La violation de l’espace aérien libanais et le bombardement d’Aïn el-Saleh, un village syrien proche de Damas, par l’armée israélienne ouvrent probablement une nouvelle période de larmes et de sang au Proche-Orient. Ces agressions ont été symboliquement entreprises le jour du 30eme anniversaire de l’attaque égypto-syrienne contre Israël qui marqua le début de la Guerre du Kippour. Elles visent à préparer l’opinion publique internationale à une guerre états-unienne contre la Syrie et le Liban, et à une frappe aérienne israélienne contre l’Iran.
C’est pourquoi ces agressions s’accompagnent d’une intense campagne de communication les présentant comme des actes de défense préventive, selon la terminologie en cours à Washington. Changeant leur discours habituel, les porte-parole de Tsahal et du gouvernement Sharon n’évoquent plus une responsabilité collective des Palestiniens pour les attaques commises par une organisation particulière. Au contraire, ils s’efforcent de construire un lien entre le Jihad islamique, la Syrie et l’Iran, et de les rendre collectivement responsables de l’attaque suicide perpétré à Haïfa par Me Hanadi Tayssir Jeradat, une jeune avocate de Jénine.
Il est surprenant d’observer le grégarisme de la presse occidentale, qui a majoritairement admis -sans aucune vérification- les imputations israéliennes relatives à l’existence d’un camp d’entraînement terroriste, à Aïn el-Saleh, où les Iraniens formeraient à la fois des combattants du Hezbollah, du Jihad islamique et du Hamas, trois formations qui se livrent par ailleurs une guerre fratricide. De même, il est étonnant de constater la facilité avec laquelle la presse occidentale a admis, contre toute évidence, que le bombardement d’Aïn el-Saleh était une riposte à l’attentat d’Haïfa, alors même qu’Israël avait déjà exercé une riposte à Gaza.
Enfin, il est particulièrement étrange de relever que cet argumentaire tiré par les cheveux de la riposte exercée contre la Syrie pour un attentat de la résistance palestinienne a suffi à faire oublier tout contexte à la presse occidentale. Voici deux ans que George W. Bush a annoncé son intention d’attaquer successivement l’Irak, puis la Syrie et l’Iran. Devant nous se construit le dossier d’accusation des prochaines cibles : la Syrie cacherait les armes non conventionnelles de Saddam Hussein ; les dirigeants en fuite de Bagdad auraient trouvé refuge à Damas ; des fedayins entreraient en Irak pour y commettre des attentats en passant par la frontière syrienne ; la Syrie auraient infiltré des espions au camp de Guantanamo ; la Syrie abriterait non seulement le quartier général politique d’organisations palestiniennes, mais aussi leurs bases militaires L’Iran serait l’instigateur de toutes les décisions de la Syrie et du Hezbollah ; il serait sur le point de produire de l’uranium enrichi pour constituer une bombe atomique ; etc.
Loin d’être une riposte légitime à l’attentat d’Haïfa, l’agression contre la Syrie est le début d’une série d’opérations militaires à venir.
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