La commission, dans le cadre de sa mission et sans qu’il soit question dans son chef de remettre en cause ou d’empiéter sur les compétences spécifiques et particulières des autorités judiciaires, a souhaité être informée de la manière la plus précise sur le travail réalisé par le pouvoir judiciaire dans le cadre des dossiers relatifs aux événements du Rwanda.

L’intérêt que la commission porte aux dossiers judiciaires est notammemnt motivé par le fait que de nombreux Rwandais, présents sur notre territoire, font l’objet d’enquêtes pénales non clôturées ce jour, soit plus de trois ans après les faits dont l’étude est confiée à la commission.

Méthode de travail

a) En un premier temps, soit le 15 avril 1997, la commission s’est adressée au ministre de la Justice afin d’obtenir de M. le procureur général près la Cour d’appel de Bruxelles des renseignements relatifs aux dossiers en cours d’information, d’une part, et ceux mis à l’instruction, d’autre part.

Par courrier du 13 mai 1997, le procureur général près la Cour d’appel de Bruxelles répondait de manière circonstanciée au ministre que 10 dossiers avaient été mis à l’instruction dans le cabinet de M. Vandermeersch, 16 autres notices étant restées à l’information.

Cette lettre, transmise par le ministre de la Justice au président de la commission, indiquait de manière succincte l’état d’avancement des procédures en cours. Ces informations seront restituées ultérieurement sous le point A.

b) En un deuxième temps et par deux fois, soit les 6 mai et 26 septembre 1997, la commission a auditionné de manière circonstanciée le juge d’instruction Vandermeersch.

Dans le souci de respecter la bonne fin de sa mission, le juge d’instruction a attiré l’attention de la commission sur la nécessité de rester discrets à l’égard de plusieurs éléments d’enquête. L’une de ses instructions est en effet toujours en cours et de nombreuses informations lui parviennent encore quotidiennement.

La commission tient compte à l’occasion du présent rapport du souhait légitime du magistrat instructeur. Ce préalable doit être compris dans le cadre de la mission générale de la commission d’enquête, dont les pouvoirs d’investigation et la restitution des informations récoltées à l’occasion de ceux-ci ne peuvent porter préjudice, dans un but d’intérêt général, aux enquêtes en cours.

Grâce à ses dépositions, la commission a pu apprécier le travail d’instruction réalisé par le magistrat. Les réponses de M. Vandermeersch lui ont permis de comprendre les difficultés multiples auxquelles le juge d’instruction a été confronté dans ce type de dossier. Le travail de M. Vandermeersch, les éclaircissements qu’il a pu fournir et les conclusions qu’il convient d’en tirer, seront abordés au point B.

c) Le 26 septembre 1997, le juge d’instruction Vandermeersch a transmis à la commission une liste actualisée des dossiers mis à l’instruction ainsi que l’état actuel de ces instructions.

Note du procureur général près la Cour d’appel de Bruxelles du 13 mai 1997

La note transmise par le ministre de la Justice à la commission par lettre du 19 juin 1997 reprend synthétiquement l’état d’avancement des diverses enquêtes en cours.

Cette note permet de réaliser les constatations suivantes :
dix dossiers ont été mis à l’instruction ;
seize notices ont été mises à l’information.

Les poursuites ont été entamées sur injonction du ministre de la Justice, conformément à l’article 274 du Code d’instruction criminelle.

Les plaintes se fondent essentiellement sur les articles 1er , 2, 3 et 4 de la loi du 16 juin 1993 relative à la répression des infractions graves aux conventions internationales de Genève du 12 août 1949 et aux protocoles additionnels I et Il du 8 juin 1977 à ces conventions.

Affaires mises à l’instruction

1. Dossier nº 34/95 (4 classeurs) (mise à l’instruction : 2 mars 1995).
Inculpé : R.E., ancien directeur de cabinet de l’ex-président Habyarimana.
Il est soupçonné de s’être associé aux préparatifs des massacres ou, à tout le moins, ce qui reste pénalement répréhensible, de n’avoir rien fait pour les empêcher.
Le dossier a été communiqué au parquet à toutes fins le 1er août 1996.
Constatation : ce dossier n’a pas évolué depuis plus de 15 mois.

2. Dossier nº 35/95 (14 classeurs) (mise à l’instruction : 2 mars 1995).
Inculpé : N.A., ancien chef d’état-major de la gendarmerie.
Le dossier était pratiquement terminé au mois de mai 1997.
Le procureur général souhaitait connaître les intentions d’évocation éventuelle du TPI avant de clôturer la procédure. L’instruction a permis de dégager des indices de culpabilité relatifs à une /omission d’agir " face à des crimes de droit international que l’intéressé avait pour mission de prévenir.
Une copie officieuse du dossier a été adressée au TPI pour lui permettre d’apprécier les suites qu’il convenait d’y réserver.
Constatation : l’audition du 26 septembre 1997 du juge d’instruction a permis d’apprendre que le dossier avait été communiqué au parquet durant l’été 1997. On en retient que le TPI n’a pas souhaité évoquer la procédure.

