Le Conseil de sécurité observe une minute de silence pour les passagers du vol MH 17 de la Malaysia Airlines, abattu le 17 juillet 2014 en Ukraine.

La séance est ouverte à 10 h 10.

Le Président (parle en anglais) : Avant de commencer la séance, je voudrais, au nom des membres du Conseil de sécurité, adresser nos condoléances aux familles de ceux qui ont perdu la vie le 17 juillet à bord du vol MH 17 de la Malaysia Airlines, ainsi qu’à la population et au gouvernement des pays qui ont perdu des concitoyens dans cet accident. Nous sommes en pensée avec eux.

J’invite maintenant toutes les personnes présentes dans la salle à se lever pour observer une minute de silence à la mémoire de ceux qui viennent de perdre la vie.

Les membres du Conseil de sécurité observent une minute de silence.

Le Président (parle en anglais) : Conformément à l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite les représentants de la Belgique, du Canada, de l’Indonésie, de la Malaisie, de la Nouvelle-Zélande, des Pays-Bas, des Philippines, de l’Ukraine et du Viet Nam à participer à la présente séance.

Conformément à l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite M. Jeffrey Feltman, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, à participer à la présente séance.

Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

Je donne maintenant la parole à M. Feltman.

M. Feltman, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques (parle en anglais) : Alors que nous sommes confrontés en Ukraine à une dégradation rapide dans la crise actuelle, dont les répercussions vont bien au-delà des frontières du pays, nous regrettons profondément que la lueur d’espoir que nous entrevoyions depuis l’annonce du plan de paix du Président Porochenko, notamment avec le cessez-le-feu unilatéral et les pourparlers de paix avec les groupes armés, se soit si rapidement dissipée.

Je vais axer mon exposé au Conseil aujourd’hui sur les événements dans l’est de l’Ukraine, ainsi que sur les efforts internationaux visant à régler la situation par des moyens pacifiques.

Premièrement, en ce qui concerne la situation dans l’est de l’Ukraine, bien que l’ONU ne dispose pour le moment d’aucune information vérifiée de manière indépendante sur les circonstances qui entourent l’accident tragique survenu hier au cours duquel un avion de la compagnie Malaysia Airlines transportant des passagers s’est écrasé, le Secrétaire général est vivement préoccupé par les nombreux éléments crédibles indiquant qu’un missile sol-air perfectionné aurait été utilisé. Le Secrétaire général condamne fermement le fait qu’un avion civil semble avoir été délibérément abattu.

Cet accident effroyable vient nous rappeler de la manière la plus brutale qui soit la gravité de la situation qui règne désormais dans l’est de l’Ukraine et à quel point elle a des répercussions sur des pays et des familles situés bien au-delà des frontières de l’Ukraine. Près de 300 innocents originaires de nombreux pays, dont plusieurs sont représentés au Conseil, ont été tués. Parmi les victimes figure un membre du personnel de l’Organisation mondiale de la Santé. Je viens d’apprendre avec stupéfaction que près des deux tiers des victimes étaient néerlandaises, et qu’il y avait 80 enfants à bord de cet avion. Nous présentons nos plus sincères condoléances aux familles et aux amis des victimes.

Le Secrétaire général a déclaré hier qu’il devait bien évidemment y avoir une enquête internationale approfondie et transparente. L’ONU est tout à fait prête à coopérer. Nous avons été en contact avec l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) hier et aujourd’hui, et celle-ci a proposé ses capacités d’investigation aux responsables ukrainiens en vue de mettre sur pied une équipe internationale. L’OACI et les responsables ukrainiens en discutent aujourd’hui, et le Secrétaire général doit s’entretenir avec le Président Porochenko demain.

Suite à l’annonce, le 30 juin par le Président Porochenko, de la fin du cessez-le-feu de 10 jours et à la reprise ultérieure des opérations de sécurité et de maintien de l’ordre dans l’est du pays, les combats entre les forces gouvernementales et les groupes armés se sont dangereusement intensifiés, faisant de nombreux morts. Les autorités ukrainiennes affirment avoir repris le contrôle d’un certain nombre de villes, notamment Sloviansk et Kramatorsk, ainsi que de villages plus petits situés dans les régions de Lougansk et de Donetsk.

Cependant, les combats se sont poursuivis au même rythme, en particulier à l’intérieur et aux alentours des villes de Lougansk et de Donetsk, où les groupes armés semblent avoir consolidé leur présence. Au début de la semaine, une bataille féroce a eu lieu à l’aéroport international de Lougansk, qui semble désormais être sous le contrôle du Gouvernement ukrainien. La situation à la frontière entre l’Ukraine et la Fédération de Russie et dans ses environs est particulièrement préoccupante. Bien que l’ONU soit dans l’impossibilité de vérifier ces informations de manière indépendante, plusieurs incidents mortels et de violents combats ont été signalés ces derniers jours.

Le 13 juillet, le Ministère russe des affaires étrangères a publié une déclaration signalant qu’un ressortissant russe avait été tué et deux autres grièvement blessés après qu’un obus de l’armée ukrainienne se soit abattu sur une maison d’habitation. L’Ukraine a rejeté cette allégation. Dans la même déclaration, le Ministère a également averti que « les tensions dans la zone de la frontière entre la Russie et l’Ukraine ont connu une escalade dangereuse et pourraient avoir des conséquences irréversibles, dont l’Ukraine sera tenue pour responsable ».

Selon les autorités ukrainiennes, leurs gardes frontières sont constamment visés par des roquettes et des obus de mortier tirés par des groupes armés. D’après certaines informations, plusieurs avions militaires ukrainiens auraient également été abattus ces dernières semaines, le dernier le 16 juillet.

Comme l’a répété le Secrétaire général à maintes occasions, les groupes armés doivent déposer immédiatement les armes et cesser toute action illégale et violente. Dans le même temps, nous exhortons de nouveau les autorités ukrainiennes à faire preuve de la plus grande retenue et à déployer tous les efforts possibles pour garantir la protection des civils pris au piège des combats. Les estimations du nombre de victimes civiles varient, mais selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, il y aurait à ce jour environ 500 morts et 1 400 blessés. D’autre part, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés estime qu’à la date du 11 juillet, la crise a provoqué plusieurs dizaines de milliers de déplacés. Aucune revendication ne peut à un quelconque moment justifier de mettre en danger de la vie de ceux que l’on prétend représenter et dont on prétend assurer la protection.

Le Secrétaire général salue les efforts diplomatiques intensifs entrepris par de nombreux membres du Conseil et d’autres acteurs ces dernières semaines pour tenter d’apaiser la crise. La déclaration conjointe adoptée à Berlin le 2 juillet par les Ministres des affaires étrangères de la Fédération de Russie, de l’Allemagne, de la France et de l’Ukraine – qui est similaire à la déclaration de Genève du 17 avril – offre un moyen clair et constructif d’aller de l’avant. Comme le souligne la déclaration, il est urgent d’instaurer un cessez-le-feu durable dans l’est de l’Ukraine qui doit être pleinement respecté par toutes les parties concernées, mais aussi de sécuriser la frontière entre la Russie et l’Ukraine et de mettre en place des contrôles efficaces.

Cependant, alors que les combats se poursuivent, nous sommes déconcertés par l’absence apparente de progrès tangibles vers un règlement politique. Une première mesure cruciale consiste à rétablir immédiatement le cessez-le-feu. Le Secrétaire général appelle la communauté internationale à s’unir pour venir en aide à l’Ukraine, conformément aux principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, et à préserver la paix et la sécurité dans toute la région. Nous continuerons de jouer notre rôle. Le Secrétaire général est en contact étroit avec les dirigeants mondiaux, et dans le cadre de l’exercice de ses bons offices, il m’a demandé de retourner à Kiev et à Moscou dans les prochains jours.

S’engager sur la voie de la paix en Ukraine, comme dans les autres zones de conflit à travers le monde, nécessite que l’ensemble des acteurs politiques nationaux déploient des efforts concertés, avec l’appui solide et unifié de la communauté internationale. Les problèmes que connaît l’Ukraine sur les plans politique, économique, social, de la sécurité et des droits de l’homme sont certes compliqués à régler, mais nous espérons que le choc causé hier par la destruction en vol d’un avion civil incitera les acteurs concernés à déployer des efforts sincères et durables pour mettre un terme aux combats et se concentrer de façon constructive sur l’avenir de l’Ukraine.

Le Président (parle en anglais) : Je remercie M. Feltman de son exposé.

Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil de sécurité.

Sir Mark Lyall Grant (Royaume-Uni) ( parle en anglais) : Nous nous réunissons aujourd’hui dans les circonstances les plus tragiques qui soient. Hier, le vol commercial MH 17 de la compagnie Malaysia Airlines a semble-t-il été abattu alors qu’il survolait l’est de l’Ukraine. Tous les passagers et membres de l’équipage ont été tués. Nous présentons nos plus sincères condoléances aux familles des victimes ainsi qu’aux peuples et aux gouvernements des pays touchés. Le Royaume-Uni pleure la perte d’au moins neuf de ses ressortissants qui étaient passagers de ce vol. Ce sont des heures sombres pour la communauté internationale. La violence insensée déclenchée par les séparatistes armés dans l’est de l’Ukraine a atteint des proportions effroyables.

Les circonstances et les causes précises de cet événement tragique doivent être établies rapidement et sans laisser de place au doute. Comme l’a affirmé le Conseil ce matin, il faudra à cette fin mener une enquête internationale approfondie et indépendante, conformément aux directives internationales en matière d’aviation civile. L’Organisation de l’aviation civile internationale, qui est le cadre juridique international pour enquêter sur les accidents aériens, doit jouer un rôle central pour garantir une participation internationale crédible et indépendante.

Nous nous félicitons que les autorités ukrainiennes aient indiqué leur volonté d’associer des enquêteurs internationaux à leurs efforts. Le Royaume- Uni fournira toute l’assistance nécessaire pour appuyer cette enquête. La priorité immédiate est de garantir l’accès des enquêteurs au lieu où l’avion s’est écrasé afin qu’ils puissent commencer leur travail. Ils doivent pouvoir le faire sans entrave et dans des conditions sûres. Il ne doit y avoir aucune ingérence ni falsification des preuves.

Les groupes séparatistes armés des environs doivent autoriser cet accès. En dépit des assurances données hier soir, il semble que cela n’ait pas été encore fait. Nous appelons la Russie à user de son influence auprès de ces groupes pour faire en sorte que cela soit fait. La mission spéciale de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui est déjà présente dans l’est de l’Ukraine, peut jouer un rôle fondamental pour ce qui est de faciliter et préserver cet accès.

Les premières informations indiquent que le vol MH 17 de Malaysia Airlines a été abattu par un missile sol-air. Or, le MH 17 n’est pas le premier avion à être abattu dans cette zone. Le 14 juin, des séparatistes armés ont revendiqué – en s’en vantant même publiquement – la destruction d’un avion de transport Il-76 ukrainien, qui a entraîné la mort des 49 personnes qui se trouvaient à bord. Le 14 juillet, des séparatistes armés ont abattu un avion de transport An-26 avec un missile sol-air. Enfin, le 16 juillet, un avion de combat Su-25 ukrainien a été abattu dans des circonstances qui n’ont pas encore été clairement établies.

Nous devons nous demander précisément pour quelle raison nous sommes actuellement confrontés à cette situation tragique. Les autorités russes ont affirmé que les séparatistes armés dans l’est du pays représentent une insurrection locale spontanée. Or nous savons que ce n’est pas le cas. Nous savons que les trois figures de proue de la soi-disant République populaire de Donetsk sont des ressortissants russes venus de l’extérieur de l’Ukraine. Nous savons que les armes, l’équipement et l’appui logistique ont été systématiquement fournis aux groupes armés séparatistes par la Russie, dont près d’une centaine de systèmes portables de défense anti- aérienne et entre 15 et 25 chars de combat, sans oublier les pièces d’artillerie, les lance-roquettes et autres véhicules blindés.

Le Royaume-Uni exhorte la Russie à réfléchir attentivement à la situation qu’elle a créée. Nous l’invitons instamment à mettre fin à sa politique de soutien aux groupes armés séparatistes et à leurs actions violentes qui déstabilisent le pays voisin et créent des déplacements et des difficultés sociales et économiques. Nous souhaitons entendre aujourd’hui la Russie condamner clairement et sans équivoque les actions de ces groupes armés, qui ne sont pas représentatifs du peuple ukrainien ; sans l’appui de la Russie, ils disparaîtraient.

Il incombe au Conseil de faire face à ces tragédies en tirant les enseignements qui s’imposent et en coopérant avec engagement et conviction pour éviter que celles-ci ne se répètent. Les responsabilités sont évidentes : elles émanent de la violence insensée des séparatistes armés et de ceux qui les ont soutenus, équipés et conseillés. Le Conseil doit condamner d’une seule voix ces actions et exiger de ces groupes qu’ils déposent les armes, renoncent à la violence et à l’intimidation et ouvrent un dialogue par le biais des mécanismes démocratiques qui sont à leur disposition. Ils ont eu plusieurs occasions de le faire, tout récemment avec le plan de paix du Président Porochenko. Mais ces occasions ont toutes été dédaignées.

