Tendances et événements au Proche-Orient

Le dialogue discret inter-palestinien se poursuit, alors qu’en Israël les signes précurseurs d’une importante crise politique qui pourrait conduire à des élections législatives anticipées se multiplient. Les partis israéliens commencent à se préparer à cette éventualité à la lumière de la crise que traverse Kadima, la formation du Premier ministre Ehud Olmert, encerclé par les revers militaires, les échecs politiques et les affaires judiciaires.
Le gouvernement d’Olmert est totalement impuissant après l’échec de la conférence d’Annapolis et l’impossibilité de régler radicalement la situation dans les territoires palestiniens. Annapolis s’est transformé en produit marketing, utilisé dans la campagne électorale du Parti républicain, en très mauvaise posture à cause des déboires en Irak. En Cisjordanie, les mouvements de résistance restent très actifs et à Gaza, l’armée israélienne est obligée de coexister avec un Hamas puissant.
Cette voie sans issue pour le gouvernement israélien risque d’accélérer la tenue de législatives anticipées. Mais cette consultation, si elle a lieu dans les circonstances actuelles, pourrait ne pas aboutir à une configuration politique très différente de celle qui régit aujourd’hui la vie politique en Israël.
Les Palestiniens, eux, pourraient prochainement resserrer les rangs et réunir leurs différentes tendances politiques dans un gouvernement d’union nationale, en revenant à la formule de l’accord de la Mecque.
Cependant, les dangers d’une escalade sur le terrain ne sont pas tout à fait écartés. Car une aventure militaire à Gaza pourrait constituer pour le ministre de la Défense, Ehud Barak, une carte gagnante. Elle lui donnerait l’image d’un dirigeant ferme, à la poigne de fer, devant une opinion publique inquiète et encore traumatisée par la défaite du Liban. Mais des experts estiment qu’une attaque d’envergure contre Gaza risque de provoquer une catastrophe politique en Israël. Car là où Ariel Sharon a échoué, Ehud Barak a peu de chance de réussir.

Presse et agences internationales

•Dans un article publié dans plusieurs journaux arabes, le journaliste états-unien David Ignatius, écrit qu’« un portrait grandeur nature de l’imam Hussein, le martyr adulé par les chiites d’Iran, est placardé sur la porte d’entrée du desk des ‘Opérations en Iran’ de l’Agence centrale d’information, appelé la ‘Maison de la Perse’, créé l’année dernière ». L’auteur poursuit : « Ce desk a été fondé pour collecter plus d’informations sur le programme nucléaire iranien et sur d’autres secrets. Avec l’intérêt grandissant pour l’Iran, les analystes responsables de ce pays ont été incités à réfléchir librement, afin de casser cette culture qui a causé des erreurs catastrophiques dans le dossier des armes irakiennes de destruction massive. Cela a poussé le vice-directeur de l’Agence nationale d’information, Thomas Fingar, à ordonner de donner plus de détails aux analystes sur la source des renseignement mis à leur disposition. Dans le passé, le processus consistait à confirmer des informations dans des moules préparés à l’avance. Le débat autour du dernier rapport des agences du renseignement sur l’Iran vient de commencer. Pour la communauté du renseignement, cet exemple de retour à la sagesse traditionnelle va lui rendre une partie de la crédibilité perdue dans l’affaire des ADM irakiennes ».

CLARIN (QUOTIDIEN ARGENTIN)
 Entretien avec Mohammad Baradéi, directeur de l’AIEA
Je ne suis pas certain que l’Iran cherche à acquérir l’arme atomique. Mais j’ai dis que je n’avais pas les preuves pour le garantir.
Je demande à l’Iran d’être plus transparent et à l’Occident plus diplomate.
Je suis dans l’œil du cyclone et je travail à l’inverse des aiguilles d’une montre.

AL-BAYAN (QUOTIDIEN QATARI)
La scène palestinienne se balance entre l’escalade et l’apaisement. La tension reste palpable entre le Hamas et le Fatah aussi bien dans le discours que sur le terrain. Mais en même temps, commencent à apparaitre des indices laissant espérer que le fossé sera bientôt comblé entre les Palestiniens, en prévision d’une réconciliation nationale globale. Les informations qui circulent montrent que le dialogue entre le Fatah et le Hamas est en passe de reprendre. Il s’agira alors d’un développement positif, le premier en six mois. Un tel dialogue, même tardif, aura eu lieu dans une période cruciale.

