Tendances et événements au Proche-Orient

Selon des sources arabes bien informées, les pays ayant participé au sommet de Charm el-Cheikh (octobre 2006), considéré comme le moment-fondateur de l’axe des pays arabes « modérés » alliés des États-Unis (Jordanie, Arabie saoudite, Egypte, Emirats arabes unis, Qatar et Autorité palestinienne), s’activent anormalement ces derniers temps. Des comités de suivi ont été formés pour se pencher sur les dossiers des crises libanaise et palestinienne. Les membres de ces comités tiennent des réunions intensives avec des représentants d’Elliott Abrams, le conseiller à la sécurité nationale de George Bush chargé du Moyen-Orient. Diverses mesures ont été décidées contre le Hezbollah, le Hamas et le Jihad Islamique, ainsi que des organisations et autres associations proches de ces mouvements. Il s’agit de mesures bancaires destinées à entraver et perturber les réseaux de financement de ces formations anti-israéliennes, sous prétexte de la mise en œuvre des lois antiterroristes et de la lutte contre le blanchiment d’argent.
Sur le plan de la sécurité, ces comités procèdent à un échange d’informations et à des recherches sur des noms de militants fournis directement par les États-uniens. Une coordination a été mise en place pour mener à bien un programme d’armement, d’entraînement et de financement des services de l’Autorité palestinienne. Au Liban, ces comités arment et entraînent les Forces de sécurité intérieure (contrôlées par le clan Hariri), les membres de compagnies de sécurité privée et les milices du Parti socialiste progressiste (PSP de Walid Joumblatt), des Forces libanaises (de Samir Geagea) et du Courant du Futur (De Saad Hariri).
Les entraînements se déroulent en Jordanie sous la supervision d’officiers des forces spéciales. 300 miliciens du Courant du futur, ayant terminé leur formation vont bientôt rentrer au Liban pour être déployés à Beyrouth.

Presse et agences internationales

• Le guide suprême de la révolution iranienne, l’ayatollah Ali Khamenei, a exprimé publiquement son soutien aux critiques des étudiants, après des protestations estudiantines lundi contre le président Mahmoud Ahmadinejad, a rapporté la radio d’État mercredi.
« Nous devons craindre le jour où nos jeunes dans les universités n’auront pas la motivation de poser des questions, des problèmes, des demandes », a dit la plus haute autorité de l’État lors d’une rencontre mardi soir avec des étudiants.
« Si nous disons parfois qu’il ne devrait pas y avoir d’opposition contre les responsables du pays, cela ne veut pas dire qu’il ne devrait pas y avoir de critiques, a-t-il poursuivi. Et ceci s’applique aussi à la direction » du pays ».
Ces propos ont été tenus au lendemain de troubles survenus à l’Université de Téhéran, où des étudiants réformateurs ont affirmé avoir été empêchés de poser des questions au président Mahmoud Ahmadinejad, qui y tenait un discours.
Une centaine d’étudiants réformateurs y ont défié le président avec des slogans hostiles et réclamé la libération de trois de leurs camarades détenus.
Le gouvernement de M. Ahmadinejad est réputé bénéficier d’un soutien sans faille de la part du guide suprême.
L’ayatollah Khamenei a expliqué mardi avoir « soutenu les gouvernements (précédents). Je soutiens aussi ce gouvernement. Mais cela ne veut pas dire que j’approuve tout ce qui est fait », a-t-il dit.

