Monsieur le Ministre, Mesdames, Messieurs, j’effectue ma quatrième visite à Beyrouth depuis le début de cette crise, au lendemain du vote à l’unanimité de la résolution 1701 et de la cessation des hostilités intervenue avant-hier matin.

La France a joué un grand rôle pour que cette résolution soit équilibrée et reflète pour une large part les préoccupations exprimées par le plan en sept points du gouvernement libanais de Fouad Siniora. C’est l’engagement que j’avais pris auprès de M. Siniora, lors de ma précédente visite. Aux termes de 33 jours de guerre et de souffrances, la communauté internationale a exercé ses responsabilités et réussi à mettre en place une cessation des hostilités. Il est mis fin aux destructions, il est mis fin à ces souffrances, à ces centaines de milliers de déplacés qui doivent maintenant avoir une perspective rapide de retour chez eux.

Aujourd’hui, la diplomatie, qui s’est beaucoup mobilisée pour trouver un accord sur cette résolution, doit s’engager sur le terrain pour permettre son application. Notre volonté est de réussir l’application des différentes phases de ce texte.

Déjà les déplacés reviennent chez eux. Il faut dans un premier temps lever le blocus aux ports et aux aéroports libanais. Nous demandons aux autorités israéliennes de lever le blocus maritime et aérien. Nous demandons au gouvernement libanais d’annoncer des mesures pour renforcer les contrôles. Il n’y a plus de raison maintenant pour qu’Israël ne lève ce blocus.

Cette résolution a été construite à la suite d’un fait politique majeur qui est le vote à l’unanimité par le gouvernement libanais du déploiement de l’armée libanaise au Sud-Liban. Le deuxième fait majeur politique, au lendemain de la cessation des hostilités, c’est bien le retrait israélien qui est en train de prendre forme et nous espérons qu’il sera mis en œuvre rapidement.

Dans ce contexte et en coordination avec la FINUL qui y travaille d’ores et déjà, il me paraît capital que le déploiement de l’armée libanaise se fasse le plus vite possible. Il faut que les différentes parties prennent leurs responsabilités. Je me félicite que les premières réunions de coordination organisées par la FINUL aient permis d’organiser un plan prévoyant ce repli israélien et le déploiement de l’armée libanaise soutenue par la FINUL. Il faut travailler dans cette direction et faire en sorte que ce plan entre rapidement en vigueur.

Les dispositions concernant le déploiement de l’armée libanaise aux côtés de la FINUL, associé au début du retrait israélien, sont de la responsabilité du gouvernement libanais. Nous avons évoqué le rôle de la FINUL et nous estimons indispensable de nous mobiliser pour la renforcer avec des contingents européens mais également d’autres pays qui sont présents aujourd’hui à Beyrouth. La FINUL accompagnera le règlement de la crise et nous sommes prêts à participer à cette force renforcée dans le cadre d’un mandat, qui je le rappelle n’est pas un mandat d’imposition de la paix mais un mandat qui permet de faciliter le déploiement de l’armée libanaise au sud, le retour des déplacés, l’acheminement de l’aide humanitaire et le rétablissement des infrastructures.

Enfin, nous continuons de soutenir le gouvernement libanais dans les immenses tâches qui l’attendent aujourd’hui :

 des tâches politiques : affirmer le consensus national, organiser le déploiement de l’armée libanaise ;

 des tâches humanitaires : faciliter le retour des déplacés, poursuivre notre engagement dans le long terme. Demain arrivera à Beyrouth le "bateau pour le Liban", avec 1500 tonnes de fret humanitaire à son bord. J’ai fait partir ce bateau, ce bateau équipé par le ministère des Affaires étrangères, de Marseille, le 11 août. Aujourd’hui nous venons ici à Beyrouth avec des spécialistes de ponts métalliques qui permettront de mettre en place des ponts Bailey au nombre de 15, afin de rétablir très rapidement les axes terrestres passant au-dessus des rivières. Il faut réouvrir les axes routiers grâce à ces 15 ponts Bailey que le président de la République a souhaité vous offrir le plus vite possible ;

 et puis des tâches économiques : il faut maintenant parler de la levée de l’embargo, du redressement, de la reconstruction ;

 enfin des tâches militaires : il est nécessaire de renforcer l’armée libanaise et la France agira à cet effet pour soutenir l’équipement de l’armée libanaise et l’accompagner dans son redéploiement. Nous poursuivrons notre engagement à cet effet. Je vous remercie.

Q - Quand est-ce que la force européenne sera prête et qu’elle viendra au Sud-Liban pour se déployer ?

R - La France estime indispensable que de nombreux pays puissent contribuer au renforcement de la FINUL. Elle est prête à prendre un rôle important dans cette mission. Tout dépendra des conditions effectives du déploiement de ces renforts sur le terrain. Nous sommes engagés dans une évaluation précise des besoins avec le gouvernement libanais et le département des opérations de maintien de la paix aux Nations unies. Il y a un préalable essentiel, c’est le déploiement effectif de l’armée libanaise au Sud-Liban. Alors oui, l’armée française au sein de la FINUL peut aider cette armée libanaise à se déployer au Sud-Liban au fur et à mesure d’un retrait progressif de l’armée israélienne. Le temps presse, car il en va aujourd’hui de l’unité du Liban. 1.700 militaires de la Marine française sont déjà déployés autour de Beyrouth et 200 militaires français participent déjà à la FINUL. Le président de la République prendra en temps voulu la décision qui s’impose. Ce qui est important, ce sont les avancées politiques, l’option militaire n’a jamais été une solution.

Q - Monsieur le Ministre, comment évaluez-vous le discours de M. Assad ?

R - Nous avons estimé depuis le début que nous n’aurions pas de contacts avec les autorités syriennes et pour nous, ce qui est important, s’agissant des autorités syriennes, c’est de mettre en œuvre l’ensemble de la résolution 1595 sur la commission d’enquête internationale qui vise à faire toute la lumière et à établir la vérité sur les différents assassinats, en particulier sur celui de M. Rafic Hariri, et que le tribunal pénal aille au terme de sa mission.

Q - Vous avez déclaré que le Hezbollah va délivrer ses armes, est-ce que cela va être par force ou bien on a entendu que Sayyed Nasrallah a assuré que c’est une question intérieure ?

R - Je voudrais tout d’abord dire qu’il s’agit là d’un débat qui concerne avant tout le gouvernement libanais. Nous avons tous admiré, tout au long de cette crise, le sens de l’Etat et le sens de la concertation dont a fait preuve le Premier ministre Siniora et le rôle important de médiation joué par le président du Parlement. Je sais que tous deux conduisent en ce moment même des consultations pour que la décision politique historique prise par l’ensemble du gouvernement libanais, y compris les ministres du Hezbollah, de déployer l’armée libanaise soit appliquée à très court terme. Or ce déploiement nécessite qu’au moins au Sud du Litani seule l’armée libanaise soit dépositaire des armes.

Q - Avez-vous des contacts avec des Israéliens concernant l’embargo ?

R - Je demande ici aux autorités israéliennes de lever le blocus aérien et maritime. Je demande en même temps au gouvernement libanais de mettre en place un système de contrôle qui permette de nous assurer de la parfaite étanchéité des ports de Beyrouth./.

Source
France (ministère des Affaires étrangères)