En mars 1966, après la publication du rapport sur les émeutes de Los Angeles, la critique littéraire Elizabeth Hardwich présenta ce rapport comme un exercice de style creux visant à calmer le public en lui faisant une démonstration d’activité gouvernementale. Au contraire, la Commission d’enquête sur le 11 septembre ne fait rien avec son rapport pour calmer le public et souhaite visiblement que son rapport trouve un large écho. Pour cela elle a décidé d’adopter un style simple et clair, une tonalité sage et triste, pas colérique.
Le ton adopté est celui qu’on retrouve dans les livres de confession ou de mémoires. Ce style est devenu un cliché dans ces genres, mais pas dans les documents officiels. Le rapport s’ouvre sur les mots : " Mardi 11 septembre 2001, le matin est doux et presque sans nuage sur l’est des États-Unis, des millions d’hommes et de femmes se rendent au travail ". Avec ces lignes, la commission fait appel à la mémoire collective des Américains et replace tous les Américains au cœur du drame. Contrairement à tous les rapports officiels, ce texte s’ouvre de la façon dont nous aurions pu rendre compte de l’événement d’après notre mémoire.
Tout au long du texte, les phrases sont courtes et simples afin que le rapport puisse être accessible au plus grand nombre et bénéficier d’une large audience, ce qui est le cas puisque le 23 juillet il était en tête des ventes sur Amazon.com. Le rapport utilise aussi une technique bien connue des romanciers : terminer un chapitre sur une ellipse dramatique pour conserver l’attention du lecteur. Le rapport fait également beaucoup appel à l’émotion pour réactiver la mémoire et pas uniquement en ré-énonçant froidement les faits.

Source
Washington Post (États-Unis)
Quotidien états-unien de référence, racheté en août 2013 par Jeff Bezos, fondateur d’Amazon.

« A Novel Approach », par Philip Kennicott, Washington Post, 1er août 2004.