Le président de la Commission des Forces armées de la Chambre des représentants, Buck McKeon.

Le Congrès s’est prononcé le 17 septembre sur l’amendement McKeon, une législation dont les citoyens n’ont, pour la plupart, jamais entendu parler. Pourtant, les conséquences de ce vote sont graves : le financement des « rebelles » syriens va engendrer une nouvelle et plus vaste guerre au Moyen-Orient. Voici huit raisons pour lesquelles le Congrès aurait du voter « Non » à l’amendement McKeon :

1. Il s’agit d’un gaspillage d’argent

Nous devrons assumer des dépenses estimées à 21 milliards de dollars sur trois ans. Le Pentagone prévoit de former 5 000 rebelles l’an prochain ce qui, à 1 million de dollars pour chaque combattant, pourrait coûter jusqu’à 15 milliards de dollars sur trois années de guerre. Le coût du maintien d’environ 2 000 soldats états-uniens en Irak dépassera les 6 milliards de dollars sur trois ans.
La dernière guerre en Irak a ajouté au moins 5 trillions de dollars au déficit structurel des États-Unis.

2. Les rebelles « modérés » n’existent pas

Écrivant sur la connexion entre l’Arabie saoudite et l’État Islamique (ÉI), l’historien Alastair Crooke a récemment décrit les insurgés « modérés » en Syrie comme étant « plus rares que la licorne des légendes. » Les « modérés » ont conclu un pacte de non-agression avec l’ÉI. Les « modérés » ont capturé un journaliste états-unien et l’ont vendu à l’ÉI, qui l’a décapité. L’Arabie saoudite qui, avec le Qatar, a financé les jihadistes en Syrie, propose désormais de « former » les rebelles. Le Congrès est prié d’avaler cette recette douteuse : les sponsors des jihadistes radicaux vont former des jihadistes « modérés ».

3. La vérité est que nous ne savons pas qui nous formons

Les soi-disant « rebelles » sont des mercenaires qui viennent de plus de 20 pays. Ils s’organisent et se réorganisent constamment en nouveaux groupes, qui offrent leur allégeance à quiconque les paye ou leur fournit des armes – et ce à tout moment. Les États-Unis ont fourni des armes au gouvernement irakien et aux rebelles syriens, qui ont fini dans les mains de l’ÉI. Par conséquent, l’US Air Force bombarde des Humvees et des véhicules blindés de transport de troupes achetés avec l’argent des contribuables états-uniens. L’ÉI a de grandes quantités d’armes de guerre et de munitions fabriquées aux États-Unis. Le Département du Trésor est-il devenu leur tirelire ?

4. Ceux qui vont recevoir de l’argent des États-Unis vont se retourner contre nous

Depuis que les États-Unis ont lancé leur guerre contre l’Irak en mars 2003, plus d’un million d’Irakiens innocents ont péri —c’est-à-dire 4 % de la population—. Par ailleurs, plusieurs milliers de milliards de dollars de dégâts ont été provoqués. Les Irakiens ont été dépouillés de leurs maisons, de leurs emplois, de leurs relations sociales, ils ont été humiliés au-delà de l’imaginable, leur pays a été ruiné. C’est pourquoi les États-Unis ne peuvent pas s’attendre à trouver des amis en Irak.

5. Nos soldats seront menacés par les « rebelles » que nous formons, payons et équipons

Cette législation du Congrès, qui permettrait de financer les « rebelles » en Syrie, prédit que les soldats états-uniens seront attaqués par ceux que nous formons. L’amendement McKeon, sur lequel le Congrès va voter aujourd’hui, prévoit ce que l’on appelle des attaques « vert-sur-bleu », et exige que des rapports sur de telles attaques soient rédigés et que des statistiques soient conservées.

6. Le Congrès est maintenu dans l’obscurité

Personne n’avoue ce qu’est l’objectif final de cette politique. Est-ce la partition de l’Irak entre sunnites, chiites et Kurdes, afin d’aider les compagnies pétrolières occidentales à faire de plus rentables affaires avec les Kurdes ? Est-ce la partition de la Syrie entre sunnites, chiites et alaouites, incluant l’établissement d’un nouveau Califat sunnite à cheval sur l’Irak et la Syrie ? Et pourquoi l’administration [Obama] a-t-elle reconnu si tardivement la situation tragique des chrétiens, qui fuient progressivement la région à cause des attaques menées par des groupes que les Saoudiens et les Qataris financent ?

7. Une crise constitutionnelle est en marche

Les États-Unis ont déjà lancé une guerre sans l’autorisation du Congrès.
La Constitution exige que seul le Congrès puisse engager le pays dans un état de guerre. En l’absence d’une déclaration de guerre par le Congrès ou d’une attaque directe contre les États-Unis, le Président n’a pas le pouvoir de lancer le pays dans un conflit armé. Même le War Powers Act —dont la constitutionnalité est douteuse— établit une limite de 60 jours pour une action militaire non autorisée.

L’article I de la Constitution des États-Unis, qui a créé le Congrès, est aujourd’hui en lambeaux. Les rédacteurs de la Constitution étaient parfaitement conscients des potentiels abus de la puissance impériale. C’est pourquoi le Congrès a été créé par l’article I, en tant que premier parmi ses pairs vis-à-vis de l’Exécutif créé par l’article II. Quand un président des États-Unis ne tient pas compte de l’impératif constitutionnel de respecter les interdictions de l’article I, il viole le serment d’investiture à travers lequel il s’engage à « préserver, protéger et défendre la Constitution des États-Unis ». Il s’expose donc à des risques de destitution pour un tel comportement.

8. Le Congrès fait les choses à l’envers

Le Congrès ne devrait pas voter pour financer une guerre qu’il n’a pas déclaré. Le Congrès doit d’abord voter pour autoriser la guerre avant de voter pour financer celle-ci.

Il est temps que le Congrès redéfinisse notre sécurité nationale, et qu’il prenne position afin de préserver, protéger et défendre la Constitution des États-Unis. Le Congrès doit mettre un terme aux interventions illégales de l’administration [présidentielle] et aux abus des pouvoirs de guerre. Arrêtons de financer des interventions armées et des coups d’État. Le Congrès doit mettre un terme à la guerre permanente avant que son coût financier et social ne détruise notre nation. Le Congrès peut agir dès maintenant, en refusant des fonds et des armes à tout groupe ou toute nation qui ont été —ou qui sont encore— alliés avec l’ÉI, et avec les organisations qui l’ont précédé et qui lui succéderont.