3. Dossier nº 36/95 (11 classeurs) (mise à l’instruction : 2 mars 1995).
Inculpés :
N.E., beau-neveu de l’ex-président,
B.S., ancien fonctionnaire du ministère de la Jeunesse et membre des Interahamwe,
M.S. (ex-Jean-Marie), ancien ministre de l’Industrie,
R.G., (de nationalité belge), animateur de la radio RTLM.
Le TPI a souhaité évoquer cette procédure et un arrêt de désaisissement a été rendu par la Cour de cassation le 9 octobre 1996.
Constatation : treize mois après la communication officielle de l’entièreté de la procédure, l’affaire n’est pas encore fixée à l’une des audiences du TPI.

4. Dossier nº 37/95 (32 classeurs) (mise à l’instruction : 2 mars 1995).
Inculpés :
N.V., chercheur à l’U.C L.,
H.A., ancien ministre MRND, directeur d’usine à Butare,
M.A., épouse de Higaniro Alphonse, et fille du médecin de l’ex-président,
K.J., ancien bourgmestre de Ngoma,
N.E., ancien bourgmestre de Muganza.
Ce dossier a donné lieu à quatre arrestations en Belgique. Les deux derniers cités ont été transférés le 8 novembre 1996 au TPI après 499 jours de détention préventive en Belgique.
Les deux premiers ont été remis en liberté provisoire par les juridictions d’instruction : N.V. après le dépôt d’un réquisitoire de non-lieu ; H.A. après que le TPI ait refusé, faute de charges suffisantes, de confirmer l’acte d’accusation qui le concernait.
L’arrêt de désaisissement de la Cour de cassation est donc intervenu pour trois inculpés le 31 mai 1996.
La chambre du conseil du tribunal de première instance de Bruxelles a rendu une ordonnance de prise de corps et d’envoi du dossier à M. le procureur général le 22 juillet 1996.
Le dossier remis à l’instruction pour H.A. a été communiqué à toutes fins au parquet le 25 septemre 1996.
Constatations : bien qu’il soit probable que le procureur général ait souhaité réunir les deux inculpés dont les procédures avaient un temps été disjointes, on remarque que la décision judiciaire coulée en force de chose jugée relative à M. N.V. n’a toujours pas fait l’objet du suivi normal qu’il convenait de lui réserver. À ce jour, la chambre des mises en accusation n’a en effet toujours pas été saisie du dossier qui le concerne, au mépris de l’autorité de la chose jugée, d’une part, et de l’article 217 du code d’instruction criminelle dont les délais ne sont cependant pas prescrits à peine de nullité, d’autre part. La situation est inquiétante dès lors que la Commission a pu apprendre que le dossier de M. H.A. est communiqué à l’Office du procureur du Roi depuis plus de 16 mois. Il apparaît que l’office de M. le procureur du Roi a disposé de plus d’une année pour mettre l’affaire en état conformément au souhait de jonction implicitement émis par le parquet général.
Si la procédure aboutit, les intéressés devraient comparaître devant la Cour d’assises de l’arrondissement judiciaire de Bruxelles, seule juridiction compétente dans notre pays pour statuer en matière criminelle.

5. Dossier nº 38/95 (6 classeurs) (mise à l’instruction : 02/03/1995).
Inculpés :
R.P-C., colonel des forces armées rwandaises, M.S., député et ancien bourgmestre de la commune de Saké,
X (inconnu).
Le premier est décédé le 21 juin 1995 au Cameroun, ce qui éteint l’action publique contre lui.
Le second, soupçonné d’avoir été le patron des Interahamwe de sa commune, serait impliqué dans la confection des listes des personnes à abattre et aurait participé à plusieurs meurtres. Il se trouverait en Zambie ou au Cameroun. Il fait l’objet d’un mandat d’arrêt international.
Copie du dossier a été transmise au TPI à qui il revient de prendre attitude dans le sens d’une éventuelle évocation.
Constatation : ce dossier est toujours en cours d’instruction et la confidentialité des derniers devoirs d’enquête réalisés se justifie afin d’éviter des fuites préjudiciables à la bonne fin de l’enquête.

6. Dossier nº 39/95 (3 classeurs) (mise à l’instruction : 02/03/1995).
Inculpés :
M. M.-Ch., religieuse dirigeant un couvent à Ndera, commune de Rubungo, dans la préfecture de Kigali,
X (inconnus).
La religieuse est soupçonnée d’avoir livré ses consoeurs Tutsies aux miliciens Interahamwe qui les ont violées et massacrées.
L’instruction a été communiquée à l’office du procureur du Roi à toutes fins le 7 décembre 1995. Au stade actuel de la procédure, le procureur du Roi pense rédiger un réquisitoire de non-lieu pour insuffisance de charges. Le dossier a été joint au dossier nº 37/95 précité.
Constatations : le réquisitoire d’éventuel non-lieu qui doit être soumis aux juridictions d’instruction et, à tout le moins, à la Chambre du Conseil qui reste libre d’apprécier en connaissance de cause les suites qu’il convient de donner au réquisitoire, n’est toujours pas rédigé près de 2 ans après la communication du dossier au parquet du procureur du Roi. Indépendamment de la complexité de l’affaire, l’obligation de respecter la règle du délai raisonnable indique l’urgence d’aboutir au stade du parquet.