Dans le communiqué de presse adopté tout à l’heure, les membres du Conseil de sécurité ont exprimé leurs condoléances et demandé qu’une enquête internationale soit menée et que les responsabilités soient dûment établies. Nous nous en félicitons, mais ce n’est pas suffisant. Le Conseil doit aller plus loin. Il doit s’unir pour demander clairement que les groupes armés séparatistes déposent les armes et poursuivent tous leurs légitimes objectifs politiques par des moyens exclusivement pacifiques et démocratiques, que les flux d’armes, de combattants et de soutien logistique destinés aux séparatistes armés soient totalement interrompus et que les frontières soient sécurisées. Compte tenu de la tragédie survenue hier, toute autre comportement serait inadmissible.

M. Cherif (Tchad) : Je voudrais remercier le Secrétaire général adjoint, M. Jeffrey Feltman, de son exposé sur les derniers événements tragiques en Ukraine.

Le Tchad exprime sa profonde compassion, et présente ses condoléances aux familles des 298 personnes victimes du crash de l’avion de ligne de la compagnie Malaysia Airlines. Cet événement tragique affecte la paix et la sécurité de toute la communauté internationale de par la diversité des nationalités des victimes. Quels que soient l’origine et les auteurs de cet accident, ce sont des vies humaines qui sont en cause, et le Tchad unit sa voix à celle de la communauté internationale pour demander qu’une enquête internationale complète et transparente soit diligentée pour élucider les circonstances de l’accident, et établir les responsabilités de cette catastrophe. À cet égard, nous nous félicitons que les autorités ukrainiennes soient disposées à élargir l’enquête aux experts internationaux indépendants.

En ce moment de douleur et de sensibilité extrêmes, le Tchad réitère son appel au calme et à la retenue à l’attention de toutes les parties en présence. Il exhorte les pays ayant une influence sur les parties en conflit à la recherche du dialogue et de la réconciliation. Le Tchad prend acte de l’annonce faite par les insurgés qu’ils observeront un cessez-le-feu pour permettre l’évacuation des corps, et de la volonté du Gouvernement ukrainien de mettre en œuvre le plan de paix afin de jeter les bases d’un dialogue politique inclusif, seule voie possible de règlement de cette crise grave.

Mme Power (États-Unis d’Amérique) (parle en anglais) : Hier, nous avons tous appris avec horreur la destruction du vol 17 de Malaysia Airlines. Les 298 personnes qui se trouvaient à bord – dont 283 passagers et 15 membres d’équipage – ont été tuées. En observant hier la liste des passagers, nous avons vu à côté de trois de ces noms un « I » majuscule. Comme nous le savons à présent, cette lettre signifie « infant » (nourrisson). Il est impossible de trouver les mots pour exprimer nos condoléances aux familles et aux amis des victimes. Nous pouvons seulement leur promettre que nous n’aurons de cesse que d’avoir établi ce qui s’est passé. Une enquête internationale exhaustive, crédible et sans entrave doit s’ouvrir immédiatement. Les responsables doivent être traduits en justice, et non pas protégés par un État Membre de l’ONU quel qu’il soit.

Je tiens à faire part au Conseil de notre analyse des éléments de preuve dont nous disposons jusqu’à présent.

Nous pensons que le vol 17 de Malaysia Airlines, qui transportait 298 personnes d’Amsterdam à Kuala Lumpur, a probablement été abattu par un missile sol- air (MSA) – un SA-11 – lancé depuis une zone contrôlée par les séparatistes dans l’est de l’Ukraine. L’avion volait à une altitude de croisière de 10000 mètres, et sa vitesse était normale pour un avion de ligne qui emprunte un couloir de vol établi fréquenté par des vols commerciaux. Le vol transmettait le code transpondeur qui lui avait été assigné, correspondant à son plan de vol, et les données de suivi de vol étaient accessibles au public sur l’Internet. Il n’y avait rien de menaçant ou de provocateur dans le vol MH 17.

Parmi les systèmes opérationnels de MSA situés près de la frontière, seuls les systèmes SA-11, SA-20 et SA-22 sont capables de toucher un avion volant à une altitude de 10000 mètres. Nous pouvons exclure les MSA de courte portée qui sont aux mains des séparatistes, y compris les systèmes portables de défense anti-aérienne, ainsi que les systèmes SA-8 et SA-13, incapables de frapper un avion à cette altitude. Jeudi, en début de journée, un système SA-11 a été signalé près de Zahnitkiv par un journaliste occidental, et des séparatistes ont été repérés quelques heures avant l’incident avec un système SA-11 à un endroit proche du site où l’avion s’est écrasé.

Les séparatistes ont tout d’abord revendiqué la responsabilité de la destruction d’un avion de transport militaire, et mis en ligne des vidéos qui sont désormais reliées à l’accident de la Malaysia Airlines. Les dirigeants séparatistes se sont également vantés sur les médias sociaux d’avoir abattu un avion, mais ils ont par la suite supprimé ces messages.

Compte tenu de la complexité technique du SA- 11, il est peu probable que les séparatistes aient pu actionner ce système sans l’assistance de personnel compétent. Nous ne pouvons donc pas exclure une assistance technique fournie par un personnel russe pour faire fonctionner ce système. Les stocks ukrainiens contiennent des systèmes SA-11. Nous n’avons cependant pas connaissance de la présence d’un quelconque système de missile sol-air ukrainien dans la zone où l’avion a été abattu. Surtout, depuis le début de cette crise, la défense aérienne ukrainienne n’a pas tiré un seul missile malgré plusieurs violations présumées de l’espace aérien ukrainien par des aéronefs russes.

Cela correspond également à un mode d’action suivi par les séparatistes appuyés par la Russie. Le 13 juin, des séparatistes ont abattu un avion de transport ukrainien, avec à bord 40 parachutistes et neuf membres d’équipage. Le 24 juin, alors que le Conseil était réuni pour saluer le cessez-le-feu déclaré de façon unilatérale par l’Ukraine (voir S/PV.7205), nous avons été informés que des séparatistes avaient abattu un hélicoptère ukrainien, en tuant les neuf occupants. Le 14 juillet, des séparatistes ont revendiqué avoir abattu un avion-cargo militaire ukrainien naviguant à 6000 mètres d’altitude et, le 16 juillet, ils ont revendiqué la destruction en vol d’un avion de chasse ukrainien. Si les séparatistes appuyés par la Russie sont bel et bien responsables de cette attaque contre un avion de ligne, ils auraient, ainsi que ceux qui les appuient, de bonnes raisons de dissimuler les preuves de leur crime. Il est donc extrêmement important d’ouvrir une enquête immédiatement.

Dans un premier temps, la mission d’observation spéciale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe doit agir en tant que premier intervenant, afin de préparer le terrain pour les efforts que déploieront d’autres organisations internationales et pays, y compris les pays dont les ressortissants ont été victimes de cette tragédie. Hier, le Président Obama a assuré le Président ukrainien, M. Porochenko, que des experts américains offriraient, à sa demande, toute l’assistance possible. Le Président Porochenko a invité l’Organisation de l’aviation civile internationale, organisation indépendante et crédible, à participer à une enquête. Les enquêteurs internationaux doivent se voir accorder immédiatement un accès total et libre au lieu où l’avion s’est écrasé. Tous les acteurs concernés, la Russie, les séparatistes pro-russes et l’Ukraine, doivent accepter d’appuyer un cessez-le-feu immédiat pour faciliter l’accès des enquêteurs internationaux.

À cet égard, nous attendons également de la mission d’observation qu’elle parvienne également à trouver un accord avec les séparatistes et d’autres acteurs dans la région pour faire en sorte que cela soit possible. Aucun élément de preuve ne doit être déplacé et tout élément de preuve enlevé du site par les séparatistes appuyés par la Russie qui opèrent dans cette zone doit être rapidement rendu et remis. La Russie doit apporter son concours à cette fin.

Même s’il faudra sans doute du temps avant de pouvoir déterminer avec certitude qui a abattu un avion rempli d’innocents, la plupart des membres du Conseil et de la communauté internationale mettent en garde depuis des mois contre les conséquences dévastatrices qui s’ensuivraient si la Russie ne mettait pas fin à ce qu’elle a commencé, si elle ne jugulait pas ce qu’elle a déclenché. Le contexte de l’abomination d’hier est clair : des forces séparatistes, appuyées par le Gouvernement russe, continuent de déstabiliser l’Ukraine et de saper les efforts déployés par les dirigeants élus de l’Ukraine pour bâtir une Ukraine démocratique stable, soudée, sûre et en mesure de décider de son propre avenir.

La Russie dit qu’elle recherche la paix en Ukraine mais nous avons bien des fois fourni au Conseil les preuves que la Russie continuait d’appuyer les séparatistes. Nous avons demandé, encore et encore, au Gouvernement russe d’apaiser la situation en mettant le holà à l’arrivée de combattants et d’armes en Ukraine, en faisant pression sur les séparatistes pour qu’ils acceptent un cessez-le-feu et libèrent tous les otages, et en appuyant une feuille de route pour des négociations. À chaque fois, le Président Poutine s’est engagé à œuvrer en faveur du dialogue et de la paix : à Genève, en avril ; en Normandie, en juin ; et à Berlin, en début de mois. Et chaque fois, il n’a pas tenu cet engagement.

Voici ce que nous savons : ces dernières semaines, la Russie a accru le nombre de chars, de véhicules blindés et de lance-roquettes dans le sud-ouest de la Russie. Des systèmes de défense anti-aérienne plus perfectionnés sont également arrivés. Moscou a récemment transféré des chars et de l’artillerie de l’époque soviétique aux séparatistes et plusieurs véhicules militaires ont passé la frontière. Après avoir repris le contrôle de plusieurs villes ukrainiennes le week-end dernier, les responsables ukrainiens ont découvert des caches d’armes associées depuis longtemps aux stocks de la Russie, y compris des système portables de défense anti-aérienne, des mines, des grenades, des rations, des véhicules et un pont flottant. Les forces ukrainiennes ont découvert des quantités importantes de matériel militaire fourni par la Russie, y compris les documents justificatifs qui en confirment l’origine russe, dans les zones qu’ils ont reprises aux séparatistes ces derniers jours. Les efforts de recrutement de combattants séparatistes s’étendent en Russie et des séparatistes ont publiquement déclaré qu’ils recherchaient des volontaires ayant une expérience dans le maniement d’armes lourdes, notamment des chars et des systèmes de défense antiaérienne. La Russie a permis à des responsables de la « République populaire de Donetsk » d’installer un bureau de recrutement à Moscou. La pilote ukrainienne Nadiya Savchenko, qui a une longue carrière bien remplie au sein de l’armée ukrainienne, a été enlevée par des séparatistes à la mi-juin. Elle est maintenant détenue : où ? dans une prison de Voronej, en Russie. D’après le Gouvernement ukrainien, elle a été transférée en Russie par des séparatistes. La Russie continue de redéployer de nouvelles forces extrêmement près de la frontière ukrainienne. En outre, lundi dernier, un avion-cargo des forces aériennes ukrainiennes a été abattu dans l’espace aérien ukrainien ; et mercredi, un avion de chasse ukrainien a également été abattu dans l’espace aérien ukrainien. Dans les deux cas, le Gouvernement ukrainien pense qu’on a tiré sur ces avions depuis le territoire russe.

C’est en raison de ces incessants actes de déstabilisation de la part de la Russie que les États-Unis ont imposé des sanctions dans les secteurs de la défense, de l’énergie et des finances de l’économie russe, y compris les institutions financières. Ces mesures comprennent le gel des avoirs d’entreprises du secteur de la défense russes et le blocage de nouveaux financements de certaines des banques et sociétés d’énergie les plus importantes de Russie. Ces sanctions sont lourdes mais elles sont également ciblées – elles visent à avoir un impact maximal sur la stratégie russe tout en limitant les effets sur la population russe et en limitant les retombées sur nos intérêts ou ceux de nos alliés. L’Union européenne a également annoncé cette semaine la prolongation des sanctions contre la Russie.

Le message est univoque et clair : si le Président Poutine continue de préférer l’escalade à l’apaisement, la communauté internationale continuera d’en faire payer le coût à la Russie. Mais aucun d’entre nous ne veut cela. Nous demeurons, de même que nos alliés, attachés à une solution diplomatique, tout comme le Gouvernement et le peuple ukrainiens qui ont vu leurs voisins, amis et membres de leur famille tués dans le cadre d’un conflit inutile.

