14.61. Les membres de la Garde présidentielle furent recrutés à peu près exclusivement parmi les résidants de la province natale du Président Habyarimana et de sa femme. Plusieurs années avant l’assassinat du Président, la Garde avait été impliquée dans le meurtre d’éminents Tutsi et de dirigeants de l’opposition. Dans les heures qui suivirent la mort d’Habyarimana, la Garde présidentielle prit la tête des tueries dans tous les quartiers de la capitale.

14.62. Les Forces Armées Rwandaises (FAR) jouèrent également un rôle important dans le génocide. Les soldats gardaient les barrages et les points de contrôle sur les routes principales, assuraient la formation des Interahamwe et des milices des partis et participaient directement au génocide, en particulier dans les zones urbaines. Les militaires assurèrent également l’organisation de toutes les tueries à grande échelle ailleurs au pays. La séquence des massacres se répétait de loin en loin. Dans un premier temps, les troupes lançaient des grenades et des gaz lacrymogènes et mitraillaient les maisons et les refuges des Tutsi. Ensuite, les Interahamwe, la milice locale ou les forces civiles d’auto-défense entreprenaient le massacre, avec des machettes et d’autres armes. Enfin, les troupes et les milices formaient des groupes de recherche afin de dépister et d’assassiner les éventuels survivants[41].

14.63. Les politiciens et les administrateurs locaux jouissaient de pouvoirs étendus. Ils ciblaient les Hutu modérés, obligeaient les Tutsi à se regrouper dans des lieux publics, incitaient les Hutu à participer au génocide, distribuaient les armes aux miliciens, imposaient des couvre-feux, établissaient des barrages, coordonnaient le travail des milices entre les communes et, de façon générale, mettaient tout en œuvre pour faciliter la réalisation du génocide. Ils avaient également le contrôle des registres de population et pouvaient vérifier l’appartenance ethnique des gens de leur village. Parfois, cela pouvait faire la différence entre la vie et la mort pour les Tutsi qui s’étaient procuré de faux papiers et tentaient de fuir les massacres.

14.64. Il est important de se souvenir que certains administrateurs et chefs militaires Hutu refusèrent courageusement de participer au génocide. Par exemple, les préfets de Butare et de Gitarama et plusieurs bourgmestres de ces districts procédèrent à l’arrestation des assaillants afin de mettre un terme aux tueries. Dans les circonstances, c’étaient là des gestes héroïques. Malheureusement, à la mi-avril, le gouvernement était déterminé à faire cesser toute opposition au génocide et entreprit d’assassiner les dissidents, de les forcer à collaborer ou tout simplement de contourner leur autorité.


Source : Organisation de l’Unité Africaine (OUA) : http://www.oau-oua.org