7. Dossier nº 48/95 (12 classeurs) (mise à l’instruction : 11/03/1995).
Inculpés : R.S. et son épouse, U.I.
L’instruction est toujours en cours ; elle concerne des détournements à mettre éventuellement en rapport avec le dossier relatif à l’assassinat des 3 coopérants belges (voir infra ).
Constatation : compte tenu de l’attente d’informations à venir, notamment du Rwanda, il est concevable que le dossier reste à l’information et que le magistrat instructeur puisse continuer celle-ci en toute sérénité et sans être gêné par des divulgations qui pourraient compromettre la suite favorable de l’enquête en cours.

8. Dossier nº 57/95 (39 classeurs) (mise à l’instruction : 21/04/1995).
Inculpés :
B. T., chef de cabinet du ministre rwandais de la Défense en avril 1994,
N. B., major dans l’armée rwandaise,
S. J.-L., adjudant-chef dans l’armée rwandaise.
B. T. a été arrêté le 10 mars 1996 à son domicile, sur la base du mandat d’arrêt délivré le 29 mai 1995 par le juge d’instruction. Il a été transféré au TPI où il est actuellement détenu suite à l’arrêt de désaisissement de la Cour de cassation du 9 juillet 1996.
Un mandat d’arrêt international a été lancé contre N. B. ce même 19 mai 1995. Il a été transmis à l’appui d’une demande d’extradition vers la Belgique au ministre de la Justice. Divers rappels ont été adressés par le procureur général au ministre de la Justice, en l’espèce les 28 novembre et 20 décembre 1995 ainsi que le 3 janvier 1997.
Par courrier du 23 décembre 1996, le ministre de la Justice a fait savoir qu’il était prêt à solliciter son collègue des Affaires étrangères afin que tout soit mis en oeuvre aux fins d’exécuter l’ordre de capture.
L’intéressé est actuellement localisé en Zambie et des démarches diplomatiques s’avèrent manifestement nécessaires pour obtenir un prompt suivi de la procédure précitée. Monsieur le procureur général déplore vivement cette situation. Il préfère, ce qui est légitime, une procédure contradictoire à un procès par contumace.
Dans le cadre de cette procédure, le juge d’instruction a enregistré, le 23 juin 1995, une plainte des familles des 10 victimes paracommandos contre le général canadien Roméo Dallaire, commandant de la MINUAR, en avril 1994. La Belgique n’est pas compétente pour poursuivre le général Dallaire. Le procureur général a donc transmis la plainte au ministre de la Justice le 6 octobre 1995 en vue d’en assurer l’acheminement aux autorités canadiennes (compétentes pour entamer des poursuites sur la base de l’accord entre l’ONU et le gouvernement de la République rwandaise sur le statut de la MINUAR, fait à New York le 5 novembre 1993).
La Belgique n’a jamais réussi à obtenir l’exécution d’une commission rogatoire directe permettant d’obtenir l’audition directe du général Dallaire. L’ONU a en effet opposé à l’État belge une fin partielle de non-recevoir ; seule, une déclaration écrite du général Dallaire a été transmise au juge d’instruction ; celle-ci n’a pu être réalisée en présence du magistrat.
Constatation : il est urgent de réaliser une démarche diplomatique auprès des autorités zambiennes afin d’obtenir l’exécution du mandat d’arrêt international en vue d’extradition délivré il y a plus de 2 ans déjà par le juge d’instruction Vandermeersch.

9. Dossier nº 58/95 (5 classeurs) (mise à l’instruction : 21/04/1995).
Inculpés :
C. M.,
R. S.,
H. A.,
B. T.,
S. B.,
K. T.,
R.,
T. A.
Ce dossier est relatif à l’assassinat des trois coopérants belges : Olivier Dulieu, Antoine Godfriaux et Christine André, abattus le 7 avril 1994 dans la commune de Rambura. Le dossier porte également sur des détournements de subventions entre l’O.N.G. belge " Nord-Sud Coopération " et l’A.S.B.L. rwandaise ADECOGIKA.
Le dossier a été communiqué au parquet en vue de disjonction le 24 novembre 1995 ; celle-ci est intervenue le 28 avril 1997. Compte tenu du fait qu’une enquête était ouverte au Rwanda et qu’un suspect s’y trouvait détenu, la procédure devait être transmise au Rwanda, pays avec lequel aucun traité d’extradition n’avait été conclu en l’espèce. La dénonciation a été réalisée à la fin de l’été 1997.
L’aspect financier de l’instruction reste cependant soumis au juge belge qui poursuit ses investigations, investigations qu’il ne convient pas de restituer afin d’éviter des fuites inopportunes et préjudiciables à l’enquête. L’assurance de la poursuite effective du travail du magistrat instructeur a été obtenue par celui-ci en cours d’audition.
Constatation : la commission n’a pas connaissance du suivi réservé à cette dénonciation. Il conviendrait de réaliser une démarche à tout le moins diplomatique pour s’assurer du suivi réel réservé à la procédure au Rwanda et ce dans le respect des droits de l’homme.