Le Président Porochenko a constamment mis ses actes en accord avec ses paroles. Il a proposé un plan de paix global et déclaré un cessez-le-feu unilatéral, tous deux rejetés avec cynisme par les groupes armés illégaux et ceux qui les appuient à Moscou. Le plan du Président Porochenko offrait l’amnistie aux séparatistes qui déposaient volontairement les armes et qui n’étaient pas coupables de crimes passibles de la peine de mort. Il s’est engagé à ménager un couloir sûr aux combattants russes pour qu’ils puissent retourner en Russie ; il a mis en place un programme de création d’emplois pour les zones touchées ; proposé un vaste programme de décentralisation et de dialogue avec les régions de l’est du pays, promettant, notamment, d’organiser des élections locales anticipées ; et il a donné plus de pouvoir aux autorités locales sur les questions concernant la langue, les jours fériés et les coutumes. Le Président Porochenko s’est également efforcé de tendre la main aux régions de l’est de l’Ukraine et il mène une réforme constitutionnelle destinée à donner plus de pouvoirs aux régions pour le choix de leurs responsables régionaux et la protection des langues parlées au niveau local. Il a dit être prêt à rencontrer les séparatistes dans n’importe quel lieu sûr, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Ukraine.

L’objectif des États-Unis tout au long de la crise en Ukraine est resté le même : appuyer une Ukraine stable, pacifique et démocratique. Un arrêt temporaire des violences ne nous satisfera pas. La Russie doit cesser de déstabiliser l’Ukraine et permettre à tous les Ukrainiens de décider de l’avenir de leur pays dans le cadre d’un processus politique démocratique. En ce moment même, les dépouilles de près de 300 innocents –nourrissons, enfants, femmes et hommes–, sont éparpillées dans un paysage ukrainien noirci et incandescent. Ces victimes sont originaires d’au moins neuf pays différents. Elles auraient tout aussi bien pu être originaires de n’importe lequel de nos pays. Nous devons toutes les considérer comme nos propres victimes. Nous devons à chacune de ces personnes, sans exception, à sa famille et à son pays de déterminer pourquoi cet avion est tombé du ciel et de demander des comptes aux auteurs. Rien ne doit s’opposer à notre volonté de traduire les responsables en justice. Cette abominable attaque s’est produite dans le contexte d’une crise alimentée par le soutien russe aux séparatistes – sous forme d’armes et d’entraînement –, par le fait que la Russie n’a pas tenu ses engagements et par son non-respect des principes fondamentaux consacrés par la Charte des Nations Unies. Cette tragédie ne fait que souligner le sentiment d’urgence et la détermination avec lesquels nous insistons pour que la Russie prenne immédiatement des mesures concrètes pour apaiser la situation en Ukraine, appuyer un cessez-le-feu durable et suivre la voie de la paix que le Gouvernement ukrainien n’a cessé de proposer. Cette guerre peut prendre fin. La Russie peut y mettre fin. La Russie doit y mettre fin.

M. Baublys (Lituanie) (parle en anglais) : Nous sommes profondément bouleversés par la destruction en vol, hier, du Boeing 777 de la compagnie Malaysia Airlines dans l’est de l’Ukraine. Nous adressons nos sincères condoléances à la Malaisie, aux Pays- Bas, à l’Australie, à l’Indonésie, au Royaume-Uni, à l’Allemagne, à la Belgique, aux Philippines, au Canada et aux autres pays dont des citoyens figurent parmi les 298 personnes qui ont péri dans cet accident. Nous sommes en pensée avec les familles des victimes.

Les circonstances de cette destruction en vol doivent être déterminées dans le cadre d’une enquête internationale indépendante, conformément aux directives de l’aviation civile internationale. Ses auteurs ne peuvent échapper à leurs responsabilités. Les enquêteurs doivent être autorisés à accéder immédiatement au site où se trouve l’appareilet que les boîtes noires doivent être remises aux autorités indépendantes afin d’empêcher toute altération des preuves.

Il est impossible d’ignorer les circonstances de l’accident. Elles pointent toutes dans la même direction, à savoir que cet horrible crime a été commis dans le cadre de l’agression armée contre l’Ukraine. La responsabilité de cet acte de terreur incombe à ceux dont l’agression empêche l’Ukraine d’exercer efficacement ses droits souverains sur son territoire et sur son espace aérien. Cela ne se serait pas produit si la Russie n’avait pas armé et encouragé la présence de groupes séparatistes dans les provinces de Donetsk et Lougansk. La communauté internationale ne peut rester sans réagir face à cette agression. Le pays est devenu une menace pour la paix et la sécurité internationales. C’est ce que nous n’avons cessé de dire depuis l’occupation de la Crimée.

Les débris de l’avion malaisien se trouvent dans une zone contrôlée par les séparatistes pro-russes. Rien que cette semaine, un avion-cargo AN-26 ukrainien et un avion de chasse Su-25 ont été abattus par des séparatistes pro-russes alors qu’ils volaient à haute altitude. Le troisième – cet avion de ligne malaisien – a été abattu délibérément. Un avion de transport Il-76 et une demi-douzaine d’hélicoptères ont été abattus par des séparatistes pro-russes à l’aéroport de Lougansk et ailleurs. En juin, les séparatistes se sont vantés de posséder un système de missiles Buk SA-11. Ils ont déclaré avoir utilisé ce système pour abattre l’avion- cargo An-26 à haute altitude. Le chef des séparatistes, Igor Strelkov, a indiqué aux médias avoir abattu un autre aéronef au moment même où le vol de la Malaysia Airlines survolait la région.

Nous sommes vraiment choqués par le nombre de victimes enregistré parmi la population civile dans l’est de l’Ukraine. Les séparatistes armés, les terroristes et les combattants étrangers et ceux qui les appuient portent la responsabilité des des morts et des blessés civils, notamment des enfants, des femmes et des personnes âgées. Le carnage doit cesser. Le Président Porochenko a proposé un plan de paix. L’Ukraine a proclamé un cessez-le-feu unilatéral. L’accord de Berlin du 2 juillet fournit un cadre de négociation. Pourtant les séparatistes et les terroristes continuent, dans l’est de l’Ukraine, de semer la terreur, de se livrer au pillage, à l’attaque de banques, au racket, au kidnapping et à la traite des êtres humains.

L’arrivée massive et incessante de combattants étrangers qui passent les frontières russes pour pénétrers dans les régions voisines de Lougansk et Donetsk se poursuit sans discontinuer. Ces arrivées s’accompagnent de l’entrée de chars T-65, de lance-roquettes multiples de type Grad, de canons antiaériens, de canons anti- chars tractés, de véhicules blindés de transport de troupes de type BTR, de systèmes portables de défense anti-aérienne et d’armes légères. De fait, les terroristes ne se sont guère donné la peine, dans le Donbass, d’enlever les marques d’identification des unités de l’armée russe sur leurs armes lourdes. Des hélicoptères et des drones de l’armée russe violent l’espace aérien ukrainien, et 40000 soldats ont un campement à quelques minutes de la frontière ukrainienne, s’ajoutant aux 20 000 hommes déjà stationnés en Crimée occupée. Des citoyens russes, dont de nombreux vétérans des conflits de Tchétchénie et de Transnistrie, commandent nombre de ces groupes terroristes.

Les chaînes et médias russes distillent en permanence une propagande anti-ukrainienne. L’organe des séparatistes, Life News, vante l’adresse avec laquelle les rebelles abattent tout avion en vue. Les terroristes et les séparatistes continuent de prendre des otages. La pilote ukrainienne Nadia Savchenko enlevée, la tête recouverte d’une cagoule, a été exfiltrée par les séparatistes directement d’Ukraine au centre de détention provisoire russe de Voronej. Nous condamnons la détention illégale de citoyens ukrainiens en Russie. La Russie doit respecter les normes du droit international et libérer Savchenko immédiatement. Nous restons atterrés par la dégradation de la situation des droits de l’homme en Crimée.

La Lituanie demande instamment l’ouverture d’une enquête exhaustive, approfondie et indépendante sur la destruction en vol de l’avion de la Malaysia Airlines, ainsi qu’en a décidé le Conseil aujourd’hui. La Lituanie prie instamment la Russie de prendre clairement ses distances avec tout type de soutien, direct ou indirect aux terroristes, aux séparatistes et aux combattants étrangers. Les insurgés doivent déposer les armes. La Lituanie appelle la Russie à coopérer avec l’Ukraine en vue d’assurer la sécurité des frontières et d’empêcher l’entrée d’armes et de terroristes armés sur le territoire ukrainien. Nous appelons la Russie à collaborer de façon constructive à la mise en œuvre du plan de paix proposé par le Président Porochenko. Une solution diplomatique est possible. L’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières reconnues au plan international, y compris la Crimée, ne sont pas négotiables et doivent être respectées par tous.

M. Liu Jieyi (Chine) (parle en chinois) : Je voudrais remercier le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de son exposé.

La Chine est en état de choc et dans une grande tristesse après la destruction du vol MH 17 de la Malaysia Airlines au-dessus de l’est de l’Ukraine. Au nom du Gouvernement et du peuple chinois, j’exprime nos sincères condoléances et nos profonds regrets aux familles des victimes.

La sûreté de l’aviation civile internationale doit être garantie. Notre priorité, à présent, est d’établir les faits. En attendant, il n’est pas souhaitable de tirer des conclusions, d’avancer des hypothèses ou d’échanger des accusations. Nous appuyons l’ouverture d’une enquête indépendante, juste et impartiale sur l’accident. Nous demandons aussi à toutes les parties de coordonner leur action et de coopérer dans le cadre de l’enquête.

La situation en Ukraine reste, ces jours, très perturbée. Combats armés et flambées de violence, toujours fréquents, fauchent des vies et provoquent des destructions. La Chine est vivement préoccupée par cette situation. Nous espérons que les parties concernées sauront tenir compte du bien-être de l’ensemble de la population ukrainienne, qu’elles se soucieront avant tout du maintien de la paix et de la stabilité régionales et qu’elles feront preuve de calme et de retenue pour empêcher une nouvelle escalade du conflit et des affrontements.

La crise en Ukraine trouve ses racines dans une situation complexe tant historique que contemporaine. Une solution politique est la seule voie de sortie. La Chine prend acte des efforts constructifs déployés dernièrement par les parties concernées en vue de parvenir à un cessez-le-feu et de favoriser un règlement politique. Nous espérons que les parties concernées resteront déterminées à dialoguer et à négocier, à tenir pleinement compte des droits et des aspirations de tous les Ukrainiens et à ne pas perdre de vue les préoccupations légitimes de toutes les parties en présence pour que les droits de toutes les parties soient respectés de façon équilibrée. Nous appuyons les efforts faits par les parties pour mettre en oeuvre effectivement le cessez-le-feu convenu et renforcer le dialogue et la consultation sur la base de l’Accord de Genève aux fins d’un règlement politique ainsi que de la stabilisation rapide et du développement de l’Ukraine.

La Chine respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les pays, y compris l’Ukraine. La Chine entend maintenir un point de vue juste et impartial et continuer de participer activement à toute proposition ou initiative permettant d’apaiser les tensions et de trouver un règlement politique. Nous jouerons un rôle constructif dans ce processus.

Mme King (Australie) (parle en anglais) : La destruction du vol MH 17 de la Malaysia Airlines au- dessus du territoire ukrainien le 17 juillet a mis le monde en état de choc. Nous avons assisté à la mort tragique de 298 personnes. Il y avait 28 Australiens à bord du vol MH 17. Notre pays pleure toutes les victimes. Les informations faisant état de la mort de 80 enfants sont déchirantes. Demain, les drapeaux seront mis en berne sur tout le territoire australien. Nous adressons nos sincères condoléances aux familles de toutes les victimes de la tragédie, avec lesquelles nous sommes de tout coeur, ainsi qu’à leurs pays. Nos pensées vont particulièrement aux Gouvernements et aux citoyens des Pays-Bas et de la Malaisie.

Les preuves que cet écrasement a été causé par un missile et que l’avion a été abattu au-dessus d’une zone non contrôlée par les autorités ukrainiennes s’accumulent. De plus en plus d’informations crédibles tendent à montrer que c’est l’oeuvre de milices séparatistes, agissant avec le concours de tiers. Nous devons aux victimes de cette tragédie et à leurs familles de faire toute la lumière sur les faits qui ont conduit à cet accident, sur ce qui s’est réellement passé et sur ceux qui sont responsables. Si, comme il semble de plus en plus probable, le vol MH 17 a été abattu par un missile, alors c’est, comme l’a dit le Premier Ministre australien, Tony Abbott, « un crime innommable », dont les auteurs doivent rapidement comparaître devant la justice.

Une enquête internationale complète, approfondie et impartiale devra être menée. Nous remercions le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de nous avoir fait savoir que l’ONU était pleinement prête à coopérer avec toute enquête et que l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) avait proposé ses capacités d’enquête. Nous nous félicitons également de l’information communiquée par M. Feltman selon laquelle l’OACI et le Gouvernement ukrainien étaient en communication sur la question d’une enquête.

Il convient de préserver immédiatement le site où s’est écrasé l’avion et de ménager un accès sans entrave aux équipes d’enquête indépendantes. Il convient également de fournir un accès pour permettre la récupération des corps de ceux qui ont perdu la vie dans la tragédie. Les initiatives entreprises par le groupe de contact trilatéral auprès des séparatistes armés qui contrôlent le territoire dans lequel l’avion s’est écrasé pour permettre d’y accéder doivent être appuyées. Notre Premier Ministre a fait savoir en termes clairs que la pleine coopération de la Russie à toutes les enquêtes était attendue.

