Thierry Meyssan

Parmi les alliés des États-Unis, de nombreuses voix s’élèvent pour demander la fermeture du camp de Guantanamo après l’annonce du suicide de trois détenus. Cette revendication appelle plusieurs commentaires :

Les autorités états-uniennes avaient installé dans les années 70 deux écoles de torture où ils formaient les cadres répressifs des dictatures alliées. La première, dénommée School of Americas, était située sur la base US de Panama. Constantin Costa-Gavras la dénonça dans son célèbre film État de siège. La seconde, connue sous le nom de Political Warfare Cadres Academy, était installée à Taiwan. Au début du XXIe siècle, les mêmes autorités états-uniennes ont reconstitué ce dispositif en créant deux écoles identiques, la première à Bagram en Afghanistan, et la seconde à Guantanamo.
Même si la torture est niée par la presse dominante malgré une accumulation de témoignages, nul n’ignore l’arbitraire qui règne dans ces prisons. Dès lors, on ne comprend pas pourquoi il faudrait en fermer une et pas l’autre.

Toutefois, chacun à l’OTAN s’efforce de penser que l’administration Bush a « démocratisé » l’Afghanistan et qu’il est légitime d’y déployer des troupes pour soutenir le régime d’Hamid Karzaï malgré un soulèvement populaire général et permanent. Guantanamo est un site illégalement occupé par les États-Unis sur le territoire cubain, tandis que Bagram est une base de l’OTAN installée dans le cadre d’une vulgaire opération coloniale travestie en riposte légitime au lendemain du 11 septembre.

Le problème de fond n’est évidemment pas celui de tel ou tel centre de détention, mais celui des droits humains. Sur ce plan, l’administration Bush a créé tout un appareil juridique lui permettant de s’exonérer aussi bien du droit états-unien que du droit international.

Cependant les Alliés des États-Unis n’exigent pas le respect du droit international étant entendu que cela les conduirait inexorablement à s’interroger sur l’évolution du droit interne états-unien. Ils se contentent donc de demander qu’on cesse de faire tout ça en public, qu’on leur laisse l’illusion confortable de partager des « valeurs communes » avec leurs cruels protecteurs de Washington.