Initialement, le Groupe de contact a été créé le 26 avril 1994 pour résoudre le conflit en Bosnie-Herzégovine. Il était constitué des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies moins la Chine, c’est-à-dire : des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni et de la Russie. Après les accords de Dayton, qui conclurent la paix entre la Serbie et la Bosnie-Herzégovine, le Groupe de contact décida de s’atteler au problème interne de la Serbie : le Kosovo. Pour ce faire, le Groupe fut élargi à deux puissances régionales directement concernées, l’Allemagne et l’Italie. Cette configuration prenait acte que l’on ne pouvait dénier plus avant l’influence allemande, même si on lui refusait de siéger au Conseil de sécurité au motif qu’elle ne disposait pas du feu nucléaire. Elle favorisait aussi une implication plus forte de l’Union européenne bien que celle-ci n’ait toujours pas réussi à définir clairement une politique commune de sécurité et de défense (PESC). Tout cela aurait dû se traduire pacifiquement par un nouvel équilibre dans les Balkans, au profit de l’influence germano-américaine. Il n’en a rien été.

Dans sa déclaration du 24 septembre 1997, le Groupe de contact rejette aussi bien la prétention serbe de maintenir le statu quo, que la prétention de la population albanaise d’accéder à l’indépendance. Au contraire, il prend position pour une autonomie renforcée du Kosovo au sein de la RFY, c’est-à-dire, soit une autonomie substantielle au sein de la Serbie, soit une re-fédéralisation de la RFY.

Dans les mois qui suivirent, le Groupe de contact planifia plusieurs déplacements de ses ministres à Belgrade, qui furent tous ajournés. À l’évidence, Russes et Américains étaient plus préoccupés de se paralyser mutuellement que de faciliter une solution, tant ils considéraient toute évolution comme mettant en péril l’équilibre de leurs influences dans la région. Face à ces atermoiements, les ministres allemand et français, Klaus Kinkel et Hubert Védrine, tentèrent une médiation restreinte avec le soutien de l’Union européenne. Il s’agissait de demander aux Serbes de céder du terrain aux Albanais et de leur offrir une compensation financière qui aurait été versée par l’entremise du FMI et de la Banque mondiale. Cette initiative échoua, le nationalisme serbe n’étant pas à vendre.

La déclaration du Groupe de contact du 9 mars 1998 manifeste une paralysie diplomatique complète. Aussi, se contente-t-elle de soutenir les efforts de l’OSCE et de la Communauté de Sant’Egidio, et de saisir le Conseil de sécurité des Nations Unies pour qu’il gèle la situation militaire en imposant un embargo aux deux parties. Cinq pays du Groupe de contact décrètent également une suspension des investissements en RFY, mais la Russie refuse de s’engager dans cette voie.

Aucun problème n’étant résolu, des milliers de Kosovars continuent à s’expatrier. Cet afflux de réfugiés déstabilise les États limitrophes qui, après avoir épuisé les sollicitations diplomatiques vers Belgrade, demandent à l’OTAN d’intervenir. Pour prévenir une action militaire, la Russie réactive le Groupe de contact à la veille de l’opération " Faucon déterminé ". Cette démonstration de force, le 15 juin 1998, prit la forme de manœuvres aériennes visant à cartographier précisément la RFY, dernier avertissement avant une action militaire. Bien que Boris Eltsine reçoive Slobodan Milosevic à Moscou, il ne parvient pas à lui arracher une démilitarisation, même relative, du Kosovo.

La crise se durcissant à nouveau, en janvier 1999, après le massacre de Racak, une intervention de l’OTAN, hors mandat de l’ONU, paraît inéluctable. C’est au tour des Britanniques et des Français de réactiver le Groupe de contact, tout autant pour résoudre la crise que pour éviter une humiliation de la Russie et sauver l’autorité de l’ONU. À l’issue de la rencontre de Londres entre Jacques Chirac et Tony Blair, le Groupe de contact convoque la conférence de Rambouillet (6-23 février 1999), qui échoue. L’OTAN et les USA s’impatientent. Le Groupe de contact organise une nouvelle conférence, au Centre Kléber à Paris (15-19 mars 1999), mais la délégation serbe refuse de signer les accords que les Kosovars paraphent seuls.

Le 23 mars, le Premier ministre russe, Evgueni Primakov, apprend, dans l’avion qui le transporte aux États-Unis que le secrétaire général de l’OTAN a ordonné le bombardement de la RFY. Il annule son voyage et fait demi-tour. Le Groupe de contact a échoué à résoudre le conflit kosovar. Surtout, il n’a pas réussi à modifier pacifiquement l’équilibre des influences américaine et russe dans les Balkans.