À quelques jours d’intervalle, une polémique a opposé dans Le Monde le politologue François Heisbourg à l’ancien patron des services secrets extérieurs français, Pierre Marion.
Pour M. Heisbourg, la réponse de George W. Bush aux attentats du 11 septembre n’a pas limité le terrorisme dans le monde, mais a ouvert un conflit des civilisations. En suivant les États-Unis, l’Europe se place dans le camp occidental et se positionne sans raison en adversaire du monde arabo-musulman. Il est urgent de désamorcer cette crise en se désolidarisant de Washington et sans attendre que George W. Bush perde les élections.
M. Marion récuse cette analyse. Selon lui, l’invasion de l’Irak n’est pas une réponse au 11 septembre, mais un premier pas, indispensable, dans la démocratisation du Moyen-Orient : la destitution d’un dictateur. Il est regrettable que cette action militaire n’ait pas été avalisée par l’ONU, mais le rapprochement franco-américain à l’occasion de l’anniversaire du Débarquement allié permet d’envisager une suite plus cohérente.
Les deux protagonistes de ce dialogue sont des atlantistes convaincus et entretiennent des liens étroits avec le Royaume-Uni. Leur divergence illustre un malaise profond à Londres et à Washington. Les désaccords débattus en privé s’étalent désormais au grand jour. 52 diplomates britanniques, puis 60 états-uniens, ont publié des lettres ouvertes à leurs gouvernements. Et mercredi 16 juin, 20 ambassadeurs et 6 généraux états-uniens, républicains et démocrates, rendront public un appel contre Bush. Cependant, toutes ces prises de position se heurtent à une même limite : en acceptant l’interprétation officielle du 11 septembre, ces personnalités se trouvent sommées d’avaliser la guerre au terrorisme. Toutefois, un courant plus critique est en train d’apparaître : les Verts états-uniens, qui seront représentés à l’élection présidentielle par Ralph Nader, ont appelé à réviser les attentats du 11 septembre. Ils ont appelé leurs adhérents à faire circuler le livre du professeur Ray Griffin, The New Pearl Harbour, étudiant et validant les travaux de Thierry Meyssan.

Le professeur John C. Yoo, ancien conseiller de John Ashcroft, explique doctement dans le Los Angeles Times que l’usage de la torture est parfaitement légal vu que le Congrès a autorisé George W. Bush à utiliser tous les moyens appropriés pour lutter contre le terrorisme. La fin justifie donc les moyens.

Dans le Wall Street Journal, c’est au tour de l’ancien président polonais Lech Walesa de faire l’éloge de Ronald Reagan. Sans surprise, il reprend la litanie classique des admirateurs de l’ancien président et le présente comme le vainqueur du communisme terrassant l’URSS grâce à son amour de la liberté avec l’aide de Jean-Paul II et de Margareth Thatcher. Débonnaire, il veut bien reconnaître un rôle à Mikhail Gorbatchev, le principal acteur de cette période, dans la fin de la Guerre froide.
Le représentant démocrate de la Silicon Valley, Tom Lantos, s’indigne dans le Los Angeles Times de ce qu’il pense être un retour de la Russie aux méthodes soviétiques en matière de contrôle de la presse et des associations. Unique survivant juif de la solution finale siégeant au Congrès et figure de l’anticommunisme, il appelle à l’exclusion de la Russie du G8. Au-delà des dernières péripéties à Moscou, la réflexion de M. Lantos est d’abord une réaction à la guerre qui oppose Vladimir V. Poutine aux oligarques, dont la plupart sont juifs et citoyens israéliens. Il interprète ce conflit non comme une ré-appropriation nationale des ressources du pays, mais comme un retour à un stalinisme antisémite.

Enfin, Bathsheba et Chester Crocker alertent les lecteurs de l’International Herald Tribune sur la difficile application de l’accord de paix au Soudan (indépendant du conflit distinct du Darfour). Il ne pourra être mis en œuvre qu’avec un soutien et un suivi extérieur. Les États-Unis, l’Union africaine et l’Union européenne doivent s’y impliquer.