10. Dossier nº 62/95 (5 classeurs) (mise à l’instruction : 03/08/1995).
Inculpés :
M. G., soeur supérieure rwandaise de l’abbaye de Sovu à Butaré,
K. M., religieuse,
M. M., journaliste belge.
La soeur a été inculpée du chef de crime de guerre par le juge d’instruction et remise en liberté. Elle vit en Belgique. Elle aurait ordonné aux réfugiés de quitter son couvent, les livrant ainsi aux milices Interahamwés qui les auraient massacrés.
Le journaliste a fait l’objet d’une plainte en diffamation.
Le dossier a été communiqué à toutes fins au parquet du pocureur du Roi le 15 mai 1996.
Constatation : indépendamment du caractère délicat du dossier, la commission n’aperçoit aucune raison à l’absence de rédaction de réquisitoire dans ce dossier communiqué depuis 18 mois.

Remarque :
Le courrier de M. le procureur général ne fait pas référence au dossier ouvert chez M. le juge d’instruction Vandermeersch le 22 mai 1995 et portant le numéro de référence 60/95.
Inculpés :
K. J.,
N. E.
Dès lors que ce dossier a été joint au dossier nº 37/95, précédemment évoqué, on peut en déduire qu’il ne s’agit pas d’une erreur ou d’une omission volontaire.

Dossiers à l’information

16 notices sont à l’information.

La commission pense bien faire de restituer le résumé analytique que lui a adressé M. le procureur général par l’intermédiaire du ministre de la Justice dans son courrier du 13 mai 1997.

La commission n’est cependant pas en mesure en l’état actuel de ces procédures de tirer des conclusions à l’égard de celles-ci. Les informations sont en effet secrètes. La mise en cause éventuelle de certaines personnes bénéficiant d’un privilège de juridiction (les ministres Willy Claes et Leo Delcroix) doit de plus s’apprécier avec une prudence extrême compte tenu du discrédit possible, et le cas échéant non fondé, que des interrogations pourraient déjà induire dans l’esprit du public.

Il n’est par ailleurs pas apparu des travaux parlementaires que le parquet général de Bruxelles ait fait l’objet de pressions dans le cadre de ces informations. L’étude de cet aspect des choses ne ressortait cependant pas de la mission première de la Commission qui n’a donc pas spécifiquement enquêté à cet égard.

Aperçu des dossiers à l’information

1. Notices de 1995
Ce dossier recueille les plaintes des familles des dix soldats belges contre les anciens ministres Willy Claes et Leo Delcroix à qui il est reproché une omission d’agir dans les limites de leurs possibilités alors qu’ils avaient connaissance d’ordres en vue de l’exécution de crimes de droit international ou de faits qui en commendent l’exécution ou alors qu’ils pouvaient en empêcher la consommation ou y mettre fin (art. 1-9º et 4 de la loi du 15 juin 1993).
Ce dossier est à rapprocher des deux suivants.

2. Notices de 1997
Ce dossier, ouvert à charge de Willy Claes, sur base de plaintes déposées par différentes victimes rwandaises, zaïroises et belges, fait l’objet d’actes d’information exécutés à la requête du procureur général près la Cour de cassation, conformément à l’article 3 de la loi du 17 décembre 1996.

3. Notices de 1997
Ce dossier, ouvert à charge de Leo Delcroix, sur base de plaintes déposées par différentes victimes, est à l’information dans les mêmes conditions que le précédent.

4. Notices de 1995
Il s’agit de l’assassinat de l’abbé Paul Késenne le 14 juillet 1994.

5. Notices de 1995
Il s’agit d’une plainte déposée le 10 mai 1995 par Eugène Rurangwa en Jean-Baptiste Murenzi contre le FPR pour l’assassinat d’une série de personnes.

6. Notices de 1995
Ce dossier accueille une plainte de l’avocat, Me De Temmerman, concernant " l’autre génocide ", c’est-à-dire les massacres que les Tutsis auraient commis sur les Hutus.

7. Notices de 1995
La plainte vise les exactions commises par le FPR.

8. Notices de 1996
La plaignante se nomme Elena Kabiligi. Elle a déposé plainte le 7 décembre 1995, notamment contre A. N., un fonctionnaire de l’ONU, pour la mort de son mari le 7 avril 1994, à Gisenyi.

9. Notices de 1996
Ce dossier contient une plainte déposée le 5 décembre 1995 contre le FPR pour l’assassinat de Mme Daphrose Nyirangaruye.

10. Notices de 1996
Il s’agit d’une plainte déposée contre T. R., F. F. et E.B. K., contre le gouvernement rwandais, pour la déportation de personnes rapatriées au Rwanda depuis la Zambie.

11. Notices de 1996
Cette plainte a été déposée par Innocent Zitoni contre inconnu pour le meurtre de son épouse, de ses enfants et de sa famille, le 15 avril 1994, à l’évêché de Kibungo.

