Il y a un an, Condoleezza Rice déclarait que la guerre au terrorisme était avant tout un conflit d’idée. Malheureusement, on ne peut que constater qu’Al Qaïda se montre plus habile à ce jeu là et que la montée de l’antiaméricanisme de par le monde risque de priver les États-Unis de leur pouvoir de séduction alors même que l’épopée irakienne a montré que la force militaire ne peut à elle seule apporter une solution. Les sondages montrent aujourd’hui que, dans le monde musulman, George W. Bush a une moins bonne image qu’Oussama Ben Laden.
La mondialisation a entraîné une diffusion bien plus large de l’information ainsi que d’informations parfois trompeuses. L’information, c’est le pouvoir et la politique est devenu un concours de crédibilité. Aujourd’hui la, puissance d’un pays se mesure à sa capacité à faire agréer sa vision du monde. Malheureusement, le gouvernement américain n’arrive pas à suivre cette tendance. Or, les États-Unis ont décliné dans ce domaine depuis l’ère Clinton quand le Congrès a commis l’erreur de supprimer l’Agence de l’information et d’en confier la charge à un nouveau sous-secrétariat d’État à la Diplomatie publique, un poste qui a été vacant ou occupé de façon intérimaire. Le budget de la diplomatie publique des États-Unis est comparable à celui de la France ou de Mc Donald, son budget militaire lui est 450 fois supérieur.
Contrairement à la propagande, la diplomatie publique cherche à entretenir une relation de crédibilité sur le long terme. Compte tenu de leur image actuelle, les représentants du gouvernement ne sont pas les plus à même de mettre en œuvre cette diplomatie publique. Certains analystes ont même suggéré que les États-Unis devraient créer une agence non partisane afin de gérer la diplomatie publique ; dotée de fonds publics et privés, celle-ci encouragerait des échanges internationaux indépendants. Son action peut passer par la création de programmes d’enseignements, la création d’institut d’études américaines dans les pays musulmans…etc. Une stratégie à long terme efficace visant à créer des conditions favorables au développement de la démocratie recèle donc de multiples aspects.
La réponse à la catastrophe qui a frappé récemment l’Asie est un bon exemple, mais il faudra tenir ces promesses dans ce domaine comme dans celui de l’aide à la lutte contre le SIDA en Afrique. Malheureusement, jusqu’ici, les fonds nécessaires pour mettre en œuvre ces initiatives furent bien moins abondants que les discours ! Surtout, aucun effort d’assistance ou de diplomatie publique ne portera ses fruits, si le style et le contenu des politiques américaines ne correspondent pas à un message démocratique global. Condoleezza Rice va devoir se pencher sur cette question de la diplomatie publique.

Source
Le Figaro (France)
Diffusion 350 000 exemplaires. Propriété de la Socpresse (anciennement créée par Robert Hersant, aujourd’hui détenue par l’avionneur Serge Dassault). Le quotidien de référence de la droite française.

« Redorer le blason de l’Amérique », par Joseph S. Nye, Le Figaro, 21 janvier 2005.
« Rice must deploy more ’soft power’ », Daily Star, 25 janvier 2005.