WASHINGTON POST (QUOTIDIEN ÉTATS-UNIEN)
 Greg Miller
Des responsables actuels et anciens de la CIA révèlent que l’agence a lancé un programme secret en 2005 pour tenter de convaincre de hauts responsables du programme nucléaire iranien de faire dissidence. Ce plan s’inscrit dans le cadre d’un vaste programme de renseignement dirigé contre l’Iran à l’initiative de la Maison-Blanche. Les informations collectées dans le cadre de ce programme ont constitué la colonne vertébrale du rapport publié par les agences US la semaine dernière affirmant que l’Iran avait suspendu son programme nucléaire militaire depuis 2003. Dans une première réaction inhabituelle, un haut responsable du renseignement a répondu aux critiques dirigées contre ce rapport. Il a assuré qu’il est le fruit de solides analyses. Dans un communiqué laconique, Donald Kerr, le directeur adjoint du renseignement national, a indiqué que « la mission des agences est de présenter des analyses objectives et vraies ».

TECHRINE (QUOTIDIEN SYRIEN)
 Ezzeddine Darwiche
« L’Iran est la source des menaces dans la région et non pas Israël ». Ces propos sont ceux du secrétaire états-unien à la Défense, Robert Gates. Mais à qui les adresse t-il ? S’il parle aux 300 millions d’Arabes, ceux-ci savent, sentent et vivent le contraire de ce qu’il dit. Ils sont convaincus jusqu’au plus profond d’eux que le seul danger qui les menace ne vient que d’Israël. Si Robert Gates s’adresse aux Israéliens et à travers eux, au lobby juif, c’est son problème. Mais il doit savoir que de nombreux Israéliens ne sont pas convaincus par ses paroles déséquilibrées. Les Arabes savent, mille fois mieux que M. Gates, distinguer leur ami de leur ennemi. Ils peuvent par instinct, par réalisme, par savoir scientifique, définir la source du danger qui n’est autre qu’Israël. Soit directement, soit indirectement, à travers l’armée américaine en Irak.

PRESSE FRANçAISE
La vive polémique suscitée par la visite officielle de six jours que le Guide libyen entreprend dès aujourd’hui en France s’est progressivement étendue de l’opposition à l’intérieur même du gouvernement. Le premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande a accusé M. Sarkozy de recevoir un « dictateur qui s’est compromis dans des actes terroristes » et « qui vient ici avec ses pétrodollars acheter des armes ». Dans un entretien au Parisien-Aujourd’hui en France —publié ce lundi, mais annoncé par l’Agence France Presse dès dimanche— la secrétaire d’État aux Affaires étrangères et aux Droits de l’homme, Rama Yade, s’est déclarée « dérangée » par cette visite. « Le colonel Kadhafi doit comprendre que notre pays n’est pas un paillasson, sur lequel un dirigeant, terroriste ou non, peut venir s’essuyer les pieds du sang de ses forfaits. La France ne doit pas recevoir ce baiser de la mort », a-t-elle poursuivi. Répondant dans la nuit à ces critiques, le Premier ministre François Fillon a rétorqué depuis Buenos-Aires où il est en déplacement officiel : « La France reçoit le colonel Kadhafi parce que le colonel Kadhafi a libéré les infirmières bulgares et parce que le colonel Kadhafi s’est engagé dans un processus de réintégration dans la communauté internationale ». N’en démordant pas, Mme Yade a réitéré ses critiques sur les ondes de France-Info puis de RTL, obtenant le soutien explicite de son ministre de tutelle, Bernard Kouchner, qui boycottera le dîner officiel. À l’inverse, Laurence Parisot, présidente du MEDEF, le syndicat patronal français, est intervenue sur I-Télé pour soutenir l’invitation lancée par président Sarkozy à Mouammar Khadafi après la libération des infirmières bulgares.
La presse reprend à l’unisson le thème du « tyran du désert », à l’exception de L’Humanité (communiste) qui rappelle son action anti-impérialiste.
D’une manière générale, à gauche comme à droite, les critiques émanent principalement des relais d’influence de l’Alliance atlantique, les soutiens proviennent des milieux d’affaires.

LE MONDE (QUOTIDIEN FRANÇAIS, SOCIAL DEMOCRATE)
Le sixième report de l’élection présidentielle libanaise s’est fait, cette fois, sur la base d’un rapprochement. Grâce à la ténacité, la patience et l’écoute dont a fait preuve Bernard Kouchner, ministre français des Affaires étrangères, les parties ont écarté la litanie des préalables posée par Michel Aoun, chef du Courant patriotique libre, et se sont entendues sur un dénominateur commun minima qui devrait permettre l’élection du général Michel Sleimane.

LE FIGARO (QUOTIDIEN FRANÇAIS, MAJORITE PRESIDENTIELLE)
Le président Nicolas Sarkozy devrait annoncer mercredi le regroupement des états-majors militaires. Une sorte de Pentagone français serait construit à Balard, dans le XVe arrondissement parisien, et opérationnel en 2012.

