A) UNE ILE SUR-ADMINISTREE

La Corse ne comprend que 256 000 habitants répartis sur une superficie de 8 600 km ?. Sa superficie et sa population sont ainsi comparables à celles du département de l’Aveyron, et sa population est équivalente à celle de villes comme Strasbourg et Nantes et inférieure à celle d’un arrondissement de Marseille.

Organisée en deux départements, la région de Corse dispose de tous les relais territoriaux départementaux et régionaux de l’administration régionale et départementale de l’Etat. On y trouve ainsi trois préfets, huit sous-préfets, et, avec quelques spécificités, les services de police, de gendarmerie et de justice présents dans les départements et les régions.

Cette sur-administration correspond d’ailleurs à une démultiplication de la représentation du corps électoral, à travers deux conseils généraux, l’Assemblée de Corse et le Conseil exécutif de Corse.

B) DES FORCES DE SECURITE PLETHORIQUES RAPPORTEES A LA POPULATION

La Corse dispose de forces de sécurité qui peuvent apparaître comme pléthoriques. Aujourd’hui, en additionnant les forces permanentes et les forces mobiles relevant de la police et de la gendarmerie, elle dispose d’un effectif de plus de 2800 hommes.

Les forces permanentes comprennent 808 hommes pour la police et 1 032 pour la gendarmerie. Elles sont restées à peu près stables depuis 10 ans.

Les forces mobiles s’élèvent à l’heure actuelle à quatre compagnies républicaines de sécurité (CRS) de 90 hommes chacune et à six escadrons de gendarmerie mobile comprenant 85 hommes par unité.

Elles ont connu un accroissement important ces dernières années. En 1993, par exemple, on ne comptait que trois escadrons de gendarmes mobiles et deux ou trois compagnies de CRS en fonction des périodes de l’année.

Le niveau actuel des forces mobiles a été fixé après l’assassinat du préfet Erignac mais il est sujet à variations. Il a ainsi connu une très forte hausse au premier semestre 1999, au cours duquel on a compté en Corse cinq compagnies de CRS et neuf escadrons de gendarmes mobiles.

Le ratio forces de sécurité par habitant s’élève ainsi à environ un policier ou gendarme pour 100 habitants ce qui représente plus du double de la moyenne nationale (un policier pour 252 habitants) et place la Corse au premier rang des régions françaises en ce domaine.

Importantes par leur effectif, ces forces de sécurité apparaissent de plus, en moyenne, financièrement et matériellement mieux dotées que leurs homologues du continent.

C) LES DIFFICULTES DE DEPLACEMENT

La Corse est une " montagne dans la mer " où les temps de déplacement se comptent en heures et non en kilomètres. Le basculement d’une compagnie de CRS entre Ajaccio et Bastia prend ainsi entre 3 heures 30 et 4 heures.

Ce facteur concourt évidemment à une implantation plus importante des forces de sécurité, qu’il s’agisse des compagnies de CRS ou des brigades de gendarmerie.

D) UNE PREDOMINANCE TERRITORIALE DE LA GENDARMERIE

Le caractère rural et montagnard de la Corse entraîne une nette prédominance territoriale de la gendarmerie. La gendarmerie nationale a en charge 98,5% du territoire et la police nationale les 1,5% restant, répartis en deux circonscriptions de sécurité publique.

En raison de la faible densité humaine des zones rurales, les deux circonscriptions de sécurité publique regroupent 41% de la population, la gendarmerie ayant en charge 59 % de la population.

La gendarmerie est donc compétente sur l’ensemble du territoire Corse, à l’exception de la commune d’Ajaccio qui est la seule circonscription de sécurité publique de Corse-du-Sud et des communes de Bastia, de Ville-Di-Petrabugno et de Furiani, qui constituent la circonscription de Bastia, unique circonscription de Haute-Corse.

Alors qu’apparaissent de fortes résistances concernant les divers projets de transferts de compétences entre police et gendarmerie, il convient de noter que la Corse a fait l’objet d’une telle procédure en mai 1997.

