Les opposants à l’administration Bush ont appelé depuis longtemps à un retour rapide de l’Irak à la souveraineté, associé à une internationalisation des efforts d’assistance. C’est ce à quoi s’emploie la résolution de l’ONU adoptée à l’unanimité le 8 juin. Cette résolution marque aussi une tentative de l’administration Bush pour répondre aux préoccupations de nations clés qui s’étaient opposées à la Guerre d’Irak en 2003 : l’Irak retrouvera sa souveraineté le 30 juin et le nouveau gouvernement aura le contrôle des forces irakiennes ; le mandat des troupes internationales expirera quand la transition politique sera achevée et les forces se retireront si le gouvernement irakien en fait la demande.
On pourrait penser que le nouveau consensus de l’ONU sur l’Irak résoudrait la crise entre les États-Unis et ses alliés européens. Néanmoins, maintenant que l’administration Bush a accepté ce que réclamaient la France et l’Allemagne, ces deux pays annoncent qu’ils n’enverront pas de troupes en Irak, quelles que soient les conditions et, plus troublant encore, Jacques Chirac a annoncé au sommet du G8 qu’il n’était pas favorable à l’implication de l’OTAN en Irak alors que la résolution votée par son pays indique que des efforts devront être faits pour internationaliser davantage les forces multinationales dans le pays.
En fait, la position franco-allemande est un abandon de responsabilité internationale. Tout le monde sait que le succès de la communauté internationale nécessite des efforts supplémentaires de celle-ci. Les troupes états-uniennes sont insuffisantes à cause de la mauvaise gestion du Pentagone et sans les troupes internationales, il ne peut y avoir la sécurité nécessaire à la reconstruction et aux élections. En outre, au delà des besoins de l’Irak, c’est le sens même du mot alliance qui est en jeu. Les États-Unis ont certes raté une occasion de travailler avec les pays de l’OTAN, mais aujourd’hui, si les puissances de l’OTAN rejettent ce partenariat, il ne faut pas s’étonner que les États-Unis ne les considèrent plus comme des partenaires stratégiques sérieux. Quand les États-Unis sont intervenus en Bosnie et au Kosovo, c’était pour le bien des pays européens et de l’alliance, pas pour leurs intérêts nationaux.
Certains affirment qu’avec des forces dans les Balkans et en Afghanistan, l’OTAN est déjà sur-déployé. Pourtant la France dispose de troupes à envoyer même si l’Allemagne ne le peut pas. Maintenant que le Conseil de sécurité a ouvert la voie à l’internationalisation, les Européens seraient sages d’intervenir et l’OTAN pourrait prendre le commandement de la zone polonaise. Une non-implication serait un coup mortel porté à l’OTAN.

Source
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« The Allies Must Step Up », par Ivo Daalder et Robert Kagan, Washington Post, 20 juin 2004.