Mes amis, nous sommes réunis à nouveau ici, citoyens libres de toutes les classes et conditions sociales, Mexicains de toutes couleurs, de tout âge, race et langue qui animent notre grande nation. Il y a des indiens, des ouvriers, des fermiers, des hommes d’affaires, des membres de la classe moyenne, des employés, professionnels, artistes, intellectuels, commerçants, écoliers, professeurs, médecins, infirmières, étudiants d’université. En particulier, je veux insister sur la présence de personnes humbles, des gens pauvres, qui sont la base de notre mouvement ; ils sont ma plus grande source de fierté, en tant qu’être humain et leader. Ils représentent des familles entières, des personnes âgées, des jeunes et des enfants. Ensemble et égaux, formant une volonté collective en défense de la démocratie.

Nous sommes tous unis, manifestant pour montrer à travers nos actions que nous voulons un pays juste, libre, démocratique, pluraliste et divers. Nous sommes ici parce que nous voulons une nouvelle économie, une nouvelle façon de faire la politique, une nouvelle co-existence sociale, plus humaine et plus égalitaire. Nous sommes ici parce que nous voulons un nouveau pays. Nous sommes ici pour sceller notre engagement pour l’histoire. Nous vivons les temps qui vont définir l’avenir du Mexique. Le destin de notre peuple est en jeu.

Non seulement la présidence de la république est en jeu, mais également le droit des citoyens à élire librement et démocratiquement leur dirigeant. Il y a des moments dans lesquels nous devons décider, soit d’installer définitivement une vraie démocratie au Mexique, soit de laisser un semblant de régime démocratique, où finalement les privilégiés vont comme toujours continuer à décider du sort de la nation entière. En 2000, beaucoup pensaient que nous avions fait un pas vers une démocratie solide au Mexique. Mais cela s’est avéré être une farce, et Vicente Fox (président sortant, ndt) n’était pas à la hauteur du défi.

Il vaut mieux se souvenir, à un autre moment historique de transition vers la démocratie, ce que Francisco Madero a dit à un journaliste des États-Unis en 1911 : « En investissant la présidence, j’ai personnifié deux principes ; l’un des deux, déjà sanctionné par la constitution et dépendant de moi dans sa réalisation, est le mandat unique. L’autre est un suffrage efficace. Afin de remplir ce dernier objectif, une réforme des lois électorales est nécessaire, et cela dépend avant tout du peuple, afin que les lois deviennent l’authentique expression de cette volonté. En bref, je vais être le principal ami et défenseur des libertés du peuple. Etant donné le moment historique auquel le Mexique fait face aujourd’hui, je considère toutes les autres choses comme secondaires ». C’est une leçon que Vicente Fox n’a jamais compris. Au lieu d’être le gardien d’un véritable suffrage, il est devenu un traître à la démocratie.

C’est pourquoi la question de la démocratie devient une fois de plus la question clé de l’agenda politique de notre pays, et l’inquiétude fondamentale des citoyens. La démocratie est non seulement le meilleur gouvernement que l’humanité aie trouvé ; c’est aussi le moyen le plus efficace pour garantir une coexistence harmonieuse. La démocratie génère des poids et des contrepoids, encourageant la dignité et prévenant une personne ou une poignée de personnes, de quelque milieu social que ce soit, de se comporter comme les propriétaires absolus des pouvoirs publics.

Mais ce n’est pas tout. Dans un pays comme le nôtre, avec tant de privilèges et d’inégalités, la démocratie prend une dimension sociale fondamentale, devenant une question de survie. La démocratie est la seule option, le seul espoir pour des millions de pauvres, pour la majorité du peuple, d’améliorer leurs conditions de vie et de travail. Si ces voies démocratiques sont fermées, tout ce qui reste est la soumission ou la violence. C’est pourquoi nous devons défendre la démocratie et la faire durer. Nous ne pouvons pas oublier que beaucoup de Mexicains ont sacrifié leur vie pour cette cause.

C’est pourquoi nous sommes là, pour exprimer notre rejet de la fraude électorale [1], qui cherche à falsifier les résultats de la volonté des citoyens exprimée dans les votes du 2 juillet. Depuis le début, nous avons eu des indices de notre victoire et maintenant, 28 jours après les élections, nous avons les éléments pour le prouver, nous sommes certains d’avoir gagné la Présidence de la République. Comme nous l’avons déjà dit, malgré le fait que tout le processus électoral ait été frauduleux, il ne pouvaient nous battre avec des votes, et c’est pourquoi ils refusent de faire un recompte vote par vote, scrutin par scrutin.

La preuve la plus concluante que nous ayons gagné les élections, c’est le fait que le candidat de droite ait rejeté notre demande de recompter les voix. S’il dit qu’il a gagné, il n’a aucune raison d’avoir peur. Qui n’a rien à se reprocher n’a pas peur. Demander de la transparence est légitime, avec un recompte vote par vote, scrutin après scrutin. Et je le répète : le Mexique, notre grand pays, ne mérite pas d’être dirigé par un président fallacieux, manquant de légitimité et d’autorité morale et politique.

Nous attendons maintenant la décision de la Cour Electorale ordonnant un recompte des votes, pour une élection propre et transparente. C’est la solution légale et politique la plus appropriée pour le Mexique et pour la démocratie, même si l’on sait que les membres de la Cour Electorale sont toujours sujets à de fortes pressions de la part des puissants, ceux qui croient posséder et dominer le Mexique.