Le Conseil vient juste de publier une déclaration à la presse appelant à la tenue d’une enquête, à l’établissement des responsabilités et à un accès immédiat au site où se trouvent les restes de l’avion. Nous nous en félicitons, mais l’Australie estime, compte tenu de la gravité de cet incident, que cela ne constitue pas un signe suffisant de la détermination du Conseil. L’Australie estime que le Conseil doit adopter un projet de résolution soulignant la nécessité de ménager un accès au site où se trouve la carcasse de l’avion et de laisser se faire une enquête complète, approfondie, indépendante et internationale.

C’est la dix-neuvième fois que le Conseil se réunit pour examiner la situation en Ukraine depuis le début de la crise. La majorité écrasante du Conseil de sécurité a appelé, encore et encore, à la fin de la violence et de la déstabilisation. Les membres du Conseil n’ont cessé d’appeler à une désescalade des tensions, et d’appeler les séparatistes à déposer les armes, afin qu’un dialogue véritable puisse commencer. Il est temps de mettre fin aux faux-fuyants, à la duplicité et aux représentations fictives de la réalité.

Dans les trois semaines qui se sont écoulées depuis que le Conseil a examiné pour la dernière fois la situation en Ukraine (voir S/PV.7205), les conditions de sécurité dans l’est du pays sont devenues de plus en plus critiques. Les séparatistes ont fait la sourde oreille aux appels répétés à déposer les armes, et ils ont poursuivi leurs attaques contre les forces militaires, installations et postes frontière ukrainiens. Deux avions-cargo militaires ukrainiens ont été abattus dans l’est de l’Ukraine rien que dans la dernière semaine. Les forces armées ukrainiennes ont réagi avec fermeté à ces attaques. Elles sont tout à fait en droit de rétablir l’ordre public et elles ont signifié leur droit de le faire de façon proportionnée.

La Russie a un rôle crucial à jouer dans une désescalade de cette crise qui continue de représenter un grand danger. Elle doit mettre fin à ses provocations et à tout appui apporté aux forces séparatistes. Elle doit contrôler sa frontière avec l’Ukraine et empêcher le passage d’armes, de matériel et de combattants de la Russie en Ukraine. La Russie doit retirer le grand nombre de contingents qu’elle a de nouveau amassés sur la frontière ukrainienne. Elle doit travailler activement à la désescalade des tensions et user de son influence notable sur les groupes séparatistes en Ukraine à cette fin.

De nouveaux efforts politiques sont indispensables. Les pourparlers à quatre de Berlin au cours des deux dernières semaines se sont avérés relativement prometteurs. Les parties y sont convenues de la nécessité de déclarer un cessez-le-feu durable, de reprendre les travaux du groupe de contact, de contrôler les points de passage aux frontières surveillés par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et d’élargir le mandat de la mission d’observation de l’OSCE pour y ajouter des activités de surveillance des frontières. Mais il reste encore à voir les résultats de ces décisions ; ces efforts doivent redoubler.

Nous pensions que la situation en Ukraine n’avait déjà provoqué que trop de tragédies. La terrible perte du vol MH 17 de la Malaysia Airlines n’a fait qu’ajouter de façon incommensurable à ce bilan. Il est temps que la communauté se mobilise, à l’unisson, pour veiller à ce que les responsables de ce crime tragique en répondent et pour faire tout son possible pour mettre fin à la violence et à la déstabilisation en Ukraine.

Mme Lucas (Luxembourg) : Je remercie à mon tour le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, Jeffrey Feltman, de son exposé.

À l’entame de mes propos, je souhaite exprimer, au nom du Gouvernement et du peuple luxembourgeois, mes condoléances les plus sincères aux familles et aux proches des 298 personnes à bord de l’avion de Malaysia Airlines qui s’est écrasé hier après-midi près du village de Grabovo, dans l’est de l’Ukraine. Parmi les victimes se trouve également une famille anglo-néerlandaise vivant au Luxembourg. Nos sympathies vont aux Gouvernements et aux peuples des Pays-Bas, de la Malaisie, de l’Allemagne, de l’Australie, de la Belgique, du Canada, de l’Indonésie, de la Nouvelle Zélande, des Philippines et du Royaume-Uni. La communauté internationale doit aux victimes de faire la lumière sur les circonstances qui ont mené à cet événement tragique. Une enquête internationale complète, transparente et indépendante doit être menée à bien dans les plus brefs délais. Un accès sûr et sans entraves doit être assuré aux enquêteurs internationaux, tout comme aux observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et aux représentants des pays affectés. Toutes les parties concernées doivent pleinement coopérer à cette fin. Nous saluons la disponibilité des autorités ukrainiennes à cet égard. Ceux qui ont commis cet acte odieux doivent être tenus responsables.

Cette catastrophe s’inscrit dans un contexte de détérioration continue de la situation dans l’est de l’Ukraine. Jour après jour, nous recevons des rapports faisant état de civils tués dans les combats opposant les forces armées ukrainiennes et des groupes armés illégaux. Les milices séparatistes pro-russes continuent à occuper des bâtiments et des postes frontière, retiennent en otage des dizaines d’innocents et menacent l’intégrité territoriale de l’Ukraine, sa souveraineté et son indépendance. Les conditions de vie des personnes vivant dans les zones affectées par les hostilités ne cessent de se détériorer et le nombre de déplacés internes augmente de manière constante. L’escalade de la violence des derniers jours, jusqu’à son tragique paroxysme d’hier, démontre une fois de plus que les groupes armés actifs dans l’est de l’Ukraine sont en réalité des forces paramilitaires bien équipées et bien entraînées, bénéficiant d’un soutien extérieur certain. Nous exhortons la Fédération de Russie à user activement de son influence sur les groupes armés illégaux et à faire en sorte que des armes et des combattants ne puissent plus franchir la frontière, afin d’aboutir dans les meilleurs délais à une désescalade.

Tout au long des derniers mois, l’Ukraine a démontré sa détermination à trouver une solution pacifique à la crise et à mettre en œuvre les accords conclus, notamment la déclaration conjointe adoptée le 17 avril à Genève entre l’Ukraine, la Russie, l’Union européenne et les États-Unis. L’Ukraine a mis en place un dialogue national et des garanties pour les minorités nationales. Une fois élu, le Président Porochenko a présenté un plan de paix très complet et mis en place une trêve unilatérale pour créer les conditions nécessaires à sa mise en œuvre. Malheureusement, les groupes armés illégaux, dont l’unique but est de déstabiliser l’Ukraine, ont choisi de ne pas saisir cette main tendue.

Les efforts diplomatiques en vue de trouver une solution pacifique à la crise dans l’est de l’Ukraine doivent être maintenus. À cet égard, l’engagement personnel du Secrétaire général depuis le début de la crise est essentiel et doit se poursuivre. Il importe de trouver d’urgence un accord sur un cessez-le-feu réel et durable qui soit observé par toutes les parties afin de créer les conditions nécessaires à la mise en œuvre du plan de paix du Président Porochenko. Nous saluons les efforts déployés à cet égard par la France et l’Allemagne ainsi que par l’OSCE pour encourager le dialogue entre la Russie et l’Ukraine. Nous espérons vivement que ces efforts pourront contribuer à une désescalade et à mettre fin à une crise qui n’a que trop duré. La catastrophe aérienne d’hier a démontré les conséquences incalculables que cette crise risque d’avoir. Il est grand temps pour toutes les parties prenantes, y compris la Fédération de Russie, de mobiliser toutes les énergies pour mettre un terme à cette crise.

M. Araud (France) : Je remercie M. Feltman de son exposé.

J’adresse mes plus sincères condoléances à tous les représentants permanents des pays qui ont perdu des compatriotes dans ce tragique événement. Je voudrais le faire en particulier à nos collègues néerlandais et malaisiens. Le deuil national des Pays-Bas est aussi le nôtre.

Hier, un avion de la Malaysia Airlines, transportant près de 300 passagers, s’est écrasé en Ukraine dans la zone contrôlée par les séparatistes. Le Président de la République française a fait part hier de son immense émotion à l’annonce de cette catastrophe. Je réitère aujourd’hui la solidarité de la France aux proches des passagers dans l’épreuve qu’ils traversent. Face à cette tragédie, s’ajoutant à un tableau déjà chaotique, la France demande que tout soit mis en œuvre pour faire la lumière sur les circonstances qui ont provoqué cette tragédie. Nous appelons au lancement d’une enquête internationale indépendante qui puisse permettre d’établir des faits et d’en tirer toutes les conséquences.

Nous demandons que toutes les mesures soient prises pour faciliter le travail des enquêteurs sur le terrain. Nous attendons en particulier des séparatistes qu’ils coopèrent avec les autorités ukrainiennes dans les recherches et permettent un accès sûr, immédiat et plein aux enquêteurs, conformément à ce qui a été décidé hier lors de la visioconférence entre le Groupe de Contact – Ukraine, Russie et Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) – et les représentants séparatistes.

Une lueur d’espoir avait commencé de poindre en Ukraine à la fin du mois dernier. Avec l’élection de M. Porochenko, un processus de normalisation politique voyait le jour. Un cessez-le-feu unilatéral, décrété par Kiev le 20 juin, laissait entrevoir un possible terme à la dégradation générale de la situation humanitaire et en matière de sécurité dans l’est. Le Président Porochenko prenait à cette même date l’initiative d’un plan de paix global en vue d’un règlement pacifique de la situation.

De même, à la suite de leur rencontre en marge des cérémonies du débarquement en Normandie, un processus d’échanges quasi quotidiens entre les Présidents Porochenko et Poutine, la Chancelière allemande, Mme Merkel, et le Président Hollande permettait d’engager un dialogue utile. Une déclaration conjointe était d’ailleurs adoptée à Berlin, le 2 juillet, qui prévoit la recherche d’un cessez-le-feu durable à travers la rencontre du Groupe de contact et des séparatistes, un renforcement des contrôles à la frontière russo- ukrainienne pour endiguer le flot d’armes et d’hommes, et le concours de l’OSCE pour participer à cet effort.

Aujourd’hui, la situation continue néanmoins de se dégrader. Depuis plusieurs jours, les combats se sont intensifiés dans l’est de l’Ukraine, en raison du refus des séparatistes de saisir la main tendue. Les exactions se font chaque jour plus meurtrières. Ainsi, des armes encore jamais utilisées sont entrées en action et ont frappé le territoire ukrainien. Deux avions ukrainiens ont été abattus à l’intérieur de leur propre espace aérien, ce qui ne peut être le fait que d’une partie dotée d’un armement antiaérien é. Plus encore, cette dégradation sans précédent tient aussi à la présence de combattants armés venant de l’extérieur de l’Ukraine. La question des soutiens extérieurs, en termes de recrutement, de fourniture de matériel et d’entraînement, ne peut être évitée. La réponse n’est que trop évidente, elle est indéniable.

Des systèmes d’armes d’une puissance de feu très importante sont employés, rendant possibles des dérapages tragiques. Ceux qui ont armés leurs utilisateurs portent la responsabilité de cet embrasement. Comme je l’ai déjà dit dans un précédent discours, lorsqu’on arme des voyous, on ne doit pas être surpris qu’ils se comportent comme des voyous.

Tous ces évènements soulignent la nécessité pressante d’une pleine coopération internationale en vue de stabiliser l’Ukraine ainsi que de garantir sa souveraineté et son intégrité territoriale. Nous appelons notamment à un engagement sincère de la Russie, qui a fait défaut jusqu’à présent. Avant-hier, les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne faisaient le constat que les nombreux appels adressés à Moscou pour cesser son action non coopérative n’avaient pas été entendus. C’est le sens de la décision prise par l’Union européenne de durcir ses sanctions.

Le renforcement de ces sanctions n’a cependant qu’un seul et même but : la facilitation de l’émergence d’une solution politique. Notre priorité demeure d’abord d’enrayer l’escalade et d’obtenir la mise en place d’un cessez-le-feu durable respecté par toutes les parties. C’est pourquoi nous appelons la Russie à s’impliquer de façon constructive dans cette entreprise et à user de son influence sur les groupes armés illégaux pour déposer les armes et s’engager dans le dialogue.

Les activités des séparatistes doivent en effet cesser. En vue de freiner les flux d’armes et de combattants qui franchissent quotidiennement la frontière russo-ukrainienne, nous appelons à des négociations Ukraine-Russie-OSCE pour permettre le déploiement rapide d’une mission de surveillance à cette frontière.

Que cette tragédie serve au moins d’avertissement à toutes les parties : une fois l’épée tirée, elle frappe indistinctement et échappe à tout contrôle. Nous avons atteint ce moment. Il est peut-être encore possible d’éviter le pire.

