C’est un plaisir et un grand honneur pour nous de pouvoir vous accueillir ici, à Berlin, à la Conférence de l’OSCE sur l’antisémitisme.

Le gouvernement fédéral vous a tous conviés à cette conférence à Berlin - dans notre capitale, la ville où, il y a près de soixante-dix ans, non très loin des lieux où nous nous trouvons, l’extermination des Juifs d’Europe a été décidée, planifiée et mise en œuvre. En accueillant cette conférence, nous voulons reconnaître la responsabilité historique et morale que porte l’Allemagne pour la Shoah. Le souvenir de ce crime monstrueux contre l’humanité continuera, à l’avenir également, de marquer la politique allemande.

Aussi suis-je particulièrement impressionné et touché que vous soyez si nombreux à avoir accepté notre invitation à venir à Berlin, désormais réunifiée et démocratique. Nous comptons aujourd’hui parmi nous non seulement des représentants d’États et de gouvernements, mais aussi et surtout des associations, des groupes et des initiatives de la société civile, des parlementaires et des journalistes.

Vous tous, membres de gouvernements ou représentants de groupes de la société civile qui venez de tous les pays de l’OSCE, vous donnez vie, ensemble, à cette conférence et faites savoir que l’antisémitisme n’est justement pas que le problème des autres - le problème d’autres pays, d’autres temps ou d’autres cultures -, mais qu’il nous concerne tous.

Nous, les États participants de l’OSCE, reconnaissons avec cette conférence que nous sommes tous chargés de combattre et de vaincre, ensemble, l’antisémitisme dans nos pays. Tel est le message principal et essentiel de cette conférence.

L’antisémitisme est une menace qui nous concerne tous - pas seulement les gouvernements. C’est la raison pour laquelle il est tellement important que cette conférence soit ouverte à la société civile. Nous pouvons observer dans les différentes salles l’engagement des groupes et des initiatives de la société civile, découvrir leurs présentations, leurs expositions, les échanges intenses qu’ils pratiquent les uns avec les autres.

Ils dotent cette conférence d’un caractère tout particulier. Je suis convaincu que les nombreux contacts qui se nouent, les nombreux entretiens qui s’amorcent ici se poursuivront dans un cadre différent et - c’est essentiel - aboutiront à des résultats concrets et positifs.

Et je suis particulièrement heureux qu’un grand nombre d’associations juives et les groupes et initiatives les plus divers aient saisi l’occasion offerte par cette conférence pour organiser à Berlin, durant ces quelques jours, leurs propres cycles de discussion, projections de films, concerts et bien d’autres choses encore.

En effet, ces manifestations variées illustrent clairement le deuxième message de cette conférence : les États, gouvernements et parlements ne sont pas les seuls à porter la responsabilité d’une lutte efficace contre l’antisémitisme. Bannir l’antisémitisme, c’est une véritable mission, une préoccupation aussi de la société civile, voire de tout individu.

Mais que signifie le bannissement de l’antisémitisme ? Doit-on encore se pencher sur cette question aujourd’hui ?

Je pense que oui, j’en suis fermement convaincu. Oui, il le faut. Tant que les Juifs ne se sentiront pas en sécurité dans nos pays, tant qu’ils n’auront pas vraiment l’impression d’être chez eux, tant que les synagogues et les écoles juives devront être protégées par la police, tant que des hommes politiques miseront sur un ressentiment antisémite pour racoler des électeurs, nous devrons faire face ensemble à la menace que représente l’antisémitisme.

Notre manière de traiter les minorités - et en premier lieu les citoyens de foi juive - dans nos États en dit long sur nous-mêmes. L’état de santé de nos démocraties se mesure essentiellement à l’aune du sentiment qu’ont les Juifs d’être les bienvenus parmi nous, d’être ici chez eux et de ne courir aucun danger.

En effet, tout acte de violence à l’égard d’un citoyen juif, toute profanation d’un cimetière juif, voire même tout propos antisémite, ne menace pas uniquement les personnes et les communautés juives, en Allemagne et ailleurs, mais aussi et surtout notre société ouverte et démocratique dans son ensemble.

L’antisémitisme est une déclaration de guerre aux valeurs fondamentales de notre société, qui préconise le respect de chaque individu et qui veille à l’inviolabilité et à la protection de la dignité humaine. L’engagement contre toute forme d’antisémitisme est donc à la fois un engagement en faveur d’une démocratie stable, d’une démocratie qui se fonde non sur l’exclusion, mais sur l’intégration. Mais aussi une démocratie qui s’oppose activement aux antisémites et qui ne minimise ni ne tolère jamais l’antisémitisme.

En Allemagne, de par notre histoire, nous en sommes particulièrement conscients. Notre histoire nous a imposé le devoir de ne plus jamais permettre que des antisémites menacent des personnes juives sans que la majorité ne s’insurge, ne s’y oppose avec détermination et ne défende énergiquement ses concitoyens juifs et leurs communautés. Au sein du gouvernement fédéral, du parlement, mais aussi de la société, nous prenons ce devoir très au sérieux.

Ensemble, nous voulons que cette conférence donne un signe - celui du souvenir de l’histoire, de la vigilance du présent et de la responsabilité pour l’avenir.

Mais n’oublions pas que les intentions les meilleures restent stériles si elle ne sont pas traduites en actes politiques. C’est pourquoi j’espère que nous conclurons cette conférence sur un résultat concret et un message clair.

Ce message doit être :
 que nous condamnons toute forme d’antisémitisme comme une violation de la dignité de l’homme,
 que nous créons des instruments permettant d’enregistrer et d’observer les actes antisémites dans les pays de l’OSCE, afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires pour les combattre,
 et que nous nous engageons ensemble, sur le plan politique, à lutter publiquement et avec détermination contre toutes les formes d’antisémitisme.

Cet engagement nous lie tous. Chaque État et chaque citoyen des pays de l’OSCE doit savoir qu’il y est tenu dans ses relations avec les citoyens de foi juive.

Nous voulons ainsi fixer des normes pour notre action. Et nous voulons montrer aux communautés juives de nos pays que leur souci quant à leur sécurité et leur avenir parmi nous est aussi le nôtre. Notre souci, mais aussi une question de principe pour nos démocraties.

Je vous remercie.

Source : ministère fédéral allemand des Affaires étrangères