En entendant les hommages adressés à Ronald Reagan par beaucoup de ses anciens adversaires, je ne peux m’empêcher de me demander si George W. Bush recevra un jour les mêmes. Ce n’est pas très crédible, même pour moi, mais il y a 20 ans, personne n’aurait soupçonné que Reagan serait vu comme l’un des plus grands présidents du XXème siècle. Reagan était présenté comme un crétin illettré, un cow-boy obtus ou un idéologue simple d’esprit qui risquait de nous envoyer vers une annihilation nucléaire. Ces affirmations semblaient être une évidence pour la classe dirigeante. La vraie question était alors : pourquoi était-il si populaire ?
D’où venait une telle animosité ? D’abord, il y avait des raisons personnelles, les intellectuels ne pouvaient pas juger légitime un ancien étudiant médiocre qui était devenu un acteur de série B. Toutefois, la raison principale était idéologique car Reagan allait à l’encontre des idées dominantes de l’époque : s’accommoder de l’URSS et coexister avec elle et baisser nos attentes économiques. Reagan, lui, organisa la baisse des impôts et augmenta les dépenses militaires et le soutien aux rebelles anticommunistes.
Bush est également vu comme quelqu’un de trop stupide pour comprendre ses erreurs politiques. Il est détesté car, comme Reagan, il rejette l’endiguement et la prévention. Bush est dénoncé, comme Reagan, parce qu’il est opposé à l’avortement et qu’il nomme des juges issus de la droite chrétienne. Il est aussi accusé de creuser les déficits avec des réductions d’impôts qui sont censées favoriser les riches. L’inattention des deux hommes a également conduit à des scandales comme ceux de l’Iran-Contras et d’Abu-Ghraib.
Bush a donc de bonnes chances de gagner le respect à l’avenir.

Source
Los Angeles Times (États-Unis)

« The Last Laugh ? Wait for the History Books », par Max Boot, Los Angeles Times, 10 juin 2004.