14.16. Dès que la Première ministre Uwilingiyimana comprit que son autorité ne serait plus respectée, elle demanda la protection des forces armées et une escorte vers Radio Rwanda, afin de s’adresser à la population. Lorsque les troupes de la MINUAR arrivèrent à son domicile aux premières heures de la matinée du 7 avril, elles furent attaquées et leurs véhicules sabotés[19]. Pendant plusieurs heures, les soldats de la Garde présidentielle cherchèrent la Première ministre ; ils la trouvèrent peu avant midi et l’assassinèrent, de même que son mari. Ses cinq enfants échappèrent de justesse à la mort et furent plus tard mis en sécurité.

14.17. Tout ceci s’inscrivait dans une politique délibérée visant à assassiner quiconque était susceptible de critiquer le nouveau régime ou le génocide. Les autres cibles comprenaient le Premier ministre désigné Faustin Twagiramungu, d’autres éminents politiciens Hutu, les administrateurs (Hutu comme Tutsi), les riches gens d’affaires Tutsi, les militants des droits de la personne et le reste des dirigeants de l’opposition. À Kigali, les officiers détachèrent des troupes de l’armée régulière et de la milice dans toutes les préfectures du Rwanda pour mettre en œuvre la politique de génocide.

14.18. Les régions du centre et du sud du pays, où la population Tutsi était plus nombreuse et mieux intégrée, résistèrent d’abord à l’idée du mouvement Hutu Power et du génocide. Les dirigeants du génocide tinrent donc de nombreuses réunions dans ces régions du pays afin de forcer les administrateurs locaux à collaborer avec eux. Au bout du compte, et malgré leur résistance initiale, les préfets et bourgmestres furent persuadés ou forcés de collaborer.

14.19. Le 16 avril, le gouvernement intérimaire renforça ses appuis en rappelant en service actif les officiers loyaux à Bagosora. Il subsistait toutefois une menace permanente du fait que des soldats refusaient de prendre part au génocide. Encore une fois, le gouvernement intérimaire réagit rapidement. Les officiers dissidents furent remplacés d’une façon ou d’une autre - mis à l’écart, envoyés sur le terrain, forcés de s’exiler ou assassinés[20].


[19] Des Forges, 188-189.

[20] Ibid., 7-8.


Source : Organisation de l’Unité Africaine (OUA) : http://www.oau-oua.org