M. Omaish (Jordanie) (parle en arabe) : La Jordanie déplore profondément l’acte criminel qui a conduit à l’écrasement au sol d’un avion de la Malaysia Airlines hier dans l’est de l’Ukraine. Nous tenons également à exprimer nos plus sincères condoléances au Gouvernement malaisien et à toutes les familles des victimes de cette terrible tragédie.

La Jordanie demande qu’une enquête complète, approfondie et indépendante soit réalisée sur les circonstances entourant l’accident d’hier, avec la participation des autorités ukrainiennes compétentes et la coopération de toutes les autorités concernées, notamment les autorités malaisiennes.

Le Gouvernement jordanien est gravement préoccupé par la détérioration de la situation dans l’est de l’Ukraine, qui a pris une tournure nouvelle et extrêmement dangereuse suite aux événements d’hier. La Jordanie a déjà fait part de sa vive inquiétude face à la dégradation de la situation dans l’est de l’Ukraine. Nous renouvelons ici notre appel à toutes les parties influentes pour qu’elles fassent en sorte de stopper l’escalade, fassent pression sur les séparatistes pour qu’ils déposent les armes et se retirent des bâtiments et installations qu’ils occupent, et trouvent une solution pacifique à la crise, afin de rétablir la stabilité dans l’est de l’Ukraine. Nous demandons également la garantie que les personnes déplacées pourront rentrer chez elles dès que possible.

La Jordanie exhorte toutes les parties ayant signé la déclaration de Genève et la déclaration conjointe de Berlin à respecter les dispositions de ces documents. Nous invitons tous les intéressés à faciliter le travail de la mission des Nations Unies de surveillance des droits de l’homme en Ukraine, et tout particulièrement dans l’est du pays.

La Jordanie réaffirme l’importance de respecter la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Pour conclure, nous invitons vivement le Gouvernement ukrainien à poursuivre ses efforts en faveur de la participation politique de tous les Ukrainiens, à veiller au plein respect des conventions internationales relatives aux droits de l’homme et à tenir compte des préoccupations des minorités et des personnes qui ne sont pas de langue ukrainienne.

Mme Perceval (Argentine) (parle en espagnol) : Je tiens à remercier M. Jeffrey Feltman de son exposé sur les derniers événements survenus en Ukraine et d’avoir rappelé que le Secrétaire général est toujours prêt à contribuer à la paix et au dialogue.

Le Gouvernement et le peuple argentins expriment leur profonde tristesse, leur solidarité et leurs plus sincères condoléances aux familles des victimes du tragique accident qui a frappé la Malaysia Airlines. Nous exprimons nos condoléances au peuple et au Gouvernement ukrainiens, de même qu’aux autres pays dont des ressortissants ont perdu la vie, particulièrement à nos collègues et aux Représentants permanents des pays dont des ressortissants se trouvaient à bord de cet appareil. Nous présentons en particulier nos condoléances aux familles qui ont vu périr leurs enfants et l’avenir qu’ils portaient en eux.

La gravité de l’événement impose d’agir et, comme les autres pays, l’Argentine appelle à une enquête internationale impartiale qui établisse de manière objective et certaine ce qui s’est passé. Il faut éclaircir dès que possible les faits et les responsabilités pour faciliter l’accès immédiat et sans entrave des enquêteurs.

Bien que ce ne soit pas le sujet dont nous parlons aujourd’hui, j’affirmerais que selon diverses indications la tension se relâchait en Ukraine. Mais l’écrasement de l’avion a montré que tel n’est pas le cas.

Revenant au sujet de la présente séance, je renouvelle l’appel lancé aux groupes armés à mettre fin à la violence. Il ne doit plus y avoir de mesures unilatérales, de nouvelles violations des droits de l’homme. Cela ne fait qu’aggraver la crise, empirer la situation, surtout pour la population civile et les innocents.

Nous rappelons la nécessité de respecter dûment la conduite par l’Ukraine de ses affaires intérieures, sans ingérence militaire, politique ou économique. L’Argentine cherche à promouvoir le plein respect par chacun des principes du droit international et des droits de l’homme, tels qu’inscrits dans la Charte des Nations Unies.

Nous traversons des moments douloureux et difficiles. C’est pourquoi l’Argentine appelle à la prudence. Nous ne parlerons pas le langage des différends géopolitiques, nous ne rejetterons pas la faute sur les uns ou les autres. L’heure est à la douleur, à la réflexion et à la recherche urgente de la vérité sur ce qui est arrivé, ainsi qu’à l’identification des responsables. Que les victimes reposent en paix.

Mme Ogwu (Nigéria) (parle en anglais) : Tout d’abord je veux dire à nos collègues dont des compatriotes ont péri que nous exprimons nos plus sincères condoléances à leurs familles, à vos concitoyens et vos gouvernements.

Hier à midi, le monde a vu avec horreur abattre l’avion de ligne malaisien. Ce qui est arrivé hier était comme une apocalypse qui marquait la fin du monde. Je crois que l’Ambassadeur Power en a donné une image assez voisine. Le spectacle est décrit aux chapitres 8 et 9 du Livre de l’Apocalypse – une pluie de feu mêlée de sang est tombée sur la Terre ; le soleil et l’air étaient assombris. C’est ce que j’ai vu hier.

Quelles que soient nos croyances religieuses, ce scénario peut devenir une prophétie qui s’inscrira dans les faits si les États continuent délibérément d’ouvrir ou de soutenir des guerres et conflits dans tous les coins du monde. Voici ce qui arrivera : le monde va s’autodétruire. Cela suffit, c’est plus qu’assez.

Le fait que cet accident est survenu alors que l’avion survolait l’est de l’Ukraine, depuis quelque temps zone de conflit, indique qu’il peut être lié d’une manière ou d’une autre à ce conflit. Mais ce n’est pas l’heure de rejeter la faute sur tel ou tel.

S’il est établi que l’avion a été abattu délibérément, cela marquera une nouvelle dimension de la crise ukrainienne, dimension qui représente une grave menace à la sécurité de l’aviation civile internationale.

À ce moment, il est d’importance critique que les faits soient établis avec certitude, sans passion. À cet égard, nous voudrions exprimer notre plein appui à la conduite d’une enquête indépendante, internationale, comme l’a demandé le Secrétaire général.

Notant que l’avion a été abattu dans une zone sous le contrôle des groupes armés rebelles, nous les exhortons à offrir à l’enquête une coopération totale et inconditionnelle.

Nous avons la certitude que sans le conflit en cours en Ukraine, sans l’insécurité et le chaos engendrés par les activités des groupes rebelles dans l’est du pays, ce tragique accident ne se serait pas produit.

Nous tenons à renouveler notre appel à une cessation des hostilités en Ukraine et à un retour au dialogue et à la négociation, dans la cadre de la déclaration de Genève du 17 avril et des entretiens quadripartites du 2 juin à Berlin.

Trouvons ensemble une solution à ce problème. Finissons-en ensemble avec ce théâtre d’opérations. avant que ses flammes ne se réverbèrent en d’autres parties du monde.

M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : D’abord, nous voudrions exprimer nos sincères condoléances aux familles et amis endeuillés des passagers et de l’équipage de l’appareil de Malaysia Airlines qui s’est écrasé près de Donetsk, ainsi qu’aux gouvernements des pays dont les ressortissants figurent sur la liste des victimes de la tragédie. Une enquête impartiale et publique s’impose. L’enquête ne doit faire l’objet d’aucune pression, ni de tentatives visant à préjuger de son issue par de vagues déclarations ou des allégations sans fondement. Étant donnée la complexité de la situation, nous croyons qu’il serait opportun de créer une commission internationale sous l’égide de l’Organisation de l’aviation civile internationale.

Je suis certain que toute personne normale voudrait d’abord poser la question de savoir ce qui a poussé un contrôleur ukrainien du trafic aérien à aiguiller un appareil de ligne vers un secteur d’affrontements armés, où actuellement sont frappés des objectifs civils, entre autres choses, et où des systèmes de défense antiaérienne sont en action.Garantir la sécurité de l’aviation civile dans son espace aérien relève de la responsabilité de tout État, conformément aux normes internationales. L’État au-dessus du territoire duquel un vol est planifié doit communiquer l’information nécessaire pour en garantir la sécurité.

Le droit international prévoit la possibilité pour un État d’interdire en temps utile les vols dans les zones jugées dangereuses. Il semble qu’une enquête soit nécessaire non seulement sur la catastrophe, mais aussi sur la mesure dans laquelle les autorités ukrainiennes compétentes en la matière ont rempli leurs obligations d’appliquer la législation pertinente et ont fait tout le nécessaire pour garantir que la campagne militaire de Kiev n’entraînerait pas de catastrophes.

Aujourd’hui, Kiev a annoncé la fermeture totale de son espace aérien afin de mener une opération dite antiterroriste. Cela ne pouvait-il pas être fait plus tôt, au lieu d’attendre que des centaines de victimes soient à déplorer ?

Au cours de notre précédente séance consacrée à l’Ukraine (voir S/PV.7205), certains membres occidentaux du Conseil ont évoqué la retenue avec laquelle les autorités de Kiev faisaient usage de la force. Cette « retenue » s’illustre parfaitement à présent. Des opérations de pilonnage ont été menées au moyen d’attaques aériennes, de chars d’artillerie et de tirs de roquettes aveugles à Donetsk et à Lougansk. Cette opération punitive est de plus en plus destructrice pour la population et les infrastructures civiles. Des dizaines de civils ont été tués, dont des enfants. Des réseaux de transport, des installations publiques et des centres médicaux ont été détruits.

Selon les chiffres du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), plus de 4,5 millions de personnes vivent dans l’est de l’Ukraine, où ont lieu les affrontements. Pourtant, Kiev n’a procédé à aucune évacuation de civils dans ces régions. Au contraire, ces personnes, livrées à elles- mêmes, doivent risquer leur vie pour quitter les zones des combats militaires. De toutes parts, on signale que les forces armées ukrainiennes s’en prennent délibérément aux personnes qui tentent de fuir la guerre, notamment pour chercher refuge en Russie. À ce jour, la Russie a accueilli plus de 110 000 réfugiés de l’est de l’Ukraine et ce chiffre augmente chaque jour. Les faits que je viens d’énoncer ont été confirmés par le HCR.

Dans ce contexte, six régions russes ont proclamé l’état d’urgence. Les tirs d’artillerie et de mortier des forces armées ukrainiennes visant le territoire russe sont désormais des occurrences régulières. Leurs cibles sont notamment des points de passage transfrontaliers et des civils pacifiques. Plusieurs de nos concitoyens ont été tués ou blessés. Nous considérons ces provocations comme des actes d’agression de l’Ukraine à l’encontre des citoyens et du territoire souverain de la Russie. Nous en rejetons l’entière responsabilité sur les autorités ukrainiennes et appelons la partie ukrainienne à prendre des mesures énergiques pour empêcher de tels incidents de se reproduire à l’avenir.

Nous avons prévenu à maintes reprises des risques qu’il y avait à vouloir régler par la force la crise politique en Ukraine. Nous avons appelé à un dialogue sans exclusive et fondé sur le respect mutuel entre toutes les grandes forces politiques de Kiev et des régions. Pourtant, les autorités ukrainiennes ont à chaque fois fait le mauvaix choix, avec l’appui de leurs amis occidentaux. Je veux évidemment parler ici des États-Unis, qui ont poussé l’Ukraine à l’escalade de la crise. À présent, ils tentent de faire porter à la Russie la responsabilité de la catastrophe à laquelle la direction choisie a abouti.

Kiev a balayé l’accord du 21 février, ainsi que la feuille de route proposée par le Président en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). La déclaration de Genève du 17 avril et la déclaration de Berlin du 2 juillet ont elles aussi été ignorées, alors même que les représentants du Gouvernement ukrainien ont participé à leur rédaction. Le plan de paix du Président Porochenko, largement acclamé, est devenu un prétexte à des préparatifs militaires et au déploiement d’une opération punitive de grande envergure.

Les autorités ukrainiennes ont choisi de faire taire les dissidences. Dès les lendemains du soulèvement de février, Kiev a commencé à qualifier les dissidents de « bandits » et de « terroristes », puis à les traiter de « sous-humains » ou « d’insectes ». Est-ce une coïncidence si la cinquième chaîne, chaîne de télévision dont M. Porochenko est propriétaire, a diffusé une publicité qui montrait des insectes en train de se faire écraser alors qu’une carte de l’est de l’Ukraine s’affichait en arrière-plan ? Des manifestants ont été massacrés à Marioupol et à Odessa. Le bilan des victimes continue de s’alourdir et aucune enquête digne de ce nom n’a été effectuée. Des dizaines d’opposants politiques à Kiev sont aujourd’hui portés disparus.

