Tendances et événements au Proche-orient

La Résistance palestinienne a mené une attaque réussie contre l’armée d’occupation israélienne à Hébron, tuant deux soldats d’élite. Cette opération, qualifiée de riposte aux crimes perpétrés par Israël, montre que tous les efforts déployés conjointement avec l’Autorité palestinienne n’ont pas réussi à briser la Résistance même en Cisjordanie. Elle illustre l’échec du pari sur un possible démantèlement des mouvements de la Résistance en tablant sur les divisions inter-palestiniennes et sur les pressions israélo-US qui ont transformé les services de l’Autorité de Mahmoud Abbas en milice auxiliaire d’Israël, à l’instar de l’Armée du Liban-Sud commandée par le général Antoine Lahad du temps de l’occupation du Liban par l’armée israélienne.
Les analystes ont largement commenté l’assassinat par les Israéliens, vendredi, du garde du corps d’Ahmad Koreih, chef de la délégation palestinienne aux négociations avec l’Etat hébreu. Ils l’ont qualifié de « message sanglant » auquel l’Autorité palestinienne a répondu par un communiqué de condamnation, tandis que le Premier ministre Salam Fayyad a dénoncé l’opération de Hébron qu’il a mis sur un pied d’égalité avec les agressions israéliennes quotidiennes à Gaza et en Cisjordanie.
Tous ces développements sur le terrain relancent le débat en Israël sur la difficulté à assurer la sécurité des colonies du sud du pays des chutes de roquettes artisanales palestiniennes, qui deviennent de plus en plus sophistiquées. Un grand scepticisme entoure l’efficacité de l’option militaire, et les voix appelant au dialogue avec le Hamas se multiplient, proposant de commencer par le dossier du soldat Gilad Shalit, capturé par le Hamas en juin 2006. L’idée d’une trêve avec le Hamas, lancé par certains milieux israéliens, fait son chemin, alors que d’autres voix appellent à l’utilisation de la manière forte, qui n’a jamais réussi à briser la Résistance palestinienne. Les tenants de la voie dure exigent l’intensification des pressions sur l’Autorité de Mahmoud Abbas afin qu’elle s’investisse directement et totalement dans la lutte contre les mouvements de résistance.

Presse et agences internationales

AL-CHARK AL-AWSAT (QUOTIDIEN SAOUDIEN)
 David Ignatius (journaliste états-unien)
Essayez d’imaginer une fille pakistanaise assise dans la salle de presse de l’université de Harvard, au début des années 70 du siècle dernier, en train de raconter d’une manière sentimentale des nouvelles sur les équipes sportives universitaires. C’est l’une des images de Benazir Bhutto qui reviennent à l’esprit de ceux qui l’ont connu à cette époque. L’assassinat de Bhutto est l’expression sauvage de l’incompréhension qu’ont les étrangers d’un pays comme le Pakistan. L’administration Bush a tenté un coup d’ingénierie politique en intervenant pour créer une alliance entre Benazir et l’autre ancien Premier ministre Nawaz Charif. Elle a présenté Bhutto comme le prochain Premier ministre. Mais dans des endroits comme le Pakistan, où l’évolution des événements est imprévisible, la meilleure attitude des États-Unis pour protéger leurs intérêts est de faire preuve d’une grande prudence.
Le plus bel hommage que l’on puisse rendre à Bhutto est d’organiser les élections prévues début janvier 2008. Avant de mourir, elle ne craignait pas ce processus de changement tumultueux en cours. Les autres non plus ne doivent pas s’en inquiéter.

HAARETZ (QUOTIDIEN ISRAELIEN)
Le ministère israélien des Affaires étrangères s’est fixé comme objectif en 2008 d’éloigner la Syrie de l’Iran et du Hezbollah libanais. Selon un document écrit, le ministère a placé la question syrienne en tête de ses priorités l’année prochaine. Des plans stratégiques sont en cous d’élaboration pour sortir la Syrie de l’axe radical. Des responsables du ministère ont indiqué qu’il n’y a pas encore de plan d’action clair pour atteindre ce but mais seulement des idées visant à éloigner la Syrie de l’Iran, du Hezbollah et des organisations terroristes palestiniennes.

AL-KHALEEJ (QUOTIDIEN ÉMIRATI)
Tendances publie ce samedi la deuxième partie des documents confidentiels britanniques datant de 30 ans et portant sur des plans d’urgence israéliens visant à occuper les champs de pétrole arabes :
Un Télex top secret portant la référence 14/9, daté du 15 juillet 1977-Damas et signé de la main de R. Tomkis :
 1. Nous n’avons jamais entendu parler d’un plan israélien d’urgence visant à occuper les champs de pétrole arabes auquel fait mention Peter Wikfield dans sa lettre.
 2. Depuis les élections israéliennes, la presse et des personnalités non-officielles faisaient état d’une possible attaque d’Israël après ou avant que Jimmy Carter commence à exercer des pressions sur l’État hébreu afin qu’il présente des concessions. Aucun responsable officiel n’a évoqué cette question.
J’ai demandé au général Hikmat Chéhabi (le chef d’état-major de l’armée syrienne) il y a deux ou trois semaines s’il s’attendait à une action israélienne. Il m’a poliment répondu que la guerre d’octobre 1973 a changé radicalement et pour toujours la donne et que les Syriens ne craignent plus les attaques d’Israël. Cela signifie en clair que la Syrie est capable de riposter à toute offensive israélienne et non pas qu’elle exclut une telle attaque.
 3. Une copie de cette lettre a été adressée aux responsables des ministères concernés et aux antennes de Tel-Aviv, Jeddah, Beyrouth et Washington.

