Suite à l’appel d’Ariel Sharon aux juifs français pour qu’ils émigrent en Israël, Le Monde a publié un dessin de son caricaturiste Plantu qui posait la question importante : pourquoi les juifs quitterait la France pour se rendre dans un pays qui a connu des bains de sang depuis quatre ans ? Après tout, aucun juif n’a été tué en France durant cette période alors que 1 000 Israéliens sont morts dans des attentats palestiniens et la France est un paradis économique et social comparé au relativement pauvre Israël. Bien sûr, il existe des incidents anti-juifs en France mais, comme l’a fait remarquer Jacques Attali dans L’Express du 26 juillet, il est bien plus facile d’être juif que musulman en France.
Pourtant, dans les trois dernières années, le nombre de juifs français émigrant chaque année vers Israël a doublé. 40 000 juifs ont visité Israël et des milliers y achètent des maisons ou des appartements. On explique cela par l’antisémitisme français, mais la France n’est pas un pays antisémite. La société française incorpore les juifs aux plus hauts échelons et Jacques Chirac a régulièrement condamné l’antisémitisme. La France a eu des Premiers ministres juifs et la culture française est indissociable de la culture israélienne. En réalité, le vrai problème est que si la France condamne l’antisémitisme quand il est issu de l’extrême droite, elle se fait beaucoup plus silencieuse quand ces actes sont commis par des musulmans. Bien sûr, il y a des condamnations, mais plus timides et cela blesse les juifs français. Le livre de Pascal Boniface « Est-il permis de critiquer Israël ? » aurait dû s’appeler « Est-il permis de ne pas attaquer Israël ? ».
On demande aux juifs français de se démarquer d’Israël. Le professeur genevois raciste Tariq Ramadan, qui s’en était pris aux intellectuels juifs français et à Bernard-Henri Lévy pour son livre sur Daniel Pearl, a été invité au Forum social européen. La France a une politique étrangère pro-arabe. Or, compte tenu de l’antisémitisme des régimes arabes, cela revient vite à avoir une politique anti-israélienne, voire anti-juive. On ne peut pas être pro-juif à Paris et fournir des installations nucléaires à Saddam Hussein.
C’est ce qui explique l’arrivée des juifs français en Israël.

Source
Jerusalem Post (Israël)

« The French connection », par Amnon Rubinstein, Jerusalem Post, 14 août 2004.