La réforme de la Constitution promise est préparée en secret. Il semble que Kiev veuille rallier l’appui des structures européennes avant de le transmettre à quelques heureux privilégiés de son entourage. En effet, selon les informations dont nous disposons, la redistribution des pouvoirs du Président vers le Parlement, la revendication qui est à l’origine des combats qui ont fait rage sur la place Maïdan pendant des mois, n’est en fait pas prévue. Est-il vraiment surprenant que ce type de stratégie ait engendré la violence et que la population de plusieurs régions du pays n’accepte pas cette situation ? Les représentants politiques de ces régions sont bien connus. Cela fait longtemps qu’ils évoluent dans le paysage politique ukrainien et les manifestations de ces récents mois les ont propulsés sur le devant de la scène. Les faire participer au dialogue aurait pu prévenir une nouvelle escalade de la crise actuelle, déjà grave, mais Kiev a préféré les arrêter, les brutaliser et les menacer.

Face à la crise ukrainienne, les institutions internationales ne se sont pas montrées à la hauteur. La faute en revient à nos partenaires occidentaux. Beaucoup de paroles ont été prononcées, mais peu d’actes ont été posés pour régler la situation. Nous travaillons d’arrache-pied au sein de l’OSCE. Au Conseil de sécurité, la délégation russe a par trois fois proposé d’entamer sérieusement la rédaction d’un projet de résolution qui permettrait d’enrayer la violence en Ukraine. Mais nos homologues occidentaux ont répondu à nos propositions avec un cynisme flagrant. Il semble que tous les actes arbitraires du Gouvernement soient accueillis favorablement, mais c’est en définitive une nation tout entière – la population ukrainienne – qui est la victime des ambitions géopolitiques du régime ukrainien.

L’opération punitive menée dans l’est de l’Ukraine doit être stoppée immédiatement. Un règlement négocié de la crise est toujours possible, mais il faut pour cela faire le bon choix.

M. Barros Melet (Chili) (parle en espagnol) : Je voudrais, pour commencer, exprimer toute l’indignation de mon pays face à l’attaque perpétrée hier, au cours de laquelle le vol MH 17 de la Malaysia Airlines a été abattu dans l’est de l’Ukraine, faisant 298 victimes, dont des enfants. Nous condamnons cet acte avec la plus grande fermeté et nous exprimons notre solidarité et nos condoléances aux proches des victimes et aux gouvernements des pays qui ont perdu des ressortissants. Aucune cause ne saurait justifier un acte de cette gravité et de cette cruauté.

Nous suivons avec attention les informations qui commencent à apparaître sur ce qui s’est passé et, à cet égard, nous demandons que soit ouverte une enquête approfondie, transparente et indépendante, conforme aux normes internationales de l’aviation civile, afin que les responsables aient à répondre de leurs actes. De la même manière, il convient que tout soit mis en œuvre, avec les garanties de sécurité qui s’imposent, pour permettre aux enquêteurs d’avoir immédiatement accès au site de la catastrophe, afin qu’ils puissent en déterminer la cause avec certitude.

Ce type d’acte ne saurait demeurer impuni et ses auteurs doivent être traduits en justice. Les proches des victimes ont le droit de connaître la vérité. C’est pourquoi nous invitons tous les États, conformément à leurs obligations en vertu du droit international et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, à coopérer activement avec les autorités compétentes.

La destruction en vol de cet avion, dans une zone marquée par de fortes tensions politiques, risque d’entraîner une intensification de la violence actuelle et l’implication de nouveaux acteurs. C’est pourquoi aujourd’hui, plus que jamais, nous appelons avec insistance les parties à faire preuve de toute la retenue possible afin de contenir la crise qui sévit dans l’est de l’Ukraine.

M. Oh Joon (République de Corée) (parle en anglais) : Je remercie le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de son exposé sur l’accident tragique qui s’est produit en Ukraine.

La République de Corée exprime toute sa consternation et son indignation face à la destruction en vol d’un avion de ligne de la Malaysia Airlines dans l’est de l’Ukraine hier. Nous déplorons la mort des près de 300 civils innocents qui se trouvaient à bord de l’appareil. Au nom du peuple et du Gouvernement coréens, j’exprime mes plus sincères condoléances aux peuples et aux Gouvernements de l’Allemagne, de l’Australie, de la Belgique, du Canada, de l’Indonésie, de la Malaisie, des Pays-Bas, des Philippines et du Royaume-Uni, ainsi qu’aux autres pays touchés. Nous sommes de tout cœur avec les familles des victimes en ces moments difficiles.

Une enquête internationale exhaustive et indépendante, à laquelle participera notamment l’Organisation de l’aviation civile internationale, doit être menée immédiatement. Quels qu’ils soient, les responsables de cette tragédie doivent avoir à rendre des comptes. Si cet accident a bien été causé par une attaque délibérée, la République de Corée, qui a elle-même été victime d’hostilités contre une compagnie aérienne civile, estime que la communauté internationale doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour traduire les responsables en justice dans les meilleurs délais. Nul ne doit pouvoir, quelles que soient les raisons, tuer impunément tant d’innocents qui n’avaient rien à faire avec la situation sur le terrain.

Nous appuyons les efforts en cours visant à rétablir la stabilité en Ukraine, en particulier les efforts de l’ONU, de l’Union européenne, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et des partenaires bilatéraux. Ces efforts, qui visent à apaiser la violence dans l’est de l’Ukraine, doivent se poursuivre en dépit de tous les redoutables obstacles.

Le Président (parle en anglais) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentant du Rwanda.

Je remercie le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Jeffrey Feltman, de sa disponibilité et de son exposé détaillé, préparé en dépit du délai très court.

Je tiens tout d’abord à exprimer ma profonde tristesse suite au décès de 298 personnes, dont 80 enfants, qui se trouvaient à bord du vol MH 17 de la compagnie Malaysia Airlines abattu au-dessus de l’est de l’Ukraine. Au nom du Gouvernement rwandais, je présente mes plus sincères condoléances aux familles qui ont perdu des proches ainsi qu’aux peuples et aux gouvernements des pays d’origine des victimes. La mort de ces civils innocents dépasse l’entendement. Ces vies ont été fauchées au beau milieu d’une crise au sujet de laquelle le Conseil s’est montré incapable d’agir depuis qu’elle a commencé en février.

Le fait que cet avion civil a été pris pour cible a pour effet que la crise ukrainienne n’est plus un conflit entre l’armée ukrainienne et les séparatistes armés. Le conflit a franchi les limites en mettant en danger notre vie à tous, comme cela a été le cas des hommes, des femmes et des enfants de différentes nationalités qui se trouvaient à bord du vol MH 17. Nous condamnons dans les termes les plus vifs cette attaque insensée et réclamons une enquête internationale exhaustive et indépendante en application des directives internationales, comme convenu dans la déclaration à la presse adoptée ce matin. Cette enquête devrait permettre d’établir les responsabilités afin que les coupables aient à rendre des comptes. Dans ce contexte, nous exhortons par ailleurs toutes les parties à cesser le feu, à coopérer pleinement dans le cadre de l’enquête et à garantir un accès sans entrave au lieu où l’avion s’est écrasé pour permettre aux enquêteurs internationaux de faire leur travail.

Nous notons que l’acte criminel commis hier fait suite à la prise pour cible d’un avion de combat ukrainien mercredi et d’un avion transportant du matériel militaire lundi. L’emploi fréquent de missiles sol-air au cours des derniers mois pose la question de l’accès à ces armes, qui, comme nous l’avons maintenant constaté, peuvent abattre un avion civil en plein vol à plus de 9 000 mètres d’altitude. En conséquence, le Conseil de sécurité et la communauté internationale dans son ensemble ne peuvent plus se permettre de détourner les yeux de ce problème.

Il est regrettable que cet événement tragique se soit produit à un moment où des efforts nationaux et régionaux sont en cours en vue de trouver une solution politique et diplomatique à la crise ukrainienne. Cet acte compromet des initiatives importantes du groupe de contact trilatéral composé de hauts représentants de l’Ukraine, de la Fédération de Russie et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui déployaient tous les efforts nécessaires pour favoriser la reprise des consultations avec les séparatistes dans l’est de l’Ukraine. Mardi, le groupe a reconfirmé son appui au plan de paix du Président Petro Porochenko et sa volonté d’instaurer un cessez-le-feu durable, exprimée dans la déclaration commune adoptée le 2 juillet à Berlin par les Ministres des affaires étrangères de l’Allemagne, de la France, de la Fédération de Russie et de l’Ukraine.

Pour terminer, je demande une fois de plus aux groupes armés de respecter l’unité, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Ils doivent déposer les armes et participer à un dialogue constructif avec le Gouvernement ukrainien. De même, nous demandons instamment à toutes les parties de cesser immédiatement les hostilités et d’appuyer les efforts en cours en vue d’apaiser la crise et de rétablir la paix en Ukraine et dans la région.

Le fait qu’un avion civil a été abattu en plein conflit dans l’est de l’Ukraine est un rappel brutal de la responsabilité morale qui incombe aux membres du Conseil de sécurité de mettre de côté leurs divergences au sujet de cette crise, d’obliger les auteurs de cet acte criminel à rendre des comptes et de remplir leur mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Je reprends à présent mes fonctions de Président du Conseil.

Je donne maintenant la parole au représentant de l’Ukraine.

M. Sergeyev (Ukraine) (parle en anglais) : Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir convoqué la présente séance. Je remercie également le Secrétaire général adjoint, M. Jeffrey Feltman, de son exposé.

Je tiens tout d’abord à exprimer la tristesse de mon gouvernement et à présenter ses plus sincères condoléances à toutes les missions des pays dont des ressortissants ont été tués dans l’écrasement tragique du vol MH 17 de la compagnie Malaysia Airlines. L’Ukraine partage la douleur et le deuil des familles et des amis des victimes. Mon pays exprime sa profonde sympathie à l’égard des personnes touchées par cet accident. Aujourd’hui, toute l’Ukraine est en deuil. Les Ukrainiens se rendent aux ambassades des Pays-Bas, de la Malaisie, de l’Australie, de l’Indonésie, du Royaume- Uni, de l’Allemagne, de la Belgique, des Philippines et du Canada pour déposer des fleurs et exprimer leur tristesse.

Les autorités ukrainiennes ont déjà appelé des organisations internationales, notamment l’Organisation de l’aviation civile internationale, Interpol et d’autres, à entreprendre une enquête internationale approfondie pour faire la lumière sur cet accident. Nous sommes convaincus qu’une enquête impartiale révélera la vérité et permettra de punir tous les responsables.

Hier, les dirigeants ukrainiens ont donné une première version de ce qui était arrivé à cet avion : c’était un acte terroriste. La position de notre gouvernement est fondée sur des informations convergentes fournies par divers organismes de renseignement et sources publiques, qui montrent que l’avion a été abattu au-dessus du territoire contrôlé par des terroristes. Deux avions ukrainiens ont été abattus près du lieu de l’accident plusieurs jours auparavant, et les chefs terroristes ont revendiqué la responsabilité de ces actes. Des conversations téléphoniques interceptées entre les chefs terroristes et leur coordonnateur – le colonel Vassili Geranin, du service de renseignement militaire russe – confirment que des terroristes sont à l’origine de ce crime. Cette conversation a été enregistrée, et le Secrétariat a promis de la transmettre aux membres du Conseil de sécurité.

Immédiatement après l’accident, le chef militaire des terroristes, Igor Girkin Strelkov, d’origine russe, se vantait sur les réseaux sociaux d’avoir abattu ce qu’il croyait être un avion de combat ukrainien, en affirmant ce qui suit.

« À Torez, en Ukraine, un avion An-26 a été abattu. Il s’est écrasé quelque part non loin de la mine de charbon Progrès. Nous avions averti tout le monde de ne pas survoler notre espace aérien ».

Il n’est possible de viser et d’abattre un avion à une altitude de 10 kilomètres qu’à l’aide d’un système anti- aérien perfectionné, tel que le système de missiles Buk SA-11 ou un autre du même genre. Or, il a été confirmé, aussi bien grâce à l’interception de communications radio des chefs terroristes qu’avec des photographies et des enregistrements vidéo obtenus auprès de citoyens de localités avoisinantes, que les terroristes détiennent au moins deux systèmes de missiles Buk SA-11. La question est de savoir qui leur a fourni ces systèmes complexes de défense anti-aérienne. Je répète que les interceptions radio, les photographies et les aveux des terroristes arrêtés, dont ceux de deux ressortissants russes récemment appréhendés alors qu’ils allaient rejoindre les terroristes en tant qu’experts militaires, indiquent que le système Buk provient de Russie. Tous ces éléments, ainsi que d’autres preuves et informations, seront versés au dossier de l’enquête internationale.

Cette tragédie n’aurait pu se produire si la Russie n’avait pas soutenu les terroristes et si elle n’avait pas mis à leur disposition un système antiaérien sophistiqué. En de nombreuses occasions, la Mission ukrainienne auprès de l’ONU s’est adressée au Conseil de sécurité et à l’ensemble des États Membres de l’Organisation pour les informer de l’appui de la Russie aux terroristes basés dans l’est de l’Ukraine. Hier encore, nous fournissions de nouvelles preuves aux médias accrédités auprès de l’ONU. L’approvisionnement considérable en armes d’origine russe utilisées par les terroristes du Donbass, qui a été attesté, preuves à l’appui, par les services de renseignement ukrainiens, les médias et le grand public, n’est plus un secret pour personne. Une vaste exposition d’armes modernes confisquées par les forces militaires ukrainiennes à des groupes terroristes a été organisée à Kiev il y a quelques jours. Dans la plupart des cas, les unités militaires de l’armée russe ayant fourni ces armes sont nommément identifiées. Ces informations sont disponibles sur le site Internet de la Mission ukrainienne, ainsi que sur le site Internet de l’ONU, où ma conférence de presse d’hier a été mise en ligne.

