Dans le cadre de l’examen de la question de la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne, le Conseil de sécurité a entendu ce matin le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Ibrahim Gambari, qui a fait un exposé sur l’évolution de la situation au cours des derniers mois.

Dans sa présentation, M. Gambari a déclaré aux membres du Conseil que la situation au Moyen-Orient avait été marquée par le désengagement israélien de la bande de Gaza, qui s’est déroulé plus rapidement et mieux que ne l’anticipait la plupart des observateurs. Les factions palestiniennes ont respecté la trêve à l’égard de laquelle elles s’étaient engagées au cours du déroulement de cette opération, a noté M. Gambari. L’évacuation des colons israéliens s’est achevée lundi dernier, a-t-il précisé. Cependant, a-t-il noté, le retrait israélien a été assombri par le meurtre gratuit, en Cisjordanie, de travailleurs palestiniens par ce que le Premier Ministre Sharon a lui-même qualifié de « terroristes juifs ».

Parlant du Quatuor et de ses engagements sur la question du Moyen-Orient, M. Gambari a dit que les envoyés du Quatuor s’étaient réunis la semaine dernière à Jérusalem pour faire le point de la situation qui prévaut sur le terrain et préparer les réunions à venir du Quatuor. Concernant la bande de Gaza, M. Gambari a relevé qu’après que les colons Israéliens l’auront quittée, le personnel militaire israélien continuera d’y mener certaines tâches avant de s’en retirer complètement, sans doute au mois d’octobre. Pour sa part, le Secrétaire général attend qu’une occasion lui soit offerte pour faire avec les autres membres du Quatuor le point sur les progrès accomplis dans le cadre du désengagement israélien, et de débattre des problèmes nés de ce retrait, comme cela a été souligné par l’Envoyé spécial du Quatuor pour le désengagement, M. James Wolfensohn. Après les quatre visites qu’il a effectuées sur le terrain avant le désengagement israélien, M. Wolfensohn continue de concentrer son attention sur six points essentiels. Ces questions ont trait aux points de passage et aux corridors commerciaux existant entre la bande de Gaza et Israël ; au lien de transport à établir entre la bande de Gaza et la Cisjordanie ; aux déplacements des Palestiniens à l’intérieur de la Cisjordanie ; à l’aéroport et au port de Gaza ; et aux logements qui constituaient les implantations israéliennes, et aux serres de culture qui existaient dans ces colonies. Bien que des contacts aient été établis entre Israéliens et Palestiniens sur ces questions, il serait bon que les débats y afférant soient connus, afin que leurs éventuels résultats ne soient pas mis en danger.

Concernant le retrait israélien de la bande de Gaza, M. Gambari a rappelé que le Premier Ministre Sharon avait lui-même indiqué dans une déclaration télévisée que « l’évolution des réalités en Israël, dans sa région et dans le reste du monde imposait une réévaluation de la politique d’Israël et un changement de sa position. Israël ne peut garder indéfiniment la bande de Gaza. La croissance démographique palestinienne et la pauvreté dans laquelle elle vit sont telles que la haine ne peut qu’y croître si elle n’a aucun espoir pour l’avenir ». Les forces de défenses israéliennes ont conduit les opérations de désengagement de manière efficace en évitant d’avoir recours à la force, a noté M. Gambari. Pour sa part, l’Autorité palestinienne a renouvelé son engagement en faveur d’un retrait israélien qui se fasse en douceur et sans violence et elle a indiqué qu’elle coopérerait avec la partie israélienne pour qu’il en soit ainsi. Le 9 août, le Président Abbas a dit au Conseil législatif palestinien qu’« un retrait réussi et le maintien de la sécurité étaient aussi la responsabilité des Palestiniens, qui doivent montrer au monde qu’ils méritent leur liberté et leur indépendance », a indiqué le Secrétaire général adjoint.

Parlant de la sécurité, M. Gambari a déclaré que la multiplication des enlèvements d’étrangers dans la bande de Gaza au cours des derniers mois indiquait que la situation de sécurité s’y était dégradée au cours de la période qui a précédé le désengagement. Cette dégradation est aussi une indication de problèmes causés non seulement par des factions armées, mais aussi par des groupes familiaux et claniques armés. M. Gambari a dit que la communauté internationale espère que l’Autorité palestinienne appliquera les changements qu’elle a promis sur le plan de la sécurité le plus tôt possible. Les engagements pris par les principales factions armées palestiniennes ont néanmoins, d’un point de vue général, contribué à réduire de manière significative les attaques armées contre des objectifs israéliens à l’intérieur des territoires occupés, a relevé M. Gambari. Le Coordonnateur américain des questions de sécurité, le général Ward, a continué à assister l’Autorité palestinienne dans la mise en œuvre des ressources qui devaient permettre un retrait israélien sans violence. L’Autorité palestinienne aura besoin du maintien de cette assistance internationale jusqu’au moment où elle disposera de forces lui permettant d’user de son monopole de l’usage de la force dans les territoires qu’elle contrôle, a dit M. Gambari.

