travers la capitale où de nombreux commerces étaient fermés.

• La justice libanaise a engagé lundi des poursuites pour « meurtres et actes terroristes » contre onze militants du groupe islamiste Fatah al-Islam, a annoncé le procureur de la République Saïd Mirza. Au total, 297 personnes suspectées d’appartenir au groupe islamiste sont poursuivies par la justice libanaise depuis le 20 août.
Le procureur a engagé des poursuites contre 11 personnes, dont sept sont en détention, pour « le meurtre de plusieurs soldats » lors des affrontements dans le camp palestinien de Nahr el-Bared (nord du Liban), du 20 mai au 2 septembre.
Les suspects sont également accusés d’avoir « perpétré des actes terroristes, porté atteinte à l’État et à ses institutions civiles et militaires, tiré sur l’armée, les forces de sécurité intérieure et des civils », selon l’acte d’accusation.
Le procureur a demandé au juge d’instruction dans le dossier de Nahr el-Bared, Ghassan Oueidate, de délivrer des mandats d’arrêt ou de dépôt contre les suspects, qui sont de différentes nationalités arabes.
Le 20 août, des poursuites avaient été engagées contre 227 personnes. Parmi elles, le chef du groupuscule, Chaker al-Abssi, dont le sort reste incertain.
Sa mort avait été annoncée peu après la chute du camp, sur la foi notamment du témoignage de son épouse, mais des tests ADN réalisés sur le corps présumé être celui de Chaker al-Abssi s’étaient révélés négatifs.
Le Conseil des ministres a indiqué lundi que le chef du groupuscule et d’autres membres étaient « toujours en fuite ».
La semaine dernière, la justice libanaise a déjà engagé des poursuites contre 59 personnes, pour les mêmes accusations.
Lors de sa réunion hebdomadaire, le Conseil des ministres a évoqué la saisie « de cassettes et d’enregistrements très riches en informations sur le financement, les objectifs et les liens entre des membres de ce groupuscule et d’autres parties à l’étranger », selon le ministre de l’Information Ghazi Aridi (membre du 14-mars, ndlr).
« Je ne parle pas uniquement de la Syrie, mais également de l’Irak et d’autres parties », a-t-il ajouté.

Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions arabe, anglaise et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise et arabe.