Excellences,
Mesdames et Messieurs
Honorables invités,

L’Algérie a eu l’honneur d’être désignée par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) pour célébrer cette année la journée Mondiale de l’Environnement. Je tiens à en remercier Son Excellence Monsieur Klaus TOEPFER, Directeur général du PNUE, pour les efforts qu’il n’a cessé de prodiguer à cet effet.

La Journée mondiale de l’environnement est l’occasion de mobiliser et de sensibiliser l’opinion internationale autour d’une thématique centrale. Après Beyrouth, et les ressources en eau en 2003, Barcelone et les mers et les océans en 2004, San Francisco et les villes vertes en 2005, c’est au tour d’Alger d’abriter les manifestations principales en 2006, autour de la thématique "Déserts et Désertification" avec pour slogan, "Ne désertez pas les zones arides !" (Don’t desert drylands !).

C’est pour répondre aux attentes de nombreux pays soucieux de promouvoir le développement durable dans les déserts et de freiner les effets dévastateurs de la désertification que l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté, sur proposition de l’Algérie, la résolution 58/211 organisant "l’Année internationale des déserts et de la désertification".

A travers cette double désignation comme pays hôte de la Journée Mondiale de l’Environnement et comme porte-parole honoraire de l’Année 2006, Année Internationale des Déserts et de la Désertification, l’Algérie perçoit une reconnaissance internationale de ses efforts en faveur de la protection de l’environnement et du développement durable, au triple plan, local, à travers la mise en oeuvre de son propre Plan d’Action pour l’Environnement et le Développement Durable (PNEA-DD), régional, avec la participation active à l’initiative Environnementale du NEPAD, et internationale, pour ses multiples action en faveur de l’environnement mondial.

Excellences,
Mesdames et Messieurs
Honorables invités,

La Journée Mondiale de l’Environnement est une manifestation majeure de calendrier environnemental. Elle invite les gouvernements, les milieux d’affaires et l’industrie, les différents acteurs économiques et sociaux, les médias, la société civile, les mouvements associatifs et les jeunes, à réaffirmer encore et toujours, leur engagement en faveur de la protection d’environnement et du développement durable.

Une prise de conscience généralisée est la garantie d’un développement écologiquement viable et solidaire. Depuis Stockholm en 1972, en passant par Rio de Janeiro en 1992 et plus récemment Johannesburg, trente ans ont été nécessaires pour que l’idée d’un développement durable, bâti sur une croissance équilibrée, la cohésion sociale et la protection des écosystèmes, s’affirme comme l’un des objectifs prioritaires de la communauté des nations. Trente ans pour que les éléments de consensus se dessinent et pour que trois conventions principales (changements climatiques, biodiversité, lutte contre la désertification) soient, après avoir été âprement débattues, approuvées et commencent à connaître un début d’application.

C’est en fait par le biais du danger multiforme que représente le phénomène de la désertification que les déserts sont revenus au premier plan des préoccupations de la communauté internationale. Il faut attendre la catastrophe humanitaire de la famine au Sahel en 1973 pour que soit mis en place un comité permanent de lutte contre la sécheresse à l’initiative de 9 pays sahéliens. La première conférence mondiale sur la désertification a eu lieu quatre ans plus tard à Nairobi, sous l’égide des Nations Unies. Il faut cependant attendre le premier Sommet de la terre à Rio de Janeiro en 1992 et surtout du second de Johannesburg en 2002 pour que la lutte contre la désertification devienne une priorité de l’Organisation des Nations Unies.

Excellences,
Mesdames et Messieurs
Honorables invités,

A l’occasion de la Journée Mondiale de l’Environnement et au cours de l’année 2006 que l’Assemblée Générale des Nations Unies a consacrée "Année Internationale des Déserts et de la Désertification", il est tout indiqué de se livrer à une réflexion lucide et sans complaisance sur le processus de désertification qui, pour inexorable qu’il apparaisse aujourd’hui à certains égards, ne s’inscrit cependant dans aucune fatalité géologique ou climatique.

L’ensemble des déserts est menacé de dégradation à cause de la fragilité de l’écosystème désertique et de la pression des activités humaines qui se manifeste à travers l’urbanisation, la transformation des modes de vie et l’introduction de pratiques agricoles non durables.

La Journée Mondiale de l’Environnement pourrait être mise à profit pour faire connaître les richesses de ce patrimoine naturel et culturel exceptionnel, échanger les informations sur les différents déserts, marquer l’originalité de chacun et inciter tous les citoyens du monde, à quelque niveau de responsabilité qu’ils soient, à contribuer à la préservation de ce précieux héritage.

