Qui a entendu parler de manifestations au Bahreïn ? Très peu de gens, certainement. Et la petitesse de ce pays ne saurait justifier ce silence. Aujourd’hui dans le monde moderne, la maxime est connue : « ce qui n’apparaît pas dans les médias, n’existe pas ». Ces mêmes médias qui avivent et amplifient ce qui se passe en Syrie, adoptent en revanche un mutisme injustifié lorsqu’il s’agit de remettre en question l’attitude des alliés des États-Unis, en l’occurrence la monarchie du roi Hamad Ben Issa Al-Khalifa.

Et les médias qui osent faire état de la situation dans ce pays parlent d’une simple confrontation entre chiites et sunnites. Mais, même s’il est vrai que les musulmans chiites de Bahreïn, royaume dirigé par la famille sunnite des Kahlifa, représentent 70% de la population, l’essence des protestations n’est ni sectaire ni religieuse.

Depuis plus d’un an, les principales revendications des manifestants étaient associées à l’emploi, à la lutte contre la pauvreté et à d’autres aspects sociaux. La perspective est laïque et pacifique. « Ni chiites ni sunnites, juste Bahreïnis », lancent-ils depuis le début des manifestations.

Les autorités ont répondu aux actions de protestation par une répression violente. Le 14 février 2011 restera gravé dans les mémoires comme le jour où les troupes d’Arabie saoudite ont envahi le pays, par la chaussée du roi Fahd, qui relie les deux pays, pour « aider » à écraser les révoltes.

La police a utilisé contre les manifestants du feu réel, des matraques, des gaz lacrymogènes et des pistolets. D’après des activistes présents sur les lieux, la cruauté était telle qu’on a même empêché les blessés de se rendre à l’hôpital.

En raison du silence médiatique, il est difficile de savoir vraiment ce qui se passe dans ce pays. Pourquoi ne pas déférer ce cas au Conseil de sécurité de l’ONU ? Pourquoi la Ligue arabe n’envoie-t-elle pas une mission d’observateurs ? Pourquoi n’exigent-ils pas la démission du roi Hamad Ben Issa Al-Khalifa, comme ils le font pour le président syrien Bashar el-Assad ?

L’analyste Pepe Escobar estime que c’est le résultat d’un accord tacite conclu entre la Maison des Saoud et Washington.

« Vous envahissez le Bahreïn et nous vous procurerons une résolution arabe permettant d’aller à l’ONU et ensuite de procéder au bombardement humanitaire de l’OTAN contre la Libye ».

Deux sources diplomatiques des Nations unies l’ont confirmé au Asia Times Online. Par ailleurs, c’est la secrétaire d’État US Hillary Clinton qui a donné le feu vert pour l’invasion du Bahreïn par l’Arabie saoudite.

Un autre exemple de la politique de double standard des États-Unis : « Fais ce que je dis et pas ce que je fais ».

L’activiste Maryam al-Khawaja du Centre bahreïnite pour les droits de l’Homme, a critiqué les ventes d’armes occidentales au Bahreïn.

Au cours des dix dernières années, les États-Unis ont vendu à ce pays des armes pour plus de 1,4 milliard de dollars. Le Bahreïn est aussi concerné par un Programme d’entraînement militaire (IMET), et il a signé un accord de ventes de matériel militaire pour un montant de 53 millions de dollars.

Pourquoi ce petit pays occupant une île reliée à l’Arabie est-il si important pour Washington ?

Les États-Unis ont proclamé en 2002 ce royaume comme « un allié non membre de l’OTAN très important  ». En mars 2008, le régime des al-Khalifa est devenu le premier pays arabe à avoir dirigé des manœuvres militaires navales conjointes avec les États-Unis. Ce n’est pas pour rien que la 5e Flotte a son siège au Bahreïn, et que ce pays sera le point central de toute action militaire future des USA dans le Golfe. Rappelons que le Bahreïn a déjà accordé de l’aide logistique en tant que base militaire pour les guerres en Irak, et qu’il a appuyé les missions en Afghanistan.

Autrement dit, l’empire ne peut s’offrir le luxe de perdre le Bahreïn.

Par Dalia Gonzalez Delgado

Source
Agence Cubaine de Nouvelles
L’Agence Cubaine de Nouvelles (ACN) est une division de l’Agence d’information nationale (AIN) de Cuba fondée le 21 mai 1974.