Concernant la question des activités de colonisation israélienne de territoires appartenant aux Palestiniens, M. Gambari a dit que des rapports provenant de groupes de surveillance non gouvernementaux indiquaient que la construction de colonies s’était poursuivie au cours du mois qui vient de s’écouler. Le Ministère israélien du logement et des travaux publics a lancé des appels d’offres pour la construction de 235 logements cette année, notamment autour de Jérusalem. Le 4 août, le même Ministère a lancé des appels d’offres pour la construction de 72 maisons à Betar Ilit, qui se situe entre Jérusalem et la colonie de Etzion. Le 25 juillet, le Comité israélien de planification de la municipalité de Jérusalem a pour sa part approuvé le plan du Ministère du logement de construire une nouvelle enclave juive de peuplement dans le quartier musulman de la vieille ville de Jérusalem.

Après avoir indiqué que la commission des affaires économiques de la Knesset avait approuvé un plan d’aide triennal de 97 millions de shekels pour améliorer les infrastructures et soutenir l’expansion des colonies de la vallée du Jourdain, le Secrétaire général adjoint a ajouté que le développement des colonies est une question qui ne peut pas être dissociée de celle concernant la construction de la barrière de sécurité israélienne. La portion entourant Jérusalem devrait être achevée en septembre et des décrets d’expropriation pour 396 acres ont été promulgués. La confiscation des terres et la construction de cette barrière se sont poursuivies en Cisjordanie le mois dernier, a-t-il dit. Après l’attaque-suicide du 12 juillet dernier, les Forces israéliennes avaient imposé un bouclage général des territoires.

Le 14 août, le Président Abbas a approuvé des amendements juridiques apportés aux textes de loi de base palestiniens. Selon un décret présidentiel, les prochaines élections législatives auront lieu le 25 janvier 2006. Les amendements spécifient que le terme de la présidence de l’Autorité palestinienne est de quatre ans et que les élections législatives doivent avoir lieu tous les quatre ans également. En prévision des élections législatives, 80% des votants se sont inscrits sur les listes électorales. Les équipes mobiles d’inscription ont enregistré 90 000 nouveaux électeurs.

Abordant la situation au Liban, M. Gambari a indiqué que la situation en matière de sécurité continue d’être instable, le 22 août une bombe ayant explosé à Beyrouth a blessé de nombreuses personnes et causé d’importants dégâts. Après la formation du nouveau Gouvernement libanais par le Premier Ministre Fouad Siniora, le Représentant personnel du Secrétaire général pour le Sud-Liban, M. Geir Petersen, a réitéré la détermination des Nations Unies à travailler avec les autorités libanaises et a offert l’aide de l’Organisation. Au cours de ses discussions avec le Gouvernement libanais, M. Petersen a insisté sur la nécessité de déployer l’armée libanaise dans le Sud-Liban. Le commandant de la Force des Nations Unies au Liban, Alain Pellegrini, a aussi souligné la nécessité de maintenir le calme le long de la Ligne bleue et d’éviter toute provocation.

Dans ses observations, M. Gambari a estimé que le désengagement de la bande de Gaza et du nord de la Cisjordanie a constitué un tournant. Les Israéliens ont démontré qu’ils disposaient de la maturité nécessaire à l’instauration d’une paix durable tandis que les Forces armées israéliennes ont fait la preuve de leur capacité à s’acquitter de leur mandat avec la retenue voulue. Le Premier Ministre israélien devrait être félicité pour sa détermination et son courage à mettre en œuvre le plan de retrait. Sous l’égide du Président Abbas, les Palestiniens ont accueilli sobrement cette importante étape de leur histoire. Les qualités de dirigeant de Mammoud Abbas demeureront essentielles à un moment où les attentes sont élevées et où les préoccupations relatives à la Cisjordanie augmentent.

La voie à suivre ne sera pas aisée et aucune partie ne doit être exempte des obligations que lui impose la Feuille de route. Le Président Abbas doit relever le défi qui est de développer le secteur de la sécurité et d’assurer que l’Autorité palestinienne détient elle seule le monopole du recours à la force sur son territoire. De son côté, Israël doit geler toutes les activités liées aux colonies de peuplement en Cisjordanie. La période après le retrait sera à l’ordre du jour de la réunion du Quatuor prévue le mois prochain. Il sera alors nécessaire de ramener ce processus dans le cadre de la Feuille de route et de la vision de deux États vivant côte à côte.

Source : ONU
Réf. : CS/8479