• Dans un article publié dans plusieurs journaux arabes, Ahmad al-Mourshed affirme que les violentes critiques du président George Bush contre la Syrie et contre le président Bachar al-Assad ne sont pas surprenantes. Il est clair que Bush veut personnaliser le conflit. Au lieu d’être entre deux États, celui-ci oppose deux personnes. À la veille de sa tournée au Moyen-Orient, le président états-unien a lancé une attaque virulente contre la Syrie qu’il a exclue du programme de sa visite. Il a fixé à sa tournée deux objectifs : œuvrer pour la réconciliation israélo-arabe et pousser de l’avant le processus de paix israélo-palestinien, et réaffirmer l’engagement des États-Unis à assurer la sécurité de la région.
La politique de Washington à l’égard de la Syrie est contradictoire. Il tente d’isoler Damas de son environnement arabo-islamique alors que la Commission Baker-Hamilton insiste sur la nécessité de parler avec la partie syrienne au sujet de l’Irak et des autres dossiers.

Tendances et événements au Liban

Des signes d’escalade au début de l’année prochaine

La nouvelle date de la séance de l’élection présidentielle fixée au 12 janvier par le président de la Chambre Nabih Berry (qui est également un des chefs de l’opposition) clôt le débat sur l’amendement de la Constitution –pour élire à la présidence le général Michel Sleimane- et la possibilité d’élire le chef de l’État à n’importe quel moment, sans attendre l’ouverture de la session parlementaire du printemps, le 17 mars. M. Berry a ainsi adopté l’étude juridique et constitutionnelle élaborée par le député Bahige Tabbarah, ancien ministre de la Justice et un des plus fidèles compagnons de Rafic Hariri. Cette mesure rend caducs les projets de loi adoptés par le gouvernement de Fouad Siniora pour amender la Constitution et ouvrir une session extraordinaire au Parlement.
À la veille de la nouvelle année, le paysage médiatique et politique libanais est particulièrement tendu. Les signes d’une confrontation entre le 14-mars pro-US et l’opposition se multiplient :
 1. Éxécutant sa décision d’exercer pleinement les prérogatives de la présidence de la République (vacante depuis le 23 novembre), le gouvernement de Fouad Siniora a adopté vendredi quelque 700 décrets que l’ancien chef de l’État, Emile Lahoud, avait refusé de contresigner ces 13 derniers mois, invoquant le fait que le gouvernement est illégitime et anticonstitutionnel depuis la démission des ministres de l’opposition, le 11 novembre 2006. Mais le gouvernement n’a pas examiné le projet de promotions militaires, après la mise en garde de l’opposition et le refus du commandant en chef de l’armée de mêler l’institution militaire aux tiraillements politiques.
Les dirigeants de l’opposition ont qualifié de « provocations » les décisions de l’équipe Siniora et ont averti que la poursuite de ces agissements constitue une violation des engagements pris par les médiateurs régionaux et internationaux en novembre.
 2. L’opposition reste plus attachée que jamais à la simultanéité entre l’obtention du tiers de garantie au sein du prochain gouvernement et l’élection du général Michel Sleimane. Les deux principaux chefs chrétiens de l’opposition, Michel Aoun et Sleimane Frangié, ont été très clairs à ce sujet. Pour assurer le quorum permettant l’élection du général Sleimane, l’opposition souhaite obtenir le tiers des sièges au gouvernement, ont déclaré les deux leaders.
 3. Un débat a commencé entre les hauts dirigeants de l’opposition sur les mesures à prendre pour affronter la période à venir. Un plan d’action détaillé est en passe d’être élaboré. Pour affronter ce qu’elle considère être un coup d’État, l’opposition va user de moyens exceptionnels.
 4. Des personnalités du 14-mars ont initié une campagne contre le général Michel Aoun et le président Nabih Berry. Elles exercent des pressions afin que des ministres soient nommés pour remplacer le ministre assassiné Pierre Gemayel -son père Amine pourrait lui succéder- et Yaacoub Sarraf, qui a démissionné il y a 13 mois. Le remplacement des cinq ministres chiites de l’opposition sera reporté. L’objectif de cette mesure est de réactiver le gouvernement Siniora, en vue de privatiser le secteur du cellulaire, en février prochain. Selon les rumeurs, des personnalités du 14-mars feraient parties des acheteurs de ce secteur qui rapporte à l’État presque un milliard de dollars par an.
Dans ce climat, il semble que les contacts franco-égyptiens et franco-syriens se heurtent au mur épais du refus américain de voir le pouvoir et l’opposition conclure un compromis historique qui sortirait le Liban de la crise.

Presse libanaise

AS-SAFIR (QUOTIDIEN PROCHE DE L’OPPOSITION)
Le gouvernement de Fouad Siniora n’a pas hésité à exercer, pour la deuxième fois en moins d’une semaine, les prérogatives du président de la République. L’adoption de centaines de décrets va provoquer l’intensification du conflit entre le 14-mars et l’opposition.

AN-NAHAR (QUOTIDIEN PROCHE DU 14-MARS)
Le tiers de blocage réclamé par l’opposition bloque l’élection présidentielle. Des sources diplomatiques indiquent que si l’horizon interne est bouché, l’horizon extérieur semble dégagé. Des contacts intensifs précèdent le sommet franco-égyptien ce week-end. La démarche française se poursuit et dépasse le cadre du facteur chargé de transmettre les revendications de l’opposition au 14-mars.

Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions allemande, arabe, anglaise, espagnole et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise, espagnole et arabe.