LE TEMPS (QUOTIDIEN SUISSE, CONSERVATEUR)
Le dernier rapport de l’Association israélienne pour les droits civiques (ACRI) met en évidence le racisme anti-rabe en Israël, particulièrement chez les adolescents. 75% des juifs israéliens refusent d’habiter dans un quartier où vivent des Arabes israéliens et 55% des juifs israéliens sont favorables à la déchéance de nationalité et à l’expulsion des 1,2 millions de leurs concitoyens arabes. Israël « ressemble à l’Allemagne à la veille de la Seconde Guerre mondiale ».

LE SOIR (QUOTIDIEN BELGE)
Le secrétaire général de l’Onu Ban Ki-moon a reçu vendredi 7 le rapport des diplomates de la « troïka » (Union européenne, Russie, États-Unis) actant l’échec de leur mission de conciliation entre les Albanophones du Kosovo et le gouvernement serbe. Au même moment, l’Otan décidait le maintien sur place de ses 17 000 hommes de la Kfor, avec des renforts disponibles. Les ministres des Affaires étrangères de l’Union se réuniront aujourd’hui pour tenter de trouver un accord, avant un débat au Conseil de sécurité de l’Onu, le 19. Au début de l’année, les Kosovars proclameraient leur indépendance « en concertation » avec Washington et une masse critique de pays européens.

Audiovisuel international

AL-ALAM (CHAINE IRANIENNE ARABOPHONE)
Émission : Spécial présidentielle libanaise
 Ghaleb Kandil, membre du Conseil national de l’audiovisuel libanais
Un accord politique global entre les loyalistes et l’opposition fournirait une véritable garantie afin que le général Michel Sleimane commence son mandat par des actions de sauvetage agréées à l’avance.
Les Libanais vivent les soubresauts d’un compromis qui comprennent des négociations, des hauts et des bas. Cela pourrait prendre plus ou moins de temps.
 Hassan Kabalan, responsable du mouvement Amal (Opposition)
Le Parlement va tenir une réunion cette semaine pour élire un président de la République, après l’accord conclu entre les loyalistes et l’opposition.
 Rami Rayes, responsable de l’information du Parti socialiste progressste (14-mars)
Il y a eu des tentatives pour faire croire que c’est le 14-mars (la coalition au pouvoir, ndlr) qui était opposé au compromis et que maintenant il l’appuie en raison de changements régionaux et internationaux. Commencer le début par un tel postulat est une erreur.

Tendances et événements au Liban

Les contacts politiques des dernières 48 heures ont montré qu’afin de mûrir, la solution à la crise libanaise nécessite des concertations supplémentaires. Les négociations en cours s’articulent sur deux points :
 1. Le mécanisme de l’amendement de la Constitution pour élire le général Michel Sleimane à la présidence (L’article 49 n’autorise pas l’élection d’un fonctionnaire de première catégorie à la magistrature suprême) est venu s’ajouter aux négociations politiques. Le 14-mars —la coalition au pouvoir— a insisté sur le fait que le projet d’amendement doit passer par le gouvernement de Fouad Siniora. Ce dernier aurait catégoriquement refusé que le mécanisme proposé prévoit la démission de son équipe, considérée comme illégitime par l’opposition. Le président du Parlement et l’opposition ont rejeté tout chantage visant à leur faire reconnaitre la légitimité des décisions et des décrets pris par le gouvernement Siniora depuis la démission des ministres de l’opposition, le 11 novembre 2006.
 2. Le package deal politique continue de bloquer sur l’identité du futur Premier ministre. Les déclarations des dernières 24 heures ont montré que les différentes composantes de l’opposition sont sur la même longueur d’onde, démentant ainsi les informations faisant état de points de vue divergents. Des milieux médiatiques et politiques du 14-mars ont affirmé que des députés du bloc du général Michel Aoun pourraient faire défection et rejoindraient ceux du bloc de Nabih Berry pour assurer le quorum nécessaire pour l’amendement de la Constitution. Mais ces rumeurs se sont avérées sans fondement et des représentants des diverses composantes de l’opposition ont fait des déclarations allant dans le même sens.

Presse libanaise

AN-NAHAR (QUOTIDIEN PROCHE DU 14-MARS)
Le sort de la huitième séance de l’élection présidentielle, prévue demain, reste inconnu. Surtout qu’il existe de grandes probabilités que cette séance n’ait pas lieu. Ajoutons que la série de conditions posée tour à tour par les pôles de l’opposition pousse à s’interroger non pas sur les obstacles dressés devant cette séance, mais sur les réelles intentions de l’opposition à l’égard de l’élection d’un président.

AS-SAFIR (QUOTIDIEN PROCHE DE L’OPPOSITION)
Tout est prêt pour l’élection du prochain président. Mais la séance de mardi n’aura probablement pas lieu. Elle sera peut-être reportée à vendredi prochain. Les obstacles apparaissent les uns après les autres, montrant à quel point est profonde la crise de confiance entre les différents protagonistes libanais depuis deux ans.

Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions arabe, anglaise et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise et arabe.