12. Notices de 1997
Ce dossier concerne Médiatrice Niwenamuha qui réside en Belgique et dont le nom apparaît sur une liste de planificateurs du génocide au Rwanda. Le parquet a en fait été saisi par la plainte de l’intéressée elle-même contre cette inscription qu’elle juge calomnieuse.

13. Notices de 1997
Ce dossier vise Paulin Rukebesha qui habite en Belgique, dont le nom apparaît sur la même liste et qui s’en plaint.

14. Notices de 1997
Le plaignant, Gasana Ndoba, dénonce R. M. N., qui réside en Belgique, comme étant mêlé à l’enlèvement des enfants de la famille Karenzi hors du couvent où ils s’étaient réfugiés pour échapper aux massacres. Ce dossier constitue un développement séparé de l’instruction visée au nº 4 du présent inventaire.

15. Notices de 1997
Il s’agirait d’un trafic de faux passeports en cause de Maurice Bagaragaza qui réside à Louvain. Les gens ayant bénéficié de ces faux passeports seraient impliqués dans le génocide rwandais.

16. Notices de 1995
S’agissant notamment d’une plainte déposée par V. N. contre Gasana Ndoba du chef de diffamation, ce dossier est tributaire du sort qui sera réservé à l’action publique intentée contre le plaignant dans l’instruction nº 37/95 (dossier nº 4 du présent inventaire).

Le procureur général près la Cour d’appel de Bruxelles a souligné que les instructions dont il a été fait état étaient traitées prioritairement.

Le témoignage du juge d’instruction Damien Vandermeersch

Le témoin a informé la commission de ce que la majeure partie des instructions, dont il a été ou reste chargé, sont la suite directe d’injonctions positives de poursuites du ministre de la Justice.

La compétence du juge d’instruction belge est basée sur la loi du 16 juin 1993 relative à la répression des infractions graves aux conventions de Genève, laquelle prévoit en son article 7 la compétence universelle du juge belge pour des faits commis à l’étranger et ce, indépendamment du lieu de refuge de l’auteur de ceux-ci.

Cette application de la compétence universelle est une première en matière procédurale, en Belgique. La commission n’a pas connaissance de l’exercice effectif de cette compétence et de la mise en oeuvre de poursuites dans les autres pays qui ont adopté un système similaire de compétence.

Le TPI fait de plus partie de l’ordre juridique belge (loi du 22 mars 1996 relative à la reconnaissance du tribunal international pour l’ex-Yougoslavie et du tribunal international pour le Rwanda et à la coopération avec ces tribunaux).

La juridiction internationale peut, sur base de cette loi, dans les affaires qu’elle détermine souverainement, évoquer les procédures internes, c’est-à-dire se les faire soumettre par priorité afin d’en poursuivre les auteurs présumés.

L’article 6 de la loi du 22 mars 1996 dispose en effet que lorsqu’une demande de désaisissement des juridictions nationales est formulée par le tribunal à propos d’un fait relevant de sa compétence, la Cour de cassation, sur réquisition du procureur général, et après audition de la personne intéressée, prononce le désaisissement de la juridiction belge saisie du même fait, après avoir vérifié qu’il n’y a pas erreur sur la personne.

L’article 7 de la loi dispose que l’arrêt de désaisissement empêche la poursuite de la procédure en Belgique, sans préjudice de l’application de l’article 8.

Le désaisissement ne fait pas obstacle au droit de la partie civile de demander réparation. L’exercice de ce droit est cependant suspendu tant que l’affaire est pendante devant le TPI

Au terme de l’article 8 précédemment évoqué, lorsque le TPI fait savoir, après désaisissement de la juridiction belge, que le procureur a décidé de ne pas établir d’acte d’accusation, que le TPI ne l’a pas confirmé, ou que le TPI s’est déclaré incompétent, la Cour de cassation, sur réquisition du procureur général et après l’audition de la personne intéressée, règle la procédure, et s’il y a lieu, prononce le renvoi de cette personne devant la cour, le tribunal ou la juridiction d’instruction compétents.

Les critères retenus par l’office du procureur du Roi pour mettre les affaires à l’instruction depuis le 2 mars 1995 peuvent se répertorier comme suit :