L’espace désertique offre l’opportunité d’une réflexion et d’une expérimentation sur le développement durable. L’émergence des préoccupations environnementales est l’occasion d’examiner les processus de requalification de ce type de territoire et de reconnaissance identitaire de leurs habitants à travers la mise en oeuvre de pratiques qualifiées de durables. L’examen de projets de développement alternatif dans différents secteurs (agriculture, hydraulique, éco-tourisme, habitat et architecture) peut s’avérer riche de cette perspective. Il en est de même de savoirs ancestraux à propos de la faune et de l’eau dans ce milieu extrême qu’est le désert, et qui peuvent s’avérer tout aussi précieux.

Le projet de Charte des Déserts du Monde qui sera soumis aujourd’hui à votre discussion contient des dispositions importantes à même de stimuler un partenariat large pour préserver un patrimoine naturel et culturel unique.

Excellences,
Mesdames et Messieurs,
Honorables invités,

Les frontières des déserts se déplacent de manière inquiétante. La désertification sera l’un des problèmes mondiaux du XXIème siècle.

Les principales causes de la désertification sont bien connues et proviennent essentiellement des activités humaines.

Leur ampleur participe de l’augmentation de l’effet de serre et de l’appauvrissement de la biodiversité.

Actuellement, les zones arides et semi-arides mais aussi certaines zones montagneuses connaissent des difficultés croissantes. Sécheresses répétées, surpâturage, surexploitation agricole, irrigation inadaptée entraînant une augmentation de la salinité, déboisement ou encore augmentation démographique, créent des ruptures et sont causes de dégradations graves provoquant l’appauvrissement, la famine, voire la misère dans les pays les moins avancés.

Les modes d’accès et de gestion qui ont été employés depuis des siècles par les populations, quelles que soient leurs activités principales, agriculture, élevage, cueillette ou autre, se révèlent petit à petit inadaptés.

La proportion de pauvres dans les populations est plus élevée dans les zones sèches, surtout parmi les populations rurales. Cette situation s’aggrave en fonction de la dégradation des terres en raison de la diminution de leur productivité, de la précarité des conditions de vie et de la difficulté d’accès aux ressources et aux opportunités. Le défaut d’investissement conduit à la marginalisation de ces zones lorsque des conditions agro-climatiques défavorables sont combinées à l’absence d’infrastructure et d’accès au marché, des techniques de production inadaptées et des populations mal nourries et peu éduquées, la plupart de ces zones restent en dehors de leur développement. En conséquence du manque de capital et d’opportunités, les populations pauvres sont conduites à exploiter des ressources limitées pour satisfaire leurs besoins à court terme, au détriment de la durabilité de ces ressources, accélérant ainsi leur vulnérabilité.

La pauvreté engendre la dégradation des terres. La désertification est à son tour un facteur d’aggravation de la pauvreté.

La désertification atteint un degré inquiétant. Elle affecte un sixième de la population mondiale et 70 % de toutes les terres sèches. En Afrique, la situation est critique. La désertification menace la vie de millions de personnes et affecte 39 % de la surface du continent. L’évaluation effective dans le Plan d’action environnementale du NEPAD indique que, depuis 1950, quelque 500 millions d’hectares de terres sont affectés par la dégradation, dont 65% de terres à potentiel agricole et que si la dégradation continuait à ce rythme, les récoltes pourraient être réduites de moitié dans 40 ans.

La désertification menace la sécurité alimentaire des pays pauvres, notamment en Afrique où le nombre de personnes mal nourries a doublé, passant de 100 millions de personnes à la fin des années 1960 à 200 millions en 1995.

A défaut d’un Plan Global pour enrayer le phénomène de désertification, des conflits pour l’accès aux ressources sont à prévoir, avec leur cortège de souffrances et d’émigration massive.

La Convention de Lutte contre la Désertification (UNCCD) a été adoptée en 1994. En incluant cette thématique dans la gouvernance environnementale mondiale au côté de la biodiversité et des changements climatiques, la communauté internationale a accepté de se donner les moyens de lutter contre la désertification.

En une dizaine d’années de travaux, la Convention de Lutte contre la Désertification a permis de progresser quelque peu et de stimuler la prise en compte de la lutte contre la dégradation des terres dans les planifications nationales des pays les plus touchés. La Convention a su placer au coeur du débat les populations dépositaires et usagères des écosystèmes arides, en insistant sur leur rôle ainsi que les moyens et les pouvoirs dont elles devraient disposer.

