L’Irak de l’après-guerre

Constantza est un port roumain situé sur la côte de la mer Noire.
Là-bas, aucune statue de Saddam n’a été renversée. Aucun coup de feu
n’a été tiré. Pourtant, de là-bas, on a apporté une importante
contribution à la victoire sur Saddam Hussein.

La ville portuaire de Constantza est située presque à mi-chemin entre
Berlin et Bagdad. C’est là que, aux confins amis de l’Europe, la
Roumanie a accueilli plus de 1.000 soldats américains déployés afin de
désarmer et de libérer l’Irak. Dans un geste de solidarité avec la
coalition contre l’Irak, la Roumanie a prêté ses terrains d’aviation à
l’installation d’un pont aérien vers le Golfe. C’est ainsi que de
nombreux outils indispensables à la victoire sont passés par
Constantza. Les hommes, les femmes, les équipements et les fournitures
ne sont pas tous arrivés en masse dans le golfe Persique, mais à point
nommé, dans un ordre déterminé, et dans des combinaisons précises de
ressources de façon à assurer la victoire. Constantza, et les
ressources fournies par les Etats de l’Europe centrale, ont réellement
facilité le succès de notre intervention militaire.

La guerre a également été gagnée grâce à l’appui de la Bulgarie, où
des forces américaines ont utilisé la base aérienne de Sarafovo sur la
Mer noire. La victoire a également été remportée grâce à la Slovaquie,
qui a envoyé au Koweït un contingent de spécialistes de la lutte
contre les armes chimiques, et à la Pologne, qui a dépêché des forces
spéciales pour combattre aux côtés des troupes américaines. Cependant,
le déploiement de forces américaines en Roumanie offre un aperçu de la
façon dont les Etats-Unis pourraient redéployer leurs structures
militaires permanentes en Europe.

Notre conception stratégique du monde a commencé à changer bien avant
le 11 septembre 2001. Les nations autrefois dominées par l’Union
soviétique sont maintenant libres et indépendantes. Aujourd’hui, nous
avons appris que la disparition de la menace soviétique ne signifiait
pas la fin de toutes les menaces, que de nouveaux dangers ont vu le
jour et qu’il faut y parer partout où ils se manifestent. Dans ce
contexte, alors que nous nous préparons aux futurs conflits qui
risquent de surgir, l’exécution de la guerre en Irak pose une question
importante : les bases militaires que nous avons installées depuis
longtemps dans des pays membres de l’OTAN constituent-elles la
meilleure position pour nos troupes ? Nous devons à l’évidence
maintenir des forces dans certains pays membres de l’OTAN depuis
longtemps. Cependant, il est clair, à la lumière de l’Irak, que nous
devons étudier sérieusement les nouvelles possibilités qui s’offrent à
nous, notamment en Europe du Sud-Est.

Nous avons des bases sur le territoire de nos partenaires de l’OTAN
depuis près de 60 ans. L’un des principaux est l’Allemagne, où nous
avons plus de 80.000 troupes. La plupart de nos blessés en Irak ont
été évacués vers des installations médicales américaines en Allemagne,
bien que ce pays se trouve à 3.500 kilomètres de Bagdad. Nous avons
soutenu le déploiement en Irak à partir de bases aux Etats-Unis ou
installées sur des territoires de l’OTAN depuis longtemps. Mais cette
fois-ci, nous avons également établi des bases temporaires dans
d’autres régions de l’Europe, notamment en Roumanie, en Bulgarie, en
Hongrie et ailleurs. Ces pays sont, ou seront bientôt, de nouveaux
membres de l’OTAN, et ils ont encore fraîchement à la mémoire
l’horreur des régimes répressifs. Ils ont tous été des membres loyaux
et énergiques de notre coalition visant à désarmer Saddam et à libérer
l’Irak.

Il existe d’abondantes possibilités d’établir des bases en Europe
centrale et sud-orientale. Il y a notamment des ports stratégiques
tels que celui de Constantza, et des dizaines d’autres installations
qui fournissent une grande souplesse de réaction à des menaces venues
du Proche-Orient et de l’Asie centrale. Certes nombre de ces
installations datent de l’ère soviétique, mais elles ont été modifiées
de façon à être conformes à l’impératif d’interopérabilité avec
l’OTAN, et à la doctrine logistique de cette organisation.

Les avantages de ces nouvelles possibilités sont les suivants :

 Ces endroits sont plus rapprochés des sources actuelles de menace.
Bien avant le 11 septembre, il était devenu évident que les nouvelles
menaces émanaient du Sud, de l’Est et d’ailleurs, au gré des
déplacements des cellules terroristes. Il suffit d’étudier une carte
pour se rendre compte des avantages pratiques et opérationnels de la
Roumanie et de la Bulgarie.

 Ces pays souhaitent notre présence. Contrairement à l’attitude qui
prévaut dernièrement en Allemagne, ainsi qu’en France, qui refuse
depuis des décennies d’accueillir nos troupes sur son sol, des pays
tels que la Roumanie et la Bulgarie nous ont invités, et les sondages
d’opinion montrent que cette hospitalité officielle reflète la volonté
des peuples.

 Ces nouvelles bases seront efficaces. Les nouvelles économies de
marché de l’Europe font preuve d’un grand zèle en matière de liberté
économique, et les opérations y coûtent tout simplement moins cher.
Une garnison près de Bucarest coûtera moins cher qu’une garnison à
Bonn.

Il est temps de réévaluer nos choix de bases en Europe. Nous devons le
faire non pas afin de punir un allié qui n’a pas été d’accord avec
nous, ni même pour récompenser nos nouveaux alliés européens, mais
pour servir les intérêts stratégiques des Etats-Unis d’Amérique. Les
nouvelles démocraties de l’Europe offrent des possibilités et des
avantages stratégiques, et elles partagent avec nous des valeurs qui
nous aideront à gagner le prochain conflit, ou tout simplement à
l’empêcher.

Traduction officielle du département d’État