1º l’injonction positive de poursuites du ministre de la Justice conformément à l’article 274 du Code d’instruction criminelle ;
2º l’impossibilité matérielle d’instruire contre toutes les personnes impliquées ;
3º l’existence d’un lien avec la Belgique :
soit lorsque des personnes impliquées se sont trouvées sur le territoire belge (on pense au dossier 58/95 relatif à l’assassinat des 3 coopérants belges),
soit lorsque l’on se trouvait en présence de victimes belges (on pense au dossier 57/95 relatif à l’assassinat des dix paracommandos belges).
Ce dossier a, en un premier temps, été instruit à l’auditorat militaire. Cependant, la compétence limitée de cette juridiction ne permettait pas un examen de la responsabilité pénale éventuelle des militaires belges. La nécessité d’enquêter sur d’autres personnes, et plus particulièrement, des " civils ", a déterminé le parquet à désigner un magistrat instructeur civil. D’emblée, le juge d’instruction Vandermeersch a souligné la parfaite collaboration qui s’est instaurée entre l’auditorat militaire et ses enquêteurs. Le substitut près l’auditorat militaire Verelst a par ailleurs été délégué au parquet du procureur du Roi dans un souci de meilleure efficacité d’enquête. Devant les juridictions militaires, l’enquête s’est clôturée après le procès du colonel Marchal, justiciable, de par son grade, de la Cour militaire. La collaboration avec l’auditorat général semble s’être bien déroulée bien qu’ayant été peu développée au moment des auditions.
Le dossier relatif à l’assassinat, le 7 avril 1994, des 3 coopérants belges (dossier nº 58/95) lui a aussi été confié au juge d’instruction sur la base de ce critère de rattachement.
soit lorsque l’auteur présumé d’un fait pouvait être de nationalité belge.
Le juge d’instruction a ainsi spécifiquement évoqué les investigations menées à l’encontre de M. Georges Ruggiu dans le cadre de ses activités à la radio RTLM.
4º la compétence universelle des juridictions belges susvisée (et ce à titre exceptionnel) ;
Cette instruction concerne un dossier dans lequel les plaignants étaient belges. L’une des personnes visées par la plainte était susceptible de se rendre sur notre territoire (dossier nº 38/95).
Le juge d’instruction a expliqué que la répartition des affaires en 10 dossiers distincts permettait une meilleure gestion procédurale. De la sorte, les instructions qu’il estimait terminées pouvaient être transmises au procureur du Roi dans l’espoir d’un suivi et sans devoir attendre que toutes les enquêtes soient clôturées.

Chaque dossier d’instruction est par ailleurs complet, le juge ayant pris soin de déposer les copies de chaque procès-verbal intéressant son enquête dans le dossier concerné par celle-ci.

L’objet de son travail est, en qualité de juge qui instruit à charge et à décharge, de recueillir un maximum d’éléments qui pourront, le cas échéant, fonder ultérieurement des preuves de culpabilité.

L’objectif d’une instruction est de permettre la tenue d’un procès et non de légitimer obligatoirement des condamnations. Le juge d’instruction a ainsi rappelé à la commission qu’un verdict d’acquittement est aussi une manière de rendre la justice.

Le magistrat a disposé d’une cellule de 5 enquêteurs de la police judiciaire, tandis que le substitut de l’auditorat militaire Verelst était délégué au parquet du procureur du Roi dans un souci d’efficacité. Le travail réalisé par les enquêteurs et par les magistrats est d’une ampleur considérable. Le dossier relatif à l’assassinat des 10 paracommandos (dossier nº 57/95) contient à lui seul près de 40 classeurs.

Globalement, les devoirs d’enquête ont été les suivants :
audition de nombreux témoins en Belgique où la communauté rwandaise est importante,
audition des plaignants,
3 séjours au Rwanda sous forme de commission rogatoire : 15 jours en mai 1995, 3 semaines en juin 1995 et 3 semaines en septembre et octobre 1995 (visite des lieux et très nombreuses auditions),
1 commission rogatoire en décembre 1995 au Togo à l’effet d’auditionner le capitaine togolais Apedo (audition dans le cadre de l’assassinat de 10 paracommandos : le capitaine Apedo, en sa qualité de représentant de l’ONU avait un bureau au camp de Kigali et avait pour mission de contrôler les armes ; il disposait de la clé de l’armoire où celles-ci devaient être entreposées ; cette armoire avait été forcée le 7 avril 1994 avant l’assassinat des 10 militaires),
1 commission rogatoire ayant abouti à l’audition de soldats ghanéens et ce, toujours en relation avec l’assassinat des 10 paracommandos,
d’autres commissions rogatoires ont été diligentées et réalisées ; elles concernaient l’ensemble des dossiers d’instruction (on pense notamment à celle acheminée à l’ONU concernant l’audition du général Dallaire).

Le magistrat a signalé avoir rencontré diverses difficultés dans le cadre de l’exécution des commissions rogatoires au Rwanda. Ces difficultés étaient liées à l’instabilité politique dans ce pays. Indépendamment de ces difficultés, le magistrat et ses enquêteurs ont disposé d’une grande liberté d’action et de mouvement pour exécuter les devoirs qu’ils estimaient opportuns de réaliser. Le rythme de travail était très élevé et la première commission rogatoire a permis la rédaction de plus de 100 auditions.

Le travail réalisé par le magistrat et par son équipe était, selon lui cependant, difficilement traduisible au travers de procès-verbaux à l’occasion desquels la restitution d’un contexte se heurte à la faiblesse des mots...