Nous avons exprimé à maintes reprises dans cette salle notre préoccupation que des ressortissants russes participent directement à la déstabilisation de la situation dans l’est de l’Ukraine. Aujourd’hui, certains collègues nous ont informés que les dirigeants de Lougansk et de Donetsk avaient proclamé des républiques. Tous leurs commandants militaires sont d’origine russe. Les groupes armés de combattants illégaux intensifient leurs efforts de recrutement en Russie. Ils recherchent des volontaires ayant l’expérience du maniement des armes lourdes, comme les chars d’assaut et les systèmes de défense anti-aérienne. La Russie a autorisé la création de bureaux de recrutement à Moscou et à Rostov, qui recrutent ouvertement des ressortissants russes pour les envoyer dans les régions orientales de l’Ukraine. Hier, pendant la conférence de presse, nous avons désigné tous les sites web qui recrutent. Plusieurs groupes de formations paramilitaires russes, y compris des Cosaques russes, soutiennent activement les terroristes s’agissant de semer la terreur et le chaos dans l’est de l’Ukraine.

Pendant toute la durée de ces affrontements créés de toutes pièces et soutenus par la Russie, celle- ci n’a jamais appelé publiquement ses concitoyens à ne pas se joindre aux groupes armés illégaux qui opèrent sur le territoire ukrainien. Ce fait est en soi éloquent. Le paragraphe 2 de l’article 208 du Code pénal de la Fédération de Russie déclare ce qui suit :

« La participation à des groupes armés qui ne sont pas régis par le droit fédéral, de même que la participation à ces groupes armés sur le territoire d’un État étranger à des fins contraires aux intérêts de la Fédération de Russie, est punissable d’un emprisonnement de 5 à 10 ans ».

Puisqu’aucun ressortissant russe n’a été traduit en justice pour ces actions, il n’y a qu’une seule conclusion à en tirer : faire partie de groupes armés illégaux sur le territoire ukrainien n’est pas contraire aux intérêts de la Fédération de Russie.

La situation à la frontière russo-ukrainienne s’est considérablement détériorée ces derniers jours en raison de violations systématiques du côté russe de la frontière, ainsi que d’actes de provocation perpétrés par des groupes terroristes armés dans les zones frontalières des régions de Donetsk et de Lougansk. Plusieurs fois par jour, des colonnes de véhicules militaires et de mercenaires russes tentent de franchir la frontière ukrainienne du côté russe. Ces tentatives sont activement facilitées par les unités russes de protection des frontières. Les forces antiterroristes ukrainiennes ont été bombardées à plusieurs reprises depuis le territoire russe. L’Ukraine a des preuves bien établies de tous ces faits afin d’aider la communauté internationale à intervenir de manière appropriée.

Le nombre de provocations à la frontière russo- ukrainienne s’est considérablement accru. Les groupes armés illégaux tirent systématiquement en direction du territoire russe afin de faire faussement croire à des tirs de l’armée ukrainienne, ce qui a entraîné la mort d’un citoyen russe. La partie russe a accusé les forces armées ukrainiennes d’avoir bombardé le 28 juin le territoire russe, à savoir la mine n°24 du village de Vasetskaya dans le district de Krasnosulynsk, non loin de Rostov, ainsi que le poste frontière de Goukovo. Les forces armées ukrainiennes n’ont jamais attaqué le territoire de la Russie ni tiré dans sa direction. Toutes ces provocations sont commises par des terroristes prorusses dans le but de trouver un prétexte à une nouvelle escalade. La déclaration faite aujourd’hui par le Ministre russe des affaires étrangères, M. Sergey Lavrov, relativement à l’éventualité de frappes contre le territoire ukrainien sonne comme une nouvelle provocation.

Aujourd’hui, certains collègues ont présenté des éléments de preuve de la détérioration de la situation à la frontière russo-ukrainienne. Tous les jours du mois de juillet, nous avons été témoins de ces violations, y compris la destruction d’avions de combat ukrainiens.

Je voudrais saisir l’occasion pour attirer de nouveau l’attention des membres du Conseil de sécurité sur le fait que la Russie ne cesse de redéployer de nouvelles forces tout près de la frontière ukrainienne. Depuis le 14 juillet, le nombre total de groupes armés russes dans les zones à la frontière de l’Ukraine a sensiblement augmenté. Ils se composent de 33 groupes de bataillon tactiques, composés d’au moins 40000 soldats, qui encerclent directement l’Ukraine, soit jusqu’à 18000 soldats en Transnistrie et près de 21000 sur le territoire occupé de la Crimée. Ces agissements et d’autres similaires constituent une violation flagrante par la Russie des obligations qui lui incombent en vertu de la Charte des Nations Unies et des autres principes et normes universellement reconnus du droit international. Ces actions sont incompatibles avec les obligations de la Fédération de Russie au regard de l’accord de Genève du 17 avril et de la déclaration de Berlin du 2 juin.

Malgré tous les efforts de la communauté internationale, étayés par la ferme volonté ukrainienne de prévenir une nouvelle escalade et renforcés par le plan de paix du Président, les terroristes étrangers et leurs partisans en Russie n’ont pas l’intention de nous laisser en paix et de déposer les armes. Nous continuons de lutter contre de puissants saboteurs militaires, prêts à détruire l’Ukraine pour y semer l’anarchie et l’instabilité.

L’Ukraine exige que la partie russe mette immédiatement fin à ses provocations à la frontière avec l’Ukraine, cesse d’entraver les efforts déployés par la partie ukrainienne et la communauté internationale pour mettre fin au terrorisme et à la violence dans les régions de Donetsk et de Lougansk, revienne au plan de paix du Président Porochenko, retire ses forces à la frontière ukrainienne, et cesse de menacer la paix et la sécurité dans notre pays, dans la région et dans le monde entier.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant de la Malaisie.

M. Haniff (Malaisie) (parle en anglais) : Permettez-moi d’emblée de vous féliciter, Monsieur le Président, ainsi que la République du Rwanda, pour votre accession à la présidence du Conseil de sécurité pour le mois en cours. Je vous remercie d’avoir convoqué cette séance d’urgence du Conseil sur l’Ukraine. Je tiens également à remercier le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Jeffrey Feltman, de l’exposé qu’il a fait tout à l’heure. Pour ma délégation, la convocation de la présente séance tombe effectivement à point nommé, étant donné l’incident tragique dont a été victime le vol MH 17 de Malaysia Airlines.

La Malaisie est extrêmement touchée par les condoléances, la sympathie et le soutien exprimés dans le monde entier. En ce moment difficile, nous voudrions également exprimer notre profonde tristesse et exprimer toute notre sympathie et toutes nos condoléances aux familles et amis des personnes qui se trouvaient à bord du vol MH 17.

La Malaisie est en état de choc, elle est affolée par la destruction en vol du MH 17. Le vol prévu, qui a quitté Amsterdam hier après-midi, heure locale, aurait dû arriver à l’aéroport international de Kuala Lumpur ce matin. Malheureusement, il s’est écrasé près de la ville de Torez, dans la région de Donetsk, dans l’est de l’Ukraine.

Deux cent quatre-vingt-dix-huit personnes ont péri dans cet incident. Parmi ceux qui ont perdu la vie, 189 étaient originaires des Pays-Bas, 44 de Malaisie, 27 d’Australie, 12 d’Indonésie, neuf du Royaume- Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, quatre d’Allemagne, quatre de Belgique, trois des Philippines, une du Canada et une de Nouvelle-Zélande. La nationalité de quatre autres passagers n’a pas encore pu être confirmée.

La ligne Amsterdam-Kuala Lumpur, qui traverse régulièrement l’espace aérien ukrainien, était une des lignes les plus demandées de la compagnie Malaysia Airlines. D’après l’Association du transport aérien international, au moment où le contact avec le vol MH 17 a été perdu, l’avion naviguait dans un espace aérien non soumis à restrictions. En outre, l’Association du transport aérien international a déclaré que ce couloir aérien était sûr. La compagnie Malaysia Airlines a également confirmé que l’avion n’avait pas lancé d’appels de détresse.

Le Gouvernement malaisien a pris des mesures immédiates pour dépêcher à Kiev une équipe d’assistance et de secours spéciale malaisienne. Cette équipe comprend des membres du personnel des forces aériennes royales de Malaisie, de la Malaysia Airlines, du Ministère de l’aviation civile ainsi que du personnel médical. Par ailleurs, 40 membres du personnel de la Malaysia Airlines ont été dépêchés à Amsterdam pour soutenir les familles et les proches des victimes. À cet égard, la Malaisie accueille avec satisfaction les promesses d’appui et d’assistance faites par d’autres pays pour contribuer aux efforts de recherche, de secours, de récupération des différents éléments et d’enquête.

Hier, le Premier Ministre, M. Razak, s’est entretenu avec le Président ukrainien, M. Porochenko, le Premier Ministre néerlandais, M. Rutte, le Président des États-Unis d’Amérique, M. Obama, et le Président de la Fédération de Russie, M. Poutine. Dans le cadre de ces conversations, notre Premier Ministre a souligné que, si le vol MH 17 a bel et bien été abattu, les auteurs de cet acte devront être rapidement traduits en justice. La Malaisie condamne dans les termes les plus énergiques un tel acte, qui constitue une violation flagrante du droit international et un outrage à la décence humaine.

La Malaisie exige une enquête internationale approfondie, indépendante et transparente sur cet incident, avec la participation des autorités internationales compétentes, y compris l’Organisation de l’aviation civile internationale. J’informe le Conseil de sécurité que la Malaisie a été officiellement invitée par les autorités ukrainiennes à participer à cette enquête et que nous enverrons deux représentants à Kiev dans les meilleurs délais.

Nous exhortons les parties au conflit dans la zone du lieu de la catastrophe à coopérer pleinement. Une telle coopération exige de faciliter l’accès libre et en toute sécurité des enquêteurs et des travailleurs humanitaires pour qu’ils puissent mener à bien leurs tâches, y compris la collecte des données pertinentes, des éléments de preuve, des dépouilles et des effets personnels des victimes.

Nous tenons à souligner qu’il ne doit y avoir aucune immixtion sur le lieu de la catastrophe et qu’aucun débris ne doit être déplacé de la zone, y compris les enregistreurs de vol, ou boîtes noires. L’intégrité du lieu de la catastrophe doit être préservée. La Malaisie demande également instamment au Conseil de sécurité de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire et des enquêteurs sur le lieu de la catastrophe afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs tâches et de leurs responsabilités.

Aucun autre fait n’est établi à ce stade, mais le fait que l’avion a peut-être été abattu rend cet incident encore plus douloureux pour nous. À nouveau, cela nous rappelle avec acuité de quelle manière l’escalade des différends et des menaces à la paix et à la sécurité internationales peut coûter la vie à des innocents de la manière la plus tragique et la plus insensée qui soit.

À cet égard, nous exhortons le Conseil de sécurité à renforcer son rôle de facilitateur d’un règlement pacifique du conflit entre la Russie et l’Ukraine afin d’empêcher qu’un nouvel incident aussi dramatique ne se reproduise.

Enfin, je voudrais réaffirmer, au nom du Gouvernement et du peuple malaisiens, notre profonde gratitude pour tout le soutien, la sympathie et la solidarité exprimés en cette période difficile et éprouvante.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant des Pays-Bas.

M. van Oosterom (Pays-Bas) (parle en anglais) : Je vous remercie, Monsieur le Président, de me donner l’occasion de transmettre un message adressé par le Ministre néerlandais des affaires étrangères en des circonstances exceptionnelles. Je remercie les membres du Conseil de sécurité de leurs paroles de compassion et de condoléances.

Hier, près de 300 hommes, femmes et enfants innocents ont perdu la vie à bord du vol MH 17 de la compagnie Malaysia Airlines, en provenance d’Amsterdam et à destination de Kuala Lumpur, quand l’avion s’est écrasé sur le sol ukrainien. Ce terrible incident a choqué le monde et profondément attristé tous les pays qui ont perdu des compatriotes. Nos pensées et nos prières vont à tous ceux qui pleurent la mort d’êtres chers, quel que soit leur lieu de naissance.

Cent quatre-vingt-neuf victimes au moins sont de nationalité néerlandaise. Aujourd’hui, dans mon pays, le Royaume des Pays-Bas, des centaines de milliers de personnes pleurent la perte de leurs parents, enfants, êtres chers, amis et collègues. C’est une heure sombre de notre histoire nationale. Notre pays est sous le choc et en larmes. Mais notre pays est également uni dans sa détermination de faire éclater la vérité sur ce qui s’est passé.

