D’une personnalité complexe, Taro Kono a été formé autant au Japon par le Parti Libéral Démocratique (dont son père était le président) qu’aux États-Unis par le Parti démocrate. Il a fait campagne pour l’intervention de l’armée à l’étranger, mais contre la guerre en Irak et pour l’interdiction de la prolifération des armes atomiques. Considérant que le conflit sino-japonais a été exagéré par les USA dans leur propre intérêt, il espère un rapprochement avec Pékin. Il supporte activement l’opposition coréenne. Cependant, pour empêcher d’interpréter sa position comme anti-coréenne, il s’est engagé à ne jamais visiter le sanctuaire de Yasakuni et a réussi en persuadant le Premier ministre Shizo Abe de suivre son exemple. Il est le nouveau ministre des Affaire étrangère de son pays depuis le 3 août 2017.

Le Premier ministre Shinzo Abe programme une visite en Inde en septembre pour traiter avec son homologue indien Narendra Modi du renforcement de la coopération bilatérale en matière de sécurité Asie-Pacifique, d’énergie atomique et de technologie ferroviaire à grande vitesse. Toutefois, étant donné que la visite a été annoncée dans le contexte de la confrontation du Doklam, elle a suscité de nombreuses spéculations quant à ce qui pourrait être discuté

Les troupes chinoises et indiennes se sont engagées dans un conflit militaire dans la région du Doklam, qui borde le Bhoutan, depuis juin. L’Inde a été extrêmement impolie et déraisonnable sur cette question. C’est un fait incontestable que le Doklam fait partie du territoire de la Chine. Bien que l’Inde considère les constructions chinoises dans la zone comme une menace, il ne peut pas s’en servir comme d’une excuse pour faire pénétrer ses troupes en territoire chinois.

La décision de New Delhi de franchir la frontière est une violation brutale de la souveraineté de la Chine et un acte aussi agressif recevra sans doute un faible soutien de la communauté internationale. Un certain nombre de pays ont déjà déclaré qu’ils resteraient neutres dans cette affaire, et même le Bhoutan, un pays qui selon l’Inde se trouve sous sa protection, a gardé le silence sur cette question. Cela a placé l’Inde dans une situation embarrassante dans laquelle elle a grandement besoin de soutien.

Le Times of India a signalé plus tôt que l’ambassadeur du Japon en Inde, Kenji Hiramatsu, avait déclaré qu’il ne devrait pas y avoir de tentative de changer par la force le statu quo sur le terrain au Doklam. Ces remarques ont été interprétées par l’Inde, un pays désireux d’un soutien international, comme manifestant le soutien du Japon. Mais ce n’est pas le cas. Les États-Unis ont exprimé l’espoir que le conflit soit réglé à plusieurs reprises, et c’est aussi ce que veut le Japon. Washington et Tokyo, toujours en principe favorables à New Delhi, ont exercés des pressions en ne montrant aucun soutien réel pour l’Inde sur le problème du Doklam.

À l’heure actuelle, les États-Unis et le Japon font face à des crises internes et externes sérieuses. Les États-Unis se débattent dans des problèmes de discrimination raciale alors que leur opinion publique condamne fermement les suprématistes blancs. Cela a conduit l’administration Trump à devenir la cible de nouvelles critiques. Des hauts fonctionnaires ont été forcés de démissionner, mais cela n’a pas suffit à sauver l’administration Trump d’une crise politique. Pendant ce temps, Shinzo Abe a été frappé par un certain nombre de scandales au Japon et, par conséquent, il ne disposerait plus que du soutien de 26 % de sa population. Bien qu’Abe ait remanié son cabinet, cela ne lui a pas permis d’augmenter sa cote de popularité qui reste au plus bas.

La crise du nucléaire et des missiles en Corée du Nord est une autre préoccupation pour les États-Unis et le Japon. Dans le passé, Washington et Tokyo ont utilisé les essais nucléaires de Pyongyang comme excuses pour renforcer leur présence militaire en Extrême-Orient, mais maintenant, une crise nucléaire semble être en cours. La Corée du Nord avait déjà menacé de tirer des missiles vers l’île états-unienne de Guam, ce qui signifiait que ses missiles traverseraient le territoire japonais [ce qui a eu lieu]. Les progrès militaires de Pyongyang sont devenus une préoccupation pour Washington et Tokyo. Il semble que la Corée du Nord, avec le renforcement de ses capacités militaires, devienne la principale « menace » à leurs yeux.

Les États-Unis et le Japon affrontent des problèmes difficiles tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Ils n’ont actuellement aucune intention de s’impliquer dans les différents d’autres nations. En même temps, ils ont besoin du soutien et de la coopération de la Chine face à la Corée du Nord. L’Inde a délibérément provoqué la Chine c’est pourquoi elle sera tenue à distance par les États-Unis et le Japon. Pour le Japon, une coopération renforcée avec la Chine est une tendance irréversible. Taro Kono, connu pour ses opinions pro-chinoises, a été nommé ministre des Affaires étrangères lors du remaniement du cabinet. De plus, aucun membre du cabinet n’a visité cette année le sanctuaire de Yasukuni le 15 août, un mouvement sans précédent pour le parti au pouvoir au Japon. De toute évidence, Abe montre de la bonne volonté à Pékin, il est donc peu probable qu’il manifeste un soutien diplomatique appuyé à New Delhi lors de sa prochaine visite en Inde.

Pour Abe, le Japon a une relation amicale avec l’Inde, et il lui faudra donc faire preuve d’amabilité avec Modi. Cependant, le Japon ne veut pas d’escalade dans le conflit sino-indien. Si la Chine continue à perdre du temps et de l’énergie pour faire face à l’impasse du Doklam, cela ne sera pas favorable pour trouver une solution au problème nord-coréen. Il convient de noter que les médias japonais ont fait preuve de retenue dans leur traitement de l’impasse du Doklam, ce qui reflète dans une certaine mesure les intentions du gouvernement japonais.

Par conséquent, l’Inde ne peut recevoir qu’un soutien limité du Japon. New Delhi peut s’être engagé à profiter de ses provocations contre la Chine, mais il s’est fourvoyé lui-même dans un bourbier diplomatique.

Traduction
Mathieu Abribat
Source
Global Times (Chine)