Le magistrat a travaillé dans plusieurs enquêtes en parallèle avec le TPI. Son travail a fait l’objet d’une transmission régulière au TPI à la première demande de celui-ci. À plusieurs reprises, une copie des dossiers a été mise à la disposition du TPI de manière officieuse et ce, dans un but de rapidité, d’efficacité et de bonne coopération réciproque. De son côté en effet, le juge d’instruction souhaite être éclairé sur les devoirs d’enquête réalisés à l’initiative du TPI. Ainsi, une double commission rogatoire a été adressée au TPI de manière officielle par l’intermédiaire du ministre des Affaires étrangères, d’une part, de manière pragmatique auprès du bureau du procureur général du TPI, d’autre part, et ce, afin de ménager d’éventuelles susceptibilités.

Le TPI a donc repris lui-même certaines enquêtes en vue de poursuites :
ainsi, le TPI a évoqué les poursuites à charge de M. Bagosora, inculpé par le juge d’instruction, et qui a fait l’objet d’un mandat d’arrêt international dans le cadre du dossier relatif à l’assassinat des 10 Casques bleus (dossier nº 57/95).
La Cour de cassation a dessaisi le juge d’instruction par arrêt du 9 juillet 1996 et le TPI semble vouloir fixer cette affaire au mois de septembre 1998.
Le juge d’instruction reste cependant saisi des faits relatifs aux autres personnes concernées par son instruction, notamment M. N.B. ; le TPI appartient en effet à l’ordre juridique belge et ce n’est donc qu’à l’égard du colonel Bagosora que le juge d’instruction est formellement dessaisi ; une copie intégrale du dossier répressif a été transmise sans désemparer au TPI ; c’est sur la base du mandat d’arrêt international délivré précédemment par le juge Vandermeersch que le TPI a pu faire écrouer M. Bagosora à Arusha.
Le TPI a évoqué l’ensemble du dossier qui concerne RTLM dans lequel Georges Ruggiu avait été inculpé (dossier nº36/95). La Cour de cassation avait dessaisi le magistrat belge par arrêt du 6 octobre 1996. Suite à cette évocation, un complément d’enquête est réalisé par le TPI ; il a permis l’arrestation de Ferdinand Nahimana. M. Georges Ruggiu fut, quant à lui, arrêté à Nairobi, au Kenya, au mois de juillet 1997.
Le dossier relatif aux faits de Butaré (dossier nº 37/95) a fait l’objet d’une évocation partielle. À l’occasion de son instruction, le magistrat avait décerné 4 mandats d’arrêt. Le TPI a évoqué le dossier pour 3 d’entre eux : M. Higaniro Alphonse, M. Kanyabashi Joseph et M. Ndayambaye Elie. L’arrêt de dessaisissement a été prononcé par la Cour de cassation le 31 mai 1996. Le TPI a cependant réorienté ultérieurement M. Higaniro vers la Belgique. Ces détours procéduraux ont entraîné une scission des poursuites dans la mesure où, entre-temps, la chambre du conseil avait été saisie d’un réquisitoire de non lieu à l’encontre de M. Vincent Ntezimana. Une ordonnance de prise de corps, suite au réquisitoire verbal de renvoi réalisé par le substitut Verelst, a en effet été rendue contre lui par la chambre du conseil le 22 juillet 1997.

En ce qui concerne M. Higaniro, l’enquête a repris pour se terminer par une communication à toutes fins au parquet le 27 septembre 1996. En ce qui concerne ce dernier volet, aucun réquisitoire du parquet n’a été rédigé à ce jour. Comme il a déjà précédemment été expliqué, cette absence de réquisitoire bloque de fait le suivi de la procédure contre M. Ntezimana dès lors que le parquet général souhaite qu’il soit statué par un seul et même arrêt sur le renvoi éventuel des intéressés devant la Cour d’assises de l’arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale.

Globalement, le magistrat instructeur, à 2 ou 3 exceptions près, estimait son travail terminé lors de sa première audition par la commission d’enquête, soit en mai 1997. L’ensemble des dossiers terminés, se trouvait déjà transmis à toutes fins au procureur du Roi, comme le veut le prescrit de la loi pénale.

En ce qui concerne l’exécution de sa mission, le juge d’instruction a attiré l’attention de la commission sur les recherches réalisées par lui en soulignant qu’il n’avait pas limité celles-ci à la détermination d’éventuels exécutants matériels des assassinats commis sur les 10 Casques bleus. Il a, avec ses enquêteurs, tenté de dégager d’autres responsabilités pénales éventuelles, lesquelles se situent à d’autres niveaux. Ses investigations ont tenu compte du contexte fort large dans lequel les événements se sont déroulés au Rwanda et qui ont été qualifiés, par certains, de génocide, dimension dont les enquêteurs belges ont tenu compte dans le cadre de leur enquête.

En ce qui concerne la détermination à mener à terme les procès en Belgique

Le magistrat instructeur a fait état de ses craintes réelles quant à une volonté de mener les procès en Belgique. Il relève, au-delà de l’important travail réalisé, qu’un verdict d’acquittement est aussi une manière de rendre la justice. Son souhait n’est autre que de voir le juste aboutissement, au travers d’un débat contradictoire, du travail d’instruction réalisé jusqu’ici. Le magistrat a signalé à la commission qu’il avait eu le sentiment de servir d’alibi et de gêner, par sa détermination, les instigateurs habituels des procédures judiciaires.