Nous appelons toutes les parties susceptibles d’influer sur cette situation à assurer aux premiers intervenants comme aux enquêteurs un accès sans entraves au lieu de la catastrophe. Nous demandons au Conseil de sécurité, la plus haute autorité au monde, d’ordonner une enquête internationale approfondie, minutieuse et impartiale sur les circonstances exactes de la catastrophe du vol MH 17. Tous les éléments matériels pertinents recouvrrés sur place, y compris les boîtes noires de l’appareil, doivent être immédiatement mis à disposition des enquêteurs internationaux, et sans immixtion d’aucune sorte.

Si une enquête établit que cette tragédie est le résultat de l’emploi d’armes, les Pays-Bas condamneront cet acte abject dans les termes les plus énergiques et exigeront que tous les responsables, directs et indirects, rendent compte de leurs actes et soient traduits en justice. Nous en avons l’obligation morale, en mémoire des victimes, et le devoir, au regard du droit international et de la justice. Mon pays n’aura de cesse que justice soit rendue.

Nous voulons ramener les dépouilles des victimes auprès de leurs proches le plus rapidement possible. Nous demandons à l’ONU de nous aider à le faire. Ceux qui sont en deuil, quel que soit l’endroit où ils vivent, méritent de savoir ce qui a causé la mort de leurs proches. Nos pays méritent de savoir ce qui s’est passé. Le monde a le droit de savoir.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant de l’Indonésie.

M. Percaya (Indonésie) (parle en anglais) : Je remercie le Président d’avoir organisé la séance d’aujourd’hui.

D’emblée, je tiens à exprimer, au nom du Gouvernement et du peuple indonésiens, nos plus sincères condoléances à tous les pays touchés, en particulier à la Malaisie, pays avec lequel nous entretenons des relations de bon voisinage, suite à la mort des 298 passagers civils et membres de l’équipage qui se trouvaient à bord du vol MH 17 de la compagnie Malaysia Airlines, qui s’est écrasé hier alors qu’il survolait l’est de l’Ukraine. Comme le Conseil le sait sans doute, 12 ressortissants indonésiens figurent au nombre des victimes. Nos pensées et nos prières vont vont aux familles des victimes. Je voudrais aussi saisir cette occasion pour remercier sincèrement les délégations qui ont exprimé leur sympathie et leurs condoléances à l’Indonésie.

Selon divers éléments et sources d’information, l’avion aurait été abattu par un missile sol-air. Si tel est vraiment le cas, un acte aussi odieux équivaut à une grave violation du droit international, en particulier du droit international humanitaire. À cet égard, l’Indonésie appelle le Conseil de sécurité à prendre immédiatement des mesures pour permettre qu’une enquête internationale approfondie, transparente et indépendante soit menée sur ce terrible incident.

L’Indonésie est prête à se joindre à une telle enquête et à l’appuyer. Si l’enquête arrive à la conclusion que le crash a été causé intentionnellement par des facteurs humains, que ce soit un tir de missile ou autre, l’Indonésie exige que les auteurs d’un crime aussi odieux et inhumain soient traduits en justice et que la loi soit pleinement appliquée dans toute sa rigueur.

À titre de précaution, le Président de mon pays a instruit hier toutes les compagnies aériennes indonésiennes d’exercer la plus grande prudence et de contourner l’espace aérien situé au-dessus et aux alentours des zones de conflit, notamment en Ukraine.

En conclusion, en tant que membre de la famille de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, l’Indonésie réaffirme sa solidarité avec le Gouvernement et le peuple malaisiens, ainsi qu’avec tous les pays dont des ressortissants ont perdu la vie dans cette tragédie.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant des Philippines.

M. Cabactulan (Philippines) (parle en anglais) : Je vous remercie, Monsieur le Président, d’avoir convoqué cette séance d’urgence.

C’est avec une profonde tristesse que les Philippines ont appris que le vol MH 17 de la Malaysia Airlines a été abatu au-dessus de l’est de l’Ukraine hier, 17 juillet. La destruction en vol de cet avion de la Malaysia Airlines est un événement des plus bouleversants et des plus inquiétants. Le vol MH 17 de la Malaysia Airlines avait à son bord 298 vies irremplaçables. Aujourd’hui, nous sommes unis dans la douleur. Les Philippines adressent leurs plus sincères condoléances aux familles des victimes de cet accident ainsi qu’aux gouvernements et peuples touchés. Aujourd’hui, nous dénonçons à l’unisson cet accident regrettable. Les Philippines condamnent dans les termes les plus fermes la destruction en vol de l’appareil de la Malaysia Airlines.

Cet accident est révoltant, en particulier compte tenu des informations troublantes et déconcertantes indiquant que le crash a été causé par un tir ciblé. Les Philippines se joignent à l’appel demandant à sécuriser immédiatement le site du crash, à lancer une enquête internationale indépendante et transparente sur l’accident et à fournir aux enquêteurs un accès sûr et sans entrave à la scène du crash pour leur permettre de mener rapidement à bien leur enquête et d’en diffuser les résultats.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole à la représentante de la Belgique.

Mme Frankinet (Belgique) : Je vous remercie, Monsieur le Président, de me donner l’occasion de participer à la présente séance. Je remercie également le Secrétaire général adjoint, M. Feltman, de son exposé d’information.

Tout d’abord, au nom du Gouvernement et des citoyens belges, je voudrais exprimer mes condoléances les plus sincères au Gouvernement malaisien, ainsi qu’aux familles et aux amis des 298 personnes qui étaient à bord de l’avion de la Malaysia Airlines, abattu au-dessus de l’est de l’Ukraine. Parmi les victimes se trouvaient cinq ressortissants belges. Nos pensées vont à tous ceux qui sont en deuil aujourd’hui, et en particulier aux familles et aux amis ainsi qu’au Gouvernement des Pays-Bas, un pays qui nous est proche.

Comme d’autres, la Belgique lance un appel à toutes les parties pour qu’elles assurent un accès complet au site de la catastrophe, non seulement pour les équipes de secours mais aussi pour les enquêteurs. Une enquête internationale complète, minutieuse et impartiale doit avoir lieu pour déterminer les circonstances exactes de la catastrophe du vol MH 17.

À cet égard, la Belgique soutient la proposition formulée par l’Australie que le Conseil de sécurité adopte une résolution qui souligne la nécessité que l’accès au site soit garanti et qu’une enquête internationale complète et indépendante ait lieu. Nous devons aux victimes et à leurs familles, mais aussi à nous-mêmes, de faire toute la lumière sur ce qui s’est passé hier dans l’est de l’Ukraine.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant du Canada.

M. Rischynski (Canada) : Nous vous remercions, Monsieur le Président, de nous donner la possibilité de prendre la parole même en cette journée de profonde tristesse pour toute la communauté internationale.

(l’orateur poursuit en anglais)

Les Canadiens sont bouleversés et attristés par les terribles pertes humaines causées par la destruction en vol du vol MH 17 de la Malaysia Airlines au-dessus de l’est de l’Ukraine. Tandis que les éléments indiquant que l’appareil a été abattu par un missile sol-air s’accumulent, nous sommes de plus en plus convaincus qu’il ne s’agit pas seulement d’une tragédie, mais aussi très probablement d’un crime révoltant perpétré contre plusieurs centaines de civils innocents de diverses nationalités.

Le Canada demande à toutes les parties au conflit en Ukraine de coopérer pleinement avec l’enquête internationale sur cet accident. Tant les autorités ukrainiennes que les experts internationaux doivent pouvoir avoir un accès sûr et sans entrave au site du crash, ainsi qu’à toutes les données et les preuves relatives à la destruction en vol de l’appareil. Nous félicitons le Gouvernement ukrainien d’avoir lancé une enquête, et nous remercions le peuple ukrainien de ses sincères condoléances à l’intention de tous les pays touchés par cette tragédie, dont le Canada. Le Canada est prêt à fournir tout l’appui possible pour aider les autorités à déterminer les causes du crash.

Le vol MH 17 de la Malaysia Airlines a été abattu dans une région de l’Ukraine en proie à un conflit armé. Il s’agit d’un conflit créé et entretenu par les actes de provocation militaires de la Russie à l’encontre de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de l’Ukraine. Nous demandons une fois encore à la Russie de cesser de soutenir politiquement, financièrement et matériellement les insurgés dans l’est de l’Ukraine. Avec les si nombreuses victimes du vol MH 17 de la Malaysia Airlines, les graves retombées internationales de la violence parrainée par la Russie dans l’est de l’Ukraine apparaissent désormais clairement aux yeux de tous.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant de la Nouvelle-Zélande.

M. McLay (Nouvelle-Zélande) (parle en anglais) : Je tiens à vous remercier, Monsieur le Président, d’avoir convoqué ce débat et de permettre à la Nouvelle-Zélande de faire la présente déclaration. Je serai bref, mais tout accident international qui plonge les Néo-Zélandais dans le deuil exige que nous prenions la parole.

La Nouvelle-Zélande se joint aux autres orateurs pour exprimer ses plus sincères condoléances aux familles, amis et collègues de toutes les victimes. Nous exprimons également notre solidarité avec nos amis proches de la Malaisie, et au-delà avec tous les pays dont des ressortissants ont perdu la vie. Nos pensées et nos prières vont à chacun d’entre eux en ces heures d’incommensurable tristesse.

Nous sommes scandalisés par la multiplication des éléments de preuve indiquant que cette tragédie parfaitement injustifiée et évitable a été provoquée par un tir de missile sol-air. Si ces informations se confirment, il s’agit véritablement d’un crime grave qui exige une enquête internationale approfondie, crédible et indépendante. Nous demandons en particulier à ce que l’intégrité du lieu du crash soit préservée.

La Nouvelle-Zélande se félicite donc des appels à ouvrir une telle enquête qui ont été lancés par le Secrétaire général, par le Conseil de sécurité et par de nombreuses autres voix. Compte tenu des circonstances de cette tragédie, de la nature catastrophique de l’événement, et du fait qu’il s’est produit dans une zone de conflit, la communauté internationale – en particulier les pays comme la Nouvelle-Zélande, ou d’autres, qui ont perdu des ressortissants – a le droit d’exiger une telle enquête. Toute partie qui disposerait d’informations susceptibles d’être utiles à ce processus doit proposer son aide et sa coopération sans attendre. Les auteurs de cet acte doivent impérativement être traduits en justice – il n’y a pasderéserve,de« si »,de« mais »oude« peut-être » quitienne.

La situation en Ukraine n’est plus simplement dangereuse. Elle provoque désormais la mort de personnes originaires d’autres régions du monde qui ne sont aucunement impliquées dans ce conflit local. Ce matin, en Nouvelle-Zélande et dans de nombreux autres pays, des familles s’éveillent à la réalité tragique qu’elles ont perdu des êtres chers à cause d’un conflit qui menace la paix et la sécurité internationales et qui exige l’attention permanente du Conseil de sécurité.

Le Président (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant du Viet Nam.

M. Le Hoai Trung (Viet Nam) (parle en anglais) : C’est avec une profonde tristesse que nous avons appris l’écrasement du vol MH 17 de la Malaysia Airlines dans l’est de l’Ukraine le 17 juillet, qui a provoqué la mort tragique de tous les passagers et de l’équipage. Ma délégation vient d’être informée que, sur les quatre victimes dont la nationalité n’avait pas encore été déterminée lorsque l’Ambassadeur de la Malaisie a pris la parole, trois étaient vietnamiennes. Nous tenons à exprimer toute notre sympathie et nos condoléances aux gouvernements et aux peuples des pays qui ont perdu des ressortissants, ainsi qu’aux familles endeuillées. Aujourd’hui, en tant que membre de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est, le Viet Nam est solidaire du Gouvernement et du peuple malaisiens. Le Président, le Premier Ministre, le Vice-Premier Ministre et le Ministre des affaires étrangères vietnamiens ont transmis leurs plus profondes condoléances au Gouvernement et au peuple malaisiens.

Nous appelons les autorités et parties compétentes à prendre des mesures rapides, efficaces et responsables vis-à-vis des familles et des victimes et à régler de la manière qui convient les autres questions connexes. Le Viet Nam demande également que soit menée une enquête prompte et transparente sur cet accident. Nous espérons que la lumière sera bientôt faite grâce aux efforts et à la détermination des autorités et parties compétentes.

Le Viet Nam suit attentivement la situation en Ukraine. Nous sommes extrêmement préoccupés par les événements complexes survenus récemment dans les provinces de l’est de l’Ukraine. Nous espérons sincèrement que toutes les parties concernées feront preuve de retenue et éviteront de prendre toute mesure susceptible d’aggraver la situation et de faire des victimes parmi les civils, tout en s’efforçant de promouvoir un dialogue pacifique pour trouver un règlement qui préserve les intérêts légitimes de toutes les parties et qui réponde aux aspirations générales à la paix, à la stabilité et au développement en Ukraine et dans toute la région.

Le Président (parle en anglais) : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur ma liste. Le Conseil a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.

La séance est levée à 12 h 15.