En surface, le renversement de Jean-Bertrand Aristide est tristement familier et apparaît comme le fruit d’un coup d’État contre un gouvernement démocratique. Toutefois, malgré les apparences et le chaos regrettable, sa chute n’est pas un recul de la démocratie. Il s’agit de la chute d’un dirigeant qui avait détourné son mandat électif pour truquer les élections, intimider l’opposition et tolérer la corruption.
Quand il a démissionné, Aristide n’était plus le dirigeant démocratiquement élu de son pays. L’érosion de la fragile démocratie haïtienne a commencé peu après la restauration d’Aristide au pouvoir par Bill Clinton et est arrivée à un tournant quand Léon Manus, le chef de la commission électorale haïtienne, a refusé de valider les élections parlementaires en juillet 2000 et a dû fuir son pays en raison des menaces. Les campagnes électorales ont été si corrompues que les États-Unis, l’Union européenne et le Canada ont refusé d’envoyer des observateurs internationaux pour la présidentielle qui a vu la victoire d’Aristide. Suite à cette élection, Haïti fut exclue de la Communauté des démocraties, l’organisation regroupant les 118 pays du monde disposant d’un gouvernement élu et respectant les bases de la démocratie.
On peut voir des manifestations de révoltes contre d’autres pseudo-démocrates en Ukraine ou au Venezuela. Cela pose des questions car la plupart de ces pseudo-démocrates ne sont pas des dictateurs sanglants. Ils détournent et sapent la démocratie petit à petit. En dépit des ambiguïtés des révoltes contre eux, elles représentent une tendance saine car elles manifestent une opposition croissante aux régimes corrompus.

Source
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« Fall of a Pseudo-Democrat », par Adrian Karatnycky, Washington Post, 17 mars 2004.