Lorsque les enfants doivent promettre quelque chose à leurs parents contre leur gré, ils croisent généralement les doigts. Dans leur esprit, ce geste magique doit annuler l’effet de leur promesse. Lorsque des gouvernements agissent de même sur la scène internationale, on appelle cela de la restriction mentale. C’est ce que le gouvernement allemand a fait quand il a décidé qu’à l’avenir, l’Allemagne ne se soumettrait pas à la jurisprudence de la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye lors de différends entre États et cela dans deux cas : doivent être absolument soustraits à la compétence de la CIJ premièrement tous les différends concernant « l’utilisation des forces armées à l’étranger » et deuxièmement ceux qui concernent « l’utilisation, à des fins militaires, du territoire de la République fédérale d’Allemagne, y compris son espace aérien et les zones maritimes sur lesquelles s’exerce la souveraineté allemande ».

Certes d’autres États ont également formulé des réserves dans leurs déclarations de reconnaissance de la juridiction de la CIJ. Toutefois, outre le fait qu’un tel procédé réduit la portée et l’efficacité d’une juridiction internationale, c’est oublier que la Loi fondamentale implique pour la République fédérale des obligations au regard du droit international. C’est exactement ce que voulait le Conseil parlementaire qui a élaboré cette Constitution après la catastrophe de la Seconde Guerre mondiale.

Carlo Schmidt, président de la principale commission de cet organe, aborda ce point lors des dernières discussions lorsqu’il déclara, à l’approbation générale : « Notre Loi fondamentale renonce à stabiliser la souveraineté de l’État comme un rocher de bronze. Au contraire, il facilite plus que toute autre constitution au monde le transfert de souveraineté à des organisations internationales. »

Ainsi, l’article 24-3 de la Loi fondamentale stipule qu’« en vue de permettre le règlement de différends entre États, la Fédération adhérera à des conventions établissant une juridiction arbitrale internationale ayant une compétence générale, universelle et obligatoire ». Ce sont justement ces précautions strictes, voire rigides qui excluent absolument que l’on soustraie à l’éventuel examen par le CIJ au moyen de réserves douteuses, ce genre de différends relevant du droit international et pour lesquels a été créée cette juridiction internationale.

Le terme « universel » implique que tous les objets de litige potentiels entre États, sans exceptions, sont de la compétence de la CIJ. Et cela inclut sans aucun doute tous les différends concernant la légalité des engagements de la Bundeswehr à l’étranger et également l’utilisation militaire du territoire allemand par les troupes allemandes ou étrangères.

Malheureusement, à un moment marqué de toute façon par une érosion très rapide des normes du droit international, le gouvernement Merkel envoie des signaux dévastateurs. Au lieu de renforcer sans réserves le droit international tel qu’il est codifié dans la Charte des Nations Unies, on fait comprendre que l’on redoute comme la peste le débat juridique, devant la CIJ, sur des questions militaires litigieuses. Manifestement, ceux qui agissent de la sorte ont l’intention de continuer à engager la Bundeswehr dans des opérations militaires contraires au droit international et à la Constitution ou à mettre à la disposition de forces armées étrangères le territoire allemand, y compris ses espaces aérien et maritime pour des opérations contraires au droit international.