Ce n’est pas tous les jours que le département états-unien à la Sécurité de la Patrie annule un visa accordé à un citoyen suisse, mais c’est ce qu’il a fait en annulant celui accordé à Tariq Ramadan et il a bien fait.
Tariq Ramadan est de haute lignée islamiste. Son grand-père maternel, Hassan al-Banna, fonda le mouvement des Frères musulmans, et Tariq est un citoyen suisse parce que son père, Saïd Ramadan, également dirigeant islamiste, dut fuir l’Égypte en 1954. Grâce à sa filiation et à ses talents, Tariq est devenu une personnalité importante, présentée par Time comme l’un des 100 meilleurs esprits scientifiques et intellectuels du monde, un argument qui poussa l’université Notre-Dame à lui confier son cours des religions. M. Ramadan acheta une maison aux États-Unis, trouva des établissements scolaires pour ses quatre enfants et fit transporter ses effets personnels dans l’Indiana. Il était supposé commencer son cours, il y a quelques jours, mais le 28 juillet, neuf jours seulement avant la date prévue de sa venue, le département de la Sécurité de la Patrie lui refusa l’entrée aux États-Unis en application d’une loi interdisant aux ressortissants étrangers ayant adopté « une attitude d’approbation ou d’adhésion envers des activités terroristes depuis une position publique dominante dans un pays quelconque » d’entrer sur le territoire. M. Ramadan réfute ces accusations et m’accuse même d’être à l’origine de cette décision.
Le département de la Sécurité de la patrie en sait plus long que moi, mais refuse de s’exprimer. Voilà cependant ce qu’on sait de Tariq Ramadan : Il salua les méthodes brutales du politicien soudanais Hassan al-Turabi qui lui rendit la politesse en déclarant que M. Ramadan était « l’avenir de l’islam ». Il a été interdit de séjour en France en 1996 car il était accusé d’avoir des liens avec un terroriste algérien. Selon Baltasar Garzon, Ahmed Brahim, un Algérien mis en examen pour des activités liées à Al-Qaida, aurait eu « des contacts réguliers » avec M. Ramadan. Djamel Beghal, dirigeant d’un groupe accusé d’avoir planifié l’attaque de l’ambassade américaine de Paris, affirma pendant son procès, en 2001, avoir étudié avec M. Ramadan. Comme la quasi-totalité des islamistes, M. Ramadan nia l’existence « de preuves définitives » de l’implication de Ben Laden dans les attentats du 11 septembre ou minimisa les attentats. Il est également soupçonné avec son frère Hani d’avoir organisé une rencontre à Genève entre Ayman al-Zawahiri, numéro 2 d’Al-Qaida, et Omar Abdel Rahman, le cheikh aveugle. L’adresse de M. Ramadan figure dans l’agenda de la banque Al Taqwa, un établissement que le Département d’État accuse de soutenir le terrorisme islamiste. Enfin, il y a cette information troublante, rapportée par Olivier Guitta, selon laquelle Oussama Ben Laden aurait étudié avec le père de Tariq à Genève, suggérant que le futur terroriste et le futur intellectuel auraient pu se connaître.
Ramadan nie, mais il est bien un islamiste, même si ses appels au jihad sont plus discrets. Cela expliquen pourquoi le département de la Sécurité de la patrie a refusé la présence de Tariq Ramadan aux États-Unis. Malheureusement, le département d’État a encouragé Ramadan à réitérer sa demande pour entrer sur le territoire, la bataille n’est donc pas finie.

Source
Frontpage Magazine (États-Unis)

« Why Revoke Tariq Ramadan’s U.S. Visa ? », par Daniel Pipes, Frontpage Magazine, 27 août 2004. Cet article a également été publié le même jour par le New York Sun.