En Haïti, un groupe paramilitaire mène des attaques coordonnées contre les villes, s’attaquant aux commissariats pour libérer les criminels et des personnes impliquées dans des massacres. Apparemment, ils tuent quiconque s’oppose à eux. Ces groupes semblent opérer avec l’approbation tacite de politiciens s’opposant au gouvernement haïtien et beaucoup de ces rebelles ont des liens avec l’ancienne junte militaire qui avait renversé Aristide. Ils disposeraient d’une base de replis en République dominicaine.
Depuis ma première visite en Haïti, en 1994, j’y ai passé beaucoup de temps et ce pays ne ressemble pas à ce que j’en lis ici dans les journaux. En effet, on affirme ici qu’Aristide utilise des milices armées pour rester au pouvoir afin de sous-entendre que ce qui se passe là-bas n’est qu’une lutte entre deux factions aussi illégitimes l’une que l’autre. En réalité, on a d’un côté un groupe disparate rassemblant des duvalliéristes, des anciens partisans de la junte et des groupes qui ont souffert sous les deux précédents régimes qui ne sont unis que par leur opposition à Aristide et de l’autre un président élu deux fois avec des majorités écrasantes et disposant du soutien du Parlement. C’est vrai qu’il y a eu des cas litigieux lors des élections parlementaires de mai 2000, mais huit sièges seulement posent problèmes et la majorité du parti d’Aristide est plus large. Difficile dans ces conditions de qualifier les élections de frauduleuses comme l’ont pourtant fait des diplomates étrangers.
C’est suite à cette élection que les États-Unis ont refusé de contrôler le bon déroulement de l’élection de 2002 qui a entraîné la victoire d’Aristide. L’opposition avait décidé de la boycotter et la présente comme illégitime contre toute évidence. Après quoi les États-Unis ont cessé toute aide économique à Haïti et ont soutenu l’opposition, sapant la présidence. Les Haïtiens se battent pour la démocratie depuis plus de 20 ans. Il ne faut pas laisser perpétrer un 33ème coup d’État qui ne pourra mener qu’à une guerre civile et à une nouvelle dictature.

Source
New York Times (États-Unis)
Le New York Times ambitionne d’être le premier quotidien global au travers de ses éditions étrangères.

« Why Aristide Should Stay », par Tracy Kidder, New York Times, 26 février 2004.