Dans Die Zeit, le ministre vert allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, se livre à un exercice de style dont il a le secret : se présenter comme un pacifiste pour mieux soutenir la guerre états-unienne. En l’occurrence son raisonnement peut se résumer ainsi : nous voulons le Bien des Irakiens, c’est pourquoi nous nous sommes opposés à l’attaque illégale de l’Irak par les États-Unis, mais elle a eu lieu, il faut désormais cesser les querelles et s’unir avec les États-Unis pour agir ensemble dans l’intérêt des Irakiens. En d’autres termes, il est temps de participer à une occupation que nous avons qualifié d’illégale, n’hésitons pas à nous servir d’autant que ce sont les États-Unis qui se sont salis les mains à notre place.
Côté CDU, le discours n’est pas moins américaniste : le député européen Hans Gert Pöttering dénonce dans Die Welt les violations des Droits de l’homme, partout où cette dénonciation sert les intérêts de Washington. Plus que jamais, il ne s’agit pas de défendre les droits humains, mais de les instrumentaliser. Oublions les crimes US et dénonçons uniquement les prisons chinoises, même si, proportionnellement à sa population, la Chine a six fois moins de prisonniers que les États-Unis.

En France, on ne débat pas directement de l’alliance atlantique, mais on l’évoque à propos de l’Union européenne. Jean-Pierre Chevènement stigmatise dans Libération l’alliance entre le grand capital et les sociaux-démocrates et leur projet commun : la « Constitution » européenne. Très éloigné du traité de Nice, ce projet grave dans le marbre la vassalité à l’OTAN et l’acceptation de la globalisation libérale. Mais l’ancien ministre gaullo-socialiste ne s’en tient pas à ce constat déjà maintes fois exprimé. Il avance l’idée de la fin de l’Union à 25 et du recentrage sur la zone euro alliée à la Russie. Une telle proposition consiste à abandonner l’actuelle zone de libre-échange au profit d’un partenariat économique et politique apte à résister à l’Empire. Proche de l’ancien ministre, le député européen Sami Naïr se contente dans Le Monde de cristalliser les angoisses sociales pour alimenter sa campagne contre le traité constitutionnel. S’il met en avant les mêmes perspectives de partenariat eurasien, il jette l’euro avec l’Union à 25.

Khairi al-Oridi, représentant en Russie de l’Autorité palestinienne, expose dans les Izvestia sa perplexité face au plan Sharon de retrait de Gaza. Personne ne sait très bien ce dont il s’agit, et le gouvernement israélien ne répond à aucune question précise. Si les Palestiniens n’attendent plus rien des Israéliens, ils espèrent par contre beaucoup des Russes, qui comprennent leur problèmes et font leur retour sur la scène diplomatique proche-orientale.
D’une certaine manière, Isi Leibler du Congrès juif mondial se pose les mêmes questions. Il s’inquiète dans le Jerusalem Post de l’exercice personnel du pouvoir par Ariel Sharon. Cela l’a déjà conduit à négliger la main tendue de George W. Bush et pourrait éloigner Israël du soutien, pourtant indispensable, des États-Unis. Au contraire, Daniel Pipes trouve que Sharon exerce de manière faible son pouvoir personnel. Il dénonce dans le même quotidien la politique d’Ariel Sharon. Non que le général d’extrême droite lui semble trop à droite, mais pas assez. Considérant que les colons de Gaza sont dans leur droit d’occuper la terre des Palestiniens, il critique leur expulsion.

Le leader cubain Ricardo Alarcon de Quesada compare dans Strana.Ru Bush à Hitler. Ce parallèle, qui paraît outrancier aux Ouest-Européens, est un poncif en Amérique latine. C’est que la figure du dictateur nazi évoque des images différentes selon les pays. Le président de l’assemblée nationale cubaine analyse la politique hitlérienne, tandis que les Européens de l’Ouest ne voient plus qu’une psychologie troublée incarnant la destruction. Ce parallèle n’est pas gratuit. Il permet à l’auteur d’affirmer que le problème Bush, comme le problème Hitler, ne peut trouver de solution que dans l’affrontement avec le peuple russe.

L’universitaire Jeffrey Sachs promeut son dernier livre dans le Taipei Times. C’est l’occasion de rappeler que des sommes dérisoires, au regard des budgets des États développés, suffiraient pour vaincre la pauvreté. Cependant, il s’agit-là d’une vision purement comptable du problème qui ignore les causes structurelles de la pauvreté. Elle préconise une impossible réponse technocratique à des problèmes politiques.
De son côté, l’ancien ministre travailliste britannique, Robin Cook, souligne dans The Guardian que le plan Annan de réforme de l’ONU vise à développer la collégialité, tandis que les projets de la Maison-Blanche visent à institutionnaliser la suprématie US. Il note que personne n’ose s’opposer aux projets états-uniens, au point que l’on a évité de commenter les conséquences pour l’ONU de la nomination de Paul Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale, qui est une agence de l’ONU.