Le drapeau de la dynastie wahhabite des Sénoussi est redevenu celui de la Libye. Aujourd’hui, l’esclavage aussi est redevenu une pratique courante comme avant le coup d’État de Mouamar Kadhafi, en 1969. La Libye, l’Arabie saoudite et dans une moindre mesure le Qatar et l’Émirat de Sharjat, sont quatre États wahhabites qui tolèrent ce crime.

Il y a sept ans, le 19 mars 2011, commençait la guerre contre la Libye, dirigée par les États-Unis d’abord par l’intermédiaire de l’AfriCom, puis par l’Otan sous commandement US. En sept mois, étaient effectuées environ 10 000 missions d’attaque aérienne avec des dizaines de milliers de bombes et missiles.

À cette guerre l’Italie participait avec des chasseurs-bombardiers et des bases aériennes, déchirant le Traité d’amitié et de coopération entre les deux pays. Avant l’attaque aéronavale déjà, des secteurs tribaux et des groupes islamistes hostiles au gouvernement avaient été financés et armés en Libye et des forces spéciales, notamment qataries avaient été infiltrées. Ainsi était démoli cet État qui, sur la rive sud de la Méditerranée, enregistrait « de hauts niveaux de croissance économique et des indicateurs élevés de développement humain » (comme documentait en 2010 la Banque Mondiale même). Environ deux millions d’immigrés, le plus souvent africains, y trouvaient du travail.

En même temps la Libye rendait possible avec ses fonds souverains la naissance d’organismes économiques indépendants dans l’Union africaine : le Fonds monétaire africain, la Banque centrale africaine, la Banque africaine d’investissement.

Les USA et la France —comme le prouvent les e-mails de la secrétaire d’État Hillary Clinton— se mirent d’accord pour bloquer tout d’abord le plan de Kadhafi de créer une monnaie africaine, alternative au dollar et au franc CFA imposé par la France à 14 ex-colonies africaines.

L’État démoli et Mouamar Kadhafi assassiné, le butin à partager en Libye est énorme : les réserves pétrolières, les plus grandes d’Afrique, et de gaz naturel ; l’immense nappe phréatique nubienne d’eau fossile, or blanc en perspective plus précieux que l’or noir ; le territoire même de la Libye, de première importance géostratégique ; les fonds souverains, d’environ 150 milliards de dollars investis à l’étranger par l’État libyen, « gelés » en 2011 par mandat du Conseil de sécurité de l’Onu.

Des 16 milliards d’euros de fonds libyens, bloqués à la Euroclear Bank en Belgique, 10 ont déjà disparu sans aucune autorisation de prélèvement. La même grande rapine advient dans les autres banques européennes et états-uniennes.

En Libye les recettes fiscales de l’export énergétique, descendues de 47 milliards de dollars en 2010 à 14 en 2017, se trouvent partageés entre groupes de pouvoir et multinationales ; le dinar, qui auparavant valait 3 dollars, est aujourd’hui changé à un taux de 9 dinars par dollar, tandis que les biens de consommation courante doivent être importés en les payant en dollars, avec une inflation annuelle consécutive de 30 %.

Le niveau de vie de la majorité de la population s’est écroulé, par manque d’argent et de services essentiels. Il n’existe plus de sécurité, ni de réel système judiciaire. La pire condition revient aux immigrés africains : sous la fausse accusation (alimentée par les médias occidentaux) d’être des « mercenaires de Kadhafi » ils ont été emprisonnés par les milices islamistes jusque dans des cages de zoo, torturés, voire assassinés.

La Libye est devenue la principale voie de transit, aux mains de trafiquants d’êtres humains, d’un chaotique flux migratoire vers l’Europe.

Sont aussi persécutés les Libyens accusés d’avoir soutenu Kadhafi. Dans la ville de Tawergha les milices islamistes de Misrata soutenues par l’Otan (celles qui ont assassiné Kadhafi) ont perpétré une véritable purification ethnique, en exterminant, torturant et violant. Les survivants, terrorisés, ont dû abandonner la ville.

Aujourd’hui ils sont environ 40 000 à vivre dans des conditions inhumaines, ne pouvant pas retourner à Tawergha. Pourquoi gardent-ils le silence ces représentants de la gauche qui il y a sept ans réclamaient à cor et à cri l’intervention en Libye au nom des droits humains violés ?

Traduction
M.-A.
Source
Il Manifesto (Italie)