Les exemples qu’il a donnés en commission pour étayer son propos peuvent être déduits des éléments suivants :
les dossiers communiqués au parquet, souvent depuis 1996 et parfois, même, 1995, n’ont pas fait l’objet de réquisitoires ;
le dossier de Butare (nº 37/95) a donné lieu à une ordonnance de la chambre du conseil au mois de juillet 1996 ; la deuxième partie du dossier a été clôturée deux mois plus tard, soit en septembre 1996 : là aussi, aucun réquisitoire ne permet d’avancer ;
trois dossiers ont été transférés au TPI sans qu’aucune interpellation quant à une date réelle de fixation n’ait été demandée par les autorités belges ;
le substitut Verelst a été chargé des dossiers qui concernent l’ex-Yougoslavie et lui-même, dès le mois de décembre 1995, soit après 7 mois d’enquête, s’est vu confier de nouvelles affaires ; 400 nouveaux dossiers ont ainsi été déférés à son cabinet en 1996. Évoquant les dossiers du Rwanda, le magistrat se demande dès lors comment il est encore possible de les qualifier de dossiers prioritaires. Cette surcharge de travail, certes légitime quand on connaît l’encombrement des juridictions bruxelloises touchées par un manque d’effectifs réel, suscite néanmoins son scepticisme et sa déception ;
c’est, in fine , le seul dossier relatif à l’assassinat de trois coopérants belges (dossier nº 58/95) qui a jusqu’ici abouti, les faits ayant été régulièrement dénoncés aux autorités rwandaises après enquête en vue de poursuites.

Le magistrat s’est vu opposer des remarques relatives aux difficultés matérielles d’organiser les procès en Belgique. De fait, les procédures devant la Cour d’assises sont des procédures orales et la comparution des témoins pose des questions d’organisation et de financement réelles.

En ce qui concerne les suites d’enquête au cours des six derniers mois

Le 26 septembre 1997, le juge d’instruction Vandermeersch a à nouveau été appelé par la commission d’enquête, qui souhaitait connaître l’évolution des dossiers en cours.

Globalement, aucune évolution significative n’a été notée. Tout au plus, le juge d’instruction a-t-il fait savoir que l’enquête se poursuivait activement dans le cadre du dossier, demeuré belge, qui concernait l’assassinat de trois coopérants (dossier nº 58/95).

En ce qui concerne les réquisitoires attendus depuis les communications des dossiers à toutes fins, le juge d’instruction a fait état de la désignation d’un nouvel avocat général pour l’ensemble des dossiers. Il s’agit de M. Wynant, qui succède ainsi à M. de Codt, nommé conseiller à la Cour de cassation au mois de juin 1997.

Les suites réelles d’enquête pour les autres dossiers se résument à ce qui suit :
le dossier nº 48/95 : des informations arrivent quotidiennement au magistrat et font l’objet d’analyses ; des informations concernant M. Rwabukumba sont donc à l’étude ;
le dossier relatif à M. Bagosora (dossier nº 57/95) : le juge d’instruction s’est mis en rapport avec le magistrat national Duinslaeger qui assure la transmission des dossiers entre autorités judiciaires et Ministère des Affaires étrangères. En effet, M. Ntuyahaga, qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt international délivré par le juge d’instruction, a été localisé en Zambie.
Le magistrat craint le peu d’intérêt des Zambiens dans le cadre de cette affaire et a même fait appel au pouvoir politique de la commission d’enquête pour tenter de rendre cette procédure réellement prioritaire ;
24 personnes sont actuellement détenues à Arusha et le magistrat souhaiterait en interroger une dizaine. Parmi les auditions importantes, il pense à celles de M. Ferdinand Nahimana, responsable de RTLM, du colonel Bagosora par rapport à l’assassinat des Casques bleus, de M. Georges Ruggiu, toujours dans le cadre de RTLM. Il a ainsi rédigé une commission rogatoire destinée à obtenir l’audition de 12 personnes. Celle-ci fut envoyée deux fois par la voie officielle du Ministère des Affaires étrangères dans un premier temps, au TPI. Le juge d’instruction a reçu le feu vert du procureur du Roi, du procureur général et du ministre de la Justice dans le cadre de cette commission. Il attend à l’heure actuelle le feu vert des autorités tanzaniennes et du TPI. Ses craintes viennent du fait que le TPI est déjà apparu " jaloux de ses informations préférant les utiliser dans ses procès publics avant de les divulguer aux autres autorités concernées. Les procès du TPI étant longs, le délai risquerait alors de compromettre sérieusement la bonne fin de la mission du juge d’instruction. Celui-ci a donc préféré à titre presque diplomatique solliciter des auditions à titre de simples renseignements dont le formalisme est moins long. Un récent entretien avec le président Kama du TPI lui a paru de bonne augure. Mme le procureur général Harbor ne lui a cependant pas encore réservé de réponse favorable. Officieusement, le juge, malgré un scepticisme que la position de Mme Harbor justifie, espérait se rendre à Arusha dans le courant du mois de décembre 1997.


Source : Sénat de Belgique