Toutefois, force est de constater que, bien que concernant les bases de la vie de millions de personnes, et en particulier les sociétés rurales africaines les plus démunies, la désertification, à la différence des autres thématiques environnementales globales, n’intéresse qu’insuffisamment les milieux politiques et économiques.

C’est pourquoi, consciente de la nécessité de sensibiliser davantage le public mais aussi de rappeler les liens persistants de la désertification avec la pauvreté, l’Assemblée Générale des Nations-Unies a, sur proposition de l’Algérie, résolu dans sa 58ème Session que l’année 2006 serait l’Année Internationale des Déserts et de la Désertification. Puisse cette Année offrir des espaces de débat et de réflexion, et contribuer à la sensibilisation des décideurs, pour qu’enfin les zones arides soient protégées en tant que lieux d’habitat et de source de biodiversité, au profit de populations actuellement en marge du développement. Puisse cette Année constituer une opportunité pour redonner à la Convention de Lutte contre la Désertification, la même importance que les deux Conventions globales adoptées à Rio de Janeiro (changements climatiques, biodiversité).

Excellences,
Mesdames, et Messieurs,
Honorables invités,

Dans le contexte mondial actuel, il serait pertinent d’élargir le traitement local de la lutte contre la désertification et de l’envisager du point de vue de l’environnement mondial.

Un Plan Global multiforme devrait être élaboré, car la tâche est immense et les besoins importants."

Le développement durable dans un contexte de désertification nécessite tout d’abord d’enrayer le processus de dégradation, de stabiliser les équilibres ressources-exploitation et de rétablir des cadres sociaux et politiques viables de gestion des ressources naturelles. Du fait de la croissance démographique, les modes traditionnels extensifs d’usage des terres ont un impact négatif sur le couvert végétal et les terres. Il sera donc indispensable d’amener les agriculteurs et les éleveurs démunis à substituer à ces modes d’usage les techniques modernes d’intensification des cultures et des élevages, en tenant compte de la fragilité du milieu.

Appuyer et renforcer les capacités et les institutions qui se trouvent au plus près des populations est un enjeu tout aussi important pour aider à créer des opportunités économiques, diversifier les activités et les revenus pour limiter les pressions sur un milieu fragile et réduire la vulnérabilité des plus pauvres.

La mise en oeuvre d’un Partenariat international, novateur et sincère, fondé sur les principes d’équité, de solidarité et de responsabilité partagée mais différenciée constitue de ce point de vue une préoccupation permanente de l’Algérie. Elle est à même de répondre aux immenses défis de la Désertification.

L’Afrique, de son côté, se prépare à cette perspective dans le cadre du NEPAD. Les pays africains ont joué un rôle clé dans le processus de négociation, d’adoption et de mise en oeuvre de la Convention de Lutte contre la Désertification. Avec l’appui des Agences spécialisées des Nations-Unies et du Fonds de l’Environnement Mondial, la plupart de leurs Plans d’Action Nationaux de lutte contre la désertification ont été finalisés ou sont en voie de l’être. Au plan régional, le Plan d’Action de l’Initiative Environnementale du NEPAD a été élaboré et contient une importante composante relative à la lutte contre la désertification.

Une première Conférence des Partenaires sur la mise en oeuvre du Plan d’Action de l’Initiative Environnementale du NEPAD s’est tenue à Alger les 15 et 16 décembre 2003. Elle a permis de sensibiliser la communauté des donateurs sur les efforts développés par l’Afrique pour emprunter la voie du développement durable et d’enregistrer les premiers engagements. Avec l’appui du PNUE, un programme de renforcement des capacités de mise en oeuvre du Plan d’Action a été également convenu et adopté. Ce programme a pour ambition de susciter une approche programmatique, de préparer des plans et des projets sous-régionaux, de renforcer la capacité des pays africains dans la mise en oeuvre des accords globaux et régionaux du Plan d’Action. C’est dire que l’Afrique est motivée et qu’elle a franchi des pas décisifs dans sa préparation à la mise en oeuvre de programme de développement durable.

L’Algérie est prête à apporter son concours à la mise en oeuvre d’un Partenariat international et se joint aux autres pays africains dans le cadre du NEPAD, pour appeler à la réunion d’une Conférence de Partenaires dans la lutte contre la désertification.

Au cours de cette Journée Mondiale de l’Environnement, vous aurez l’occasion de discuter, d’échanger vos idées et de faire des propositions pour stimuler la coopération à tous les niveaux local, sous-régional, régional, mondial, pour faire de la lutte contre la désertification et l’éradication de la pauvreté, un objectif partagé par la communauté des nations.

Je vous remercie et je souhaite plein succès à vos travaux.