Tendances et événements au Proche-Orient

La décision de la Knesset de considérer Israël comme « l’État des juifs » a fixé définitivement le plafond des négociations avec les Palestiniens à la veille de la Conférence d’Annapolis, convoquée par George Bush. Il est désormais clair que les questions du droit au retour des réfugiés palestiniens, du statut de Jérusalem, de la colonisation et des frontières du futur État ne seront pas ou prou abordées lors de cette rencontre internationale. Les Palestiniens doivent se résigner à accepter ce plafond et à ne pas espérer une percée significative.
À la lumière de cette équation, la situation actuelle en Cisjordanie est appelée à durer ad vitam aeternam. Dans les faits, ce territoire palestinien est divisé en sorte de bantoustans séparés les uns des autres et dont tous les aspects de la vie quotidienne sont contrôlés par les Israéliens. Une source dirigeante palestinienne fait le commentaire suivant : « Voici l’État palestinien tel que le conçoivent les États-Unis ; et ils ont promis à Mahmoud Abbas de lui fournir la couverture politique et sécuritaire nécessaire pour le diriger en contrepartie de l’éradication des mouvements de résistance ».
Cette même source souligne l’importance des efforts entrepris par le Jihad Islamique en Palestine en coopération avec les Fronts populaire et démocratique de libération de la Palestine (FPLP et PDLP) pour faire face à la situation actuelle, caractérisé par une confiscation record de terres palestiniennes en Cisjordanie et les punitions collectives contre la population de Gaza.

Presse et agences internationales

EL PAIS (QUOTIDIEN ESPAGNOL)
 Carlos Fontes
Le vote sur l’Irak au Conseil de sécurité (2003) s’est produit à l’époque de la fulgurante ascension impérialiste de George Bush. À ce moment-là, le président états-unien avait osé dire que son pays était le seul modèle de progrès de l’humanité, ce qui avait permis à la Maison-Blanche d’agir comme bon lui semble au nom de l’humanité. La secrétaire d’État Consoleezza Rice avait prodigué le conseil suivant : « Oubliez les intérêts d’une communauté internationale trompeuse ».
Tous ces rappels visent à souligner que l’heure de l’ascension impérialiste est terminée. Une série de vedettes internationales à caractère multipolaire commence à apparaître, comme la Chine, l’Inde, la Russie, le Brésil et, bien entendu, l’Europe. La réémergence du multipolarisme, accompagnée du recul des pulsions impérialistes de Bush, offrent à la communauté internationale une chance unique de ré-agencer ou de créer une structure juridique et légale d’État souverains, liés entre eux par des droits et des devoirs, et capables d’éviter les conflits et les divergences.

TECHRINE (QUOTIDIEN SYRIEN)
 Ezzedine Darwiche
La date de la Conférence d’Annapolis, qui devrait se tenir à la fin de ce mois, n’a pas encore été fixée d’une manière définitive. Il est évident que cette date, qui occupe la tête des préoccupations politiques et médiatiques au Proche-Orient, n’est pas l’essentiel. D’autres questions sont plus importantes. _ Ainsi, Israël se rend à Annapolis sans ordre du jour et sans offrir la moindre promesse aux Palestiniens. Il a même rejeté les propositions présentées par la secrétaire d’État, Condoleezza Rice, lors de sa dernière tournée régionale. L’État hébreu a ajouté à ses conditions le refus que l’initiative arabe de paix soit examinée lors de la réunion.
Au départ, Israël a dit, par la bouche de son Premier ministre et de sa ministre des Affaires étrangères, qu’il souhaitait à travers la Conférence d’Annapolis, s’asseoir à la même table avec le plus grand nombre possibles de pays arabes. En d’autres termes, qu’il souhaitait la normalisation des relations avec les États arabes. Devant les concessions présentées gratuitement par les Arabes, Israël s’est fixé un nouveau but : il exige que le caractère juif de l’État soit reconnu. La paix juste, elle, n’a aucune place à Annapolis. Après tout cela, est-il concevable que les Arabes continuent de miser sur cette conférence ?

AL-BAYAN (QUOTIDIEN EMIRATI)
Avec le début du compte à rebours pour la conférence d’Annapolis, les ambitions israéliennes ne cessent de croître, de même que se multiplient ses efforts pour vider cette réunion de tout contenu afin qu’elle n’avance pas d’un seul pouce vers la paix juste et globale. L’objectif de l’État hébreu est de transformer cette rencontre en festin pour se rassasier et avaler des concessions palestiniennes supplémentaires. Il veut phagocyter ce qui reste de territoires palestiniens et les découper pour empêcher l’édification d’un État palestinien à l’avenir. Les ambitions israéliennes s’amplifient à un tel point qu’elles risquent de bloquer la route d’Annapolis. Les Palestiniens se trouvent dans une situation délicate qui ne leur permet pas de militer pour récupérer leurs droits. Tout juste s’ils sont en mesure de faire face aux ambitions d’Israël.