Ainsi, il est approprié de le rappeler ici : ce n’est pas que nous ne respectons pas les institutions, mais plutôt que notre pays, malheureusement, n’a pas une tradition qui nous assure que les hommes ayant les institutions entre leurs mains agissent avec droiture et honneur. Nous ne pouvons oublier que les faux-semblants ont toujours régné. Historiquement, la Constitution et les lois ont toujours été exécutées dans les formes, et violées dans le fond. Au Mexique, malheureusement, la Loi a souvent signifié le contraire de sa raison d’être ; bien que l’État de droit soit toujours invoqué, ceux chargés de rendre justice ont surtout légitimé les abus commis par les plus forts, au lieu de protéger les faibles ; la loi qui a régné a été la loi de l’argent et du pouvoir, plus que toute autre. Par conséquent, même si l’on ne peut être sûr que les magistrats de la Cour agiront comme des hommes et des femmes libres, avec la stature morale, le courage et le patriotisme que ce moment demande, nous ne pouvons accepter cela et rester les bras croisés.

De plus, nous devons nous souvenir que tout ce qui a été accompli dans notre pays, à propos des libertés, de la justice et de la démocratie, a été gagné par l’organisation et la lutte du peuple. Rien, ou presque rien, n’a été une concession libre de pouvoir. Nous sommes devenus un pays indépendant non parce que la Couronne Espagnole l’a décidé, mais par le combat du peuple mené par Hidalgo et Morelos. La Réforme a été amenée, non par la volonté des conservateurs, mais par la conviction et la ténacité des progressistes. Et la justice sociale qui a été amenée est due à la révolution Mexicaine, la lutte de Zapata et de beaucoup de héros anonymes. C’est pourquoi nous ne pensons pas que la démocratie sera validée d’en haut. Cela sera seulement possible avec l’effort et la mobilisation des citoyens. La démocratie, comme la liberté, comme la justice, n’est pas donnée. Elle se conquiert.

Par conséquent, je vous propose aujourd’hui que nous attendions la décision de la Cour pleinement mobilisés, avec fermeté et fierté. Avant de vous faire une proposition concrète, je veux insister sur le fait que la cause que nous défendons est fondamentale. Je veux vous dire que cela va bien au-delà de l’enjeu de reconnaître ma victoire en tant que Président de la République. Je le répète : je ne suis pas un vulgaire chercheur de pouvoir. Je ne suis pas mû par l’appât du gain. J’ai toujours affirmé que le pouvoir ne fait sens et ne devient vertueux que quand il se met au service des autres. Je me bats pour des principes et des idéaux que je considère plus importants que ma propre vie, pas pour un poste en particulier, même si nous parlons du plus important dans le pays. Et c’est pourquoi j’affirme qu’en ce moment, au-dessus de tout, le plus important est de sauver la démocratie.

À ceux qui ne pensent pas comme nous, je présente mes sincères excuses pour les troubles que notre mouvement peut avoir causés. J’espère qu’un jour, vous nous comprendrez, que vous comprendrez que ce combat est nécessaire, pas seulement pour nous, mais pour tout le monde ; parce que ce n’est qu’avec la démocratie que nous vivrons en harmonie et que le Mexique sera un pays respectable et respecté.

Ecoutez bien ce que je vais vous dire : je propose que nous restions ici, en Assemblé Permanente, jusqu’à ce que la Cour délibère. Je vous propose que nous restions ici jour et nuit, jusqu’à ce que les votes soient comptés, et que nous ayons une élection présidentielle avec le minimum de légitimité que méritent les Mexicains. Je vous assure que nos efforts et sacrifices ne seront pas vains. Si nous décidons de rester pour unifier notre volonté, nous nous organiserons de la manière suivante :

(…) Nous parlons de 47 camps, coordonnés par des sénateurs élus et des députés, des chefs de district élus, des leaders de coalitions de partis, de tous les états et de tous les districts. Dans chaque camp, il y aura discipline, respect et propreté. Nous allons prendre soin des jardins, monuments historiques, nous ne détériorerons pas les espaces publics, et éviterons les provocations. Toutes nos actions seront soumises à l’idée d’une résistance pacifique, dans un contexte de non-violence. Légalement, nous allons faire plein usage de notre droit à la manifestation, comme nous le permet la Constitution Politique des Etats-Unis du Mexique. Pendant que nous sommes en Assemblée Permanente, dans chaque camp et sur chaque place publique de Mexico, il y aura des événements artistiques et culturels. J’appelle les intellectuels, les artistes, et les travailleurs de la culture à organiser des ateliers culturels et des représentations, des lectures de poésie, des évènements musicaux, tournois d’échecs, théâtres, ateliers pour enfants… J’appelle aussi les médecins qui soutiennent le mouvement de nous aider à organiser des brigades de santé pour s’occuper des malades et des personnes nécessitant des soins particuliers. Je vivrai aussi sur ce site pendant que nous serons en Assemblé Permanente.

Je sais que ce que je propose n’est ni simple ni facile, mais c’est ce qui est le plus recommandable pour notre cause. Je mets cette proposition devant votre considération. Resterons-nous ici ? Oui ou non ?

(…) De cette Assemblée Permanente viendront d’autres actions de résistance pacifique civile, que nous ferons connaître et amèneront au bon moment. Au travail ! Nous allons défendre la démocratie activement. Je suis convaincu que je ne suis pas seul. Je ne suis pas seul car nous sommes ensemble.

Merci beaucoup, mes amis.

Version française : CG et TR, du LaRouche Youth Movement France.