La crise électorale en Ukraine est un avant goût des problèmes que l’Union européenne va rencontrer dans les décennies à venir à sa frontière orientale. La situation en Ukraine a peu à voir avec l’Union européenne et est largement dûe au recyclage des anciennes élites communistes en dirigeants nationalistes privatisant le pays à leur profit. Toutefois, une Ukraine démocratique va poser un problème de compréhension à l’Union européenne.
L’Ukraine n’est pas un ancien pays satellite de l’URSS, c’est une ancienne partie de l’URSS et une partie vitale pour son économie dont sont venus Khrouchtchev et Brejnev. C’est la frontière occidentale de la Russie et c’est un territoire historiquement disputé entre la Russie et l’Europe. L’Ukraine n’est pas une partie de l’Union européenne et n’est pas prête de le devenir : l’espérance de vie des hommes y est de 62 ans, le salaire moyen est de 95 dollars par mois, le pays est une plaque tournante du trafic de drogue et du trafic d’êtres humains. Le coût de la modernisation de l’Ukraine est au-delà de toute estimation, alors même que Bruxelles anticipe de grandes difficultés pour intégrer la Roumanie qui est deux fois plus petite et en meilleure santé économique. Vladimir Poutine s’opposera à l’entrée de l’Ukraine dans l’Union européenne, mais même s’il lui offrait sur un plateau, l’Union n’en voudrait pas.
L’Ukraine pose le même type de problème que la Turquie : elle aussi est une part de l’Europe que l’Union ne veut pas voir comme telle. L’Europe rejette la Turquie car elle craint d’avoir ses frontières avec l’Irak ou la Syrie. Ce problème de frontières instables est également un problème qu’on trouve avec l’Ukraine.

Source
New York Times (États-Unis)
Le New York Times ambitionne d’être le premier quotidien global au travers de ses éditions étrangères.

« The Eastern Front, 2004 », par Tony Judt, New York Times, 6 décembre 2004.