• Le feu vert politique a été finalement donné mardi à une opération transfrontalière turque en Irak, « si nécessaire », lors de la réunion d’une instance antiterroriste réunissant les principaux dirigeants civils et militaires du pays, sous la houlette du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.
Ce dernier, craignant de vexer l’allié états-unien, s’était jusque là opposé à une incursion en Irak avant d’épuiser toutes les voies diplomatiques.
Le durcissement de ton du gouvernement turc à l’égard des séparatistes kurdes renforce la main des généraux qui veulent neutraliser depuis des mois les camps du Parti de travailleurs du Kurdistan (PKK) en Irak qui a augmenté ses activités, estiment les analystes.
« Cela serait très utile, je ne peux pas dire que nous en finirons avec le PKK mais une incursion portera un grand coup » contre les rebelles réfugiés en Irak, avait déclaré cet été le chef de l’armée, le général Yasar Buyukanit, insistant sur la nécessité d’une autorisation politique.
Depuis l’intervention US contre l’Irak en 2003, les Kurdes irakiens ont été les premiers alliés des Américains. Or Ankara accuse les Kurdes d’Irak d’approvisionner leur « frères » du PKK en armes et en explosifs sur leur territoire, sanctuaire à partir duquel les rebelles s’infiltrent en Turquie pour y mener des attaques.
« Si le gouvernement avait donné son feu-vert en avril, quand l’armée l’avait demandé pour la première fois, il n’y aurait pas eu autant de morts aujourd’hui », assure le général à la retraite Necati Ozgen, se référant aux soldats tués dans des combats avec le PKK, dont 15 le week-end dernier, le bilan le plus lourd depuis 1995.
Cet ancien général quatre étoiles souligne que même si une opération n’est pas imminente, « la menace d’une incursion va faire réfléchir à deux fois les États-uniens et les Kurdes d’Irak ».
Des manifestations ont été organisées ces trois derniers jours à travers la Turquie pour dénoncer le PKK, dont certaines critiquant particulièrement le laxisme des Etats-Unis à l’égard de ce groupe qui figure sur leur liste des organisations terroristes.
M. Erdogan était de plus en plus pressé par l’opposition et les médias à sévir contre le PKK en Irak, sur fond d’exaspération populaire attisant les sentiments anti-états-uniens en Turquie, pays membre de l’Otan.
Pour lancer une opération d’envergure dans la montagne irakienne il faut un feu vert des députés, comme le demande la Constitution. Une motion pourrait être présentée dès la semaine prochaine, précise-t-on de source parlementaire.
M. Erdogan a confirmé mercredi ces informations. « Des préparatifs sur une motion ont commencé et se poursuivent », a-t-il dit à des journalistes.
Ce texte ne sera pas immédiatement appliqué, mais « sera une façon de montrer que la Turquie est sérieuse et déterminée », a indiqué le général à la retraite Edip Baser, sur la chaîne NTV.
Cet officier faisait partie d’un groupe de travail tripartite constitué en 2006 pour encourager le dialogue avec les Irakiens. Mais lui et son homologue états-unien, le général à la retraite Joseph Ralston, ont quitté cette instance devenue obsolète.
Washington et Bagdad ont de nouveau tenté mercredi de dissuader Ankara de recourir à une intervention unilatérale mais leurs voix semblent avoir de moins en moins d’effet.
« Depuis des mois, la Turquie attend en vain des actions de la part des États-Unis », a déclaré devant la presse l’ancien ambassadeur de Turquie à Washington, Faruk Logoglu, qui estime que la réaction états-unienne à une éventuelle incursion serait sans doute « limitée ».
Ankara envisage aussi des mesures de rétorsion économique pour isoler le Kurdistan irakien qui s’approvisionne en électricité depuis la Turquie.
Le PKK devra être évoqué en priorité lorsque M. Erdogan sera reçu en novembre par le président George W. Bush à la Maison Blanche.

• Le secrétaire US à la Défense, Robert Gates, a autorisé l’armée de Terre à augmenter ses effectifs de 65 000 soldats en trois ans au lieu de cinq, afin de relâcher la pression causée par la guerre en Irak, a indiqué mercredi un responsable du Pentagone.
« Nous avions un précédent programme visant à renforcer les effectifs de l’armée d’active, pour atteindre 547 400 en 2012 (contre 512 000 aujourd’hui). _ Le secrétaire à la Défense a approuvé la proposition d’accélérer le rythme pour atteindre cet objectif en 2010 », a expliqué David Chu, sous-secrétaire à la Défense chargé du personnel.
Atteindre ce niveau d’effectifs en trois ans revient à recruter « au moins 80 000 soldats par an, probablement plus », a-t-il estimé.
Mais ce chiffre pourrait être inférieur si l’armée parvenait en parallèle à retenir plus de soldats dans ses rangs, a-t-il ajouté.
Après quatre ans de conflit en Irak, qui a fait plus de 3 800 morts parmi les GI’s et ne recueille plus l’adhésion de l’opinion publique, le Pentagone craint d’avoir du mal à attirer du sang neuf.
Selon M. Chu, des enquêtes menées par l’armée montrent « à long terme une baisse de la volonté de l’entourage des recrues potentielles de leur recommander de rejoindre l’armée ».
L’armée US a atteint ses objectifs de recrutement sur l’année fiscale 2007 (close fin septembre), a affirmé M. Chu.
Mais cela s’est fait au prix d’un assouplissement de ses critères : le taux de diplômés du secondaire est tombé à 79 % l’an dernier, contre 95 % il y a quelques années.
Quelque 18 % des recrues ont reçu des dérogations concernant des problèmes d’ordre médical ou de petits délits inscrits à leur casier judiciaire, contre 15 % en 2006, a en outre reconnu le général Michael Bostick, chef du recrutement de l’armée.
Après six ans de missions lourdes en effectifs et de longue durée avec les guerres en Afghanistan et en Irak, l’armée de Terre US est « déséquilibrée », répète depuis plusieurs semaines son chef d’état-major, le général George Casey.
« Déséquilibrée ne veut pas dire cassée », a-t-il précisé lundi, mais « cela va prendre trois ou quatre ans et des ressources conséquentes pour nous remettre d’aplomb ».