Le décret n° 97-581 du 27 mai 1997 a ainsi supprimé le régime de police d’Etat dans la commune de Corte, transférant celle-ci dans la zone de compétence de la gendarmerie. Un arrêté du même jour a instauré le régime de la police d’Etat dans les communes de Furiani et de Ville-Di-Pietrabugno. A ce jour, il n’existe aucun autre projet de transfert de compétences entre la police et la gendarmerie.

A côté d’une police concentrée sur deux zones urbaines, la gendarmerie a une implantation très dispersée sur le territoire à travers la multiplication de petites brigades.

Sur 56 unités territoriales, 27 unités ont ainsi un effectif égal ou inférieur à six militaires. Il convient de s’interroger sur la nécessité de garder un tel maillage, d’autant plus que certains cantons sont encore le siège de plusieurs brigades. La fermeture de la brigade de Cozzano, comprenant un effectif de quatre gendarmes et distante de 4 km d’une autre brigade, est en cours. La fermeture de trois unités en Corse-du-Sud et de huit unités en Haute-Corse est actuellement à l’étude.

E) DES MISSIONS SPECIFIQUES

La multiplication en Corse des attentats et des actes de violence nécessite une protection renforcée des bâtiments publics et des personnes.

Les gardes statiques, les fonctions de protection rapprochées et les opérations de convoyage y sont particulièrement développées et se révèlent très coûteuses en effectifs, plus de cinq cents policiers ou gendarmes étant mobilisés sur ces missions.

(1) Les gardes statiques

Le dispositif de gardes statiques concerne à la fois les bâtiments publics et les domiciles de certaines personnalités.

Après l’assassinat du préfet Erignac, ces gardes avaient été renforcées sur les bâtiments symboles de l’Etat, tels les préfectures, les palais de justice d’Ajaccio et de Bastia et les sous-préfectures de Corte, Calvi et Sartène. Depuis lors certaines protections ont fait l’objet d’allégements, voire de suppression, à la suite de réunions d’évaluation des menaces, présidées par le préfet adjoint à la sécurité.

La charge de ces gardes se répartit entre la police et la gendarmerie en fonction de leurs zones de compétences respectives.

Leur coût est de deux unités de CRS et de deux escadrons mobiles de gendarmerie, en incluant la garde des cantonnements de ces unités.

Il a été décidé de lever les surveillances statiques des domiciles de certaines personnalités pour donner la préférence à un dispositif dynamique de rondes et de patrouilles.

(2) La protection des personnalités

En juin 1999, les protections rapprochées concernaient en permanence 16 bénéficiaires, dont trois élus et 13 fonctionnaires de l’Etat résidant en Corse.

Des missions ponctuelles de surveillance sont mises en place à l’occasion d’événements particuliers, tels les différentes missions d’inspections, mais aussi les commissions d’enquête parlementaires... En 1998, ont ainsi été assurées près d’une centaine de missions en vue d’assurer la protection de trois cents personnalités.

Ces protections sont assurées en zone de police par les fonctionnaires du service de recherche, d’assistance, d’intervention et de dissuasion de la police nationale (RAID), et, en zone de gendarmerie, par les militaires de la gendarmerie mobile, de la gendarmerie départementale ou de l’escadron parachutiste d’intervention de la gendarmerie nationale (EPIGN).

Ces mesures de protection font l’objet d’un réexamen périodique, lors de réunions présidées par le préfet adjoint à la sécurité, compte tenu de l’analyse des menaces effectuée par les renseignements généraux, la gendarmerie et l’Unité de coordination de la lutte anti-terroriste. Elles ont fait l’objet d’allégements au printemps 1999, notamment en zone de gendarmerie.

(3) Les opérations de convoyage

Depuis la cessation des activités de la société Bastia Securita, les convoyages de fonds sont assurés en Corse par la société Ardial, une filiale de La poste, sous la protection des forces de l’ordre. Cette mission mobilise l’équivalent d’un escadron de gendarmerie. Font également l’objet de protection, le convoyage de la solde du premier régiment de parachutistes de Calvi, et les transports d’explosifs ou de cigarettes.


Source : Sénat. http://www.senat.fr