Libération (France) | 7 août 2003
La Jamaa Islamiya revendique l’explosion en Indonésie
L’ombre de Ben Laden sur l’attentat de Djakarta
Même affaibli, le réseau Al-Qaeda reste actif et pourrait s’en prendre à nouveau à l’Occident.

À la Une de Libération : « Attentat de
Djakarta, La marque AL-Quaeda »
. Le
quotidien précise :« L’explosion de mardi
en Indonésie a été revendiquée par le Jamaa
Islamiya, succursale locale du réseau de Ben
Laden »
.

La piste de la Jamaa Islamiya, « succursale » du réseau Al-Qaeda en Asie, semble se confirmer. La police
indonésienne qui enquête sur l’attentat perpétré mardi contre l’hôtel Marriott de Djakarta (14 morts, 150 blessés au moins) a relevé
hier nombre de similitudes avec l’attentat de Bali (202 morts le 12 octobre), pour lequel la Jamaa Islamiya (JI) est tenue
responsable
. Selon les policiers, les composants de la bombe utilisés étaient identiques : une combinaison d’explosifs de faible
(poudre noire et chlorate de potassium, un composé utilisé pour les engrais) et de forte puissance (TNT). Or, à Bali aussi un
cocktail d’explosifs au TNT et au chlorate de potassium avait été utilisé. Autre élément convergent vers la JI : la police a indiqué
que l’hôtel Marriott se trouvait dans une zone citée comme une cible potentielle dans des notes saisies chez neuf membres présumés
de cette organisation
, en juillet. Les suspects avaient été arrêtés à Java, parallèlement à la découverte
d’une cache renfermant 1200 détonateurs, 900 kg de chlorate de potassium et du TNT ­ encore les mêmes explosifs que ceux utilisés à Bali.
Zones d’ombre. Le modus operandi paraît également similaire. « La bombe a été déclenchée par un téléphone portable », a révélé hier
l’un des responsables de l’enquête, Erwin Mappaseng, selon qui « cette façon de procéder est analogue à celle utilisée lors de
l’attentat de Bali et celle contre la résidence de l’ambassadeur des Philippines »
. L’attentat de Bali avait quant à lui été perpétré
au moyen de deux bombes. L’une avait tout d’abord été actionnée par un kamikaze, tandis que la seconde, placée dans une voiture
garée à quelques mètres, avait été actionnée au moyen d’un téléphone portable peu après. Dans le cas du Marriott, des zones d’ombre
subsistent pourtant
. Un déclenchement à distance semble écarter a priori l’hypothèse d’un attentat-suicide. Or, aux dires mêmes des
enquêteurs, les restes d’un corps ont bel et bien été retrouvés dans les décombres de la voiture piégée...
« Avertissement ». Une revendication, dont la police était toujours hier en train d’examiner l’authenticité, est par ailleurs parvenue
au quotidien de Singapour, The Straits Times. Un interlocuteur cité par le quotidien, et présenté
comme un militant de la JI
, aurait
proclamé
que l’attentat du Marriott devait servir d’« avertissement sanglant » à la présidente indonésienne
Megawati Sukarnoputri :
« C’est un message pour elle et tous nos ennemis : s’ils exécutent l’un de nos frères musulmans, nous poursuivrons cette campagne de
terreur en Indonésie et dans la région. »
Une allusion sans aucun doute au premier verdict, attendu aujourd’hui, dans les procès
contre de présumés militants de la JI, accusés d’être les auteurs de l’attentat de Bali....

Philippe Grangereau


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  Le surtitre de l’article est catégorique, « La Jamaa Islamiya revendique l’explosion en Indonésie », tout comme la Une du journal : « L’explosion de mardi a été revendiquée par la Jamaa Islamiya ». Pourtant, les informations que présente le journaliste dans son article ne permettent pas une telle affirmation : « Une revendication, dont la police était toujours hier en train d’examiner l’authenticité, est par ailleurs parvenue
au quotidien de Singapour,
The Straits Times. Un interlocuteur cité par le quotidien, et présenté
comme un militant de la JI
, aurait
proclamé
que l’attentat du Marriott devait servir d’"avertissement sanglant" »
.

 Libération publie une carte présentant « les attentats antioccidentaux depuis le 11 septembre 2001 ». Le quotidien établit des liens entre seize attentats qui ont eu lieu dans neuf pays. Il affirme que ces attentats étaient tous « antioccidentaux ». Pourtant, chacun des ces événements fait l’objet d’interprétations différentes. Nous n’avons aucune certitude sur les auteurs de ces divers attentats et aucun élément ne permet de faire de lien évident entre eux.

 Libération publie une interview d’un « spécialiste des réseaux terroristes », Rohan Gunaratna, qu’il présente comme un expert indépendant : « chercheur du Centre d’études sur le terrorisme et la violence politique à l’université Saint-Andrews, en Ecosse », il « a travaillé pour l’ONU en qualité d’enquêteur au sein du département de prévention du terrorisme ». Le quotidien ne juge pas utile de préciser à ses lecteurs qu’il est membre de l’Institut international de politique sur le contre-terrorisme de Tel Aviv. Précision pouvant s’aver utile, deux anciens directeurs des services secrets de l’armée israélienne siègent au Conseil d’administration : les généraux Shlomo Gazit et Eli Zeira. Cet Institut s’est fait une spécialité de dénoncer des liens supposés entre les mouvements palestiniens de résistance, Al Qaïda et « l’Axe du Mal ». Libération ne précise pas non plus qu’il a été, à l’instigation du Pentagone, nommé président du Groupe de travail de l’OTAN sur le terrorisme et que l’université de Saint-Andrews est financée par la Rand Corporation, le lobby militaro-industriel états-unien.

 L’interview du « spécialiste des réseaux terroristes », Rohan Gunaratna, se termine par cette affirmation : Oussama Ben Laden est « un homme qui a le culte du secret. Il ne communique plus que par messager, même s’il utilise parfois encore le courrier électronique. » Libération oublie de préciser si Ben Laden utilise AOL, Hotmail ou LaPoste.net.

 Dans l’éditorial présenté en vis-à-vis des articles, Patrick Sabatier explique que « Ben Laden semble avoir profité de la désertion de George W. Bush sur le front de la "guerre au terrorisme" ». Le directeur-adjoint de la rédaction conclut : « Ben Laden et Al-Qaeda restent la menace principale pour la sécurité des démocraties libérales. » Le principe de l’éditorial est de donner la position du journal sur un sujet. Négligeant le travail de ses propres journalistes, la direction de Libération reprend à son compte le point de vue de l’extrême droite militaire états-unienne.

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