• Près de 25 000 personnes sont actuellement détenues dans les prisons gérées par l’armée états-unienne en Irak, a indiqué mercredi le général Douglas Stone, qui commande la force en charge de ces prisons. 860 sont des mineurs âgés de 16 ans ou moins, précisé l’officier. Environ 83 % des détenus sont de confession sunnite, 16 % sont chiites, et sont incarcérés pour avoir participé à l’insurrection armée.
280 étrangers sont également prisonniers de l’armée américaine en Irak, dont des Égyptiens, des Syriens, des Iraniens, des Saoudiens et d’autres nationalités, selon l’officier.
Deux prisons sont actuellement gérées par l’armée états-unienne sur le territoire irakien, l’une sur la base de Camp Cropper (en périphérie de Bagdad), et l’autre à Camp Bucca, près de la ville de Bassorah (sud).
Ces prisons reçoivent en moyenne soixante nouveaux prisonniers chaque jour, selon le général Stone, qui a affirmé que les enquêteurs militaires US ont établi la culpabilité de 65 % des prisonniers actuellement détenus dans des actes de violence contre les forces de la coalition.
Enfin, le temps moyen d’incarcération d’un détenu est de 300 jours, a ajouté l’officier.
Depuis le début du mois de jeûne musulman du ramadan à la mi-septembre, l’armée états-unienne a libéré environ 50 à 60 prisonniers par jour.

Tendances et événements au Liban

Que s’est-il passé lors de la dernière réunion entre le faucon du 14-mars, Walid Joumblatt, et le commandant en chef de l’armée, le général Michel Sleimane ? Les deux hommes ne se rencontrent que très rarement. En début de semaine, Joumblatt a invité le général à dîner à sa résidence de Beyrouth.
Selon des sources bien informées, la discussion a porté sur des questions sécuritaires, à la lumière de pronostics pessimistes sur l’évolution de la situation au Liban. Le chef druze a ainsi demandé au général Sleimane de ne plus dévoiler au public les informations en possession des services de renseignement de l’armée et susceptibles d’innocenter la Syrie des assassinats et autres désordres sécuritaires intervenus au Liban. L’interrogatoire des membres de Fatah al-Islam détenus par l’armée a ainsi permis d’établir un lien direct entre ce groupe intégriste sunnite et al-Qaida, surtout la branche irakienne de l’organisation. Joumblatt a conseillé à Sleimane de suivre l’exemple du service de renseignement des Forces de sécurité intérieure (contrôlé par un proche de Hariri), qui détient les mêmes informations mais s’abstient de la divulguer. Ce service a ainsi imposé un black-ouit total sur les aveux d’un réseau salafiste qui a reconnu être impliqué dans l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri.
Walid Joumblatt a tenté de convaincre Michel Sleimane de s’aligner sur le projet états-unien au Liban et de ne plus adopter une position de stricte neutralité dans la crise politique qui secoue le Liban.
Selon un journaliste étranger qui l’a récemment rencontré, le chef druze est convaincu qu’une prochaine guerre israélienne contre la Syrie et le Hezbollah est inéluctable. Il continue sa pression pour empêcher toute entente autour d’un président consensuel et semble s’être totalement impliqué dans le projet US non seulement au Liban mais aussi au Moyen-Orient. Il pense qu’une guerre israélienne va modifier en faveur de son camp les rapports de forces internes. Le chef de file des faucons du 14-mars a été convoqué à Washington pour accélérer le processus d’internationalisation de l’échéance présidentielle libanaise qui se traduirait par l’établissement d’un cordon de sécurité « international » dans le centre-ville de Beyrouth pour « protéger le Parlement et permettre la tenue de l’élection ».
En lisant entre les lignes de la dernière lettre secrète envoyée par Fouad Siniora au secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, on comprend que l’intervention étrangère au Liban n’est pas seulement un vœu pieux mais un plan bien intégré.

Presse libanaise

• Des bus affrétés par l’Unrwa (l’Agence d’aide aux réfugiés palestiniens) et portant des drapeaux palestiniens ou des voitures et fourgonnettes privées ont transporté une centaine de familles réfugiées vers Nahr el-Bared. Des agents de l’Unrwa ont distribué des brochures pour avertir les réfugiés contre les bombes et grenades enfouies dans le camp.
L’Unrwa va distribuer de la nourriture, des couvertures et des produits de nettoyage aux familles et une clinique ambulante effectuera des visites régulières pour ceux qui ont regagné le camp.
Sept cents autres familles, réfugiés dans le camp voisin de Beddaoui depuis le début des combats le 20 mai, doivent prendre le chemin du retour les dix prochains jours. Elles vont réintégrer leurs domiciles dans ce qui est communément appelé le nouveau camp, dont certains quartiers ont été relativement épargnés. L’ancien camp, construit dans les années cinquante du siècle dernier, est pratiquement rasé.

Audiovisuel libanais

NBN (PROCHE DU PRESIDENT DU PARLEMENT, NABIH BERRI)
Émission : En résumé
 Invité : Ghassan Tuéni, député du 14-Mars et Pdg du quotidien An-Nahar
Les dissensions inter-chrétiennes traduisent une courte vue et l’absence de sagesse.
Les propos selon lesquels les maronites ont créé le Liban et ce sont eux qui vont le démembrer sont dénués de fondement.
Je n’ai pas compromis la signification de la proposition de Sayyed Hassan Nasrallah de faire élire le président par le peuple.
Je suis sûr qu’en fin de compte, les Libanais réussiront à élire leur président. J’attache beaucoup d’importance à l’initiative du président Nabih Berri et à son esprit d’ouverture.

Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions arabe, anglaise et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise et arabe.