Dans son édition du lundi 30 juillet 2007, Le Figaro, journal de référence de la droite française, a consacré sa page 3 a l’accord que Washington et l’Arabie Saoudite ont trouvé. Un accord portant sur un contrat faramineux de vente d’armes au régime de Ryad et à 5 autres pays du Golfe persique, s’élevant à un total de 20 milliards de dollars. L’analyse de cet événement est mené par le quotidien en 3 parties, incluant les protagonistes sous-jacents des objectifs de cette transaction. A savoir, les États-unis : « Washington arme les monarchies face à l’Iran ». Israël : « Israël ferme les yeux, au nom de la lutte contre l’ennemi commun ». Et l’Iran : « Craignant une confrontation, Téhéran renforce l’obligation du service militaire ». Triptyque belliciste aux relents de conflits inéluctables.

Le plus intéressant étant sans doute le troisième d’entre eux. La façon dont le journal feint de précipiter l’Iran dans une attitude de confrontation et d’hostilité, en condamnant le renforcement de son service militaire, devenu plus rigide depuis 2002. Voici ce qui est reproché à l’Iran, par les dires de deux exemptés :

Les pénalités imposées aux déserteurs ont été alourdies. Auparavant, avoir effectué son service était une condition nécessaire pour obtenir un passeport afin de voyager à l’étranger. « Aujourd’hui, ceux qui ne font pas leur service font face à de plus en plus d’interdits », confie un exempté, récemment rappelé à son devoir militaire. Il cite, pêle-mêle, l’impossibilité d’acheter une voiture, une maison, et d’accéder à des métiers de la fonction publique. « Sans service militaire accompli, on ne peut même pas bénéficier d’une assurance-maladie », confie-t-il. Un autre conscrit souligne que « depuis le début de l’année, on ne peut plus acheter de ligne téléphonique sans certificat de service militaire. Et la police a fait savoir que tous les Iraniens doivent avoir ce certificat dans leur poche…C’est comme en temps de guerre ! »

Le quotidien reproche un peu en deçà les «  cours de propagande religieuses [qui] y sont également dispensés ».

Ce que le journal ne dit pas, c’est que l’État d’Israël qui a débuté par l’occupation de la Palestine, et qui s’est en grande partie fondé sur sa capacité à manier et à glorifier son armée Tsahal, applique exactement les mêmes principes que l’Iran.

Sauf que le service militaire israélien peut durer jusqu’à 36 mois – contre 18 pour l’Iran – et qu’il se prolonge par des périodes de réserve jusqu’à l’âge de 40 ans. Qu’il s’applique également aux femmes. Que ceux qui désirent être exemptés doivent suivre des cours de théologie juive – comme pour l’Iran, le militaire et le religieux sont ainsi mélangés. Enfin, les citoyens israéliens qui se trouveraient dans l’impossibilité de faire leur service militaire se trouvent confrontés aux mêmes problèmes que les Iraniens n’ayant pas effectués leur service militaire. Il s’agit en fait des populations arabes, volontairement écartées par le régime d’apartheïd israélien, afin que celles-ci ne disposent pas des mêmes droits que les autres.

Au demeurant, la présentation des faits eux-mêmes par Le Figaro est fallacieuse : les États-Unis n’ont pas décidé d’armer les monarchies du Golfe contre l’Iran et Israël n’a pas décidé de fermer les yeux face à l’ennemi commun. De son côté, de manière tout aussi biaisée, le département d’État parle dans un communiqué plus généralement de « contrer les influences négatives d’Al-Qaïda, du Hezbollah, de la Syrie et de l’Iran ».
En réalité, les États-Unis ont accordé gratuitement 30 milliards de dollars d’armement à Israël sur 10 ans pour prendre sa revanche contre le Liban et la Syrie. Simultanément, ils ont vendu pour 20 milliards de dollars d’armement à 5 États du Golfe à titre de garantie que l’armement livré à Tsahal ne serait pas utilisé contre eux. À quoi devrait s’ajouter le renouvellement d’accords d’assistance militaire avec l’Égypte pour 10 milliards de dollars environ de manière à équilibrer le tout. (Voir notre bulletin de veille politique, Tendances, de ce jour).