Une visite aux États-Unis est un bon moyen de se souvenir que l’Europe et l’Amérique ne sont pas séparées que par un océan, mais aussi par de profondes différences dans leur agenda médiatique. Une des histoires qui fait les gros titres de la presse outre-Atlantique est ainsi les salaires touchés par le fils de Kofi Annan payés par une entreprise qui a participé au programme « pétrole contre nourriture ». J’ai même été interrogé par un présentateur de CNN qui m’a demandé si moi aussi je voulais la démission du secrétaire général de l’ONU.
Le problème de la couverture de l’ONU par les médias états-uniens, c’est qu’elle est présentée comme s’il s’agissait d’un continent étranger et qu’ils ne pointent jamais que l’un de ses principaux problèmes est l’attitude de son principal membre. Il est temps de nous pencher sur le rapport sur la réforme de l’ONU. La rédaction de ce rapport a été lancée suite à la guerre d’Irak, quand les Anglo-saxons affirmèrent que l’ONU était discrédité pour ne pas les avoir suivis et que le reste du monde affirmait qu’elle s’était décrédibilisée par son incapacité à empêcher les États-Unis et les Britanniques à agir. Il est évident que l’ONU serait dans une situation bien pire si elle avait cru aux fausses preuves de Colin Powell concernant l’Irak.
Le rapport publié le 2 décembre condamne le principe des frappes préventives et les actions unilatérales. Ce rejet est renforcé par la présence dans les rédacteurs du dossier de Brent Scrowcroft, qui occupa de hautes responsabilités dans l’administration de George H. Bush. De l’autre côté, le rapport appuie le principe d’interventions humanitaires défendu par Tony Blair. Cela renforce le droit des individus sur le droit des États.
Avec ce rapport, l’ONU pourrait finalement sortir plus forte de la guerre d’Irak en étant plus adaptée aux conflits du XXIème siècle : les conflits internes. Il faut soutenir ce rapport à l’ONU et l’appliquer, mais cela sera difficile avec des gens comme Alberto Gonzales dans l’administration Bush, lui qui rejette même la Convention de Genève.

Source
The Guardian (Royaume-Uni)

« A UN for this century, not the last one », par Robin Cook, The Guardian, 3 décembre 2004.