• Certains journaux arabes ont indiqué que l’Arabie saoudite est en train de créer une force d’intervention rapide de 35 000 hommes pour protéger les installations pétrolières d’éventuelles attaques menées par des extrémistes. Il y a un an, les autorités ont commencé à recruter et à entraîner les membres de cette force de protection des industries après une attaques ratée lancée par al-Qaida contre un des plus grands sites pétroliers du monde, dans la région de Ibqiq, en février 2006. Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, le général Mansour al-Turki, a révélé qu’il fallait faire face à des menaces proférées récemment par des terroristes contre de nouvelles installations. Il a précisé que l’Arabie ne pouvait pas uniquement compter sur l’ancien système de sécurité en place depuis longtemps pour affronter des dangers d’une forme différente. La force d’intervention rapide compte jusqu’à présent 9 000 hommes. D’ici à trois ou quatre ans, le nombre sera porté à 35 000.
Des sources diplomatiques affirment que des sociétés états-uniennes et britanniques offrent les conseils nécessaires aux autorités saoudiennes.
Cette nouvelle force sera indépendante des autres services de sécurité, ce qui lui permettra d’intervenir plus rapidement.

Tendances et événements au Liban

Une grande confusion règne à Beyrouth autour des noms des candidats à la présidence qui figurent sur la liste du Patriarche maronite, Nasrallah Sfeir, et de leur nombre. Les informations varient entre une liste de trois noms de candidats consensuels et une autre de 12 noms qui, dans ce cas, se contenterait d’énumérer la plupart des candidats, déclarés ou pas. L’image devrait s’éclaircir avec la prochaine reprise des concertations entre le président de la Chambre, Nabih Berry, et le chef de la coalition au pouvoir Saad Hariri, après une interruption plus au moins longue en raison des médiations française et autre.
À la lumière des développements des dernières 24 heures, le paysage politique libanais se présente comme suit :
 1. Poursuite de la campagne de Saad Hariri contre le Hezbollah et le chef chrétien de l’opposition, le général Michel Aoun, ce qui a appelé des réponses sévères de ces deux parties liées par un document d’entente qui aurait pu constituer un modèle pour l’ensemble des forces politiques libanaises.
 2. Le faucon du 14-mars, Walid Joumblatt, feint la modération en appelant au téléphone le président Nabih Berry, à qui il exprimé son soutien aux efforts d’entente en cours. Certains dirigeants de l’opposition ont vu dans cette attitude une manœuvre visant à faire croire que de nouvelles alliances politiques étaient possibles dans le cadre de l’entente, le but étant d’influencer les négociations en cours pour donner l’avantage à des candidats au détriment d’autres. Car certains candidats, présentés comme étant consensuels, sont en fait plus extrémistes que les candidats officiels du 14-mars et sont directement liés à la structure financière et sécuritaire du clan Hariri.
 3. L’ancien ministre Sleimane Frangié, un des chefs chrétiens de l’opposition, a déclaré que toutes les composantes de l’opposition adopteront une position unifiée derrière Michel Aoun, quelle que soit sa décision. M. Frangié a indiqué que le président consensuel doit être élu dans le cadre d’un accord national global portant sur la protection des armes de la Résistance, l’arrêt de la marginalisation des chrétiens, et l’ouverture d’un dialogue avec la Syrie.
 4. Les milieux politiques attendent les résultats de la visite à Beyrouth, ce samedi, de l’adjoint de Condoleezza Rice, David Welch. Encourage-t-il le 14-mars à aller vers la confrontation, ou, au contraire, à soutenir l’initiative française destinée à trouver un compromis ?
 5. Une très forte tension populaire est ressentie à tous les niveaux. Les Libanais attendent avec inquiétude le dénouement de cette crise, tandis que l’opposition a noté une mobilisation milicienne sans précédent des partis du 14-mars dont certains sont encadrés par des conseillers arabes. Le 14-mars, lui, affirme que des groupes armés des partis de l’opposition ont été placés en état d’alerte en prévision des prochains développements.
 6. Les concertations se poursuivent entre les dirigeants de l’opposition pour peaufiner les plans en cas d’élection par le 14-mars d’un président à la majorité simple ou du transfert des prérogatives du président de la République au gouvernement de Fouad Siniora si l’élection échouait.

Audiovisuel libanais

AL MANAR (HEZBOLLAH)
Émission : La discussion de l’heure
 Sleimane Frangié, ancien ministre et un des chefs chrétiens de l’opposition
Le député Robert Ghanem, candidat à la présidence, a quitté les rangs du 14-mars il y a deux mois sur le conseil de Saad Hariri, afin de se présenter comme un candidat consensuel. L’opposition refuse son accession à la présidence. De même que nous refusons l’élection de Joseph Tarabay et de Demianos Kattar.
Nous souhaitons l’élection d’un président qui inspire confiance et qui ne soit pas hostile à la Syrie.
S’ils élisent un président à la majorité simple, nous avons tous les moyens pour nous y opposer. Nous ne leur permettrons pas de changer l’identité du pays.
L’opposition n’acceptera pas un compromis sans le général Michel Aoun. Soit nous l’acceptons tous, soit nous le rejetterons tous. Nabih Berry représente toute l’opposition. Il ne l’abandonnera pas.

Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions arabe, anglaise et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise et arabe.